Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 16 octobre 2019, 19-84.776, Inédit

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Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 16 octobre 2019, 19-84.776, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

N° R 19-84.776 F-D

N° 2215

SM12

16 OCTOBRE 2019

CASSATION SANS RENVOI

SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

M. W… E… a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de NANCY, en date du 4 juillet 2019, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs notamment d’abus des biens sociaux, de fraude fiscale et banqueroute, a confirmé les ordonnances du juge d’instruction requalifiant les faits et le renvoyant devant le tribunal correctionnel, le maintenant sous contrôle judiciaire et lui restituant une partie des scellés.

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 2 octobre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Barbé, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Salomon ;

Greffier de chambre : M. Maréville ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Barbé et les conclusions de M. l’avocat général Salomon ;

Un mémoire personnel et des observations complémentaires ont été produits.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le commissaire aux comptes des sociétés APM recherche et développement et Prince Charles investissements, présidées par M. E…, a dénoncé auprès du procureur de la République de Nancy, les 21 février 2012 et 30 novembre 2013, une situation susceptible de constituer un délit d’entrave à sa mission. Plusieurs plaintes d’actionnaires et d’investisseurs dans ces deux sociétés ont également été déposées.

3. A la suite de ces plaintes et dénonciations, M. E… a été mis en examen pour abus des biens de la société ART KOL du 11 janvier au 23 septembre 2010, des sociétés APM recherche et développement, APM et PCI, comme gérant de droit, et de la société FAVOR INVEST, comme gérant de fait, du 1er mai 2009 au 30 novembre 2013, ainsi que pour obstacle à la mission des commissaires aux comptes de la société APM recherche et développement du 1er janvier au 2 avril 2015.

4. Il a également été mis en examen, sur réquisitoires supplétifs des 5 décembre 2016 et 5 janvier 2017, des chefs de fraude fiscale entre le 1er janvier 2011 et le 1er janvier 2013, d’abus des biens de la société FAVOR INVEST entre le 1er décembre 2013 et le 5 décembre 2016, d’abus des biens de la société APM recherche et développement et de la société PCI entre le 1erdécembre 2013 et le 18 novembre 2015, de banqueroute par détournement ou dissimulation d’actif entre le 19 novembre 2015 et le 5 décembre 2016 au préjudice des sociétés PCI et APM recherche et développement, de banqueroute par défaut de comptabilité ou comptabilité irrégulière ou incomplète du 1er janvier 2011 au 5 décembre 2016, au préjudice des sociétés PCI et APM recherche et développement et du délit d’escroquerie.

5. Placé en détention provisoire du 2 avril au 12 juin 2015, il a ensuite été mis sous contrôle judiciaire à compter de cette date.

6. Par ordonnance du 26 juillet 2017, le juge d’instruction a ordonné le versement d’un cautionnement dont le montant a été ramené à 350 000 euros par arrêt de la chambre de l’instruction du 28 septembre 2017. Cette somme a été versée le 8 février 2018.

7. Par ordonnance modificative du 4 avril 2018, il lui a été fait interdiction d’entrer en contact avec les victimes et de se livrer aux activités de création et gestion d’entreprise, d’acquisition de parts sociales.

8. Par ordonnance du 22 janvier 2019 (n°2019/79), le juge d’instruction a requalifié les faits et renvoyé M. E… devant le tribunal correctionnel et par ordonnance du même jour (n°2019/84), il a ordonné le maintien du contrôle judiciaire jusqu’à sa comparution devant le tribunal correctionnel. Par ordonnance du 16 janvier 2019 (n°2019/76), il a restitué une partie des scellés qui lui avait été demandé.

9. M. E… a interjeté appel de ces trois ordonnances.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième, quatrième, cinquième, sixième et septième moyens

10. Ces moyens ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le troisième moyen

Exposé du moyen

11. Le moyen est pris de la violation des articles 139 et suivants du code de procédure pénale ainsi que l’article 194 et 593 du même code, l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à l’article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

12. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il confirme l’ordonnance du juge d’instruction qui maintient le contrôle judiciaire :

“1°) alors qu’en joignant les appels des trois ordonnances de nature différente, la chambre de l’instruction a statué hors délai sur l’ordonnance de maintien sous contrôle judiciaire qui lui était déférée, ce délai étant prévu par l’article 194 alinéa 3 et ne pouvant dépasser deux mois, ce qui entraîne la mainlevée du contrôle judiciaire ;

“2°) alors que la chambre de l’instruction s’est contentée de procéder par voie d’affirmation sans motiver sa décision de maintenir le contrôle judiciaire”.

Réponse de la Cour

Vu l’article 194, alinéas 2 et 3, du code de procédure pénale :

13. Il résulte de ce texte que la chambre de l’instruction, lorsqu’elle statue sur l’appel d’une ordonnance de placement sous contrôle judiciaire ou de refus de mainlevée de cette mesure, doit se prononcer dans un délai de deux mois à compter de la déclaration d’appel ; à défaut, la mainlevée de celle-ci est acquise de plein droit, sauf si des vérifications concernant la demande de la personne ont été ordonnées ou si des circonstances imprévisibles et insurmontables mettent obstacle au jugement de l’affaire dans les délais prévus.

14. Après avoir joint les trois ordonnances précitées, la chambre de l’instruction, qui avait été saisie de l’appel le 28 janvier 2019 et qui a clos les débats le 28 février 2019, a mis l’affaire en délibéré au 16 mai 2019.

15. En statuant ainsi, par un arrêt rendu plus de deux mois après l’appel formé contre la décision de maintien du contrôle judiciaire du juge d’instruction, sans faire état de vérifications concernant la demande de la personne ni de circonstances imprévisibles et insurmontables mettant obstacle au jugement de l’affaire dans les délais prévus, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé.

16. La mainlevée de la mesure de contrôle judiciaire est acquise de plein droit.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Nancy, en date du 4 juillet 2019, en ses seules dispositions ayant confirmé le maintien du placement sous contrôle judiciaire, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize octobre deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

ECLI:FR:CCASS:2019:CR02215


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