Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 2 novembre 2011, 11-82.799, Inédit

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Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 2 novembre 2011, 11-82.799, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

– La société NVS Holding SAS, anciennement société

Novovis, partie civile,

contre l’arrêt de la cour d’appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2011, qui, dans la procédure suivie contre MM. André X… et José Y…du chef de violation du secret de fabrique et recel, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 2, 6, 591 et 593 du code de procédure pénale, de l’article 1134 du code civil et des articles L. 236-3 et L. 236-22 du code de commerce ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a constaté que la société NVS Holding, anciennement dénommée Novovis SA, n’a plus qualité pour poursuivre l’action en indemnisation résultant de la violation du secret de fabrique sanctionnée au pénal par le jugement du 26 janvier 2005 et l’arrêt du 26 mai 2005 depuis le traité d’apport partiel signé le 29 mars 2006 et entré en vigueur le 27 juillet 2006, que la société Nouvelle Novovis, société bénéficiaire de l’apport partiel d’actif n’est pas intervenue à la présente procédure, et a déclaré la société NVS Holding irrecevable en l’ensemble de ses demandes ;

 » aux motifs qu’en cas d’apport partiel d’actif soumis au régime des scissions, il s’opère de la société apporteuse à la société bénéficiaire, laquelle est substituée à la première, une transmission universelle de tous ses droits, biens et obligations pour la branche d’activité faisant l’objet de l’apport ; que sauf dérogation expresse prévue dans le traité d’apport, il en est ainsi même s’il s’agit de biens, droits le obligations qui ne figurent pas dans le traité par suite d’une erreur, d’un oubli ou de toute autre cause : que, s’agissant des actions en justice, la substitution universelle de la société bénéficiaire dans les droits et obligations de la société fusionnée ou scindée s’étend aux actions en justice appartenant à cette dernière ; qu’en l’absence de dispositions contraires au contrat de fusion ou de scission, la substitution s’opère, à la date de la réalisation définitive de l’opération, c’est-à-dire à la date de la dernière des assemblées ayant approuvé l’opération,- qu’ainsi, sans aucune autre formalité, la substitution automatique prive la société apporteuse de toute qualité et même intérêt à agir ; qu’elle ne peut plus prétendre exercer à l’avenir les actions en justice afférentes à la branche d’activité apportée, ni même poursuivre celles qu’elle avait elle-même initiées avant l’adoption du projet d’apport ; que dès lors, à la suite de l’apport partiel d’actif, la société bénéficiaire est de plein droit devenue titulaire de toute qualité et intérêt pour introduire ou poursuivre toute action se rapportant aux droits et obligations transmis ; que la société ayant bénéficié d’un apport partiel d’actif pour la branche d’activité en cause, peut intervenir en appel, puisqu’elle se substitue dans tous les droits de la société partie initialement à l’instance en sa qualité d’ayant cause universel pour la branche d’activité apportée ; qu’en l’espèce, par traité d’apport partiel en date du 29 mars 2006 précisant qu’il prendra effet à la date d’immatriculation de la société Nouvelle Novovis au registre du commerce et des sociétés de Montpellier qui est intervenue le 27 juillet 2006, il a été convenu que la société Novovis, société apporteuse devenant holding et conservant le droit sur la marque et la trésorerie en vue du développement du groupe notamment à l’international, cède à la société Nouvelle Novovis sa branche complète d’activité dans le domaine de production d’accessoire pour plaques de plâtre ; qu’il est précisé à l’acte les éléments d’actif dont la transmission est prévue, et ainsi notamment l’incorporel pour un montant de 599 933 euros, avec la description en page 4 des immobilisations incorporelles affectées à l’exploitation de la société nouvelle Novovis comme étant le fond de commerce comprenant la clientèle et le droit de se dire successeur de la société Novovis, le fichier servant de support à cette exploitation ; que le bénéfice et la charge de tous les contrats passés avec tous clients et tiers en cours à la date de la réalisation de l’apport ;- le bénéfice du nom de la société et de son image vis-à-vis de l’extérieur ; plus généralement, tous droits de propriété incorporelle (concession de brevets, licences, logiciels,…) rattachés à l’activité exercée par la société Novovis ; que le rapport du commissaire aux apports mentionne dans sa présentation de l’opération et la description des apports que l’apport en nature est le suivant : apport partiel de la société Novovis dont l’objet est la fabrication d’articles divers en papier destinés à l’activité des entreprises du bâtiment, le commerce de gros de matériaux de construction et des activités annexes ; qu’il reprend la description du fonds de commerce affecté à l’exploitation de la société  » Nouvelle Novovis  » dans les termes identiques au Traité d’apport partiel ; que l’avis de Me Laurens, rédacteur de l’acte, ne remet pas en cause les termes et le périmètre du traité d’apport partiel en ce qui concerne la transmission de l’incorporel, c’est-à-dire du fonds de commerce, avec la branche complète d’activité dans le domaine de la production d’accessoires pour plaques de plâtre ; qu’il ne fournit aucune précision sur ce point ; que la société Novovis, société apporteuse, ne peut dès lors pas sérieusement remettre en cause la transmission du secret de fabrique objet de la présente procédure en indemnisation ; que cette transmission ne peut pas être mise à néant par des assemblées générales tenues postérieurement par les sociétés Novovis et NVS Holding, anciennement SARL Novovis, décidant de soustraire du fonds de commerce transmis valorisé à 599 933 euros le secret de fabrique pour immédiatement ensuite, dans le même document, envisager par nécessité de fonctionnement de la société bénéficiaire de l’apport, une convention pour l’utilisation du secret de fabrique ; qu’en l’absence d’exclusion expresse par la convention des parties telle qu’elle est consignée dans le traité d’apport partiel, l’action objet de la présente procédure doit être entendue comme étant comprise dans la branche d’activité transmise à la société Nouvelle Novovis, le Traité énonçant d’ailleurs que  » l’énumération portée dans le traité de fusion  » n’ayant qu’un caractère indicatif et limitatif, l’ensemble des éléments composant la branche d’activité devant être transmis à la société Nouvelle Novovis, qu’ils soient ou ne soient pas énumérés au présent contrat et ce, dans l’état où ils se trouveront à la date de la réalisation définitive de l’opération et également en page 5, au terme du Chapitre I : description des apports, il est stipulé :  » d’une manière générale, la société bénéficiaire sera subrogée purement et simplement, dans tous les droits, actions. obligations et engagements divers de la société apporteuse, dans la mesure où ces droits, actions, obligations et engagements se rapportent aux biens faisant l’objet du présent apport  » ; que, par arrêt en date du 26 mal 2005, la cour de céans a déclaré recevable et régulière en la, forme la constitution de partie civile de la société Novovis 140, rue Louis Blériot ZAC Marcel Dassault à 34 430 Saint-Jean-de-Védas ; que cette recevabilité de la constitution de partie civile décidée par un arrêt ayant acquis l’autorité de la chose jugée, ne peut pas être remise en cause par le traité d’apport partiel qui lui est au demeurant postérieur ; qu’en revanche, c’est sans remise en cause de la chose jugée par le dit arrêt que la cour est appelée à statuer au regard du Traité du 29 mars 2006 et de ses effets sur la présente procédure, après l’arrêt du 6 mars 2008 qui n’a pas statué au fond et n’est donc pas définitif sur l’indemnisation sollicitée par la partie civile, puisqu’il a seulement ordonné avant dire droit une mesure d’expertise-comptable,- qu’ainsi, l’affaire étant pendante devant la cour sur la demande d’indemnisation formée initialement par la société Novovis, il appartenait à la société Nouvelle Novovis, société bénéficiaire de l’apport partiel gui se trouvait substituée dans tous les droits et actions concernant le secret de fabrique, d’intervenir à l’instance, puisqu’elle a désormais seule qualité et intérêt à poursuivre la procédure sur la constitution de partie civile régulière de la société apporteuse en première instance ; qu’il y a lieu de constater que la société Nouvelle Novovis, société bénéficiaire de l’apport partiel d’actif constitué par la branche d’activité comprenant le secret de fabrique et les procédures qui y sont rattachées, n’est pas intervenue pour régulariser la procédure devant la présente cour, alors même que la difficulté avait déjà été soulevée par M. X… par voie de conclusions en cours d’expertise ; qu’en conséquence, la société NVS Holding anciennement dénommée Novovis SA, société apporteuse n’ayant plus qualité et intérêt à agir, seule poursuivante sur sa constitution de partie civile initialement régulière, est déclarée irrecevable devant la cour en sa demande en réparation de la violation par MM. X… et Y…du secret de fabrique transmis à la société Nouvelle Novovis, violation qui été sanctionnée sur l’action publique par le jugement du 26 janvier 2005 et l’arrêt confirmatif du 26 mai 2005 ;

 » 1°) alors que la chose jugée met obstacle à ce que le juge remette en cause la décision avant dire droit par laquelle la constitution de partie civile a été déclarée recevable et à laquelle il a été accordé une provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que, par arrêt du 26 mai 2005, la cour d’appel avait déclaré recevable la constitution de partie civile de la société NUS Holding, alors dénommée SA Novovis, et avait alloué une provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice ; que la cour d’appel, qui demeurait saisie exclusivement pour statuer sur l’étendue de l’indemnisation, ne pouvait donc, sans méconnaître la chose jugée par l’arrêt du 26 mai 2005, déclarer irrecevable la société NVS Holding ;

 » 2°) alors, subsidiairement, que si, en principe, l’apport partiel d’actif emporte transmission universelle de tous les droits, biens et obligations de la société apporteuse au profit de la société bénéficiaire pour la branche d’activité faisant l’objet de l’apport, il en va autrement pour les droits et obligations qui restent attachés à la personne de l’apporteuse, tels que le droit d’agir en réparation du préjudice causé personnellement à la société apporteuse par une infraction pénale ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel ne pouvait considérer que la société NVS Holding avait pu transmettre à la société Nouvelle Novovis sa créance d’indemnisation des préjudices causés par les infractions pour lesquelles MM. Y…et X… avaient été reconnus coupables et en déduire que seule la société Nouvelle Novovis demeurait recevable à demander leur indemnisation, dès lors que le droit de se constituer partie civile devant le juge pénal restait attaché à société NVS Holding qui avait personnellement subi le dommage causé par ces infractions ;

 » 3°) alors, très subsidiairement, que la qualité à agir s’apprécie au jour de la constitution de partie civile ; que, dès lors, la cour d’appel ne pouvait se fonder sur la circonstance que la société NVS Holding aurait transféré à la société Nouvelle Novovis  » l’action objet de la présente procédure  » à l’occasion du traité actant l’apport partiel d’actif devenu effectif le 27 juillet 2006, qui était postérieur à la constitution de partie civile de la société NVS Holding intervenue le 23 juillet 2002 et qui était, partant, inopérante pour apprécier la recevabilité de sa constitution de partie civile ;

 » 4°) alors, infiniment subsidiairement, que s’il s’opère de la société apporteuse à la société bénéficiaire une transmission universelle de tous ses droits, biens et obligations pour la branche d’activité, faisant l’objet de l’apport, il en va autrement lorsque les parties à cette opération en décident autrement,- que la liberté contractuelle autorise ces parties à limiter le transfert de plein droit de cette universalité aussi bien au jour du traité d’apport que, ultérieurement, à l’occasion d’un avenant introductif de ce traité ; que, dans ses conclusions, la société NVS Holding, faisait valoir que les parties à l’apport partiel d’actif avaient chacune pris une délibération en assemblée générale extraordinaire le 20 juillet 2009, valant avenant introductif au traité d’apport signé le 29 mars 2006, aux termes de laquelle il était décidé que le secret de fabrique bandes armées n’avait pas été transféré par la société NVS Holding à sa filiale ; qu’elle soutenait que cet avenant faisait obstacle à la transmission de l’action civile liée à la propriété de ce secret ; qu’en considérant que ces délibérations n’avaient pu remettre en cause la transmission du secret de fabrique, la cour d’appel a méconnu la liberté par laquelle les parties à une opération d’apport partiel d’actif peuvent décider de l’étendue de la transmission des biens, droits et obligations de la société apporteuse à la société bénéficiaire  » ;

Vu l’article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que MM. Y…et X…, définitivement déclarés coupables des délits de révélation d’un secret de fabrique et de recel ont été condamnés à réparer le préjudice de la société Novovis ; qu’une mesure d’expertise a été ordonnée et qu’en cours de procédure cette société qui a modifié sa raison sociale en prenant le nom de NVS Holding a fait un apport partiel de ses actifs, portant sur la branche d’activité concernant le secret de fabrique, à une société nouvellement constituée dénommée SAS Novovis ; que le jugement liquidatif a été frappé d’appel et qu’une nouvelle expertise a été ordonnée par la cour d’appel ; que durant les opérations d’expertise, les prévenus ont contesté la qualité à agir de la société NVS Holding en se prévalant du transfert de son action dans le patrimoine de la société SAS Novovis ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la société NVS Holding en l’ensemble de ses demandes, l’arrêt attaqué retient que, si la constitution de partie civile de cette société reçue par une précédente décision ayant acquis l’autorité de chose jugée ne peut être remise en cause par le traité d’apport partiel intervenu entre elle et la société SAS Novovis, il y a lieu de constater que la transmission du secret de fabrique qui a été effective n’a pas pu être mise à néant par des assemblées générales ultérieures tenues par ces deux personnes morales ; que le cour d  » appel en déduit que la société SAS Novovis qui se trouvait substituée dans tous les droits et actions concernant le secret de fabrique et qui n’était pas intervenue à l’instance pour régulariser la procédure, avait seule qualité et intérêt à poursuivre ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société NVS Holding qui faisait valoir que les deux sociétés s’accordaient pour dire qu’il n’avait jamais été de leur commune intention et notamment de l’intention de la société SAS Novovis d’acquérir de sa société mère NVS Holding le secret de fabrique et qui produisait, à cet effet, les délibérations prises par chacune de ces sociétés en assemblée générale extraordinaire le 20 juillet 2009, valant avenant modificatif au traité d’apport signé le 29 mars 2006, aux termes desquelles il était précisé que la propriété du secret de fabrique n’avait pas été transférée par la société NVS Holding à sa filiale, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Montpellier, en date du 20 janvier 2011, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Nîmes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


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