Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 octobre 2015, 14-20.399, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 octobre 2015, 14-20.399, Inédit
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Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article 31 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le 27 juin 2012 l’assemblée générale de la société civile des Mousquetaires (la société) a décidé une modification des statuts et l’insertion d’un article prévoyant une clause compromissoire visant tous les litiges survenant entre associés ou entre associés et la société, concernant l’interprétation et l’exécution des statuts, incluant les litiges concernant la perte de qualité d’associé et ses conséquences ; que M. X…, l’un des associés, a assigné la société afin que cette clause soit déclarée non écrite ;

Attendu que pour déclarer M. X… irrecevable en ses demandes, l’arrêt retient que les stipulations statutaires critiquées ne sont pas contraires à la protection des actionnaires minoritaires puisqu’il appartient à l’arbitre de mettre en oeuvre les règles impératives du droit, sous le contrôle du juge de l’annulation, que les clauses statutaires modifiées lors de l’assemblée générale n’ont pas un contenu illicite et que, dès lors, les dispositions de l’article 1844-10, alinéa 2 du code civil ne sont pas applicables en l’espèce ; qu’il en déduit que M. X… ne démontre pas d’intérêt à agir ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 10 avril 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société civile des Mousquetaires aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X….

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir déclaré M. X… irrecevable en ses demandes ;

Aux motifs que M. X… entend demander au juge de considérer comme nulle pour divers motifs la clause compromissoire insérée dans les statuts par une résolution adoptée régulièrement, alors qu’il n’a pas remis en cause la validité de la décision prise par l’assemblée générale ; que l’assemblée générale extraordinaire est seule habilitée à modifier les statuts et qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de se substituer aux organes de la société en ordonnant la modification d’une clause statutaire au motif qu’elle serait contraire aux dispositions légales impératives applicables ; que la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative prévue par le texte ou de l’une des causes de nullité des contrats en général, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ; que l’exception de nullité ne peut être invoquée que pour faire échec à une demande d’exécution d’un acte juridique, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ; que les stipulations statutaires critiquées ne sont pas contraires à la protection des actionnaires minoritaires, puisqu’il appartient à l’arbitre de mettre en oeuvre les règles impératives du droit, sous le contrôle du juge de l’annulation et que les clauses statutaires modifiées lors de l’assemblée générale n’ont pas un contenu illicite et que dès lors, l’article 1844-10 alinéa 2 du code civil n’est pas applicable ; que M. X… ne démontre ainsi pas d’intérêt à agir ;

Alors 1°) que le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction ; que la société SCM avait seulement soutenu, à l’appui de l’irrecevabilité de l’action de M. X… pour défaut d’intérêt à agir, qu’il ne justifiait pas d’un intérêt né et actuel, puisque son action étant fondée sur l’hypothèse où il contesterait la valorisation de ses parts à l’occasion d’une éventuelle démission ou exclusion et où il souhaiterait, alors, éviter l’arbitrage (arrêt p. 6 et 7 ; conclusions de la SCM p. 6 et 7) ; qu’en relevant d’office, pour déclarer irrecevables les demandes de M. X…, le moyen selon lequel l’intérêt à agir de ce dernier était subordonné à une remise en cause préalable de la validité de la décision de l’assemblée générale, seule habilitée à modifier les statuts, qu’il n’entrait pas dans les pouvoirs du juge d’ordonner la modification d’une clause statutaire contraire aux dispositions légales impératives applicables, que la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne pouvait résulter que de la violation d’une disposition impérative ou de l’une des causes de nullité des contrats, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, et que les stipulations statutaires critiquées n’étaient pas contraires à la protection des actionnaires minoritaires (arrêt p. 8 et 9), sans avoir provoqué les explications des parties sur ces points, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

Alors 2°) que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action ; que pour décider que M. X… n’avait pas d’intérêt à agir, la cour d’appel a retenu qu’il n’avait pas remis en cause la validité de la décision prise par l’assemblée générale, seule habilitée à modifier les statuts, qu’il n’entrait pas dans les pouvoirs du juge d’ordonner la modification d’une clause statutaire contraire aux dispositions légales impératives applicables, que la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne pouvait résulter que de la violation d’une disposition impérative ou de l’une des causes de nullité des contrats, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, et que les stipulations statutaires critiquées n’étaient pas contraires à la protection des actionnaires minoritaires (arrêt p. 8 et 9) ; qu’en subordonnant ainsi l’intérêt à agir de M. X… à la démonstration préalable du bien-fondé de son action, la cour d’appel a violé l’article 31 du code de procédure civile ;

Alors 3°) que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ; que l’associé d’une société a intérêt à agir en nullité d’une clause des statuts qui instaure une clause compromissoire stipulant que « tous les litiges survenant entre associés ou entre associés et la société, concernant l’interprétation et l’exécution des présents statuts, incluant les litiges concernant la perte de qualité d’associé et ses conséquences, seront résolus par voie d’arbitrage » et qui confère à l’arbitre « en cas de contestation de la valeur de remboursement des parts des associés retrayants ou exclus telle que déterminée par les statuts et le règlement intérieur, les pouvoirs de l’expert chargé d’évaluer le montant de remboursement des parts conformément à l’article 1843-4 du code civil et à l’article L. 231-1 du code de commerce et celui de statuer en amiable compositeur et en dernier ressort » ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 31 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2015:CO00907


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