Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 décembre 2014, 13-22.635 13-22.636 13-22.637 13-22.638 13-22.639 13-22.640 13-22.641 13-22.642 13-22.643 13-22.644 13-22.645 13-22.646 13-22.647 13-22.650 13-22.651 13-22.652 13-22.653, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 décembre 2014, 13-22.635 13-22.636 13-22.637 13-22.638 13-22.639 13-22.640 13-22.641 13-22.642 13-22.643 13-22.644 13-22.645 13-22.646 13-22.647 13-22.650 13-22.651 13-22.652 13-22.653, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° X 13-22.635, Y 13-22.636, Z 13-22.637, A 13-22.638, B 13-22.639, C 13-22.640, D 13-22.641, E 13-22.642, F 13-22.643, H 13-22.644, G 13-22.645, J 13-22.646, K 13-22.647, P 13-22.650, Q 13-22.651, R 13-22.652 et S 13-22.653 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 7 juin 2013), que M. X… et seize autres salariés de la société Géodis logistic Sud-Ouest, filiale du groupe Géodis, qui travaillaient sur le site de Cugnaux ont été licenciés pour motif économique le 7 janvier 2008 ;

Sur le moyen unique :

Attendu que l’employeur fait grief aux arrêts de dire que le licenciement des salariés est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer à chacun d’eux diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque la lettre de licenciement fait état d’une réorganisation de l’entreprise, telle la suppression d’un site d’activité, il appartient aux juges du fond de vérifier si celle-ci était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité du groupe dont relevait l’entreprise, peu important que la lettre vise la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise ; qu’en l’espèce, les lettres de licenciement visaient « la fermeture du site de Cugnaux qui est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise » ; qu’en jugeant les licenciements sans cause réelle et sérieuse au prétexte que la lettre de licenciement lie le débat et se contentait de faire état de la situation de la société Géodis logistics Sud-Ouest et de ses établissements toulousains, quand il lui appartenait d’examiner si la réorganisation mise en oeuvre était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe Géodis dont relevait l’entreprise comme l’ont retenu les juges du fond, la cour d’appel a violé les articles L. 1233-3 et L. 1233-16 du code du travail ;

2°/ que lorsqu’une entreprise appartient à un groupe comprenant plusieurs secteurs d’activité, l’existence d’un motif économique de rupture s’apprécie au niveau de ce secteur d’activité ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de la cour d’appel que la société Géodis logistics Sud-Ouest faisait partie du secteur d’activité « logistique contractuelle » au sein du groupe Géodis ; que dans ses conclusions d’appel l’employeur montrait l’existence d’un impératif de sauvegarde de la compétitivité de ce secteur d’activité ; qu’en écartant cependant l’existence d’un motif économique au regard, d’une part, de la progression du chiffre d’affaires du groupe tout entier, et au regard, d’autre part, de l’évolution du chiffre d’affaires et des résultats d’exploitation de la seule société Géodis logistics Sud-Ouest prise isolément, la cour d’appel, qui devait examiner l’existence d’un motif économique de licenciement au niveau du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe Géodis, a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et suivants du code du travail ;

3° / que la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d’activité du groupe dont relève l’entreprise ne suppose pas que sa pérennité soit en cause ; qu’en écartant en l’espèce l’existence d’un motif économique de rupture au prétexte que la pérennité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe auquel appartient la société Géodis logistics Sud-Ouest n’apparaît pas être en cause ce qui au demeurant n’était ni établi ni même allégué par l’intimée, quand il suffisait que l’employeur établisse, comme il le faisait dans ses conclusions d’appel, que la compétitivité du secteur d’activité était menacée dès lors qu’il était devenu impossible de fournir du travail aux salariés du site de Cugnaux, la cour d’appel a violé les articles L. 1233-2 et suivants du code du travail ;

4°/ que la réorganisation de l’entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient ; que la nécessité de sauvegarder la compétitivité ne suppose pas une baisse du chiffre d’affaires, mais seulement un risque pesant sur l’avenir qu’il convient de prévenir ; qu’en écartant en l’espèce l’existence d’un impératif de sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe Géodis, dont la société Géodis logistics Sud-Ouest faisait partie comme l’a constaté la cour d’appel, au prétexte que le chiffre d’affaires de ce secteur avait cru de 4.4 % entre 2006 et 2007, sans rechercher si, comme le soutenait la société en cause d’appel, l’effondrement de l’activité sur les sites toulousains de la société Géodis logistics Sud-Ouest, et l’impossibilité de fournir du travail aux salariés qui en résultait, ne créait pas un péril pour le secteur d’activité « logistique contractuelle » tout entier si bien que la suppression du site d’activité de Cugnaux répondait à la nécessité de prévenir des difficultés économiques à venir et répondait ainsi à un impératif de sauvegarde de la compétitivité apprécié au niveau du secteur d’activité dont relevait l’entreprise au sein du groupe, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et suivants du code du travail ;

5°/ que l’existence de motif économique ne peut pas être écartée au regard de l’amélioration de la situation consécutive à la réorganisation mise en place par l’employeur pour sauvegarder la compétitivité ; qu’en l’espèce cependant, la cour d’appel a jugé sans cause réelle et sérieuse les licenciements prononcés le 7 janvier 2008 au prétexte que « le résultat d’exploitation de la société Géodis logistics pour l’exercice 2008 qui est ressorti à – 258 K euros intégrait dans son calcul, pour environ 200 K euros de charges constituées par la dotation pour risques sociaux de 54 K euros et par les charges relatives au PSE de Cugnaux comptabilisées dans les impôts et taxes pour environ 100 K euros et qu’en juin 2009, l’expert-comptable de l’entreprise prévoyait que la filiale dont il s’agit, pourrait renouer avec les bénéfices, dès l’année 2010 » ; que cependant ce redressement témoignant de l’efficacité de la réorganisation réalisée et non pas de l’absence de motif économique la justifiant comme le soulignait l’employeur en cause d’appel ; qu’il en résulte que la cour d’appel a derechef statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et suivants du code du travail ;

6°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’il ne peut pas fonder sa décision sur les moyens qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d’office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l’audience, il peut être apporté la preuve contraire ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu que l’employeur ne justifiait pas de recherches loyales de reclassement dès lors qu’il n’avait identifié que trois cent quatre-vingt postes de reclassement en France quand le groupe était de dimension internationale ; qu’en omettant d’inviter les parties à faire valoir leurs observations sur ce point bien qu’elle relevait que les parties s’étaient contentées de reprendre leurs conclusions lors de l’audience et que celles-ci ne comportaient aucun moyen relatif à l’obligation de l’employeur de rechercher des postes de reclassement à l’étranger, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

7°/ que les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l’intérieur du groupe que parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation leur permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a reproché à l’employeur, qui avait identifié trois cent quatre-vingt postes de reclassements et adressé à chaque salarié une offre de reclassement personnalisé, de ne proposer des postes que sur le territoire national ; qu’en omettant de caractériser qu’une permutation était possible entre les salariés de la société Géodis logistics Sud-Ouest employés sur le site de Cugnaux et le personnel des entreprises du groupe implantées à l’étranger, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-4 du code du travail ;

8°/ que satisfait à son obligation de reclassement l’employeur qui s’est efforcé de faire des propositions personnelles de reclassement, adressées préalablement aux licenciements, portant sur tous les postes disponibles susceptibles de correspondre à la catégorie professionnelle de chaque salarié, mais qui ont été refusés par les salariés ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de la cour d’appel que l’employeur avait identifié trois cent quatre-vingt postes de reclassement en France au 23 novembre 2007 et avait proposé à chaque salarié plusieurs de ces postes, qu’ils n’ont pas acceptés ; qu’en jugeant que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement au prétexte qu’« Eu égard à l’importance du groupe, de tels éléments sont insuffisants », sans caractériser que tous les postes correspondant à la qualification professionnelle de chaque salarié ne leur avaient pas été proposés, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-4 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d’appel, qui a constaté que la société Géodis logistics Sud-Ouest faisait partie du groupe Géodis et que les entreprises du groupe relevant du même secteur d’activité avaient connu une croissance, en sorte que la réorganisation avait pour objet d’optimiser la rentabilité de l’entreprise et qu’elle ne pouvait justifier un licenciement pour motif économique, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Géodis logistics Sud-Ouest aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux salariés la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen commun produit aux pourvois par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Géodis logistics Sud-Ouest

Il est fait grief à la décision attaquée d’AVOIR dit que le licenciement de chaque salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d’AVOIR condamné l’employeur aux dépens et à payer à chacun des salariés des dommages et intérêts pour licenciement cause réelle et sérieuse outre une somme par application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l’article L 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à IB personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification refusée par le salarié d’un élément essentiel du contrat de travail consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou encore à une réorganisation de l’entreprise. Une réorganisation ne peut constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ou si celleci appartient à un groupe, celle du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise. Les difficultés de l’entreprise ne peuvent suffire à justifier un licenciement économique si le secteur d’activité du groupe auquel elle appartient n’en connaît pas. Enfin, la preuve de la nécessaire sauvegarde de la compétitivité tout comme celle de la réalité et de l’importance des difficultés économiques incombe à l’employeur. Au cas présent, force est de constater que la S.A. GEODIS LOGISTICS Sud Ouest qui a procédé, le 7 janvier 2008, au licenciement de chaque salarié fait partie du groupe GEODIS dont le chiffre d’affaires n’a cessé de progresser entre 2005 et 2007, avec une croissance de 26,4 % entre 2006 et 2007 et un résultat 2007 net (53,7 millions d’euros) en augmentation de 11 %, qualifié dans un document interne au groupe de « résultat le plus élevé de toute son histoire », ce document précisant en outre : « GEODIS a pu aborder l’année 2008 avec une structure saine grâce à la maîtrise de son endettement » et la lettre du groupe GEODIS du 26 février 2008 confirmant que « toutes les divisions Métiers contribuent à la croissance du chiffre d’affaires » et mentionnant que dans un tel contexte, le conseil d’administration proposera le versement aux actionnaires, d’un dividende de 2,85 euros par action, en hausse de 16 %. S’agissant plus particulièrement de la division logistique contractuelle, il ressort des pièces du dossier que le chiffre d’affaires de ce secteur d’activité dont relève précisément la S.A. GEODIS Sud Ouest a connu, en 2007, une croissance de 4,4 % par rapport à l’année précédente. Aux termes de la lettre de licenciement qui lie le débat, la S.A. GEODIS LOGISTICS Sud Ouest se contente de faire état des difficultés rencontrées sur ses établissements toulousains, de la baisse globale d’activité ainsi que de la baisse de rentabilité de ces sites qui en est résultée depuis 2004, de la baisse des volumes traités pour le client CIBA et du recentrage stratégique du client BAUSCH et LOMB entraînant une perte majeure de chiffre d’affaires et un résultat d’exploitation des sites toulousains fortement déficitaire « mettant en péril le site de Cugnaux et par voie de conséquence, compte tenu de son importance relative dans l’entreprise, la survie de l’entreprise elle-même ». Cependant, la pérennité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe auquel appartient la S.A. GEODIS LOGISTICS Sud Ouest n’apparaît pas, pour autant, être en cause, ce qui, au demeurant, n’est ni établi ni même allégué par l’intimée. Dans ces conditions, les baisses de chiffres d’affaires et de résultats d’exploitation enregistrées au cours des années 2005 et 2006 et attendues pour 2007 telles qu’invoquées dans la lettre de licenciement et ayant affecté la S.A. GEODIS LOGISTICS Sud Ouest ainsi que la réorganisation qui en est résultée laquelle apparaît seulement destinée à répondre à un souci d’optimiser la rentabilité de cette dernière et ce, en dehors de toute référence aux entreprises du groupe relevant du même secteur d’activité ne suffisent pas à justifier un licenciement pour motif économique et ce, alors même qu’il ressort des pièces de la procédure que le résultat d’exploitation de la S.A. GEODIS LOGISTICS pour l’exercice 2008 qui est ressorti à – 258 K euros intégrait dans son calcul, pour environ 200 K euros de charges constituées par la dotation pour risques sociaux de 54 K euros et par les charges relatives au PSE de Cugnaux comptabilisées dans les impôts et taxes pour environ 100 K euros et qu’en juin 2009, l’expert comptable de l’entreprise prévoyait que la filiale dont il s’agit, pourrait renouer avec les bénéfices, dès l’année 2010. Or, la seule logique de profits ou de rentabilité pour une entreprise ne permet pas de caractériser un motif économique au sens des dispositions de l’article L 1233-3 précité. Il convient, donc, de retenir que fait défaut, au cas d’espèce, la justification de la cause économique qui doit fonder la décision de licenciement » ;

1) ALORS QUE lorsque la lettre de licenciement fait état d’une réorganisation de l’entreprise, telle la suppression d’un site d’activité, il appartient aux juges du fond de vérifier si celle-ci était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité du groupe dont relevait l’entreprise, peu important que la lettre vise la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise ; qu’en l’espèce, les lettres de licenciement visaient « la fermeture du site de Cugnaux qui est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise » ; qu’en jugeant les licenciements sans cause réelle et sérieuse au prétexte que la lettre de licenciement lie le débat et se contentait de faire état de la situation de la société GEODIS LOGISTICS SUDOUEST et de ses établissements toulousains, quand il lui appartenait d’examiner si la réorganisation mise en oeuvre était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe GEODIS dont relevait l’entreprise comme l’ont retenu les juges du fond, la Cour d’appel a violé les articles L.1233-3 et L.1233-16 du Code du travail ;

2) ALORS QUE lorsqu’une entreprise appartient à un groupe comprenant plusieurs secteurs d’activité, l’existence d’un motif économique de rupture s’apprécie au niveau de ce secteur d’activité ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de la Cour d’appel que la société GOEDIS LOGISTICS SUD-OUEST faisait partie du secteur d’activité « logistique contractuelle » au sein du groupe GEODIS ; que dans ses conclusions d’appel l’employeur montrait l’existence d’un impératif de sauvegarde de la compétitivité de ce secteur d’activité ; qu’en écartant cependant l’existence d’un motif économique au regard, d’une part, de la progression du chiffre d’affaires du groupe tout entier, et au regard, d’autre part de l’évolution du chiffre d’affaires et des résultats d’exploitation de la seule société GOEDIS LOGISTICS SUD-OUEST prise isolément, la Cour d’appel, qui devait examiner l’existence d’un motif économique de licenciement au niveau du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe GEODIS, a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1233-2 et suivants du Code du travail ;

3) ALORS QUE la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d’activité du groupe dont relève l’entreprise ne suppose pas que sa pérennité soit en cause ; qu’en écartant en l’espèce l’existence d’un motif économique de rupture au prétexte que la pérennité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe auquel appartient la SA GEODIS LOGISTICS SUD-OUEST n’apparaît pas être en cause ce qui au demeurant n’était ni établi ni même allégué par l’intimée, quand il suffisait que l’employeur établisse, comme il le faisait dans ses conclusions d’appel, que la compétitivité du secteur d’activité était menacée dès lors qu’il était devenu impossible de fournir du travail aux salariés du site de Cugnaux, la Cour d’appel a violé les articles L.1233-2 et suivants du Code du travail ;

4) ALORS QUE la réorganisation de l’entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient ; que la nécessité de sauvegarder la compétitivité ne suppose pas une baisse du chiffre d’affaires, mais seulement un risque pesant sur l’avenir qu’il convient de prévenir ; qu’en écartant en l’espèce l’existence d’un impératif de sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité « logistique contractuelle » du groupe GEODIS, dont la société GEODIS LOGISTICS SUD-OUEST faisait partie comme l’a constaté la Cour d’appel, au prétexte que le chiffre d’affaires de ce secteur avait cru de 4.4 % entre 2006 et 2007, sans rechercher si, comme le soutenait l’exposante en cause d’appel (conclusions page 18 et suivantes), l’effondrement de l’activité sur les sites toulousains de la société GEODIS LOGISTICS SUD-OUEST, et l’impossibilité de fournir du travail aux salariés qui en résultait, ne créait pas un péril pour le secteur d’activité « logistique contractuelle » tout entier si bien que la suppression du site d’activité de Cugnaux répondait à la nécessité de prévenir des difficultés économiques à venir et répondait ainsi à un impératif de sauvegarde de la compétitivité apprécié au niveau du secteur d’activité dont relevait l’entreprise au sein du groupe, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L.1233-2 et suivants du Code du travail ;

5) ALORS QUE l’existence de motif économique ne peut pas être écartée au regard de l’amélioration de la situation consécutive à la réorganisation mise en place par l’employeur pour sauvegarder la compétitivité ; qu’en l’espèce cependant, la Cour d’appel a jugé sans cause réelle et sérieuse les licenciements prononcés le 7 janvier 2008 au prétexte que « le résultat d’exploitation de la S.A. GEODIS LOGISTICS pour l’exercice 2008 qui est ressorti à – 258 K euros intégrait dans son calcul, pour environ 200 K euros de charges constituées par la dotation pour risques sociaux de 54 K euros et par les charges relatives au PSE de Cugnaux comptabilisées dans les impôts et taxes pour environ 100 K euros et qu’en juin 2009, l’expert comptable de l’entreprise prévoyait que la filiale dont il s’agit, pourrait renouer avec les bénéfices, dès l’année 2010 » ; que cependant ce redressement témoignant de l’efficacité de la réorganisation réalisée et non pas de l’absence de motif économique la justifiant comme le soulignait l’employeur en cause d’appel (conclusions page 22) ; qu’il en résulte que la Cour d’appel a derechef statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard des articles L.1233-2 et suivants du Code du travail ;

ET AUX MOTIFS QUE « Par ailleurs, le licenciement économique d’un salarié ne peut intervenir que si le reclassement de l’intéressé dans l’entreprise n’est pas possible ; dans le cadre de cette obligation de reclassement, il appartient à l’employeur de rechercher s’il existe des possibilités de reclassement et de proposer au salarié dont le licenciement est envisagé un emploi disponible de même catégorie ou à défaut, de catégorie inférieure, fût-ce par voie de modification des contrats de travail, en assurant au besoin l’adaptation du salarié à l’évolution de son emploi. Cette recherche de reclassement doit être tentée avant la notification du licenciement et à l’intérieur du groupe de reclassement constitué par les entreprises dont les activités l’organisation ou le lieu de travail ou d’exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel. Il appartient à l’employeur de prouver qu’il était, alors, dans l’impossibilité de procéder à ce reclassement. Alors que dans ses documents publicitaires contemporains du licenciement litigieux, le groupe GEODIS se présente comme un groupe européen de dimension mondiale présent dans plus de 120 pays et comptant, en 2007, un effectif de plus de 25 000 salariés, la S.A. GEODIS LOGISTICS s’en est tenue aux 380 postes de reclassement tels que mentionnés dans le plan de sauvegarde de l’emploi qu’elle indique avoir identifiés, à la date du 23 novembre 2007, sur le seul territoire national, au travers de la bourse emploi du groupe, et ce pour l’ensemble des salariés licenciés du site de Cugnaux, chaque salarié ayant été destinataire (¿) de quelques-unes de ces propositions de postes, avec un délai de plusieurs jours pour y répondre. Eu égard à l’importance du groupe, de tels éléments sont insuffisants pour permettre à l’employeur de rapporter la preuve qui lui incombe d’avoir procédé à une recherche sérieuse et loyale de reclassement. Il s’ensuit que la S.A. GEODIS LOGISTICS qui n’établit pas avoir effectivement tout essayé pour reclasser chacun des salariés doit être considérée comme ayant méconnu l’obligation de reclassement mise à sa charge. En cas de méconnaissance d’une telle obligation de l’employeur tout comme lorsque fait défaut la justification de la cause économique de la rupture, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Par conséquent, il convient de retenir que le licenciement dont chaque salarié a fait l’objet, est dépourvu de cause réelle et sérieuse. L’absence de cause réelle et sérieuse ouvre droit au bénéfice du salarié à une indemnité » ;

6) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer luimême le principe de la contradiction ; qu’il ne peut pas fonder sa décision sur les moyens qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d’office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l’audience, il peut être apporté la preuve contraire ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel a retenu que l’employeur ne justifiait pas de recherches loyales de reclassement dès lors qu’il n’avait identifié que 380 postes de reclassement en France quand le groupe était de dimension internationale ; qu’en omettant d’inviter les parties à faire valoir leurs observations sur ce point bien qu’elle relevait que les parties s’étaient contentées de reprendre leurs conclusions lors de l’audience et que celles-ci ne comportaient aucun moyen relatif à l’obligation de l’employeur de rechercher des postes de reclassement à l’étranger, la Cour d’appel a violé l’article 16 du Code de procédure civile ;

7) ALORS QUE les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l’intérieur du groupe que parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation leur permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel a reproché à l’employeur, qui avait identifié 380 postes de reclassements et adressé à chaque salarié une offre de reclassement personnalisé, de ne proposer des postes que sur le territoire national ; qu’en omettant de caractériser qu’une permutation était possible entre les salariés de la société GEODIS LOGISTICS SUD-OUEST employés sur le site de Cugnaux et le personnel des entreprises du groupe implantées à l’étranger, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.1233-4 du Code du travail ;

8) ALORS QUE satisfait à son obligation de reclassement l’employeur qui s’est efforcé de faire des propositions personnelles de reclassement, adressées préalablement aux licenciements, portant sur tous les postes disponibles susceptibles de correspondre à la catégorie professionnelle de chaque salarié, mais qui ont été refusés par les salariés ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de la Cour d’appel que l’employeur avait identifié 380 postes de reclassement en France au 23 novembre 2007 et avait proposé à chaque salarié plusieurs de ces postes, qu’ils n’ont pas acceptés ; qu’en jugeant que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement au prétexte qu’« Eu égard à l’importance du groupe, de tels éléments sont insuffisants », sans caractériser que tous les postes correspondant à la qualification professionnelle de chaque salarié ne leur avaient pas été proposés, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.1233-4 du Code du travail.

ECLI:FR:CCASS:2014:SO02346


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