Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 novembre 2018, 16-26.741, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 novembre 2018, 16-26.741, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme Y… épouse Z… a été engagée en qualité de directeur général salarié le 1er décembre 2003, avec reprise de l’ancienneté acquise depuis le 1er octobre 1990, par la société Serenity Invest, société holding du groupe Giraudet ; que le 19 septembre 2012, la société Serenity Invest a convoqué la salariée à un entretien préalable en vue de son licenciement ; qu’elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse le 4 octobre 2012 ; qu’elle a saisi la formation de référé de la juridiction prud’homale de diverses demandes le 30 avril 2013 puis au fond le 5 juin 2013 ;

Sur les deuxième à cinquième branches du premier moyen, la première branche du deuxième moyen et les quatrième et cinquième branches du troisième moyen du pourvoi principal de l’employeur, ci-après annexés :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la salariée, ci-après annexé :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l’employeur, pris en sa première branche :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de déclarer nul le licenciement de la salariée, d’ordonner sa réintégration dans ses fonctions de directeur général salarié de la société Serenity Invest, de condamner celle-ci à payer à la salariée ses salaires depuis le 8 janvier 2013 jusqu’à la date effective de sa réintégration sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 10 000 euros outre la prime contractuelle annuelle de 30 000 euros sur la période concernée, alors, selon le moyen qu’il est interdit aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement se bornait à mentionner, pour les démentir, les accusations de harcèlement moral faites par Mme Z…, sans en faire un grief de licenciement ; qu’en affirmant qu’au vu de cette lettre, la dénonciation d’agissements de harcèlement moral imputés à l’employeur constituait l’un des motifs de licenciement retenu à l’encontre de Mme Z…, la cour d’appel a violé le principe susvisé, ensemble l’article L. 1232-6 du code du travail ;

Mais attendu que c’est par une interprétation souveraine, rendue nécessaire par les termes ambigus de la lettre de licenciement, que la cour d’appel a constaté, d’une part, que la dénonciation d’agissements de harcèlement imputés à l’employeur constituait l’un des motifs du licenciement et, d’autre part, que la salariée ne saurait être considérée de mauvaise foi, ce dont elle a exactement déduit que ce grief emportait à lui seul la nullité du licenciement ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal de l’employeur, pris en sa seconde branche :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à payer à la salariée diverses sommes à titre de rappel de primes contractuelles, de prime contractuelle annuelle sur la période allant du 8 janvier 2013 jusqu’à la date effective de sa réintégration, de rejeter la demande de l’employeur tendant à voir condamner la salariée à lui rembourser diverses sommes au titre de primes contractuelles indues dont la société Serenity Invest s’était acquittée à titre de provision suite à l’arrêt de la cour d’appel de Grenoble du 27 février 2014, alors, selon le moyen que l’acceptation d’une modification du contrat de travail peut s’établir par tous moyens ; que si le silence ne vaut pas à lui seul acceptation, il n’en est pas de même lorsque les circonstances permettent de donner à ce silence la signification d’une acceptation ; qu’en l’espèce, pour établir l’accord donné par Mme Y… épouse Z… à la substitution des primes contractuelles initialement prévues par la rémunération du mandat de directrice générale instituée lors de l’assemblée générale ordinaire du 23 juin 2008, l’employeur faisait valoir que Mme Y… épouse Z…, directrice générale, actionnaire à 23 % de la société qui l’employait et épouse de son président, disposant des pleins pouvoirs opérationnels et d’engagement et ayant notamment la charge de superviser les paies et en particulier les bulletins de paie, avait marqué son acceptation en validant ses propres bulletins de paie et en n’opérant aucune réclamation entre 2008 et son licenciement ; qu’en se bornant à affirmer que les délibérations des 23 juin 2008 et du 31 mai 2011 ne remettaient pas expressément en cause le principe du versement des primes bi-annuelles, sans s’expliquer sur les autres éléments invoqués par l’employeur, quand elle relevait par ailleurs qu’en sa qualité de directrice générale de la société, Mme Z… bénéficiait d’une délégation générale pour veiller à l’application de la législation notamment sociale et qu’une « erreur » la concernant commise durant plusieurs années ne pouvait pas lui échapper, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble l’article L. 1221-1 du code du travail ;

Mais attendu qu’appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d’appel qui a retenu, par motifs propres, qu’aucune disposition de la délibération de l’assemblée générale du 31 mai 2011 ne remettait expressément en cause le principe du versement des primes bi-annuelles, et par motifs adoptés, que l’employeur ne produisait aucun document contractuel attestant de l’accord de la salariée pour la suppression de ces primes, a, par ces seuls motifs et sans encourir le grief du moyen, justifié légalement sa décision ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal de l’employeur, pris en sa première branche :

Vu les articles 2227 du code civil et L. 3245-1 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable ;

Attendu que si, en principe, l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d’une même instance, concernent l’exécution du même contrat de travail ;

Attendu que, pour déclarer prescrite la demande de l’employeur en répétition des congés excédant les seuils légaux et conventionnels dont a bénéficié la salariée au titre des années 2009 à hauteur de soixante-douze jours, 2010 à hauteur de cent deux jours et 2011 à hauteur de neuf jours, l’arrêt retient qu’en application de l’article L. 3245-1 du code du travail, cette demande est soumise à la prescription de trois ans, qu’ayant été formulée par conclusions du 13 octobre 2014 devant les premiers juges, la demande est prescrite au titre des années 2009 et 2010, que s’agissant de l’année 2011 la prescription est acquise jusqu’au 13 octobre 2011, qu’à défaut de précision par l’employeur, la part non prescrite au titre de 2011 ne peut être déterminée, qu’il y a lieu en conséquence de le débouter de sa demande à ce titre ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud’hommes par la salariée le 5 juin 2013, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les deuxième et troisième branches du troisième moyen du pourvoi principal de l’employeur :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’elle rejette comme prescrite et non déterminée la demande de la société Serenity Invest tendant à voir condamner Mme Z… à lui rembourser diverses sommes au titre d’un trop-perçu de congés payés et d’ancienneté, l’arrêt rendu le 29 septembre 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Chambéry ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Serenity Invest.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR déclaré nul le licenciement de Mme Y… épouse Z…, ordonné sa réintégration dans ses fonctions de directeur général salarié de la société Serenity Invest, et condamné la société Serenity Invest à payer à Mme Y… épouse Z… ses salaires depuis le 8 janvier 2013 jusqu’à la date effective de sa réintégration sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 10 000 € outre la prime contractuelle annuelle de 30 000 € sur la période concernée,

AUX MOTIFS QUE La lettre de licenciement du 04 octobre 2012 énonce notamment les griefs suivants : « (…) Vos agissements immodérés sont confirmés par les accusations mensongères que contiennent les courriers que vous avez récemment adressés aux sociétés Serenity Invest et Giraudet. Il n’a jamais été question de vous retirer vos outils de travail ni de « vous humilier ou de vous harceler » de quelque manière que ce soit. Comment pouvez-vous tenir de tels propos’ ? Nous préférons penser qu’il s’agit uniquement d’une stratégie juridique destinée à inverser les responsabilités et faire endosser à la société, par tout moyen, les conséquences de vos propres agissements. Sans revenir sur les termes extravagants de ces courriers, nous vous rappelons simplement que suite à la disparition concomitante de deux ordinateurs portables début septembre, dont le vôtre, nous avons entrepris les démarches nécessaires afin de restaurer rapidement le fonctionnement de vos outils professionnels. Il ne nous semble pas que vous soyez depuis privée de votre ordinateur portable, de votre véhicule de fonction, carte carburant, etc. De même, vous confondez volontairement la nécessité de faire valider, au préalable, certaines informations par la présidence, avec une soi-disant interdiction de communiquer avec l’ensemble des salariés. (…) » ; qu’au vu de cette lettre qui fixe le cadre du litige, la dénonciation d’agissements de harcèlement imputés à l’employeur constitue l’un des motifs de licenciement retenu à l’encontre de Mme Z… ; qu’or, selon l’article L 1152-2 du Code du Travail, aucun salarié ne peut être licencié pour avoir subi ou refusé de subir les agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ; qu’il en résulte que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf en cas de mauvaise foi étant précisé que la bonne foi se présume ; que cette mauvaise foi ne saurait résulter du seul fait que le salarié n’est pas dans la capacité de prouver le harcèlement moral invoqué et ne peut résulter que de la seule connaissance du salarié que les agissements qu’il dénonçait n’étaient pas établis ; qu’il a été retenu ci-dessus que Mme Z… ne rapportait pas la preuve de faits laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral ; que cependant, eu égard à l’imbrication de ses fonctions liées aux mandats sociaux qu’elle détenait et liées à sa position de salariée, Mme Z… qui a ressenti les mesures prises du fait de la révocation de ses mandats comme harcelantes, ne saurait être considérée de mauvaise foi ; que le fait que le licenciement soit fondé même partiellement sur la dénonciation de faits de harcèlement moral, prive à lui seul le licenciement de cause sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres motifs invoqués dans la lettre de licenciement ; qu’il convient en conséquence de déclarer le licenciement de Mme Z… nul en application de l’article L 1152-3 du code du travail ; que le jugement sera infirmé sur ce point ; que l’annulation du licenciement implique qu’il n’a jamais été prononcé de sorte que le contrat de travail s’est poursuivi ; que si le salarié le demande, il doit être réintégré dans l’entreprise et a droit à une indemnisation correspondant à la réparation du préjudice subi au cours de la période qui s’est écoulée entre la rupture du contrat et sa réintégration dans la limite du montant des salaires dont il a été privé ; qu’il convient en conséquence d’ordonner la réintégration de la salariée sans qu’il soit justifié de prévoir une astreinte dès lors que Mme Z… n’a elle-même formulé cette demande que tardivement en cause d’appel et de condamner la société Serenity Invest à lui payer les salaires perdus depuis le 08 janvier 2013 jusqu’à la date effective de sa réintégration sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 10 000,00 euro ;

1. ALORS QU’il est interdit aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement se bornait à mentionner, pour les démentir, les accusations de harcèlement moral faites par Mme Z…, sans en faire un grief de licenciement ; qu’en affirmant qu’au vu de cette lettre, la dénonciation d’agissements de harcèlement moral imputés à l’employeur constituait l’un des motifs de licenciement retenu à l’encontre de Mme Z…, la cour d’appel a violé le principe susvisé, ensemble l’article L. 1232-6 du code du travail ;

2. ALORS en tout état de cause QUE même lorsque la lettre de licenciement évoque une fausse accusation de harcèlement moral, le juge doit examiner les autres griefs de licenciement pour déterminer si, à eux seuls, ils ne suffisent pas à justifier le licenciement ; qu’en l’espèce, à supposer que la dénonciation d’agissements de harcèlement moral imputés à l’employeur ait constitué l’un des motifs de licenciement retenu à l’encontre de Mme Z…, la lettre de licenciement formulait de nombreux autres griefs ; qu’en jugeant qu’en l’absence de mauvaise foi de la salariée, le fait que le licenciement soit fondé même partiellement sur la dénonciation de faits de harcèlement moral, entraînait la nullité du licenciement sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres motifs invoqués dans la lettre de rupture, la cour d’appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;

3. ALORS plus subsidiairement QUE même lorsque le licenciement est nul, le juge ne peut ordonner la réintégration dans l’entreprise d’un salarié lorsqu’elle est impossible en raison notamment du comportement de ce dernier ; qu’en l’espèce, l’exposante soutenait que la réintégration était dangereuse pour le groupe Giraudet et ses salariés compte tenu notamment du comportement de Mme Z… et du trouble causé par celui-ci (conclusions d’appel, p. 19 et 21) ; qu’elle offrait notamment de démontrer, par des attestations et des courriels dont le jugement avait admis la valeur probante (p. 22-23), que Mme Z… s’était rendue coupable de menaces et intimidations à l’égard des salariés, qu’un turn-over important avait été constaté et s’expliquait par le management par pression psychologique dont avait usé Mme Z…, par sa mauvaise foi et l’usage de la méthode du bouc émissaire, ainsi que par le stress permanent résultant des retards, des remises en cause quasi-systématiques des arbitrages, de la formulation de demandes véhémentes et intempestives, ou encore par le dénigrement et les humiliations de salariés dont Mme Z… était coutumière ; qu’il ajoutait que Mme Z…, en raison de son incapacité à décider, avait recours aux services d’un cabinet de voyance avant toute prise de décision importante, et que ses tergiversations faisaient courir des risques majeurs à l’entreprise (conclusions d’appel, p. 24-25 et 30 à 41 ; prod. 15 à 29) ; qu’en ordonnant la réintégration de Mme Z…, sans rechercher si celle-ci n’était pas impossible compte tenu du comportement de la salariée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1152-3 du code du travail ;

4. ALORS encore plus subsidiairement QUE le salarié dont le licenciement est annulé et qui a attendu plusieurs années pour solliciter sa réintégration ne peut obtenir qu’une indemnité égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre sa demande de réintégration et sa réintégration effective ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt (p. 6, § 1) que la salariée n’avait formé la demande de réintégration que tardivement et pour la première fois en cause d’appel ; qu’en condamnant cependant l’employeur à lui payer ses salaires depuis le 8 janvier 2013, date d’expiration du préavis, jusqu’à la date effective de sa réintégration, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-1, L.1154-1 et L. 1152-3 du code du travail ;

5. ALORS à titre infiniment subsidiaire QUE le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit au paiement d’une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s’est écoulée entre son licenciement et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé ; qu’en condamnant l’employeur à payer à la salariée salaires depuis le 8 janvier 2013, date d’expiration du préavis, jusqu’à la date effective de sa réintégration, sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 10 000 € outre la prime contractuelle annuelle de 30 000 € sur la période concernée, sans prévoir de déduction des revenus de remplacement éventuellement perçus, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné la société Serenity Invest à payer à Mme Y… épouse Z… la somme de 144 500 € à titre de rappel de primes contractuelles, ainsi que la prime contractuelle annuelle de 30 000 € sur la période allant du 8 janvier 2013 jusqu’à la date effective de sa réintégration, et d’AVOIR rejeté la demande de la société Serenity Invest tendant à voir condamner Mme Y… épouse Z… à lui rembourser la somme de 144 500 € au titre de primes contractuelles indues dont la société Serenity Invest s’était acquittée à titre de provision suite à l’arrêt de la cour d’appel de Grenoble du 27 février 2014,

AUX MOTIFS PROPRES QUE l’article 4-3 du contrat de travail de Mme Z… prévoit en sus de son salaire fixe, le paiement de deux primes équivalentes à 1,5 mois de salaire chacune, versées en juin et décembre de chaque année ; que ces primes ont cessé de lui être versées à partir de juin 2008 ; que pour justifier ce fait, l’employeur explique qu’en date du 1er décembre 2003, concomitamment à son contrat de travail de Directeur Général salarié, Mme Z… a été nommée Directeur Général mandataire social de la société Serenity Invest sans être rémunérée à ce titre ; que l’employeur se prévaut de la délibération du 23 juin 2008, co-signée par Mme Z…, ayant décidé de fixer avec effet rétroactif au 1er janvier 2008, une rémunération spécifique au titre du mandat social détenu par Mme Z… et correspondant à 3.000,00 euro bruts par mois pour en déduire que les primes bi-annuelles perçues dans le cadre du contrat de travail n’ont pas été supprimées mais ont été transférées au titre du mandat social avec un paiement mensuel ; que toutefois, la rémunération qui constitue l’élément essentiel du contrat de travail, ne peut être modifiée ni dans son montant ni dans sa structure, sans l’accord express du salarié ; que l’acceptation d’une modification ne peut résulter de la seule poursuite du contrat de travail ni d’une acceptation tacite ; qu’en l’espèce, la délibération du 23 juin 2008 mentionne expressément d’une part qu’il est décidé de fixer à compter du 1er janvier 2008 un traitement annuel brut au Directeur Général au titre de son mandat social et d’autre part que le contrat de travail de Mme Z… est maintenu sans aucune autre précision ; qu’ainsi, il n’est nullement fait référence à un quelconque lien entre la mise en place de cette rémunération et les primes bi-annuelles prévues au contrat de travail ni à un quelconque transfert ; que dans ces conditions, il ne peut être soutenu que Mme Z… aurait donné son accord pour voir cesser le versement desdites primes. Le «’statut d’épouse’» de la salariée ne faisait nullement obstacle à ce qu’une telle précision soit apportée dans le cadre de la délibération ; que de même, la délibération du 31 mai 2011, précise le montant de la rémunération brute annuelle de Mme Z… tant au titre du mandat social que du contrat de travail sans qu’aucune disposition ne remette expressément en cause le principe du versement des primes bi-annuelles ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Serenity Invest à verser à la salariée la somme de 144.500,00 euro au titre des primes contractuelles pour la période allant de 2008 à 2012 ; qu’il sera également fait droit à la demande de Mme Z… en paiement de cette prime à compter de 2013 jusqu’à la date effective de sa réintégration ; (…) qu’en sa qualité de directrice générale de la société, Mme Z… bénéficiait d’une délégation générale pour veiller à l’application de la législation notamment sociale ainsi que cela ressort de son contrat de travail ; que dans ces conditions, une telle « erreur » la concernant commise depuis septembre 2009 soit durant 3 années avant le licenciement, ne pouvait pas lui échapper :

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le salaire constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié unilatéralement par l’employeur ; qu’en l’espèce, si la société Serenity Invest souhaitait que ces primes soient supprimées, il était nécessaire que les parties au contrat de travail soient d’accord et le formalisent par un avenant au contrat de travail initial ; que la société Serenity Invest s’appuie exclusivement sur les procès-verbaux d’Assemblée Générale pour affirmer que les parties avaient donné leur accord pour supprimer ces primes ; que les procès-verbaux produits ne font nullement mention du sort de ces primes ; que la société Serenity Invest ne peut produire aucun document contractuel attestant de l’accord de Mme Marie-Laure Z… pour la suppression de ces primes ; qu’il est patent que les primes n’ont plus été payées depuis que Mme Marie-Laure Z… était devenue mandataire social ; que pour autant, il n’est pas établi qu’elle ait renoncé à leur perception; que les parties avaient convenu que Mme Marie-Laure Z… cumulerait les fonctions de mandataire social et de salariée et que ces deux fonctions donneraient lieu à des rémunérations distinctes versées sous des bulletins de salaires différents ; qu’il ne peut être établi par aucun document que la rémunération de mandataire incluait les primes prévues au contrat de travail ;

1. ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ; que dans la cinquième résolution de l’assemblée générale de la société Serenity Invest en date du 31 mai 2011, dont le procès-verbal était signé par Mme Z…, il était indiqué, après mention que la rémunération annuelle de Mme Z… au titre de son mandat de directeur général était fixée à 40 000 € à partir du 1er janvier 2011, que « Mme Marie-Laure Z… continue d’être liée à la société par un contrat de travail en qualité de directeur général opérationnel avec un salaire annuel depuis le 1er janvier 2011 s’élevant à 116 000 €. Mme Marie-Laure Z… continue également de bénéficier au titre de son contrat de travail d’un avantage en nature pour l’utilisation d’un véhicule de société estimé à un montant mensuel de 250 € » ; qu’il en résultait clairement qu’au titre de son contrat de travail, Mme Z… ne bénéficiait que d’un salaire total annuel de 116 000 € et de l’avantage en nature au titre du véhicule, ce qui excluait le maintien des primes initialement prévues par le contrat de travail d’un montant total de 30 000 € ; qu’en énonçant que la délibération du 31 mai 2011 précisait le montant de la rémunération brute annuelle de Mme Z… tant au titre du mandat social que du contrat de travail sans qu’aucune disposition ne remette expressément en cause le principe du versement des primes bi-annuelles, la cour d’appel a dénaturé le document litigieux, en violation du principe susvisé et de l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;

2. ALORS en tout état de cause QUE l’acceptation d’une modification du contrat de travail peut s’établir par tous moyens ; que si le silence ne vaut pas à lui seul acceptation, il n’en est pas de même lorsque les circonstances permettent de donner à ce silence la signification d’une acceptation ; qu’en l’espèce, pour établir l’accord donné par Mme Y… épouse Z… à la substitution des primes contractuelles initialement prévues par la rémunération du mandat de directrice générale instituée lors de l’assemblée générale ordinaire du 23 juin 2008, l’employeur faisait valoir (conclusions d’appel, p. 50 à 53) que Mme Y… épouse Z…, directrice générale, actionnaire à 23 % de la société qui l’employait et épouse de son président, disposant des pleins pouvoirs opérationnels et d’engagement et ayant notamment la charge de superviser les paies et en particulier les bulletins de paie, avait marqué son acceptation en validant ses propres bulletins de paie et en n’opérant aucune réclamation entre 2008 et son licenciement ; qu’en se bornant à affirmer que les délibérations des 23 juin 2008 et du 31 mai 2011 ne remettaient pas expressément en cause le principe du versement des primes bi-annuelles, sans s’expliquer sur les autres éléments invoqués par l’employeur, quand elle relevait par ailleurs (p. 7, § 7) qu’en sa qualité de directrice générale de la société, Mme Z… bénéficiait d’une délégation générale pour veiller à l’application de la législation notamment sociale et qu’une « erreur » la concernant commise durant plusieurs années ne pouvait pas lui échapper, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble l’article L. 1221-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR rejeté la demande de la société Serenity Invest tendant à voir condamner Mme Y… épouse Z… à lui rembourser la somme de 83 182,65 € au titre d’un trop perçus de congés payés et d’ancienneté,

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Z…. sollicite le paiement de 20 jours ouvrés de congés payés correspondant aux congés acquis du 1er juin 2011 au 31 mai 2012, du 1er juin 2012 jusqu’à la notification du licenciement et au cours de la période de préavis dispensé ; qu’elle réclame également sur la base de l’article 23 de la convention collective applicable à l’entreprise, des congés d’ancienneté à raison d’un jour ouvré par tranche de 5 ans d’ancienneté avec un maximum de 4 jours après 20 ans soit 17 jours ouvrés ; qu’il ressort des bulletins de salaire produits que les congés payés de Mme Z… n’ont plus été décomptés à partir de septembre 2009 ; que Mme E…, directrice administratif et financier de la société SERENITY INVEST atteste que Mme Z… lui a demandé de «’supprimer son compteur congés payés dès septembre 2009, considérant que ses congés de toute façon elle les prenait et qu’il n’y avait pas d’intérêt à les faire apparaître.» ; que Mme Z… affirme sans le démontrer qu’il s’agirait d’une attestation mensongère établie par la salariée pour masquer son erreur et moyennant une promotion qui lui aurait été accordée en contrepartie par l’employeur ; qu’il convient de relever que la suppression du compteur congés payés ne concerne que Mme Z…, ce qu’elle ne conteste pas, de sorte que l’explication selon laquelle Mme E… aurait commis une erreur n’est pas crédible ; que par ailleurs en sa qualité de directrice générale de la société, Mme Z… bénéficiait d’une délégation générale pour veiller à l’application de la législation notamment sociale ainsi que cela ressort de son contrat de travail ; que dans ces conditions, une telle « erreur » la concernant commise depuis septembre 2009 soit durant 3 années avant le licenciement, ne pouvait pas lui échapper : que Mme E… atteste également que l’examen des archives de paie depuis 2003 confirme que Mme Z… ne remplissait jamais de bons de congés, que les congés payés traités sur ses bulletins étaient communiqués oralement à la personne en poste qui établissait les paies et que ses absences régulières au moment des vacances scolaires officielles constituaient un nombre de jours bien supérieurs aux cinq semaines légales ; que cette attestation est corroborée par celles d’autres salariés :

– M. B… atteste que Mme Z… prenait systématiquement des congés durant les périodes de congés scolaires et quelques fois au-delà,

– M. C… indique que Mme Z… a toujours pris ses congés payés, notamment pendant les périodes de vacances scolaires, ce dont elle l’informait oralement,

– Mme D… atteste que Mme Z… prenait régulièrement des congés pendant les petites vacances scolaires ainsi qu’une bonne partie de l’été ;

Que le seul fait qu’il s’agisse de salariés de l’employeur ne suffit pas à enlever tout crédit à leurs attestations concordantes (…) ; que la société Serenity Invest sollicite la condamnation de Mme Z… à lui rembourser les congés excédant les seuils légaux et conventionnels dont elle a bénéficié au titre des années 2009 à hauteur de 72 jours, 2010 à hauteur de 102 jours et 2011 à hauteur de 9 jours ; qu’en application de l’article L. 3245-1 du Code du Travail, cette demande est soumise à la prescription de trois ans ; qu’ayant été formulée par conclusions du 13 octobre 2014 devant les premiers juges, la demande est prescrite au titre des années 2009 et 2010 ; que s’agissant de l’année 2011 la prescription est acquise jusqu’au 13 octobre 2011 ; qu’à défaut de précision par l’employeur, la part non prescrite au titre de 2011 ne peut être déterminée ; qu’il y a lieu en conséquence de le débouter de sa demande à ce titre ;

ET AUX MOTIFS à les supposer ADOPTES QUE il ressort des éléments de fait et de droit produits par les parties que Mme Marie-Laure Z… disposait des pouvoirs de direction les plus larges et d’une autorité largement reconnue au titre de ses divers mandats sociaux ; qu’elle disposait de ce fait d’une très large autonomie et liberté d’organisation, ce dont attestent ses agendas ; qu’elle disposait d’une délégation générale de pouvoirs pour veiller efficacement à l’application de la législation sociale ; qu’elle ne peut invoquer sa propre turpitude pour réclamer des droits en rejetant la responsabilité sur une subordonnée qui n’a fait qu’appliquer les consignes de la personne qui était l’autorité de la direction générale de la société (…) ; que la société Serenity Invest avait conféré à sa Directrice une large autonomie et n’a pas cru nécessaire d’organiser un contrôle de sa délégation ou de son organisation ; qu’elle ne peut aujourd’hui démontrer qu’elle n’a pas admis l’organisation et l’absentéisme de sa Directrice Générale ; qu’elle ne peut pas plus sérieusement démontrer, faute de compteur, que le solde de congés était débiteur ou créditeur ; qu’en conséquence de quoi, le Conseil déboutera également la société Serenity Invest de sa demande reconventionnelle ;

1. ALORS QUE si, en principe, l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à l’autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d’une même instance, concernent l’exécution du même contrat de travail, cet effet interruptif s’étendant aux demandes reconventionnelles de la partie adverse dérivant du même contrat de travail ; qu’en l’espèce, la saisine par la salariée du conseil de prud’hommes, dont l’arrêt a constaté (p. 2, avant-dernier §) qu’elle était intervenue le 7 juin 2013, avait donc interrompu la prescription à l’égard de toutes les demandes concernant l’exécution du même contrat de travail, auraient-elles été présentées en cours d’instance par la société Serenity Invest ; qu’en déclarant prescrite la demande de l’employeur de répétition d’un trop perçu de rémunération pour la période antérieure au 13 octobre 2011 au prétexte qu’elle avait été formulée par conclusions du 13 octobre 2014 devant les premiers juges, la cour d’appel a violé l’article L. 3245-1 du code du travail ;

2. ALORS en outre QUE si la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 a modifié l’article


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