Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 septembre 2015, 13-22.730, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 septembre 2015, 13-22.730, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 juin 2013), que M. X… a été engagé à compter du 9 octobre 2002 par la société PGA Motors en qualité de directeur de concessions, chef de plaque, statut cadre dirigeant ; que selon la lettre d’engagement, il devait bénéficier d’une rémunération fixe et d’un bonus garanti de 5 mois de salaire la première année, puis ensuite d’un bonus selon les  » critères Groupe  » pouvant aller jusqu’à six mois de salaire ; qu’à compter de septembre 2005, il a été promu directeur général adjoint ; qu’il a été licencié le 28 août 2009 pour insuffisance professionnelle après qu’un poste de directeur de pôle lui a été proposé ; que par ordonnance prononcée en référé du 21 juillet 2010, il a été ordonné à la société de rembourser la somme de 107 119 euros au titre des primes investies dans l’entreprise ; qu’il a saisi sur le fond la juridiction prud’homale de diverses demandes ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l’employeur, qui est préalable :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de dire que le licenciement du salarié est dénué de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que l’insuffisance professionnelle constitue une cause réelle et sérieuse lorsque le salarié n’exécute pas correctement des tâches qui lui sont confiées et qui correspondent à sa qualification professionnelle, sans qu’il soit nécessaire de caractériser l’existence d’une négligence ou d’une mauvaise volonté délibérée du salarié ; que, s’agissant d’un directeur général ayant la qualité de cadre dirigeant de l’entreprise, les mauvaises performances récurrentes des structures placées sous sa responsabilité sont susceptibles de caractériser l’insuffisance professionnelle lorsque les résultats sont très inférieurs aux budgets prévisionnels qui avaient été établis et que ces budgets étaient réalisables ; qu’au cas présent, il résulte des conclusions d’appel du salarié qu’il avait en 2005 rejoint l’équipe dirigeante du Groupe PGA Motors à Poitiers en qualité de directeur général adjoint aux opérations et qu’à ce titre, il était devenu membre du comité de direction et invité aux conseils de direction ; qu’il résulte des constatations de l’arrêt attaqué que le salarié exerçait depuis 2005 des fonctions de directeur général adjoint pour les pôles Wolfsburg Motors (comprenant notamment les marques Volkswagen/ Audi/ Skoda) et Dearborn Motors (comprenant notamment les marques Ford/ Jaguar) et qu’il avait en cette qualité « un rôle prépondérant dans la mise en oeuvre de la politique du groupe PGA Motors et dans la coordination et l’animation des structures sous sa responsabilité » ; que l’employeur faisait valoir que les résultats des deux pôles placés sous la responsabilité du salarié étaient pour les exercices 2007 et 2008 et pour l’exercice 2009 très inférieurs aux budgets qui avaient été établis ; qu’elle faisait également valoir que ces mauvais résultats étaient imputables à l’insuffisance professionnelle de l’intéressé dans la mesure où les ventes de véhicules Volkswagen et Audi, si elles étaient en décroissance au sein de la société, avaient connu sur le marché français une progression importante au cours de cette période ; que, pour estimer que l’insuffisance professionnelle n’était pas établie, la cour d’appel s’est fondée, d’une part, sur l’absence d’objectifs précis fixés par la direction et, d’autre part, sur le fait que compte tenu du contexte économique de récession ayant frappé la société PGA Motors, il était impossible d’imputer les mauvaises performances des marques Volkswagen, Audi et Ford « à la seule négligence du salarié » ; qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si les résultats des différentes structures avaient fait l’objet de budgets prévisionnels établis par la direction à laquelle appartenait le salarié et si les budgets prévisionnels étaient réalisables, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ que l’insuffisance professionnelle constitue une cause réelle et sérieuse lorsque le salarié n’exécute pas correctement des tâches qui lui sont confiées et qui correspondent à sa qualification professionnelle ; qu’au cas présent, il résulte des constatations de l’arrêt attaqué que M. X… exerçait depuis 2005 des fonctions de directeur général adjoint pour les pôles Wolfsburg Motors (comprenant notamment les marques Volkswagen/ Audi/ Skoda) et Dearborn Motors (comprenant notamment les marques Ford/ Jaguar) et qu’il avait en cette qualité « un rôle prépondérant dans la mise en oeuvre de la politique du groupe PGA Motors et dans la coordination et l’animation des structures sous sa responsabilité » ; que, dans la lettre de licenciement, la société reprochait au salarié sa passivité face aux difficultés des organisations dont il était en charge ; qu’elle produisait plusieurs rapports d’audit faisant état de dysfonctionnements au sein des structures placées sous la responsabilité de l’intéressé pour illustrer ces difficultés ; que pour écarter ce grief, la cour d’appel a relevé que « la société PGA Motors n’établit pas, par la simple production de rapports, en quoi le salarié serait seul responsable des dysfonctionnements qui y sont dénoncés » ; qu’en statuant de la sorte, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si le salarié avait, en sa qualité de directeur général adjoint, pris la moindre mesure en vue de mettre fin aux dysfonctionnements qui étaient matériellement avérés, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

3°/ que lorsqu’une pièce invoquée dans ses conclusions par une partie, dont la production aux débats n’a pas été contestée, ne figure pas au dossier transmis au juge, celui-ci doit rouvrir les débats afin de requérir les explications des parties sur l’absence de la pièce en cause ; qu’au cas présent, il résulte des constatations de la cour d’appel que la pièce n° 3 visée par la société dans ses écritures figurait « au bordereau de communication de pièces » ; que cette communication n’était pas contestée par le salarié ; qu’en prétendant se fonder sur l’absence de cette pièce au dossier dont elle disposait pour en déduire l’impossibilité « de constater en quoi consistait la fonction de DGAO proposée au salarié », sans inviter préalablement les parties à s’expliquer sur l’absence au dossier de cette pièce qui figurait expressément dans le bordereau établi par la société, et dont la communication n’était pas contestée, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’ayant constaté que les carences relevées à l’encontre du salarié n’étaient pas suffisamment établies, la cour d’appel exerçant les pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail a estimé que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen, inopérant sur la troisième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande en versement du bonus au titre des années 2008 et 2009, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail, mais que son montant dépend d’éléments discrétionnairement fixés par l’employeur, de telle sorte qu’il n’est pas déterminable par accord des parties, il incombe au juge de fixer cette rémunération par référence aux critères visés au contrat et à l’application qui en a été faite au cours des années antérieures ; qu’en l’espèce, il résulte des propres constatations de l’arrêt attaqué que  » le principe d’une rémunération variable résultait des engagements contractuels initiaux (bonus garanti de 5 mois de salaire la première année puis bonus ensuite selon les critères groupe pouvant aller jusqu’à 6 mois de salaire)  » sans que  » rien ne vien (ne) préciser ce qu’il en était de l’attribution de ce bonus après la nomination du salarié au poste de DGAO « , aucun avenant modificatif n’étant produit aux débats ; qu’il incombait dès lors à la cour d’appel de fixer les droits du salarié pour les années 2008 et 2009 en fonction des critères fixés au contrat et des primes allouées pour les années antérieures ; qu’en le déboutant de sa demande la cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1134 du code civil ;

2°/ que le salarié avait produit aux débats et invoqué à l’appui de ses écritures se prévalant de son acceptation du poste de  » directeur du Pôle Techstar à Melun  » d’une part, un échange de courriel des 20 et 29 mai aux termes duquel l’employeur lui proposait ce poste, et lui-même s’engageait à y réfléchir (sa pièce n° 2), d’autre part, un courriel du 7 juillet 2009 aux termes duquel, soulignant que l’employeur avait unilatéralement subordonné le versement de son bonus 2008 à  » son acceptation de sa proposition de reclassement « , il déclarait  » avoir finalement accepté  » ce poste de reclassement ; qu’en retenant qu’il résultait des  » courriers échangés entre les parties « , que  » la promesse de prime au titre de 2008 était conditionnée à l’acceptation par le salarié du poste de directeur de Pôle de Techstar … que le salarié ne justifie pas … avoir accepté (…) « , la cour d’appel a dénaturé par omission ces courriels des 20, 29 mai et 7 juillet 2009, en violation de l’interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause ;

3°/ que constitue une modification du contrat de travail insusceptible d’être imposée au salarié la soumission par l’employeur de l’attribution de la rémunération variable à une condition que ne prévoit pas ce contrat ; que le salarié, qui n’accepte pas cette modification, est fondé à exiger la poursuite de son contrat de travail aux conditions antérieures ; qu’en l’espèce, il résulte des propres constatations de l’arrêt attaqué que  » le principe d’une rémunération variable résultait des engagements contractuels initiaux (bonus garanti de 5 mois de salaire la première année puis bonus ensuite selon les critères groupe pouvant aller jusqu’à 6 mois de salaire) « , de sorte qu’en conditionnant l’octroi de la prime 2008 à l’acceptation, par le salarié, de sa mutation dans un nouvel emploi, la société avait procédé à une modification de son contrat de travail que ce salarié était en droit de refuser ; qu’à défaut de preuve de cette acceptation, le salarié était fondé à exiger l’attribution du bonus contractuel aux conditions antérieures ; qu’en le déboutant de sa demande à ce titre au motif  » qu’il ne justifiait pas avoir accepté le poste de directeur du Pôle de Techstar, qui conditionnait l’attribution de la prime 2008  » la cour d’appel, qui a fait produire effet à une modification unilatérale du contrat de travail imposée par l’employeur, a violé l’article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu’après avoir constaté que l’employeur s’était engagé contractuellement au versement d’un bonus garanti de cinq mois de salaire la première année puis de l’attribution d’un bonus selon les critères du groupe pouvant aller jusqu’à six mois de salaire, la cour d’appel en a déduit, hors toute dénaturation des courriers échangés entre les parties et sans être tenue de les suivre dans le détail de leur argumentation, que rien ne permettait d’établir que le salarié était en droit de percevoir chaque année cette prime laissée à la libre appréciation de son employeur ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de condamner la société à lui verser une certaine somme au titre de la perte d’une chance d’avoir pu profiter des bénéfices du plan SCA Vision, alors, selon le moyen, que le salarié, privé de la possibilité de lever ses options de souscription d’actions du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, peut solliciter l’indemnisation du préjudice subi, lequel, consistant en la perte d’une chance d’exercer ses options, doit être mesuré à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée ; qu’en indemnisant M. X… de la perte d’une chance, non de lever les options SCA Vision et de recueillir les avantages y attachés, dont il avait fourni, selon la cour d’appel, une  » évaluation très précise « , mais d’investir  » à sa guise  » les salaires initialement placés dans ce plan de souscription d’actions la cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1147 du code civil ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son libre pouvoir d’appréciation que la cour d’appel a fixé le montant de son préjudice dont elle a souverainement apprécié l’étendue ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu’incident ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X…, demandeur au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur François X… de sa demande tendant à la condamnation de la Société PGA Motors au paiement d’une somme de 129 670, 94 €, représentant le  » bonus  » contractuel dû au titre des années 2008 et 2009 ;

AUX MOTIFS QUE  » Monsieur X… soutient que, tout au long de son contrat de travail, (il) a perçu à titre de primes une moyenne de 5, 75 mois de salaire en dehors de sa rémunération fixe ; qu’il n’a pas perçu ses primes au titre des années 2008 et 2009 et réclame pour ces deux années une somme de 129 670, 94 €, soit 66 697, 47 € au titre de 2008, 62 973, 47 € au titre de 2009 (prorata temporis) ;

QUE si le principe d’une rémunération variable résultait bien des engagements contractuels initiaux (bonus garanti de 5 mois de salaire la première année puis bonus ensuite selon les critères groupe pouvant aller jusqu’à 6 mois de salaire), en revanche, rien ne vient préciser ce qu’il en était de l’attribution de ce bonus après la nomination de Monsieur X… au poste de DGAO ; que quoi qu’il en soit, l’employeur ne conteste pas que le salarié a perçu depuis sa nomination une prime annuelle qui s’est élevée en 2007, à six mois de salaire au titre 2006, en 2008, à 5, 5 mois de salaire au titre de 2007 ;

QUE l’employeur affirme que la promesse de prime au titre de 2008 était conditionnée à l’acceptation par le salarié du poste de directeur de Pôle de Techstar, ce qui résulte effectivement des courriers échangés entre les parties ;

QU’aucune pièce contractuelle ne fixe clairement les conditions d’attribution des primes annuelles (l’avenant du 30 août 2005 n’est pas versé aux débats et le salarié conteste l’avoir signé) ; que compte tenu des courriers échangés entre les parties au sujet de la prime 2008, rien ne permet d’établir que Monsieur X… était en droit de percevoir une prime de 5, 75 mois de salaire au titre des années 2008 et 2009, observation étant faite que le salarié ne justifie pas davantage avoir accepté le poste de directeur de Pôle de Techstar, qui conditionnait l’attribution de la prime 2008 ; qu’il y a donc lieu de confirmer le jugement contesté et de débouter Monsieur X… de sa demande de prime au titre des années 2008 et 2009  » (arrêt p. 7 in fine, p. 8 alinéas 1 et 2).

1°) ALORS QUE lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail, mais que son montant dépend d’éléments discrétionnairement fixés par l’employeur, de telle sorte qu’il n’est pas déterminable par accord des parties, il incombe au juge de fixer cette rémunération par référence aux critères visés au contrat et à l’application qui en a été faite au cours des années antérieures ; qu’en l’espèce, il résulte des propres constatations de l’arrêt attaqué que  » le principe d’une rémunération variable résultait des engagements contractuels initiaux (bonus garanti de 5 mois de salaire la première année puis bonus ensuite selon les critères groupe pouvant aller jusqu’à 6 mois de salaire)  » sans que  » rien ne vien (ne) préciser ce qu’il en était de l’attribution de ce bonus après la nomination de Monsieur X… au poste de DGAO « , aucun avenant modificatif n’étant produit aux débats ; qu’il incombait dès lors à la Cour d’appel de fixer les droits du salarié pour les années 2008 et 2009 en fonction des critères fixés au contrat et des primes allouées pour les années antérieures ; qu’en le déboutant de sa demande la Cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1134 du Code civil ;

2°) ALORS QUE Monsieur X… avait produit aux débats et invoqué à l’appui de ses écritures se prévalant de son acceptation du poste de  » directeur du Pôle Techstar à Melun  » d’une part, un échange de courriel des 20 et 29 mai aux termes duquel l’employeur lui proposait ce poste, et lui-même s’engageait à y réfléchir (sa pièce n° 2), d’autre part, un courriel du 7 juillet 2009 aux termes duquel, soulignant que l’employeur avait unilatéralement subordonné le versement de son bonus 2008 à  » son acceptation de sa proposition de reclassement « , il déclarait  » avoir finalement accepté  » ce poste de reclassement ; qu’en retenant qu’il résultait des  » courriers échangés entre les parties « , que  » la promesse de prime au titre de 2008 était conditionnée à l’acceptation par le salarié du poste de directeur de Pôle de Techstar … que le salarié ne justifie pas … avoir accepté (…) « , la Cour d’appel a dénaturé par omission ces courriels des 20, 29 mai et 7 juillet 2009, en violation de l’interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause ;

3°) ALORS subsidiairement QUE constitue une modification du contrat de travail insusceptible d’être imposée au salarié la soumission par l’employeur de l’attribution de la rémunération variable à une condition que ne prévoit pas ce contrat ; que le salarié qui n’accepte pas cette modification est fondé à exiger la poursuite de son contrat de travail aux conditions antérieures ; qu’en l’espèce, il résulte des propres constatations de l’arrêt attaqué que  » le principe d’une rémunération variable résultait des engagements contractuels initiaux (bonus garanti de 5 mois de salaire la première année puis bonus ensuite selon les critères groupe pouvant aller jusqu’à 6 mois de salaire) « , de sorte qu’en conditionnant l’octroi de la prime 2008 à l’acceptation, par Monsieur X…, de sa mutation dans un nouvel emploi, la Société PGA Motors avait procédé à une modification de son contrat de travail que ce salarié était en droit de refuser ; qu’à défaut de preuve de cette acceptation, Monsieur X… était fondé à exiger l’attribution du bonus contractuel aux conditions antérieures ; qu’en le déboutant de sa demande à ce titre au motif  » qu’il ne justifiait pas avoir accepté le poste de directeur du Pôle de Techstar, qui conditionnait l’attribution de la prime 2008  » la Cour d’appel, qui a fait produire effet à une modification unilatérale du contrat de travail imposée par l’employeur, a violé l’article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la Société PGA Motors à lui verser une somme de 25 000 € au titre de la perte d’une chance d’avoir pu  » bénéficier des bénéfices du plan SCA Vision  » ;

AUX MOTIFS QUE  » Rappelant qu’il avait investi une partie de ses primes annuelles dans un plan d’intéressement « SCA VISION », Monsieur X… soutient qu’il a perdu le droit de lever les options offertes, la chance de voir prospérer ses actions, mais aussi les avantages fiscaux attachés aux gains ; que le salarié expose que s’il a pu judiciairement obtenir la restitution des primes déposées sur le plan (soit la somme de 107 119 euros), il a perdu cependant la valorisation des options acquises sur le plan SCA Vision, soit au total une somme de 429 316 euros dont il demande le paiement pour les options acquises de 2004 à 2008 inclus, déduction faite de somme de 107 119 euros déjà perçue à la suite de la procédure de référé qu’il a dû engager ;

QUE bien que le salarié ait fourni dans ses écritures une évaluation précise des sommes qu’il aurait pu recueillir s’il avait pu lever les options souscrites par lui de 2004 à 2008, il n’en résulte pas moins au vu des pièces produites, que celui-ci a été remboursé du capital placé en récupérant le montant des primes investies, qui étaient des éléments de salaire ; que rejetant le pourvoi formé par la Société Motors à l’encontre de l’arrêt du 26 mai 2011 rendu par la Cour d’appel de Paris, la Cour de Cassation (par arrêt du 10 octobre 2012) a en effet considéré « qu’en relevant que les sommes placées sur le plan d’investissement étaient déduites du bonus annuel du salarié et avaient en conséquence la nature d’un salaire, la cour d’appel devant laquelle il n’était pas allégué que le salarié y avait renoncé, a pu décider que la privation en cas de licenciement de (la possibilité de) lever les options et de récupérer les sommes ainsi placées constituait un trouble manifestement illicite » ;

QUE toutefois, bien que le salarié ait pu obtenir la restitution de ses salaires, celui-ci a perdu cependant une chance d’en disposer à sa guise et de recueillir le bénéfice (…)  » ;

ALORS QUE le salarié, privé de la possibilité de lever ses options de souscription d’actions du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, peut solliciter l’indemnisation du préjudice subi, lequel, consistant en la perte d’une chance d’exercer ses options, doit être mesuré à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée ; qu’en indemnisant Monsieur X… de la perte d’une chance, non de lever les options SCA Vision et de recueillir les avantages y attachés, dont il avait fourni, selon la Cour d’appel, une  » évaluation très précise « , mais d’investir  » à sa guise  » les salaires initialement placés dans ce plan de souscription d’actions la Cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1147 du Code civil.

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société PGA Motors, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l’arrêt attaqué infirmatif de ce chef d’AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X… était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d’AVOIR condamné la société PGA MOTORS à lui verser les sommes de 160. 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et 25. 000 € à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice résultant de la perte de chance d’avoir pu bénéficier des bénéfices du plan SCA VISION, et d’AVOIR ordonné à la société PGA MOTORS de rembourser à POLE EMPLOI les indemnités d’assurance-chômage versées à Monsieur X… dans la limite de six mois ;

AUX MOTIFS QUE « sur le bien-fondé du licenciement, l’incompétence ou l’insuffisance professionnelle d’un salarié (c’est-à-dire la difficulté à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté) peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement si elle fait l’objet d’une appréciation objective ; qu’il n’est pas nécessaire que l’inadaptation à l’emploi ou l’incompétence du salarié se soient traduites par une faute ; qu’il importe cependant que les insuffisances alléguées par l’employeur se soient manifestées par des éléments extérieurs, par des anomalies de nature à entraver la bonne marche de l’entreprise, et susceptibles de vérifications objectives ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement de six pages adressée à M. X… le 28 août 2009 reprochait à ce dernier une situation très dégradée tant d’un point de vue économique et financier que sur un plan organisationnel et humain des structures dont il avait la charge, l’inefficacité des mesures mises en place ou l’absence de mesures démontrant selon l’employeur qu’il avait failli dans sa mission de dirigeant ; que l’employeur a considéré que le travail par délégation vers les directeurs de pôle était révélateur de son mode de fonctionnement et de son déficit d’engagement ; qu’il lui était reproché une certaine lassitude de ses fonctions, une passivité et un défaut d’accompagnement des affaires difficiles avec une préférence pour visiter des affaires rentables, ce qui expliquait son absence de valeur ajoutée, et l’aggravation de situations déjà dégradées ; que la société fait état :

– de résultats en forte décroissance pour les marques VOLKSWAGEN/ AUDI sur les trois dernières années, en totale opposition avec l’évolution des marchés

-de résultats décevants pour les marques Ford et annexes avec constat de dérives et de non respect des méthodes et procédures du groupe PGA sur les concessions dont il avait la charge,- des difficultés des organisations dont il avait la charge (Autos sport, BASA, MCA, OA, AGO), notant qu’aucun accompagnement particulier ou proposition et mises en oeuvre de solutions appropriées de plusieurs carences :

*dans l’accompagnement des dirigeants en difficultés,

*dans l’accompagnement des nouveaux pour faciliter leur réussite dans leur mission,

*en ce qui concerne les ressources humaines,

*en ce qui concerne la définition et la mise en oeuvre des business plans dans les relations avec les constructeurs,

*absence de contrôle du respect des procédures et des règles incontournables du groupe,

*prise d’engagement sans autorisation ;

que, selon les pièces produites, M. X… était au moment de son licenciement et depuis le ter Août 2005 Directeur Général Adjoint des opérations (DGAO) pour les plaques (pôles) Wolfsburg Motors (notamment marques Volkswagen/ Audi/ Skoda) et Dearborn Motors (notamment Ford/ Jaguar) ; que la Société PGA MOTORS rappelle dans la lettre de licenciement que dans le cadre de ces fonctions, le salarié avait un périmètre de responsabilités clairement défini, et notamment « un rôle constant de propositions et d’initiatives pour améliorer les performances et le fonctionnement des organisations sous sa responsabilité, à savoir les pôles et les concessions des marques concernées ; que l’employeur affirme que le salarié s’était ainsi engagé à :

– animer les collaborateurs et mettre en oeuvre les actions nécessaires à la réalisation des objectifs quantitatifs et qualitatifs des marques dont il avait la charge ;

– participer aux réunions avec les constructeurs et assurer avec eux un relationnel permanent de nature à renforcer le partenariat ;

– participer à l’élaboration et à la validation des budgets ;

– participer à la préparation et à l’animation des réunions de plaque et centralisateurs de plaques ;

– participer aux recherches de compétences, de validation des profits etc ¿ afin d’optimiser les organisations humaines dans les différents services des concessions qui vous sont rattachées-participer en back office aux études analyses, investigations nécessaires à l’élaboration des plans d’actions au tire des affaires sensibles ;

– participer aux études, analyses nécessaires lors de la reprise d’affaires dans le cadré du développement de la ou les marques,

– alerter la Direction Générale lors de constat de dysfonctionnements graves dans les affaires du périmètre en responsabilité ; que la Société PGA MOTORS en tire la conclusion que tant son statut que sa qualification conféraient au salarié « une obligation de réussir » et que cette réussite se mesurait « au travers des performances et du bon fonctionnement des organisations » étant sous sa responsabilité ; que le caractère vague et l’appréciation de cette « obligation de réussir » à travers les « performances et le bon fonctionnement des organisations » doit être cependant relativisé et étayé par des éléments concrets permettant de vérifier si le salarié a été réellement défaillant dans l’exercice de ses responsabilités ; or, bien que l’employeur ait défini les principales responsabilités de M. X… en sa qualité de DGAO, il faut pourtant observer que ce dernier n’a concrètement signé aucun écrit listant précisément ces responsabilités ; que la Société PGA MOTORS le reconnaît puisqu’elle écrit dans ses conclusions : « Si pour des raisons dont il n’a pas été trouvé trace au dossier, Monsieur X… n’a pas signé son avenant du 30 août 2005 relatif à son accession à la fonction de Directeur Général adjoint des opérations (DGAO) (pièce 3) pas plus que sa lettre de mission (pièce 4), il ne peut soutenir, en raison du niveau de sa fonction et des avantages financiers importants qu’il en retirait, qu’il n’en connaissait pas le contenu et l’étendue et ce moyen de défense le discrédite » ; que, pourtant, dès lors que le salarié est licencié pour des raisons d’insuffisance professionnelle, il s’avère essentiel de pouvoir déterminer quelles étaient ses attributions précises et en quoi le salarié était défaillant ; or, qu’en l’espèce, la Cour constate d’une part que la pièce 3 (avenant du 30 août 2005) figurant au bordereau de communication de pièces ne se trouve pas dans la cote 1 où elle est annoncée de sorte qu’il est impossible de constater en quoi consistait précisément la fonction de DGAO proposée au salarié, et d’autre part que la pièce 4 (« la lettre de mission » d’août 2005) n’a pas été signée par ce dernier, cette lettre précisant 3 points :

– rattachement et Position : il est indiqué que M. X… était rattaché hiérarchiquement au Directeur des opérations de la société PGA MOTORS et qu’il était membre du comité de Direction ;

– domaines de responsabilité : (rubrique non remplie) ;

– amélioration : Il est précisé que le DGAO a un rôle constant de propositions et d’initiatives pour améliorer les performances et le fonctionnement des organisations sous sa responsabilité dans les domaines suivants :

– animation de la ou des marques dont il a la responsabilité,

– analyse/ suivi des résultats de la marque pilotée,

– audit interne : validation des actions correctives,

– ressources humaines (centralisateurs, coordinateurs, CDS),

– réparation des réunions de plaques, pôles,

– participation aux comités de direction des filiales (ponctuel),

– validation des plans de formation,

– participation des plans de formation,

– participation à l’élaboration des plans marketing,

– élaboration des pré-budgets et validation des budgets en CE,

– préparation et participation aux réunions opérations,

– relations constructeurs,

– suivi des partenariats,

– suivi des pay plans et des rémunérations,

– suivi des BFR et des stocks ;

que si l’on se reporte à la lettre de licenciement, les reproches faits aux salariés en matière de résultats ne peuvent être pris en considération, dès lors que PGA MOTORS ne lui a fixé aucun objectif précis, ce qui est pourtant indispensable pour évaluer la performance d’un cadre et déterminer son bonus annuel ; que même si l’on peut admettre que le salarié en sa qualité de Directeur Général adjoint des Opérations avait un rôle prépondérant dans la mise en oeuvre de la politique du groupe PGA MOTORS, dans la coordination et l’animation des structures sous sa responsabilité, il est toutefois impossible au vu des résultats produits des marques Volkswagen, Audi et Ford pour 2007, 2008 et 2009, d’en attribuer les mauvaises performances à sa seule négligence, en faisant abstraction du contexte économique de récession ayant touché le groupe PGA MOTORS ; qu’aucun entretien annuel d’évaluation ne fixe ou ne rappelle au salarié le cadre contractuel de ses obligations ou n’évoque ses insuffisances pendant les quatre années où il a exercé ses fonctions de DGAO. Bien plus, il résulte des pièces produites que jusqu’à l’année ayant précédé son licenciement, Monsieur X… avait été promu et récompensé pour ses performances par des augmentations régulières de salaire et des versements de primes équivalentes à cinq mois minimum de salaire ; qu’en ce qui concerne les difficultés des organisations dont il avait la charge (Autos sport, BASA, MCA, OA, AGO), et le défaut d’accompagnement particulier ou proposition et mises en oeuvre de solutions appropriées, la société PGA MOTORS n’établit pas, par la seule production de rapports d’audit, en quoi le salarié serait seul responsable des dysfonctionnements qui y sont dénoncés ; que, s’agis


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