Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 6 février 2014), que M. X… a été engagé le 3 septembre 2006 par la société Eolfi en qualité de directeur commercial ; que licencié pour insuffisance professionnelle le 25 février 2010, le salarié a saisi la juridiction prud’homale ;
Sur le premier moyen ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de dénaturation et de manque de base légale, le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par laquelle la cour d’appel a estimé que les parties n’avaient pas entendu modifier les conditions de la rémunération contractuelle du salarié ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses trois premières branches, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d’appel qui a décidé, dans l’exercice des pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche, et sur le troisième moyen :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eolfi aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Eolfi à payer à M. X… la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Eolfi.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné la société Eolfi à verser à M. X… les sommes de 689. 856 euros à titre de rappel de salaires pour la période de janvier 2007 à juin 2010, de 68. 985, 60 euros au titre des congés payés afférents, de 37. 110, 22 euros à titre d’indemnité complémentaire de congés payés et de 6. 127, 68 euros à titre d’indemnité complémentaire de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE pour justifier la demande de rappel de salaire qu’il a formulée, M. X… invoque les dispositions arrêtées aux termes de l’article 9 de son contrat de travail selon lesquelles il était convenu d’un salaire brut annuel sur 12 mois fixé de la manièresuivante : « Un montant variable de 8, 50 % des commissions de gestion nettes des rétrocessions facturées par la société ou ses filiales au véhicule d’investissement qu’elle gère, dirige ou conseille defaçon directe ou indirecte, àl’exception de la SAS Eole Patrimoine. Ce montant sera calculé chaque mois sur la base des commissions de gestion nette de rétrocessions facturées par la société le mois précédent. En tenant compte de l’exception ci-dessus. En tout état de cause, le salaire brut mensuel de M. X… ne pourra être inférieur à celui prévu par la loi et la réglementation s’appliquant dans le cadre des présentes. A titre indicatif, le premier brut mensuel de M. X…, payable le 30 septembre 2006 sera de 9. 766, 53 euros. En outre, M. X… sera éligible à l’attribution de 4 % des parts B du FCPR, dans les termes et conditions qui lui seront détaillées ultérieurement et séparément. Ces conditions prévoiront notamment que l’attribution de parts B du FCPR sera réalisée en trois fois : un tiers à la fin de la période d’essai, un tiers après deux ans d’ancienneté et le solde lors de la liquidation du FCPR Eolinvest, et en tout état de cause après cinq ans d’ancienneté. M. X… sera de plus éligible à l’attribution de parts de carried interest des futurs véhicules d’investissement créés par Eolfi ou par ses filiales dans une proportion qui reflétera sa contribution personnelle à la levée des fonds de ces véhicules » ; qu’il en conclut que la société était tenue de lui verser une rémunération mensuelle égale à 8, 5 % des commissions de gestion facturées mensuellement (après déduction des rétrocessions dues aux distributeurs) dans le cadre de son activité et de celle de ses filiales de gestion, de direction et de conseil des véhicules d’investissement ; qu’il relève qu’à compter de janvier 2007 la SA Eolfi lui a versé une rémunération fixe, indépendante du montant des commissions de gestion facturées, qu’il n’a jamais bénéficié de parts B (carried interest) des véhicules d’investissement créés par la société et ses filiales, autres que celles du FCPR Eolinvest et du FCPR Windfall, et ce, en violation des termes du contrat ; que M. X… conteste avoir jamais accepté cette modification unilatérale de son contrat et les modalités de sa rémunération telles qu’appliquées par l’employeur, à compter de janvier 2007 ; qu’il fait observer qu’un avenant à son contrat de travail « prévoyant que M. X… percevra à compter du 1erdécembre 2006 un salaire brut annuel payable sur 12 mois correspondant à la durée du travail prévue à l’article 8 ci-dessus et fixé à 132. 371, 40 euros » lui a été proposé le 4 novembre 2009 à effet rétroactif donc au 1er décembre 2006, qu’il l’a refusé ; qu’il relève qu’il a été convoqué à un entretien préalable peu après son refus, puis licencié ; que s’appuyant sur les dispositions de l’article 1134 du code civil selon lesquelles « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi » et sur les principes régissant le droit du travail qui subordonnent toute modification de la rémunération d’un salarié à son accord exprès, lequel ne peut résulter de la poursuite du travail même pendant une longue période et de l’acceptation sans protestation ni réserve de ses bulletins de salaire, M. X… sollicite le versement d’un rappel de salaire sur toute la période à compter de janvier 2007, à partir des éléments contractuellement prévus ; que la SA Eolfi rétorque qu’un accord est bel et bien intervenu entre les parties au terme de la période d’essai afin que la rémunération entièrement variable initialement prévue soit modifiée au profit d’une rémunération fixe et stable et soit arrêtée à la somme mensuelle de 11. 030, 95 euros bruts ; qu’elle relève que cet accord, qui pour devoir être exprès, ne doit pas être nécessairement écrit, s’est appliqué pendant plus de trois années sans la moindre observation ni remise en cause de la part de M. X… jusqu’au moment où a été évoqué avec lui son licenciement pour insuffisance professionnelle ; qu’elle invoque une novation du contrat de travail réalisée en décembre 2006, qu’une rémunération fixe s’est substituée à la rémunération entièrement variable initialement prévue et ce, avec l’accord de M. X… qui désirait en réalité cloisonner les aléas financiers attachés à la situation de la SA Eolfi, de ses propres revenus et de son patrimoine ; qu’il a alors cédé sa participation de 45 % au capital de la SA Eolfi pour un montant de 175. 000 euros ; que pour établir l’accord de M. X…, elle s’appuie également sur les témoignages du responsable des ressources humaines en 2006 et 2007, M. Y…, du directeur technique de la société travaillant aux côtés de M. X…, M. Z…, et enfin de M. A…, ancien président d’Eolfi et actuellement directeur financier supervision groupe Veolia Environnement, qui de manière concordante évoquent l’absence de remise en cause par M. X… de ses modalités de rémunération postérieurement à janvier 2007 ; que la SA Eolfi renvoie tout spécialement à l’attestation du Chief Exécutive Officer, M. B… qui précise « avoir courant septembre 2007 assisté à une réunion entreM. C… et M. X…, l’objet de cette réunion étant de confirmer à la demande du groupe Veolia Environnement qui allait entrer au capital d’Eolfi que la base de rémunération de M. X… était maintenant 100 % fixe. M. X… a reconnu le fait, puis la réunion s’est terminée » ; que l’article 1271 du code civil prévoit que la novation s’opère de trois manières et notamment lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l’ancienne, laquelle est éteinte ; que l’article 1273 du même code précise que la novation ne se présume point, il faut que la volonté de l’opérer résulte clairement de l’acte ; qu’en l’espèce, la simple concomitance de la modification de la rémunération du salarié avec la vente par M. X… des parts qu’il détenait dans la SA Eolfi n’est pas de nature à démontrer la volonté des parties d’opérer une quelconque novation portant sur les modalités de la rémunération de M. X… ; que de même, la clause contractuelle relative à la rémunération du salarié, telle que précédemment rapportée, ne permet en aucun cas de constater que la commune intention des parties était d’appliquer la rémunération variable pour la seule durée de la période d’essai ; qu’enfin, le mode de rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément essentiel du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord ; qu’aussi, l’acceptation de la modification du contrat de travail que constitue le passage d’une rémunération entièrement variable à une rémunération fixe ne peut-elle résulter que d’une manifestation claire et non équivoque de volonté et ne peut se déduire d’un acquiescement implicite, d’une absence de protestation et de réclamations ou de la seule poursuite du contrat modifié ; qu’il résulte des circonstances propres à l’espèce que l’absence de protestation et de réclamation de la part de M. Marliave avant la fin de l’année 2009, la poursuite du contrat de travail modifié, ne peuvent caractériser un acquiescement à la modification des modalités de sa rémunération ; que le constat opéré par M. B… témoin de l’échange intervenu entre M. X… et M. C… n’est pas significatif d’un accord exprès du salarié à l’application exclusive d’une rémunération fixe ; qu’en effet, dans la mesure où la SA Eolfi était concomitamment engagée dans des pourparlers pour l’introduction de la société Veolia Environnement dans son capital, il ressort de ce témoignage que le salarié a seulement admis, pour les besoins de la cause, que la « base de sa rémunération était maintenant 100 % fixe », ce qui ne caractérise pas un accord à une modification des modalités de sa rémunération et une renonciation à se prévaloir des éléments contractuels de celle-ci ; qu’au surplus, avant même tout débat judiciaire, la SA Eolfi a elle-même proposé un avenant au contrat de travail le 4 novembre 2009 pour régulariser a posteriori avec un effet rétroactif la modification qu’elle avait unilatéralement imposée au salarié ; qu’aux termes de ses écritures, M. X… explicite par un tableau le montant des commissions réclamées ainsi que la détermination des taux et des assiettes des commissions ; qu’il communique également un tableau récapitulatif par année et a fait une estimation du moins perçu par lui à savoir la différence entre 8, 5 % du montant des commissions nettes et la rémunération qui lui a été effectivement versée ; que la SA Eolfi n’a formulé aucune observation sur les modalités de calcul du rappel de salaire formé par M. X… ; qu’il sera en conséquence fait droit à la demande et la SA Eolfi sera condamnée à régler à M. X… la somme de 689. 856 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de janvier 2007 à la rupture du contrat outre les congés payés afférents ;
1°) ALORS QUE l’article 9 du contrat de travail stipulait que le salarié percevrait « un montant variable de 8, 5 % des commissions de gestion nettes de rétrocessions facturées par la société ou ses filiales aux véhicules d’investissement qu’elles gèrent, dirigent ou conseillent de façon directe ou indirecte, à l’exception de la SAS Eole Patrimoine » ; que la société Eolfi faisait valoir que les parties avaient fixé ce pourcentage anormalement élevé de 8, 5 % précisément parce qu’il ne devait s’appliquer que pendant les trois mois de la période d’essai, le temps que l’activité de la société démarre ; que la cour d’appel a pourtant jugé que la clause contractuelle relative à la rémunération du salarié ne permettait en aucun cas de constater que la commune intention des parties était d’appliquer la rémunération variable pour la seule durée de la période d’essai ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher si l’application au-delà de la période d’essai du taux de 8, 5 % n’aurait pas conduit à ce que le salarié, directeur commercial d’une PME d’une dizaine de salariés, bénéficie d’une rémunération mensuelle exorbitante, fondée sur un taux de commissionnement hors de proportion avec la pratique dans ce type d’activités et la trésorerie de l’entreprise, ainsi qu’avec tout autre salaire au sein de l’entreprise, y compris celui de son président-fondateur, ce qui confirmait que les parties n’avaient jamais eu l’intention d’appliquer un tel taux au-delà des trois mois de la période d’essai, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents qu’ils examinent ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que la société Eolfi produisait l’attestation de M. Guy B…, qui précisait « avoir courant septembre 2007 assisté à une réunion entre M. C… et M. X…, l’objet de cette réunion étant de confirmer à la demande du groupe Veolia Environnement qui allait entrer au capital d’Eolfi que la base de rémunération était maintenant 100 % fixe. M. X… a reconnu ce fait, puis la réunion s’est terminée. » ; que pour décider cependant que l’échange intervenu entre M. X… et M. C… n’était pas significatif d’un accord exprès du salarié pour l’application exclusive d’une rémunération fixe, la cour d’appel a relevé qu’il ressortait de ce témoignage que le salarié avait seulement admis « pour les besoins de la cause » que la « base de sa rémunération était maintenant 100 % fixe » ; qu’en statuant ainsi, quand il ressortait de cette attestation que le salarié avait expressément reconnu que sa rémunération était fixe sans émettre la moindre réserve, ce qui démontrait qu’il avait bien précédemment donné son accord pour le passage d’une rémunération variable à une rémunération fixe, la cour d’appel a dénaturé l’attestation de M. B… et, partant, violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents qu’il examine, ensemble l’article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QUE l’accord du salarié à la modification de son contrat de travail, y compris concernant sa rémunération, s’il doit être exprès et donc résulter d’une manifestation claire et non équivoque de volonté, n’a pas à être obligatoirement écrit ; que par ailleurs, les contrats s’exécutent de bonne foi ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que M. Guy B… attestait « avoir courant septembre 2007 assisté à une réunion entre M. C… et M. X…, l’objet de cette réunion étant de confirmer à la demande du groupe Veolia Environnement qui allait entrer au capital d’Eolfi que la base de rémunération était maintenant 100 % fixe. M. X… a reconnu ce fait, puis la réunion s’est terminée » ; qu’en déniant pourtant l’existence d’une manifestation claire et non équivoque de volonté de la part de M. X… quant à son passage à une rémunération fixe, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, et a violé les articles 1134, 1135 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
4°) ALORS QUE si l’intention de nover ne se présume pas, il n’est pas nécessaire qu’elle soit exprimée en termes formels dès lors qu’elle est certaine et résulte des faits de la cause ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que M. B… attestait « avoir courant septembre 2007 assisté à une réunion entre M. C… et M. X…, l’objet de cette réunion étant de confirmer à la demande du groupe Veolia Environnement qui allait entrer au capital d’Eolfi que la base de rémunération était maintenant 100 % fixe. M. X… a reconnu ce fait » ; qu’elle a également constaté que M. X… reconnaissait que la société Eolfi lui avait versé une rémunération exclusivement fixe sans interruption à compter du mois de janvier 2007, ce qui coïncidait avec la fin de la période d’essai de trois mois ; qu’elle a également constaté que cela coïncidait avec la vente par M. X… de toutes ses actions de la société ; qu’elle a enfin constaté l’absence de protestation et de réclamations de la part de M. X… avant la fin de l’année 2009 ; qu’en écartant pourtant une volonté de nover le contrat sur le mode de rémunération, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé les articles 1271 et 1273 du code civil ;
5°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents qu’ils examinent ; qu’en l’espèce, la société Eolfi produisait l’attestation de M. Nicolas Y…, qui avait en charge les ressources humaines de la société Eolfi en 2006 et 2007, et dans laquelle il relatait qu’à l’époque de la négociation et de la conclusion du contrat de travail de M. X…, il était clair pour les parties que la rémunération variable prévue dans le contrat ne pouvait être que temporaire, qu’il faudrait rapidement passer à une rémunération fixe et que c’est ainsi d’un commun accord que les parties avaient convenu du passage à une rémunération fixe en janvier 2007 ; qu’en affirmant que M. Y… s’était borné à évoquer dans son attestation l’absence de remise en cause par M. X… de ses modalités de rémunération postérieurement à janvier 2007, quand il ressortait des termes de son attestation que le salarié avait expressément donné son accord pour la modification de sa rémunération, la cour d’appel a dénaturé cette attestation en violation de l’article 1134 du code civil, ensemble le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les éléments de la cause ;
6°) ALORS QUE l’employeur faisait valoir que le salarié, compte tenu de la place qu’il occupait dans l’entreprise, n’aurait pas poursuivi pendant trois ans et demi l’exécution de son contrat de travail sans émettre aucune observation sur sa rémunération s’il avait réellement été privé des deux tiers de son salaire ; que la cour d’appel a cependant affirmé que l’absence de protestation et de réclamation de la part de M. X… avant la fin de l’année 2009 et la poursuite du contrat de travail modifié ne pouvaient caractériser un acquiescement à la modification des modalités de sa rémunération ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher si eu égard à la liberté d’expression dont disposait le salarié du fait de ses fonctions de directeur commercial, des mandats sociaux qu’il exerçait dans d’autres sociétés du groupe et de la relation directe et quotidienne, ainsi que d’amitié qu’il entretenait avec le président, son silence pendant plus de trois ans ne confirmait pas au contraire qu’il avait donné son accord pour la modification de sa rémunération, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné la société Eolfi à verser à M. X… la somme de 270. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement du 25 février 2010 est ainsi libellée : « Nous revenons vers vous à la suite de l’entretien préalable qui s’est tenu le 28 janvier dernier, en présence de moi-même et de M. Jean-Paul G…, directeur juridique d’Eolfi, et lors duquel vous étiez assisté de Mme N… E…, juriste au sein de notre Société. Lors de cet entretien, nous vous avons exposé les motifs qui nous ont amenés à envisager à votre égard une mesure de licenciement et que nous vous rappelons ci-après. Vous exercez depuis le mois de septembre 2006 au sein de notre Société les fonctions de Directeur Commercial et, à ce titre, vous êtes principalement chargé de gérer la relation investisseurs, le marketing, la communication et les ventes de la société Eolfi, des sociétés affiliées et des véhicules d’investissement pour lesquels la Société ou ses filiales agissent en tant que conseils, et de gérer les levées de fonds lors de la création ou de l’augmentation de capital de nouveaux supports d’investissement initiés par Eolfi ou par ses filiales. A la fin de l’année 2006 et alors que nous étions en phase de levée de fonds pour notre premier Fonds d’investissement de proximité (FIP), je n’ai pu que constater votre rôle quasi-inexistant dans les diverses initiatives qui ont été prises à l’égard des prospects investisseurs, alors pourtant que la levée de fonds et les relations avec les Investisseurs sont l’élément essentiel de votre mission au sein d’Eolfi. J’ai dû, en réalité, me substituer à vous dans l’exécution de ces tâches. J’ai alors pensé que vous n’aviez pas encore pris la pleine mesure de vos fonctions. Or, dans le courant de l’année 2007, la création de deux nouveaux fonds d’Investissement, qui constituait l’essentiel de votre mission à l’époque, a été lancée (FCPR Windfall et SIF Windfall). Alors que la date prévue de création de ces deux fonds avait pourtant été validée par vous après mûre réflexion, cette date a été très substantiellement décalée en raison de votre incapacité à gérer efficacement les relations avec BNP Paribas et KBL (Luxembourg), le suivi des processus administratifs et la rédaction des documents juridiques afférents à ces fonds. Ce décalage important a repoussé jusqu’à la fin de l’année 2007 le début de la campagne de promotion de ces deux fonds par BNP Paribas et KBL Luxembourg, ce qui a désorganisé leurplanning de commercialisation en les obligeant d’annuler des réunions avec leur réseau. Outre le fait que ceci les atrès fortement mécontentés, ce retard a contribué à unefaible levée defonds sur ces deux véhicules d’investissement, très largement en-dessous des attentes légitimes que vous aviez vous-même validées à de multiples reprises (à savoir 200 millions d’euros pour le FCPR Windfall et le SIF Windfall). A ce jour, seulement 44 millions ont été levés dans Windfall, et 4, 3 millions dans le SIF Windfall. Cette incapacité à gérer et à mener à bien vos missions s’est renouvelée en 2008, au travers des opérations suivantes :- La société de gestion 123 Venture, qui est l’un de nos partenaires privilégiés depuis le début des activités d’Eolfi, nous a fait part, à plusieurs reprises, de son mécontentement sur la manière dont vous gériez notre relation avec eux : lenteur des échanges, manque d’initiative de votre part, reporting imprécis et insuffisant sur les investissements. La situation était telle que j’ai dûdécider de confier à Nicolas Y…, Directeur du Portefeuille France, à compter de janvier 2009, la responsabilité de la gestion de notre relation avec 123Venture, alors qu’elle se situe au coeur de vos responsabilités ;- En 2008, la levée de fonds est restée très en-deçà de vos objectifs sur Windfall et le SIF Windfall, hormis ce qui est venu du réseau BNPP et des investisseurs que j’ai apportés personnellement. Le déséquilibre financier de Windfall est devenu, en 2008, dramatique au point de mettre ce fonds au bord du dépôt de bilan. Cette situation résultait du non-respectflagrant des prévisions de levées defonds que vous aviez indiquées, obligeant Eolfi à lever 20millions d’euros auprès de ses actionnaires enjuillet 2008, et à injecter 9millions d’euros dans Windfall en plus des 12 millions d’euros qu’Eolfi avait déjà avancés à cefonds, dont vous aviez pourtant la charge de l’animation commerciale, et qui n’a dû sa survie qu’à l’intervention massive des actionnaires d’Eolfi. Finalement, votre insuffisance professionnelle s’est cristallisée au cours de l’année 2009 ; votre défaillance a été totale dans la levée de fonds de Windfall en 2009, aucune souscription significative n’ayant été enregistrée, à l’exception de 3millions d’euros souscrits par Olivier F… en raison des efforts de Jean-Paul G… et Nicolas Y… sans aucune contribution de votre part. Nos trois principaux distributeurs (Petercam, BNPP et Banques Populaires) se sont plaints de façon indépendante et spontanée, envers moi, dans le courant du 1er semestre 2009, sur la manière dont vous gériez la relation avec eux : manque de professionnalisme, manque de rigueur, reporting défaillant et lacunaire, délais excessifs de traitement. Nous avons pu également constater lors des deux Assemblées Générales Annuelles de 2008 et 2009 de la société Eole Patrimoine, la profonde insatisfaction des investisseurs dans cette société, dont vous êtes le principal interlocuteur, en charge des relations au quotidien, au point qu’ils ont refusé, lors de l’assemblée 2009, la reconduction du plan de BSPGE au profit des deux dirigeants. Ces divers éléments de profonde insatisfaction et d’insuffisance ont été évoqués de vive voix entre vous et moimême, à plusieurs reprises et depuis de longs mois, notamment lors des entretiens qui ont eu lieu les 3 juillet et 23 novembre 2009. Face à ce constat objectif discuté entre nous nous avons été amenés à envisager, d’un commun accord avec vous, une rupture conventionnelle de votre contrat de travail. C’est la raison pour laquelle je vous ai invité par lettre du 30 novembre, à un entretien prévu le 7 décembre 2009, où nous devions évoquer cette éventuelle rupture d’un commun accord. Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien alors que j’étais pourtant disponible dans monbureau pour vous recevoir et avez alors adopté une attitude totalement hostile. Dans ce contexte, nous n’avons eu d’autre choix que d’envisager une mesure de licenciement. Les explications que vous nous avez fournies lors de l’entretien préalable ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation de la situation. Dans ces conditions, nous vous notifions, par la présente votre licenciement en raison de l’insuffisance professionnelle manifeste dont vous avez fait preuve pour l’ensemble des faits rappelés ci-dessus. Votre contrat de travail prendra fin à l’issue d’une période de préavis de trois (3) mois à compter de la date de première présentation de cette lettre par les services postaux (…) » ; que l’insuffisance professionnelle, qui se définit comme l’incapacité objective et durable d’un salarié d’exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification, constitue une cause légitime de licenciement ; que si l’appréciation des aptitudes professionnelles et de l’adaptation à l’emploi relève du pouvoir patronal, l’insuffisance alléguée doit toutefois reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l’employeur ; que pour justifier le licenciement, les griefs formulés doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l’entreprise ou être préjudiciables aux intérêts de celle-ci ; que la SA Eolfi met surtout l’accent sur le rôle quasi inexistant du salarié dans la levée de fonds du FIP Energies Nouvelles fin 2006, ses carences dans la levée de fonds pour le FCPR Windfall et le SIF Windfall en 2007, et la mauvaise gestion administrative de la création du FCPR Windfall et du SIF Windfall, et de façon générale sur les mauvais résultats du salarié en lien avec un manque de rigueur, de méthode et d’organisation caractérisant une insuffisance professionnelle avérée dès lors qu’il devait en tant que directeur commercial, essentiellement gérer la relation investisseurs et les levées de fonds, en identifiant et démarchant des investisseurs et en suscitant et en concluant les levées de fonds ; qu’elle communique les attestations des deux représentants de la société Petercam SA qui ont témoigné en 2011 que « la levée de fonds pour le FCPR Eolinvest avait été pour ce qui les concerne exclusivement menée par M. Alain C… qui a assumé seul l’ensemble des présentations de ce fonds à leurs clients, la présence de M. X… ayant été épisodique et passive » ; qu’ils ajoutent que « le reporting du fonds devait être assuré par M. X…, qu’ils ont fait part à M. C… de leur mécontentement quant à son manque de maîtrise des dossiers, ses réponses à leurs questions étant souvent imprécises » ; que s’agissant des carences dans la levée des fonds pour le FCPR Windfall et le SIF Windfall, la SA Eolfi fournit plusieurs courriels de M. X… qu’elle considère avoir été rédigés sur un ton minimaliste manquant totalement d’approche commerciale, n’étant pas de nature à démontrer les critères de qualité qu’elle était en droit d’attendre d’un directeur commercial, également mandataire social d’une entreprise de ce secteur d’activité ; que ces courriels étaient rédigés de la manière suivante : « voici les éléments sur le fond Windfall, offre 10 M Euros cordialement », « Bonjour Monsieur, avez-vous toujours un intérêt pour Windfall. Nous avons collecté 50 M €. Très cordialement », « Monsieur, avez-vous encore un intérêt pour Windfall nous pouvons nous parler. Cordialement » ; qu’elle considère qu’en dépit de la crise, l’échec de M. X… dans la levée des fonds est patent puisqu’il n’a levé globalement que 45 millions d’euros sur les 200 M € qu’il avait annoncés et sur lesquels elle comptait au regard des engagements pris par ailleurs ; qu’elle relève que la carence du salarié a placé le FCPR Windfall au bord du dépôt de bilan ; que s’agissant de la gestion administrative de la création du FCPR Windfall et du SIF Windfall, la SA Eolfi communique toute une série de courriels émanant pour l’essentiel de la BNP Paribas entre le 5 octobre 2007 et le mois de février 2008 faisant état « du dépassement de certains délais, de l’absence de communication d’éléments extrêmement précis sur les aspects fiscaux, sur l’intégration de corrections, sur le caractère insuffisamment précis et complet de certaines clauses sur l’exigence d’une relecture parfaite des versions anglaises, sur la difficulté d’envoyer en temps et en heure divers documents à Monaco, à Luxembourg, à Londres, sur un nouveau dysfonctionnement s’ajoutant à une série d’autres qui commencent à poser de sérieux problèmes » ; que M. Guy B… chief executive officer d’Eolfi avait écrit le 27 novembre 2007 « l’opération de placement du SIF Windfall auprès notamment de la BNP est sur le point d’échouer à cause de ces délais trop longs non tenus » ; que la SA Eolfi considère que M. X… avait la charge de coordonner les interventions de la banque KBL au Luxembourg, qu’il a échoué dans cette mission de coordination ; que la SA Eolfi fait aussi état de l’entretien d’évaluation du salarié réalisé au début de l’année 2009 au titre de l’année 2008 ; qu’elle relève que M. X… a, du fait des relations amicales entretenues avec M. C…, obtenu la note moyenne de « G », que des remarques très précises révélant les carences du salarié ont été alors formulées telles que : « Désorganisation, trop de retenue dans les initiatives, travail insuffisamment approfondi, insuffisances dans la méthodologie de travail, pas de rôle de modèle positifpour les équipes, mauvaise capacité à diriger ses subordonnés, insuffisante capacité à se fixer des objectifs dans la réalisation de son travail » ; qu’elle fait observer que M. X… a signé cette évaluation et en a donc admis le bien fondé ; qu’il ressort de l’ensemble des pièces communiquées y compris par le salarié qu’hormis dans le cadre de l’unique évaluation réalisée début 2009, aucune remarque, aucune lettre de recadrage n’a été adressée à M. X… tout au long de la collaboration qui a duré près de quatre années ; que si diverses rubriques de la notation révèlent des insuffisances sur les points précis préalablement relevés, il apparaît que M. X… présente « des résultats au-dessus des attentes » dans plus de 10 rubriques et spécialement dans les rubriques relatives à son sens des responsabilités puisqu’il est « capable de travailler avec une supervision limitée » qu’il est « loyal, responsable, adaptable et qu’il accepte volontiers de nouvelles responsabilités », qu’il a « un sens de l’urgence et les priorités » ; que la cour relève par ailleurs que postérieurement à cette évaluation, la SA Eolfi a notifié à M. X… que cette rémunération mensuelle fixe passerait de 11. 030 euros à 11. 360 euros bruts ; que l’auteur de la lettre notifiant cette augmentation a expressément indiqué qu’elle était accordée sur « proposition du supérieur hiérarchique » ; que cette augmentation proposée par l’employeur immédiatement après l’évaluation réalisée au titre de l’a