Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 septembre 2014, 13-18.572, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 septembre 2014, 13-18.572, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 4 avril 2013), que M. X…, engagé par société Jean Combaluzier le 12 juin 1995, dont le contrat avait été transféré à la société Ascenseurs Drieux-Combaluzier en 1997, a été promu attaché de direction commerciale le 22 décembre 2005 ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail puis a été licencié pour faute grave ;

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail avec effet au 9 avril 2010 et de le condamner à verser au salarié des sommes à titre d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité compensatrice de congés payés, d’indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque l’employeur procède à la suppression de tâches relevant de la qualification contractuelle du salarié, sans les remplacer par d’autres, le contrat de travail ne se trouve modifié que si l’économie fonctionnelle de celui-ci s’en trouve changée ; qu’en retenant que la « décharge » de la responsabilité de l’outil de chiffrage et de la mission de tutorat caractérisait une modification du contrat de travail du salarié, sans constater que l’économie fonctionnelle s’en trouvait changée, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil ;

2°/ que la qualification d’un salarié s’apprécie au regard des fonctions réellement exercées par lui et non en considération des mentions figurant sur le contrat de travail ou tout autre document ; qu’en se basant sur les mentions figurant dans l’organigramme de l’entreprise et dans des courriers de la direction pour affirmer que le salarié n’exerçait plus les fonctions d’attaché de direction et avait subi une modification unilatérale de son contrat de travail, la cour d’appel, qui s’est prononcée par des motifs inopérants, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil ;

3°/ que l’employeur faisait valoir, d’une part, le salarié avait eu la fausse impression d’avoir été écarté en 2009 de la gestion de l’outillage alors que, cette année-là, l’activité avait été réduite à de simples mises à jour ponctuelles auxquelles il avait participé, et d’autre part, que le système de binôme pour l’activité de tutorat n’avait vocation qu’à être mis en place en cas d’absence de l’un des intéressés et représentait, à cet égard, un changement ponctuel et sans importance, insusceptible comme tel de caractériser une modification du contrat de travail ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen des écritures de l’employeur, la cour d’appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance de l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et répondant aux conclusions, la cour d’appel, qui a constaté que le salarié avait été déchargé de la responsabilité de la gestion de l’outil de chiffrage, qu’il n’était plus appelé à exercer sa mission de tutorat, qu’il figurait sur les organigrammes sans qu’il soit fait mention de sa qualité d’attaché de direction, et qu’il apparaissait dans les courriers de la société comme ingénieur commercial et non plus comme attaché de direction commercial, a pu décider que l’employeur avait commis des manquements suffisamment graves empêchant la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ascenseurs Drieux-Combaluzier aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Ascenseurs Drieux-Combaluzier et condamne celle-ci à payer

à M. X… la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la société Ascenseurs Drieux-Combaluzier

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail avec effet au 9 avril 2010 et condamné la SAS ASCENSEURS DRIEUX-COMBALUZIER à verser à M. X… des sommes à titre d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité compensatrice de congés payés, d’indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (98.000 euros) ;

AUX MOTIFS QUE aux termes de l’avenant au contrat de travail du 22 décembre 2005, M. X… a été promu au poste d’attaché de direction commerciale et ses missions ont été étendues à la responsabilité de la gestion de l’outil de chiffrage modernisation, au tutorat des nouveaux entrants aux postes de commercial modernisation, à la responsabilité de la diffusion de l’image de la société ; que M. X… fait valoir qu’à partir du 1er avril 2006, date de la nomination de M. Y… aux fonctions de directeur des travaux, il a vu progressivement son contrat de travail se vider de sa substance ; que bien qu’il ait alerté sa hiérarchie le 23 juin 2008 sur la modification de sa qualification, l’employeur lui a retiré les responsabilités qui lui avaient été confiées par l’avenant au contrat de travail du 22 décembre 2005 ; que courant février 2009, M. Y… lui a proposé un poste de VRP ; qu’il a alors par courrier du 16 mars 2009 demandé à l’employeur une rupture négociée de son contrat de travail ; que ses démarches auprès de l’employeur étant restées vaines, il a alerté l’inspection du travail par courrier du 29 septembre 2009 ; qu’enfin la dégradation de ses conditions de travail a affecté son état de santé et entraîné des arrêts maladie du 20 janvier au 14 février 2010, puis du 6 au 27 avril 2010 ; que pour démontrer les manquements qu’il reproche à l’employeur, le salarié verse au dossier un courrier du 23 juin 2008 dans lequel il proteste sur la qualification d’ingénieur des ventes figurant sur les courriers accompagnant les devis qu’il adresse aux clients et rappelle que selon l’avenant au contrat de travail, sa qualification est celle d’attaché de direction commerciale, ainsi qu’un courrier du 16 mars 2009 dans lequel il se plaint du retrait des nouvelles missions qui lui ont été confiées à compter du 1er janvier 2006 dans l’avenant et de n’apparaître sur aucun des organigrammes de la société ; que l’employeur dans sa réponse à ce dernier courrier datée du 6 avril 2009 refuse la proposition de rupture conventionnelle, confirme les missions précisées à l’avenant tout en admettant que la responsabilité de la gestion de l’outil de chiffrage a été transférée au directeur des achats ; que M. X… justifie en outre du courrier adressé à l’inspection du travail le 25 septembre 2009 et des correspondances échangées avec l’employeur entre le 25 septembre et le 30 novembre 2009 ; qu’aux termes du courrier daté du 25 septembre adressé à ce dernier, le salarié proteste contre la modification de son contrat de travail en constatant que le 5 avril 2009 la responsabilité de la gestion de l’outil de chiffrage lui a été enlevée que son activité de tutorat a été vidée de son sens par l’organisation adoptée unilatéralement d’un système de binôme en juin 2009 et qu’il ne lui est plus confié aucune action de publicité ou de participation à des salons depuis la fin de l’année 2008 ; qu’il ajoute que le statut de VRP qui lui avait été proposé début 2009 et qu’il avait refusé lui est imposé par la modification progressive de l’organisation de l’entreprise et de ses fonctions ; que l’employeur dans sa réponse datée du 5 octobre soutient que le salarié conserve la possibilité de faire des propositions au directeur des achats à qui incombe la responsabilité de « finaliser » la gestion de l’outil de chiffrage et lui reproche de ne plus s’impliquer dans les deux autres missions en concluant que s’il devait de son propre chef décider de se dégager de ces missions, un nouvel avenant serait régularisé, il reconnaissait par ailleurs que sa position dans l’organigramme n’était pas claire ; qu’aux termes de son courrier du 30 novembre 2009, M. X… prenait acte de cette reconnaissance et réfutait les autres assertions en soulignant la récente mise en place d’un outil de communication spécifique à laquelle il n’avait pas été associé ainsi que la décision qui avait été prise de recourir à un prestataire alors qu’il était lui-même chargé de la communication de l’image de la société ; qu’à l’audience et dans ses écritures, la société DRIEUX-COMBALUZIER fait remarquer que la qualification du salarié n’est pas mentionnée sur les courriers destinés aux clients et fait valoir que les organigrammes produits aux débats sont ceux du comité de direction dont M. X… ne faisait pas partie ; qu’elle reproche au salarié de n’avoir pris aucune initiative depuis la fin de l’année 2008 dans le domaine de la diffusion de l’image de la société alors qu’il n’a pas été exclu de ce domaine comme en témoigne sa participation au lancement du plan marketing en janvier 2010 et soutient qu’il ne démontre pas avoir été écarté de ses fonctions alors qu’il avait une zone commerciale plus réduite que celle des autres ingénieurs des ventes compte tenu des attributions qui lui avaient été dévolues ; qu’elle fait valoir que l’outil de chiffrage n’a plus nécessité que des mises à jour ponctuelles à compter de l’année 2009 et que M. X… ne démontre pas que ses propositions n’ont pas été prises en compte ; qu’en 2009, l’équipe des salariés commerciaux a été renouvelée mais que les ingénieurs commerciaux étant expérimentés, ils n’avaient pas besoin de tutorat et que le système des binômes a été mis en place pour le cas où l’un d’eux serait en congé ou absent ; qu’elle établit par ailleurs que M. X… assistait en 2008 et 2009 aux réunions mensuelles du service modernisation ; qu’en dépit de cette argumentation, il résulte des pièces produites aux débats que le salarié a été déchargé de la responsabilité de la gestion de l’outil de chiffrage en début d’année 2009 ; que sa mission de tutorat aurait dû trouver pleinement à s’exercer à l’égard d’au moins cinq des jeunes salariés nouvellement embauchés courant 2008 et début 2009, qui contrairement à ce que soutient l’employeur, étaient loin compte tenu de leur âge d’avoir l’expérience de l’appelant ; qu’enfin, dans son courrier du 5 octobre 2009, l’employeur se contente de reprocher à M. X… de ne pas s’impliquer dans ses missions complémentaires alors que le 4 mai de la même année, dans sa fiche d’évaluation, il notait que son implication, son sens de l’innovation et son respect des objectifs étaient excellents ; qu’enfin sur les organigrammes de la société, le salarié sur la page de la direction commerciale apparaît dans la colonne « commercial renov » sans qu’il soit fait mention de sa qualité d’attaché direction ; que les courriers datés de l’année 2009 co-signés par le directeur commercial Mr X… produits au dossier mentionnent la fonction d’ingénieur commercial pour ce dernier et non celle d’attaché de direction commerciale ; qu’il est ainsi établi que l’employeur a procédé unilatéralement à la modification du contrat de travail tel qu’il résultait de l’avenant du 22 décembre 2005 ; qu’en imposant au salarié cette modification, la société DRIEUX-COMBALUZIER a gravement manqué à ses obligations contractuelles ;

1/ ALORS QUE lorsque l’employeur procède à la suppression de tâches relevant de la qualification contractuelle du salarié, sans les remplacer par d’autres, le contrat de travail ne se trouve modifié que si l’économie fonctionnelle de celui-ci s’en trouve changée ; qu’en retenant que la « décharge » de la responsabilité de l’outil de chiffrage et de la mission de tutorat caractérisait une modification du contrat de travail du salarié, sans constater que l’économie fonctionnelle s’en trouvait changée, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil ;

2/ ALORS QUE la qualification d’un salarié s’apprécie au regard des fonctions réellement exercées par lui et non en considération des mentions figurant sur le contrat de travail ou tout autre document ; qu’en se basant sur les mentions figurant dans l’organigramme de l’entreprise et dans des courriers de la direction pour affirmer que le salarié n’exerçait plus les fonctions d’attaché de direction et avait subi une modification unilatérale de son contrat de travail, la cour d’appel, qui s’est prononcée par des motifs inopérants, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil ;.

3/ ALORS QUE l’exposant faisait valoir, d’une part, le salarié avait eu la fausse impression d’avoir été écarté en 2009 de la gestion de l’outillage alors que, cette année-là, l’activité avait été réduite à de simples mises à jour ponctuelles auxquelles il avait participé, et d’autre part, que le système de binôme pour l’activité de tutorat n’avait vocation qu’à être mis en place en cas d’absence de l’un des intéressés et représentait, à cet égard, un changement ponctuel et sans importance, insusceptible comme tel de caractériser une modification du contrat de travail ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen des écritures de l’exposant, la cour d’appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance de l’article 455 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2014:SO01568


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