Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 3 décembre 2008, 08-80.583, Inédit

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Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 3 décembre 2008, 08-80.583, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

X… Paul,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, 9e chambre, en date du 30 novembre 2007, qui, pour abus de biens sociaux, faux et usage, l’a condamné à trente mois d’emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l’épreuve, et cinq ans d’interdiction de gérer et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 et L. 241-9 du code de commerce, 441-1 du code pénal, 6, 8, 203, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a rejeté l’exception de prescription invoquée par Paul X… et l’a déclaré coupable d’abus de biens sociaux, de faux et d’usage de faux ;

 » aux motifs qu’il est constant que l’information a été ouverte par réquisitoire du 23 mars 1999, visant des faits d’abus de biens sociaux au préjudice de la société FCI relativement à des transferts d’espèces depuis le Crédit Suisse de Zurich et la Discount Bank de Genève vers des agences bancaires parisiennes ; que des réquisitions supplétives d’informer ont été prises les 7 novembre, 8 décembre 2003 et 21 février 2005, relativement aux faits d’abus de biens sociaux, complicité, recel, faux et usage de faux visés à la prévention ; que ces faits étant connexes, la prescription a été interrompue dès le premier acte du 23 mars 1999 ; que commis, y compris le faux du 10 avril 1996, postérieurement au 23 mars 1996, aucun des délits poursuivis n’est prescrit, quand bien même un non-lieu a été prononcé relativement aux premiers faits dénoncés ;

 » alors que l’extension de l’interruption de la prescription d’une infraction à des faits connexes implique qu’il existe entre ces faits un rapport étroit, qu’ils procèdent d’une conception unique ou qu’ils sont déterminés par la même cause et tendent au même but ; qu’en l’espèce, un réquisitoire introductif a été pris le 23 avril 1999 du chef d’abus de biens sociaux en raison de transferts d’espèces depuis le Crédit Suisse de Zurich et la Discount Bank de Genève vers des agences bancaires parisiennes ; qu’il fallait attendre des réquisitions des 7 novembre, 8 décembre 2003 et 21 février 2005 pour que l’instruction initialement ouverte soit étendue aux faits objets de la poursuite ; qu’en se bornant à relever que ces faits étaient connexes pour exclure l’exception de prescription invoquée par Paul X…, la cour d’appel qui s’est abstenue de rechercher dans quelle mesure ils procédaient d’une conception unique, ou étaient déterminés par la même cause et tendaient au même but ou encore qu’il existait entre eux un rapport étroit, a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés ; qu’il en va d’autant plus ainsi que les faits pour lesquels l’instruction a été initialement ouverte ne relevaient d’aucune qualification juridique et que Paul X… a bénéficié d’un non-lieu  » ;

Attendu que, pour dire les infractions d’abus de biens sociaux, commis au préjudice de la société Friedland consultants international, faux et usage, retenus à l’encontre du prévenu, connexes à d’autres faits ayant bénéficié d’un non-lieu, et partant non prescrites, l’arrêt prononce par les motifs au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 241-3 et L. 241-9 du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Paul X… coupable d’abus de biens sociaux au préjudice de la société FCI, de faux et d’usage de faux, l’a condamné à la peine de 30 mois d’emprisonnement dont 24 mois avec sursis ainsi qu’à une interdiction de gérer, et l’a condamné à payer à Me Y…, es qualité de liquidateur de la société FCI, une somme de 762 248, 33 euros à titre de dommages et intérêts ;

 » aux motifs que Paul X… qui ne conteste plus sa qualité de dirigeant de fait de la société Friedland consultants international (FCI) a fait procéder le 14 janvier 1998 à un virement de 430 00 dollars US du compte BNP de cette société sur un de ses comptes personnels ouvert dans les livres de la Discount Bank à Genève ; que par l’intermédiaire d’Annette Z…, titulaire de la signature sur les comptes bancaires de la société, et qui lui remettait ces sommes, il a également fait procéder, de décembre 1997 à juin 1998, à des retraits d’espèces, pour un montant global de 2 818 000 francs ; que, pour justifier du virement précité, a été établi un contrat daté du 10 avril 1996 entre la société FCI et une société Atlantic management consultants (AMC) représentée par Hassan B… ; que ce dernier, qui n’a jamais été dirigeant de cette société AMC, laquelle n’a pas d’existence légale justifiée, a indiqué avoir apposé sur ce contrat sa signature, à la demande de Paul X…, pour lui rendre service ; que Hassan B… a ainsi déclaré  » Paul X… m’a précisément dit à ce sujet : J’ai un service à te demander, j’ai un contrat à signer entre FCI et une autre société et je voudrais que tu signes pour cette autre société…. j’avais commencé par signer avec ma signature en français et c’est Paul X… qui m’a demandé de rajouter au-dessus ma signature en arabe en m’indiquant, cela fera plus arabe  » ; que ce contrat fictif a servi à justifier le virement bancaire de 430 000 dollars US, et au cours de la procédure, les retraits d’espèces à hauteur de 2 010 00 francs (prétendument reversés à ce partenaire syrien dans un premier temps par Hassan B… puis, devant les dénégations de ce dernier, par un homonyme non identifié) ; que, pour la somme complémentaire de 818 000 francs, Paul X… a invoqué des frais professionnels engagés en Afrique ; que, cependant, comme l’a relevé le tribunal, ceux-ci ne sont aucunement justifiés ; que l’expert-comptable, Philippe A…, a déclaré à ce propos  » pour moi, ce sont des dépenses personnelles et de voyages, Paul X… avait un train de vie dispendieux ; une grosse partie des retraits d’espèces effectués sur le compte de la FCI servait à assurer le train de vie de Paul X… et de son épouse  » ; que, n’étant pas actionnaire de la société, il ne pouvait détenir dans celle-ci un compte courant ; que les délits d’abus de bien sociaux, de faux et usage de faux qui lui sont reprochés sont ainsi établis ;

 » 1°) alors que l’abus de biens sociaux suppose un usage abusif des biens ou des fonds de la société dans l’intérêt personnel direct ou indirect du dirigeant ; que le demandeur avait péremptoirement fait valoir que la somme de 765 000 USD, payée par virement d’un compte que la société FCI détenait auprès de la BNP à hauteur de 430 000 USD et par versement d’une somme en espèces de 335 000 USD correspondait à la rémunération de l’interlocuteur syrien intervenu dans le cadre du contrat de centrale thermique au Maroc et pour lequel la société FCI avait été rémunérée à hauteur de 1 300 000 USD ; que la cour d’appel, qui s’est bornée à constater l’existence des prélèvements opérés, sans caractériser l’usage abusif qui aurait été fait desdits fonds et l’intérêt personnel que Paul X… aurait retiré auxdits paiements, a privé sa décision de toute base légale ;

 » 2°) alors que les sommes inscrites en comptes courants d’associés constituent des créances de l’associé sur la société ; que le débit de sommes exposées par la société sur le compte courant créditeur d’un associé n’implique aucun usage abusif des biens de la société ; qu’en l’espèce, estimant que les retraits pour une somme de 818 000 francs n’avaient pas été justifiés, l’expert comptable de la société FCI les avait imputés sur le compte courant d’associé ; que la cour d’appel, qui a retenu l’infraction d’abus de biens sociaux par le motif inopérant que Paul X… n’était pas actionnaire de la société et ne pouvait détenir dans celle-ci un compte courant, a violé les articles visés au moyen  » ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 et L. 241-9 du code de commerce, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Paul X… coupable d’abus de biens sociaux au préjudice de la société FCI, de faux et d’usage de faux, l’a condamné à la peine de 30 mois d’emprisonnement dont 24 mois avec sursis ainsi qu’à une interdiction de gérer, et l’a condamné à payer à Me Y…, es qualité de liquidateur de la société FCI, une somme de 762 248, 33 euros à titre de dommages-intérêts ;

 » aux motifs propres que, pour la somme complémentaire de 818 000 francs, Paul X… a invoqué des frais professionnels engagés en Afrique ; que, cependant, comme l’a relevé le tribunal, ceux-ci ne sont aucunement justifiés ; que l’expert-comptable, Philippe A…, a déclaré à ce propos  » pour moi, ce sont des dépenses personnelles et de voyages, Paul X… avait un train de vie dispendieux ; une grosse partie des retraits d’espèces effectués sur le compte de la FCI servait à assurer le train de vie de Paul X… et de son épouse  » ; que, n’étant pas actionnaire de la société, il ne pouvait détenir dans celle-ci un compte courant ; que les délits d’abus de bien sociaux, de faux et usage de faux qui lui sont reprochés sont ainsi établis ;

 » et aux motifs adoptés que Me Y…, es qualités de liquidateur judiciaire de la société FCI, se constitue partie civile et demande au tribunal de condamner Paul X… à lui verser une somme de 762 248, 33 euros à titre de dommages-intérêts ainsi qu’une somme de 3 000 euros en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale ; qu’il y a lieu de la déclarer recevable en sa constitution de partie civile et de lui allouer la somme réclamée à titre de dommages-intérêts, correspondant au montant global des détournements retenus contre Paul X… ;

 » alors que le droit d’exercer l’action civile devant les juridictions répressives n’appartient qu’à ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ; qu’estimant que les retraits pour une somme de 818 000 francs n’avaient pas été justifiés, l’expert comptable de la société FCI les avait imputés sur un compte courant d’associé créditeur, de sorte que la cour d’appel, qui a néanmoins condamné Paul X… à indemniser le liquidateur de la société FCI à hauteur des sommes détournées quand ladite somme de 818 000 francs était venue en déduction d’une créance détenue par un associé sur la société, a violé les articles visés au moyen  » ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l’allocation, au profit de la partie civile, de l’indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D’où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 000 euros la somme que Paul X… devra payer à la société Friedland Consultants Internationaux, représenté par son liquidateur Me Hélène Y…, au titre de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Slove conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


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