Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 janvier 2015, 13-24.972, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 janvier 2015, 13-24.972, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Donne acte à M. X… du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre Mme Y… et M. Z… ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 31 janvier 2013), que la société Abell a été mise en redressement judiciaire le 13 juin 2001 ; que la procédure a été étendue le 13 décembre suivant aux sociétés Group Adress, Zonetic, Materialis et Le Marketing direct local puis convertie en liquidation judiciaire le 23 janvier 2002 ; que la Selarl A… Herbaut, agissant en qualité de liquidateur (le liquidateur) a assigné M. X…, dirigeant, en comblement de passif et en vue de prononcer à son encontre une mesure d’interdiction de gérer ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de sursis à statuer, de le condamner à supporter l’insuffisance d’actif de chacune des sociétés et de prononcer à son encontre une mesure d’interdiction de gérer pendant quinze ans alors, selon le moyen, que l’insuffisance d’actif doit être certaine, son existence et son montant devant être appréciés par le juge au jour où il statue ; qu’en l’espèce, l’existence même d’une insuffisance d’actif ne pouvait être certaine avant qu’il soit irrévocablement statué sur la demande en dommages-intérêts des sociétés Lectiel et Group Adress contre la société France Telecom en réparation du préjudice subi du fait de l’abus de position dominante commis par cette dernière ; qu’en condamnant néanmoins M. X… sur la base du passif admis au motif inopérant que l’arrêt de la cour d’appel du 27 juin 2012 rejetant les demandes en dommages-intérêts était exécutoire, sans rechercher, comme il lui était pourtant demandé, si cet arrêt était irrévocable et donc si l’insuffisance d’actif était certaine, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige et des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et 1er du premier protocole additionnel à ladite Convention ;

Mais attendu qu’ayant relevé que le liquidateur avait expressément indiqué dans ses écritures qu’il n’entendait pas se pourvoir en cassation contre l’arrêt du 27 juin 2012, de sorte que cet arrêt, en ce qu’il avait rejeté la demande de dommages-intérêts formée par la société Group Adress contre France Telecom était devenu irrévocable, la cour d’appel, qui a effectué la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X… fait le même grief à l’arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que l’insuffisance d’actif doit être certaine ; que M. X…, après avoir rappelé que le liquidateur de la société Materialis avait été autorisé à vendre des biens immobiliers pour un montant total de 615 000 euros, soit une somme de plus de 410 000 euros supérieure au passif de 201 968 euros, a fait valoir que « le produit de cette vente n’apparaît pas dans la comptabilité versée au débat » et que « faute de justifier de l’insuffisance d’actif alléguée pour chacune des sociétés, Mme A…, ès qualités, sera déboutée » ; qu’en condamnant M. X… au titre de l’insuffisance d’actif des sociétés Group Adress, Abell, MDL et Zonetic, sans rechercher ce qu’il était advenu de la somme de plus de 410 000 euros dégagée par la vente de ces biens immobiliers d’une société du groupe à laquelle la procédure collective a également été étendue, excédant son passif propre, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige ;

2°/ alors que la faute de gestion doit s’apprécier au regard du comportement d’un dirigeant normalement diligent placé dans la même situation à la même époque ; que pour imputer une faute de gestion à M. X…, qui dirigeait un groupe employant plus de 280 salariés, du fait de la poursuite d’une exploitation déficitaire, la cour d’appel a jugé que l’action en responsabilité engagée contre la société France Telecom était complexe, longue et aléatoire ; qu’en s’abstenant de rechercher si en 1999 il était inconcevable de cesser l’exploitation de l’activité en l’état de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 juin 1999, condamnant la société France Telecom à une sanction pécuniaire de 10 millions de francs pour abus de position dominante, lequel avait conduit à évincer la société Lectiel d’un marché de plus de 26 milliards de francs, et enjoignant à France Telecom de fournir la base annuaire réclamée à des conditions de prix reflétant les seuls coûts liés aux opérations, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ alors que, subsidiairement, en ne tenant pas compte, dans l’appréciation du quantum de la condamnation pécuniaire et de l’interdiction de gérer, des circonstances particulières et des perspectives du contentieux opposant la société Lectiel à la société France Telecom et des décisions de principe favorables rendues par le Conseil de la concurrence le 29 septembre 1998 et par la cour d’appel de Paris le 29 juin 1999, qui justifiaient, sinon excusaient, les décisions prises par M. X…, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d’une part, que M. X… s’était borné, dans ses écritures d’appel, à contester le montant de l’insuffisance d’actif société par société ; que le moyen, en ce qu’il discute l’insuffisance d’actif dans sa globalité, est nouveau, et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, d’autre part, que l’arrêt, après avoir relevé, par des motifs non critiqués, que la poursuite d’une exploitation déficitaire au moyen d’une trésorerie artificielle était mise en évidence par la dégradation des capitaux propres et des résultats de chaque société entre 1998 et 2000, retient que les dirigeants ne pouvaient s’exonérer de cette faute en faisant valoir qu’ils espéraient une amélioration sensible de la situation du groupe grâce à la condamnation de France Telecom à des dommages-intérêts dès lors qu’ils ne pouvaient ignorer la complexité, la longueur et le caractère aléatoire de cette procédure, dont l’existence ne pouvait les dispenser de tirer les conséquences de l’état de cessation des paiements et des résultats négatifs enregistrés ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, qui rendaient inopérante la recherche visée par le moyen, la cour d’appel n’a fait qu’user des pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu, enfin, que sous le couvert du grief non fondé de violation de la loi, le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine, par les juges du fond, de la durée de la sanction personnelle prononcée à l’encontre de M. X… et du montant du préjudice subi par les sociétés Group Adress, Zonetic et Le Marketing direct local à raison des fautes de gestion commises par ce dernier ;

D’où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, n’est pas fondé sur le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer la somme de 3 000 euros à la Selarl A… Herbaut en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Abell, Group Adress, Zonetic, Materialis et le Marketing direct local ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. X…

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la demande de sursis à statuer, d’avoir condamné M. X… à payer au liquidateur judiciaire, au titre de l’insuffisance d’actif de chacune des sociétés, les sommes de 500 000 € pour la société Group Adress, 200 000 € pour la société Abell, 20 000 € pour la société MDL et 30 000 € pour la société Zonetic, et d’avoir prononcé à son encontre une interdiction de gérer de 15 ans ;

AUX MOTIFS QUE, par son précédent arrêt du 18 novembre 2010, la cour avait sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir de la cour d’appel de Paris sur renvoi après cassation ; que l’arrêt attendu a été rendu le 27 juin 2012 ; que Mme A…, ès qualités de liquidateur judiciaire, indique expressément dans ses dernières écritures qu’elle n’entend pas se pourvoir en cassation contre cet arrêt ; que les dirigeants ont fait valoir qu’un pourvoi serait formé par le mandataire judiciaire de la procédure ouverte à Fort de France à l’égard de la société Lectiel ; que ces affirmations ne sont étayées d’aucune preuve et qu’il apparaît donc au jour où la cour statue qu’aucune justification d’un pourvoi formé contre l’arrêt précité n’est fournie ; que dès lors, l’arrêt du 27 juin 2012 étant en tout état de cause exécutoire, il n’y a pas lieu de surseoir à statuer et il peut être considéré que le montant des insuffisances d’actif relevées revêt un caractère définitif ; que sur les insuffisances d’actif, Mme A… détaille dans ses écritures, société par société, en mentionnant à chaque fois le montant du passif définitivement admis et le montant de l’actif réalisé, ces indications étant justifiées par la liste des créances admises et par la comptabilité du mandat versées aux débats ; que les montants des insuffisances d’actif en résultant ne font l’objet d’aucune contestation de la part des appelants, à l’exception de celle de M. X… relative à l’insuffisance d’actif de la société Materialis, qui est sans portée dès lors que Mme A… s’est désistée devant les premiers juges de sa demande de comblement au titre de cette société pour laquelle la vente d’immeubles a permis d’apurer le passif ; qu’en conséquence doivent être retenues les insuffisances d’actif suivantes : Group Adress : 5 386 825 € (5 601 966, 71-215 140, 78) ; Abell : 3 347 749 € (3 653 235, 91-306 302, 48) ; MDL : 180 070 € (somme égale au passif admis, aucun actif réalisé) ; Zonetic : 346 089 (378 174-32 085, 38) ; que sur la qualité de dirigeant de droit ou de fait, il est établi et non contesté que M. X… était le dirigeant de droit des sociétés Groupadress, MDL et Zonetic ; qu’il reconnaît et même revendique, notamment aux termes d’une attestation du 24 février 2003, avoir été le dirigeant de fait de la société Abell dont il avait demandé à M. Z…de prendre la gérance afin de respecter les dispositions relatives aux règles de cumul des mandats sociaux et expose ses actions de gestion et de direction de la société exercées en toute indépendance ; que, sur les fautes de gestion et leur contribution à l’insuffisance d’actif, en ce qui concerne la comptabilité incomplète ou irrégulière, au vu des rapports déposés par Mme A…, il est établi que la comptabilité de la société Abell pour l’exercice 2000 n’a pas été remise et aucun justificatif de l’établissement des comptes pour cet exercice n’est fourni ; qu’en revanche, ce grief ne peut être retenu s’agissant des autres sociétés, les rapports de Mme A… mentionnant la remise des comptes jusqu’à l’exercice 2000 inclus ; que les premiers juges ne peuvent être suivis lorsqu’ils ont retenu le non-dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce pendant plusieurs années ; qu’en effet, si ce fait est fautif, il est sans incidence sur l’insuffisance d’actif des sociétés concernées ; qu’il ressort surtout du rapport du cabinet OCA que l’enregistrement des mouvements financiers intervenus entre les sociétés Abell et Groupadress a été effectué au mépris des principes comptables, aucune distinction n’étant faite dans les comptes de Abell entre la nature des créances et dettes vis-à-vis de la société Groupadress et des anomalies ont été relevées consistant notamment en l’absence de refacturation de prestations entre ces sociétés ou en des paiements non causés ; que le même type d’anomalies a été relevé dans les relations entre Abell et MDL ; qu’ainsi, il est établi que les comptabilités des sociétés précitées n’ont pas été tenues régulièrement et ne pouvaient donner une image fidèle et sincère de la situation réelle de chacune des sociétés privant ainsi les dirigeants d’un outil de gestion indispensable, notamment quant à la survenance de l’état de cessation des paiements ou d’une exploitation déficitaire et que ces manquements ont dès lors aggravé l’insuffisance d’actif constatée ; que sur le défaut de déclaration de la cessation des paiements et la poursuite d’une exploitation déficitaire, la date de la cessation des paiements a été fixée par le jugement d’ouverture du 13 juin 2001 au 4 décembre 1999 ; que cette date ne fait l’objet d’aucune contestation de la part des appelants ; que la procédure collective ouverte à l’encontre de la société Abell l’a été sur assignation de l’Urssaf et, à l’égard des autres sociétés, sur extension à la demande des mandataires judiciaires désignés pour le redressement judiciaire de la société Abell ; qu’il peut donc être imputé à chacun des dirigeants appelants le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal des sociétés dont ils étaient respectivement dirigeants de droit (et de fait pour M. X… s’agissant de la société Abell) ; que la poursuite d’une exploitation déficitaire, au moyen d’une trésorerie artificielle notamment à raison du défaut de paiement de la TVA, est mise en évidence par la dégradation des capitaux propres et des résultats de chaque société cités par Mme A… (page 21 de ses dernières écritures) entre 1998 et 2000 ; qu’ainsi, le défaut de déclaration de la cessation des paiements et la poursuite d’exploitation déficitaire ont contribué à l’aggravation de l’insuffisance d’actif comme le montre l’analyse du passif déclaré ; que les dirigeants ne peuvent s’exonérer de ces deux fautes en faisant valoir qu’ils espéraient une amélioration sensible de la situation du groupe grâce à la condamnation de France Telecom à des dommages-intérêts ; qu’en effet, ils ne pouvaient ignorer la complexité, la longueur et le caractère aléatoire de cette procédure dont l’existence ne pouvait de toute façon les dispenser de tirer les conséquences de l’état de cessation des paiements et des résultats négatifs enregistrés ; que finalement, M. X… doit être déclaré responsable de l’ensemble des fautes de gestion retenues par la cour ; que sur le montant des contributions aux insuffisances d’actif, s’agissant de M. X… dirigeant de droit ou de fait de l’ensemble des sociétés et dont le rôle prépondérant est incontesté, il y a lieu de prononcer les condamnations pécuniaires les plus significatives tout en réduisant les montants appréciés excessivement par les premiers juges ; que les contributions de M. X… aux insuffisances d’actif seront donc fixées comme suit : pour la société Groupadress, 500 000 euros, pour la société Abell, 200 000 euros, pour la société MDL, 20 000 euros, pour la société Zonetic, 30 000 euros ; que, sur les interdictions de gérer, le principe des interdictions de gérer prononcées par le tribunal doit être confirmé en raison de l’absence de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal par application combinée des articles L. 625-5, 5° et L. 625-8 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 ;

ALORS QUE l’insuffisance d’actif doit être certaine, son existence et son montant devant être appréciés par le juge au jour où il statue ; qu’en l’espèce, l’existence même d’une insuffisance d’actif ne pouvait être certaine avant qu’il soit irrévocablement statué sur la demande en dommages et intérêts des sociétés Lectiel et Group Adress contre la société France Telecom en réparation du préjudice subi du fait de l’abus de position dominante commis par cette dernière ; qu’en condamnant néanmoins M. X… sur la base du passif admis au motif inopérant que l’arrêt de la cour d’appel du 27 juin 2012 rejetant les demandes en dommages et intérêts était exécutoire, sans rechercher, comme il lui était pourtant demandé, si cet arrêt était irrévocable et donc si l’insuffisance d’actif était certaine, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige et des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et 1er du premier protocole additionnel à ladite Convention.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) :

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la demande de sursis à statuer, d’avoir condamné M. X… à payer au liquidateur judiciaire, au titre de l’insuffisance d’actif de chacune des sociétés, les sommes de 500 000 ¿ pour la société Group Adress, 200 000 € pour la société Abell, 20 000 ¿ pour la société MDL et 30 000 € pour la société Zonetic, et d’avoir prononcé à son encontre une interdiction de gérer de 15 ans ;

AUX MOTIFS QUE, par son précédent arrêt du 18 novembre 2010, la cour avait sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir de la cour d’appel de Paris sur renvoi après cassation ; que l’arrêt attendu a été rendu le 27 juin 2012 ; que Mme A…, ès qualités de liquidateur judiciaire, indique expressément dans ses dernières écritures qu’elle n’entend pas se pourvoir en cassation contre cet arrêt ; que les dirigeants ont fait valoir qu’un pourvoi serait formé par le mandataire judiciaire de la procédure ouverte à Fort de France à l’égard de la société Lectiel ; que ces affirmations ne sont étayées d’aucune preuve et il apparaît donc au jour où la cour statue qu’aucune justification d’un pourvoi formé contre l’arrêt précité n’est fournie ; que dès lors, l’arrêt du 27 juin 2012 étant en tout état de cause exécutoire, il n’y a pas lieu de surseoir à statuer et il peut être considéré que le montant des insuffisances d’actif relevées revêt un caractère définitif ; que sur les insuffisances d’actif, Mme A… détaille dans ses écritures, société par société, en mentionnant à chaque fois le montant du passif définitivement admis et le montant de l’actif réalisé, ces indications étant justifiées par la liste des créances admises et par la comptabilité du mandat versées aux débats ; que les montants des insuffisances d’actif en résultant ne font l’objet d’aucune contestation de la part des appelants, à l’exception de celle de M. X… relative à l’insuffisance d’actif de la société Materialis qui est sans portée, dès lors que Mme A… s’est désistée devant les premiers juges de sa demande de comblement au titre de cette société pour laquelle la vente d’immeubles a permis d’apurer le passif ; qu’en conséquence doivent être retenues les insuffisances d’actif suivantes : Group Adress : 5 386 825 € (5 601 966, 71-215 140, 78) ; Abell : 3 347 749 € (3 653 235, 91-306 302, 48) ; MDL : 180 070 € (somme égale au passif admis, aucun actif réalisé) ; Zonetic : 346 089 (378 174-32 085, 38) ; que, sur la qualité de dirigeant de droit ou de fait, il est établi et non contesté que M. X… était le dirigeant de droit des sociétés Groupadress, MDL et Zonetic ; qu’il reconnaît et même revendique, notamment aux termes d’une attestation du 24 février 2003, avoir été le dirigeant de fait de la société Abell dont il avait demandé à M. Z…de prendre la gérance afin de respecter les dispositions relatives aux règles de cumul des mandats sociaux et expose ses actions de gestion et de direction de la société exercées en toute indépendance ; que, sur les fautes de gestion et leur contribution à l’insuffisance d’actif, en ce qui concerne la comptabilité incomplète ou irrégulière, au vu des rapports déposés par Mme A…, il est établi que la comptabilité de la société Abell pour l’exercice 2000 n’a pas été remise et aucun justificatif de l’établissement des comptes pour cet exercice n’est fourni ; qu’en revanche, ce grief ne peut être retenu s’agissant des autres sociétés, les rapports de Mme A… mentionnant la remise des comptes jusqu’à l’exercice 2000 inclus ; que les premiers juges ne peuvent être suivis lorsqu’ils ont retenu le non-dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce pendant plusieurs années ; qu’en effet, si ce fait est fautif, il est sans incidence sur l’insuffisance d’actif des sociétés concernées ; qu’il ressort surtout du rapport du cabinet OCA que l’enregistrement des mouvements financiers intervenus entre les sociétés Abell et Groupadress a été effectué au mépris des principes comptables, aucune distinction n’étant faite dans les comptes de Abell entre la nature des créances et dettes vis-à-vis de la société Groupadress et des anomalies ont été relevées consistant notamment en l’absence de refacturation de prestations entre ces sociétés ou en des paiements non causés ; que le même type d’anomalies a été relevé dans les relations entre Abell et MDL ; qu’ainsi, il est établi que les comptabilités des sociétés précitées n’ont pas été tenues régulièrement et ne pouvaient donner une image fidèle et sincère de la situation réelle de chacune des sociétés privant ainsi les dirigeants d’un outil de gestion indispensable, notamment quant à la survenance de l’état de cessation des paiements ou d’une exploitation déficitaire et que ces manquements ont dès lors aggravé l’insuffisance d’actif constatée ; que sur, le défaut de déclaration de la cessation des paiements et la poursuite d’une exploitation déficitaire, la date de la cessation des paiements a été fixée par le jugement d’ouverture du 13 juin 2001 au 4 décembre 1999 ; que cette date ne fait l’objet d’aucune contestation de la part des appelants ; que la procédure collective ouverte à l’encontre de la société Abell l’a été sur assignation de l’Urssaf et à l’égard des autres sociétés sur extension à la demande des mandataires judiciaires désignés pour le redressement judiciaire de la société Abell ; qu’il peut donc être imputé à chacun des dirigeants appelants le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal des sociétés dont ils étaient respectivement dirigeants de droit (et de fait pour M. X… s’agissant de la société Abell) ; que la poursuite d’une exploitation déficitaire, au moyen d’une trésorerie artificielle notamment à raison du défaut de paiement de la TVA, est mise en évidence par la dégradation des capitaux propres et des résultats de chaque société cités par Mme A… (page 21 de ses dernières écritures) entre 1998 et 2000 ; qu’ainsi, le défaut de déclaration de la cessation des paiements et la poursuite d’exploitation déficitaire ont contribué à l’aggravation de l’insuffisance d’actif comme le montre l’analyse du passif déclaré ; que les dirigeants ne peuvent s’exonérer de ces deux fautes en faisant valoir qu’ils espéraient une amélioration sensible de la situation du groupe grâce à la condamnation de France Telecom à des dommages-intérêts ; qu’en effet, ils ne pouvaient ignorer la complexité, la longueur et le caractère aléatoire de cette procédure dont l’existence ne pouvait de toute façon les dispenser de tirer les conséquences de l’état de cessation des paiements et des résultats négatifs enregistrés ; que finalement, M. X… doit être déclaré responsable de l’ensemble des fautes de gestion retenues par la cour ; que sur le montant des contributions aux insuffisances d’actif, s’agissant de M. X… dirigeant de droit ou de fait de l’ensemble des sociétés et dont le rôle prépondérant est incontesté, il y a lieu de prononcer les condamnations pécuniaires les plus significatives tout en réduisant les montants appréciés excessivement par les premiers juges ; que les contributions de M. X… aux insuffisances d’actif seront donc fixées comme suit : pour la société Groupadress, 500 000 euros, pour la société Abell, 200 000 euros, pour la société MDL, 20 000 euros, pour la société Zonetic, 30 000 euros ; que, sur les interdictions de gérer, le principe des interdictions de gérer prononcées par le tribunal doit être confirmé en raison de l’absence de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal par application combinée des articles L. 625-5, 5° et L. 625-8 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 ;

1°) ALORS QUE l’insuffisance d’actif doit être certaine ; que M. X…, après avoir rappelé que le liquidateur de la société Materialis avait été autorisé à vendre des biens immobiliers pour un montant total de 615 000 €, soit une somme de plus de 410 000 € supérieure au passif de 201 968 €, a fait valoir que « le produit de cette vente n’apparaît pas dans la comptabilité versée au débat » et que « faute de justifier de l’insuffisance d’actif alléguée pour chacune des sociétés, Mme A… ès qualités, sera déboutée » (concl., p. 5) ; qu’en condamnant M. X… au titre de l’insuffisance d’actif des sociétés Groupadress, Abell, MDL et Zonetic, sans rechercher ce qu’il était advenu de la somme de plus de 410 000 € dégagée par la vente de ces biens immobiliers d’une société du groupe à laquelle la procédure collective a également été étendue, excédant son passif propre, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige ;

2°) ALORS QUE la faute de gestion doit s’apprécier au regard du comportement d’un dirigeant normalement diligent placé dans la même situation à la même époque ; que pour imputer une faute de gestion à M. X…, qui dirigeait un groupe employant plus de 280 salariés, du fait de la poursuite d’une exploitation déficitaire, la cour d’appel a jugé que l’action en responsabilité engagée contre la société France Telecom était complexe, longue et aléatoire ; qu’en s’abstenant de rechercher si en 1999 il était inconcevable de cesser l’exploitation de l’activité en l’état de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 juin 1999, condamnant la société France Telecom à une sanction pécuniaire de 10 millions de francs pour abus de position dominante, lequel avait conduit à évincer la société Lectiel d’un marché de plus de 26 milliards de francs, et enjoignant à France Telecom de fournir la base annuaire réclamée à des conditions de prix reflétant les seuls coûts liés aux opérations, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige ;

3°) ALORS QUE, subsidiairement, en ne tenant pas compte, dans l’appréciation du quantum de la condamnation pécuniaire et de l’interdiction de gérer, des circonstances particulières et des perspectives du contentieux opposant la société Lectiel à la société France Telecom et des décisions de principe favorables rendues par le Conseil de la concurrence le 29 septembre 1998 et par la cour d’appel de Paris le 29 juin 1999, qui justifiaient, sinon excusaient, les décisions prises par M. X…, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2015:CO00084


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