Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 mai 2011), que la société Coopération Verlags, dont Emery X… était le seul actionnaire, a acquis en 1954 de Gabrielle Y… 11900 des 12000 parts de la société civile immobilière…, propriétaire de la villa… à Roquebrune Cap Martin ; que Emery X… a fait notamment apport, en 1970, des actions la société Cooperation Verlags à la Fondation Beaux Arts, créée la même année, dont les statuts précisaient que lui seul pouvait être le président, et, après son décès, son épouse survivante ; que, dans le même temps, un accord en date 23 avril 1970, conclu entre la société The Arts limited, fondée également par Emery X… et dont il était l’actionnaire principal, et la société civile immobilière… avait prévu la mise à disposition de la villa au bénéfice de la première, pour y exposer les collections d’Emery X…, précisant que les époux X… pourraient y résider gratuitement jusqu’à leur mort, la société civile immobilière assurant l’ensemble des coûts d’entretien ; qu’à l’occasion de l’apport, en 1970, à la Fondation Beaux Arts, des actions de la société The Arts limited, la Fondation s’est engagée à faire en sorte que les époux X… soient autorisés à continuer à y résider ; qu’en exécution de ces accords Emery X… a occupé la Villa…, seul puis avec Wendy A…, son épouse, de 1954 jusqu’à son décès en 1981 ; que Wendy A… a occupé seule la villa jusqu’à son décès en 2007 ; que M. B…, fils d’une première union de Wendy A…, unique héritier de celle-ci, a assigné la société civile immobilière pour voir juger que sa mère avait acquis la propriété de la villa par prescription trentenaire, et qu’il en était dès lors propriétaire par succession ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt de débouter M. B… de sa demande fondée sur l’usucapion, alors, selon le moyen :
1°/ que M. B… faisait valoir, dans ses dernières conclusions d’appel déposées et signifiées le 18 février 2011, que la mise à disposition figurant dans la convention du 23 avril 1970 conclue entre la SCI… et la société The Arts Limited, qui s’inscrivait dans la cadre d’un montage juridique destiné à réduire l’imposition du patrimoine des époux X…, n’était qu’une stipulation de pure complaisance décidée par M. X…, qui contrôlait en pratique les deux entités, et qu’elle n’était donc pas de nature à constituer un véritable titre conférant à M. X…, puis à son épouse, la qualité de détenteurs précaires les empêchant de prescrire la propriété de la Villa… contre la SCI… ; que dès lors, en affirmant, au regard de cette convention, que les époux X… avaient toujours détenu la Villa pour le compte d’un tiers, sans rechercher si le contexte global dans lequel celle-ci avait été conclue n’était pas de nature à établir qu’elle n’était que de pure complaisance, n’ayant pas vocation à être invoquées par la SCI… et la société The Arts Limited, lesquelles étaient entièrement contrôlées par M. X…, puis Mme X…, ce qui était de nature à exclure la qualification de détenteurs précaires, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2228 et 2229 anciens du code civil ;
2°/ que l’intention de se comporter en propriétaire peut se manifester au travers des actes d’un tiers agissant pour le compte du possesseur ; que dans ses dernières conclusions, déposées et signifiées le 18 février 2011, M. B… faisait valoir qu’en vertu du montage fiscal mis en place par M. Emery X…, ce dernier, puis son épouse, contrôlaient seuls la Fondation Beaux-Arts, la société Coopération Verlags, la société The Arts Limited et la SCI…, de sorte qu’ils étaient seuls maîtres du sort de la Villa…, qu’ils ne pouvaient être obligés de restituer, et que tous les actes réalisés par la société The Arts Limited, la Société Coopération Verlags et la Fondation Beaux-Arts, de nature à établir leur animus domini sur la Villa et, notamment, la prise en charge de son entretien et le paiement de toutes les charges et loyers afférents, ne pouvaient être attribués qu’à M. X…, puis à son épouse ; qu’en retenant, par motifs propres et adoptés, que si M. X… puis, à son décès, Mme X…, avaient un droit d’occupation de la Villa, leur possession était exclusive de tout animus domini dès lors qu’ils n’avaient personnellement exercé aucun acte à titre de propriétaires, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si, eu égard au montage mis en place, les actes effectués par l’ensemble des entités participant au montage mis en place par M. X…, parce qu’elle étaient contrôlées intégralement par M. X…, puis par Mme X…, ne traduisaient pas la volonté de ces derniers de se comporter en véritables propriétaires dès leur entrée en possession, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2228 et 2229 anciens du code civil ;
3°/ que pour prescrire on peut joindre à sa possession celle de son auteur de quelque manière qu’on lui ait succédé ; que Mme Wendy X… était la seule héritière de son époux, M. Emery X… ; qu’en retenant, pour écarter la prescription acquisitive, que Mme Wendy X… n’avait pu prescrire qu’à compter du décès de son mari et qu’elle ne pouvait se prévaloir de la possession de ce dernier, dès lors qu’elle n’avait été que sa concubine puis son épouse séparée de biens, circonstances pourtant inopérantes à l’empêcher de joindre à la sienne la possession de son auteur, la cour d’appel a violé l’article 2235 ancien du code civil ;
4°/ qu’est dénuée d’équivoque la possession caractérisée par des actes de nature à exclure tout doute, dans l’esprit des tiers, quant à la qualité de propriétaire du possesseur ; qu’en considérant que la présentation sociale de Wendy X…, dans sa biographie, comme co-acquéreur de la Villa…, le fait qu’elle se soit investie dans l’aménagement de la Villa ou encore la qualification de propriétaire de M. X…, puis de Mme X…, faite respectivement par les services fiscaux américains et français, ne pouvaient établir que les époux X… avaient occupé la Villa à titre de propriétaires dès lors que ces qualifications étaient inexactes au regard du droit de la propriété, sans rechercher si ces circonstances n’étaient pas, néanmoins, de nature à démontrer que les époux X… apparaissaient, aux yeux des tiers, comme les véritables propriétaires de la Villa litigieuse, et ainsi à caractériser le caractère non équivoque de la possession invoquée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 2229 ancien du code civil ;
Mais attendu qu’ayant souverainement retenu que les actes de possession accomplis depuis 1954 par Wendy A…, soit par elle-même, soit du chef de son auteur, ne l’avaient pas été à titre de propriétaire, et que la détention de la villa… n’avait été exercée que pour le compte d’un tiers titulaire du droit de propriété, la cour d’appel, qui a ainsi établi le caractère équivoque de la possession, a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt de condamner M. B… à payer diverses sommes à la SCI… à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que l’exercice d’une action en justice est un droit qui ne dégénère en abus que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol ; qu’en affirmant que les diverses demandes de M. B… tendant à faire suspendre l’instance dans l’attente de la décision à intervenir dans la procédure parallèle intentée par les entités composant le montage juridique mis en place par M. X…, ou à voir ces deux procédures jointes, témoignaient de sa volonté d’utiliser la procédure à des fins dilatoires pour paralyser le droit de la SCI… à disposer de son immeuble, la cour d’appel n’a pas caractérisé des circonstances de nature à faire dégénérer le droit de M. B… à agir en justice, et a violé l’article 1382 du code civil ;
2°/ que ne peut constituer un abus du droit d’agir en justice le fait de saisir une juridiction du fond d’une demande préalablement présentée devant le juge des référés et qui a été rejetée par celui-ci en raison de l’existence d’une contestation sérieuse ; que par une ordonnance en date du 6 mars 2008, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice a rejeté la demande de M. B… tendant à obtenir des mesures conservatoires portant notamment sur la Villa…, aux motifs qu’elle se heurtait à une contestation sérieuse quant à l’appartenance de cette villa à la succession de Mme Wendy X… ; qu’en jugeant que le fait, pour M. B… d’avoir assigné la SCI… afin de faire reconnaître que Mme X… avait acquis la Villa par usucapion, seulement quelques jours après le prononcé de cette ordonnance l’ayant débouté de ses demandes, constituait un détournement de procédure et, partant, un abus de droit, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
3°/ que la reconnaissance de l’appartenance de la Villa… au patrimoine de Mme X…, dans le cadre de l’action intentée par les entités prenant part au montage juridique mis en place par M. X…, aurait été de nature à priver d’objet l’action de M. B… fondée sur l’usucapion et justifiait donc sa demande tendant à la jonction des deux procédures ou, à tout le moins, d’un sursis à statuer aux fins de la bonne administration de la justice ; qu’en décidant que sa demande de jonction en date du 4 février 2009, et ses demandes de renvoi devant le juge de la mise en état, puis devant le conseiller de la mise en état, et enfin le déféré de l’ordonnance rendue par ce dernier, toutes destinées à obtenir un sursis à statuer, établissaient sa volonté d’utiliser la procédure à des fins dilatoire, la cour d’appel, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil ;
4°/ que M. B… faisait valoir dans ses dernières conclusions d’appel régulièrement déposées et signifiées le 18 février 2011, que le 22 septembre 2009, l’administration fiscale française avait reconnu que les actifs des entités créées dans le cadre du montage juridique mis en place par M. X… faisaient partie de la succession de Mme X…, dont il était héritier réservataire, et que le 30 juin 2010, après plus de trois ans de contestation, la SCI… avait reconnu sa qualité d’héritier réservataire de Mme X…, circonstances de nature à légitimer son intérêt à maintenir son action en revendication de la Villa… et donc à exclure tout abus de son droit à agir en justice ; qu’en s’abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que, subsidiairement, M. B… faisait encore valoir, dans ses dernières conclusions d’appel déposées et signifiées le 18 février 2011, qu’il ne s’était pas opposé à la vente de la Villa…, mais avait simplement demandé que le prix de vente soit séquestré jusqu’à l’issue du litige ; qu’en confirmant le jugement ayant retenu que la SCI… avait perdu une chance de vendre l’immeuble en 2008 du fait de la procédure engagée par l’exposant, sans répondre aux conclusions de ce dernier, qui faisait valoir que la procédure qu’il avait intentée n’avait pas empêché cette vente, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
6°/ que, subsidiairement, M. B… exposait, dans ses dernières conclusions d’appel régulièrement déposées et signifiées le 18 février 2011, que l’article III de l’accord conclu entre la SCI… et la société The Arts Limited, le 23 avril 1970, au sujet de la mise à disposition de la Villa… aux époux X…, prévoyait que la seconde devait entretenir complètement la Villa en prenant en charge toutes les réparations et améliorations provisoires ou temporaires, de quelque nature que ce soit, ainsi que les impôts, y compris l’impôt foncier, la SCI n’entendant supporter aucune charge pour la Villa ; que M. B… ajoutait que le règlement de la Fondation Beaux-Arts, qui détenait l’intégralité des parts de la société The Arts Limited, disposait, en son article 5 (ii), qu’outre les actions de la société
Coopération Verlags, M. X… transférerait des fonds destinés à couvrir l’ensemble des taxes et charges, frais d’entretien et de réparation, salaires du personnel et toutes les autres dépenses et frais de valorisation de la Villa…, ce dont il résultait que la SCI… ne supportait aucune charge relative à l’entretien de la Villa ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour condamner M. B… à verser les sommes de 523 000 et 1 222 000 à la SCI… à titre de dommages-intérêts, qu’elle était fondée à obtenir l’indemnisation des coûts d’entretien de la Villa pendant la durée de la procédure, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si la SCI avait effectivement supporté la charge définitive de ces dépenses et justifiait ainsi d’un préjudice certain, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code de procédure civile ;
7°/ que, subsidiairement, la réparation d’une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée ; qu’en condamnant M. B… à indemniser la SCI… à hauteur de l’intégralité des frais d’entretien de la Villa pendant la procédure, après avoir pourtant constaté que cette dernière avait seulement perdu une chance de céder la Villa du fait de la procédure, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé l’article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les nombreux incidents de procédures dus à la seule initiative de M. B…, témoignaient de sa volonté de paralyser le droit de la société civile immobilière de disposer de son immeuble, et caractérisé ainsi une faute dans l’exercice du droit d’agir en justice, la cour d’appel, répondant aux conclusions et abstraction faite de motifs surabondants, a souverainement apprécié l’existence du préjudice, et le montant de sa réparation ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. B… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. B… à payer à la société civile immobilière… une somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. B… ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. B….
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté M. Arnold B… de sa demande fondée sur l’usucapion ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la prescription acquisitive : pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ; il existe des actes matériels de possession en ce sens que Wendy X… a occupé la Villa… de manière presque ininterrompue, sauf séjours à l’étranger, depuis 1954 ; pour autant, pendant la période courant de 1954 à 1970, date de la création de la Fondation Beaux-Arts, il convient de rappeler d’une part qu’en 1954, c’est la SA Coopération Verlags, certes détenue par Emery X…, qui acquiert la quasi-totalité des parts de la SCI… et que d’autre part, Wendy X… n’occupe cet immeuble qu’en qualité de compagne, puis d’épouse séparée de biens d’Emery X…. Pour cette période, il n’est pas justifié de l’accomplissement par Wendy X…, à titre personnel, d’actes matériels de possession faits à titre de propriétaire, de l’immeuble litigieux et qui exprimeraient une possession contraire à la propriété de la SA Coopération Verlags ; c’est à juste titre que le premier juge a énoncé que la SCI… avait valablement pu mettre, gratuitement et sans bail, la Villa à la disposition d’Emery X…, président du conseil d’administration de la société Coopération Verlags, principal porteur de parts de la SCI, et de son épouse, sans que cette mise à disposition ne puisse s’analyser en une détention par les époux X…, et notamment par Wendy X…, faite à titre de propriétaire ; de même, la présentation sociale de Wendy X… comme coacquéreur de la Villa…, dans la biographie de celle-ci, est parfaitement inexacte, et le fait qu’elle se soit investie dans l’aménagement de la Villa et la présentation des oeuvres et la présentation des oeuvres d’art ayant appartenu à son époux et dont la propriété avait été transférée à la société The Arts Limited, ne relève que cette qualité de compagne et d’épouse d’Emery X… ; il ne peut pas plus être tiré argument de la lettre du Département du Trésor des États-Unis du 20 juin 1969 présentant Emery X… comme propriétaire de la Villa, d’une part parce que la propriété supposée d’Emery X… ne peut emporter celle de son épouse séparée de biens, et, d’autre part, parce que cette présentation ne repose sur aucun élément objectif au regard du droit de propriété et de la prescription acquisitive. Il en va de même pour l’analyse de la situation fiscale de Wendy X… par les services fiscaux français qui ne saurait valoir ni comme preuve de la propriété ni comme élément de possession ; par convention du 23 avril 1970, la SCI… a mis à disposition de la société The Arts Limited la Villa… pour une durée de deux ans, tacitement renouvelable, sauf dénonciation de l’une ou l’autre des partie, afin d’y entreposer sa collection d’oeuvre d’Art ; en contrepartie la société The Arts Limited s’est engagée à prendre en charge les réparations et améliorations de toute nature ainsi que les impôts fonciers et s’est vu attribuer le droit de désigner « une personne ou un couple afin de veiller sur les collections et les entretenir et pour ce faire cette ou ces personnes auront la faculté de vivre dans la Villa pendant leur séjour… dès maintenant, la société The Arts Limited propose Monsieur et Madame X…, ou le survivant d’entre eux, comme premiers gardiens, ce qui est accepté par la société propriétaire » ; cette convention, qui s’inscrit exactement dans le cadre des objets sociaux des deux sociétés confère un titre d’occupation de la Villa aux époux X… qui ne l’ont jamais remis en cause, tous les frais liés à la Villa étant réglés par les sociétés contractantes ; il n’est pas plus justifié depuis cette date d’actes de possession accomplis à titre de propriétaire par Wendy X… contredisant ce titre d’occupation et la propriété de la SCI… ; Wendy X… n’a jamais remis en cause cette convention après le décès de son époux, ni même après que la collection d’objets et oeuvre d’art exposés à la Villa… ait été transférée au Dallas Muséum of Arts par acte de donation du 31 mai 1983 ; spécialement, Wendy X… n’a jamais acquitté de quelconques sommes pour l’entretien de cet immeuble ou réglé des impôts fonciers, ne remettant ainsi jamais en cause ni l’application de la convention, ni la propriété de la SCI… ; Arnold B… invoque également les dispositions du règlement de la Fondation Beaux-Arts pour soutenir que ces différentes sociétés et Fondations ne seraient que des écrans masquant une véritable détention par Emery X… et son épouse et notamment l’article 4 § a de ce règlement qui stipule « si la société The Arts Limited perd le droit d’utiliser la Villa accordé par la SCI… en vertu de l’accord conclu entre les deux sociétés, la Fondation prendra les mesures nécessaires afin de s’assurer qu’Emery X… et Wendy X… ou celui ou celle d’entre eux qui survivra soi (en) t autorisé (es) à rester et résider dans la Villa » ; ce texte ne vise qu’à assurer la pérennité d’un titre l’occupation de cette Villa accordé au président de la Fondation Beaux-Arts et à son épouse, à titre viager, mais sans en modifier la nature ni conférer aux époux X… un quelconque droit de propriété, ceux-ci ne possédant que pour le compte de la SCI… propriétaire ; l’appelant invoque également les autres dispositions du règlement de la Fondation conférant selon lui un véritable pouvoir de disposition à Wendy X…, devenue présidente de la Fondation au décès de son époux ; l’article 4 § b du règlement stipule que « si Wendy X… survit à son époux et souhaite renoncer à son droit de rester et de résider dans la Villa, la Fondation peut vendre la Villa…, soit par le biais de la vente des actions de la société Coopération Verlags Vaduz ou de toute autre manière : en cas de vente de la Villa…, il est entendu que la Fondation fera grâce au produit de la vente, l’acquisition d’un autre bien immobilier à la demande et conformément aux instructions de Wendy X…. » ; ce texte ne confère pas un pouvoir de disposition sur la Villa… comme le soutient l’appelant puisque la Fondation n’est pas obligée de vendre la Villa (« peut ») et doit seulement faire l’acquisition d’un autre immeuble si Wendy X… le demande ; cette disposition vise en réalité à garantir à Wendy X… un droit d’usage et d’habitation dans l’immeuble de son choix, ce que confirment les dispositions de l’article 4 § c, sans que soit remis en cause le droit de propriété de la SCI… qui a seule le pouvoir de disposer de la Villa, la Fondation ne pouvant qu’envisager la vente des parts de la SCI ou de la SA Coopération Verlags ; les articles 5 § d et e confèrent à Wendy X… le droit de d’obtenir l’attribution d’objets d’arts et ou de tout ou partie du capital de la Fondation, cependant, même à supposer que Wendy X… ait pu exercer ce pouvoir de manière discrétionnaire, sans pouvoir d’opposition du conseil d’administration, elle n’aurait disposé que des actions de la SA Coopération Verlags et non de la propriété de la Villa…, toujours détenue par la SCI…, ce qui ne caractérise aucunement une possession à titre de propriétaire de la Villa… ; la détention exercée par Wendy X… sur la Villa… a toujours été exercée pour le compte d’un tiers titulaire du droit de propriété, sans qu’aucun acte ne soit effectué par celle-ci à titre de propriétaire et le jugement déféré doit être confirmé de ce chef.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Arnold B… soutient que sa mère Wendy A…- X… dont il est l’unique héritier réservataire, a acquis la propriété de la Villa… par prescription trentenaire en application de l’article 2229 du Code Civil ; aux termes de l’article 2229 ancien du Code Civil (applicable à l’espèce, l’instance ayant été introduite avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2008661 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile), « pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue, et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire » ; l’usucapion suppose que soient réunies toutes les composantes de la possession, à savoir le corpus c’est-à-dire l’accomplissement d’actes purement matériels sur la chose, et l’animus, soit l’élément psychologique consistant en l’intention de se comporter comme le propriétaire de la chose ; il résulte de l’acte notarié du 30 septembre 1952 contenant statuts de la SCI… que l’immeuble Villa… a été apporté en nature à cette SCI par Gabrielle Y… ; la SCI… a pour objet « la gestion et l’exploitation de la propriété… sise à Roquebrune Cap Martin, Alpes Maritimes, et généralement toutes opérations quelconques mobilières et immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement a l’objet ci-dessus, ou susceptibles d’en favoriser le développement, pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société. » ; suivant acte du 8 février 1954, Gabrielle Y… a cédé à la société Coopération Publishing Company SA (Société Coopération Verlags ayant son siège social à Vaduz et dont le président du conseil d’administration était Emery X…) les 11 900 parts qu’elle possédait au sein de la SCI (sur 12 000 parts) comme lui ayant été attribuées en représentation de son apport en nature de la SCI… ; le reliquat des parts de la SCI est actuellement entre les mains de Patricia E…, gérante de la SCI… depuis 1983 ; Arnold B… soutient que depuis 1954 et jusqu’à son décès en mars 2007 ; sa mère Wendy A… X… a occupé la Villa… en qualité de propriétaire ; la règle de l’article 2230 ancien du Code Civil selon laquelle « on est toujours présumé posséder pour soi, et a titre de propriétaire, s’il n’est prouvé qu’on a commencé à posséder pour un autre » comporte une contrepartie résultant de l’article 2231 ancien du même code, selon laquelle « quand on a commencé à posséder pour autrui on est toujours présumé posséder au même titre, s’il n’y a preuve du contraire. » : l’article 2236 ancien du Code Civil dispose en outre que « ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais, par quelque laps de temps que ce soit ; ainsi le fermier, le dépositaire, l’usufruitier, et tous autres qui détiennent précairement la chose du propriétaire ne peuvent la prescrire » ; il ressort des pièces produites que Wendy A… a épousé Emery X… le 10 juillet 1964, le couple étant marié suivant le régime de la séparation des biens, aux termes d’un contrat de mariage établi le 9 juillet 1964 à Genève : pour autant, il est établi que Wendy A… et Emery X… ont reçu à plusieurs reprises dans cette Villa de Roquebrune Cap Martin dans les années suivant 1954, notamment Winston F…, dont Emery X… a été l’agent littéraire ; la SCI… ne conteste pas que Wendy A… et Emery X… ont occupé la Villa… à partir de 1954, et que Wendy A…- X… a continué d’y séjourner postérieurement au décès de son mari survenu en septembre 1981, jusqu’à son propre décès en mars 2007 ; si les actes matériels de la possession ne sont pas contredits, en revanche la SCI… conteste que les époux X…, puis Wendy X…, aient pu posséder en qualité de propriétaires ; l’objet du litige consiste dès lors a déterminer si Wendy X…, qui a fait sur la Villa… des actes d’usage et de jouissance, est un possesseur de la propriété ou un détenteur précaire ; la SCI… fait valoir que le droit d’occupation des époux X…, puis de Wendy X… résulte notamment de la convention conclue le 23 avril 1970 entre The Arts Limited, société ayant son siège à Nassau (Bahamas) créée par Emery X… en 1968, et la SCI… ; dans cette convention, il est rappelé que la SCI… est propriétaire de la Villa… sise commune de Roquebrune Cap Martin, et que la société The Art Limited est propriétaire de diverses oeuvres d’art, tableaux, meubles, tapisseries, porcelaine formant une collection unique en son genre destinée éventuellement par la société à être constituée en un musée ouvert au public ; il résulte de la convention du 23 avril 1970 que la SCI… a mis la Villa… à la disposition de la société The Arts Limited dans le but de permettre à celle-ci d’entreposer ses collections et éventuellement de les faire visiter par le public si elle le désire en contrepartie la société The Arts Limited s’est engagée à entretenir complètement la Villa… ; la convention stipule que la société The Arts Limited aura « la possibilité de désigner une personne ou un couple afin de veiller sur les collections et les entretenir et pour ce faire cette ou ces personnes auront la faculté de vivre dans le Villa pendant leurs séjours… dès maintenant, la société The Arts Limited propose Monsieur et Madame X…, ou le survivant d’eux, comme premiers gardiens, ce qui est accepté par la société propriétaire » ; ces dispositions ont été confirmées par un accord passé le 28 avril 1970 entre le société The Arts Limited et les époux X… ; Arnold B… soutient que la convention du 23 avril 1970 n’aurait désigné les époux X… que pour assurer la garde de la collection d’oeuvres, sans référence aucune à l’immeuble litigieux ; il est cependant expressément stipulé dans la convention que « La société The Arts Limited prendra la propriété… dans l’état où elle se trouve actuellement ; la société The Arts Limited ou la ou les personnes désignées pour y habiter comme ci-dessus prévu, c’est-à-dire actuellement Monsieur et Madame X… ou leurs successeurs occuperont la dite propriété en « bon père de famille » sans pouvoir en changer le destination de propriété et maison bourgeoise avec toutefois la possibilité à l’article IV ci-dessus de permettre l’accès au public de la Villa pour la visite des collections entreposées » ; il est en outre prévu que la société propriétaire se réserve le droit a tout moment de visiter la Villa, d’en vérifier l’état et l’entretien ; il résulte de ces stipulations que les époux X… ont occupé la Villa… en vertu d’un accord donné par le propriétaire la SCI… ; Arnold B… fait valoir qu’il ne peut être soutenu que la convention de 1970 serait la cause de l’occupation de la Villa par les époux X… car ceux-ci y résidaient depuis 1954 ; cet argument est dépourvu de portée au titre de l’usucapion que cherche à établir Arnold B…, dés lors qu’il ne s’est écoulé que 16 ans entre 1954 et 1970 ; au demeurant, il est établi qu’aux termes de l’acte précité de 1954, la société Coopération Verlags détient 11 900 parts sur les 12 000 parts constituant le capital de la SCI…, propriétaire de la Villa… sise à Roquebrune Cap Martin ; la SCI… peut valablement soutenir que pendant cette période (1954-1970), elle a mis la Villa dont elle était propriétaire, gratuitement et sans bail, à la disposition de Emery X… président de la société Coopération Verlags, son associé majoritaire, sans pour autant avoir renoncé à la jouissance de l’immeuble, dès lors qu’il est de jurisprudence constante qu’un propriétaire se réserve la jouissance d’un logement non seulement lorsqu’il l’occupe personnellement mais aussi lorsqu’il le laisse gratuitement à la disposition d’un tiers ; en donnant aux époux X… la faculté de résider et de séjourner dans la Villa, la SCI… a manifesté sur le bien un acte de jouissance, de sorte qu’elle ne peut être considérée comme un possesseur négligent comme le soutient Arnold B… ; Arnold B… expose que la convention de 1970 serait dépourvue de portée pour établir le titre d’occupation des époux X… à compter de 1983, date de la donation par la société The Arts Limited de sa collection au Musée de Dallas ; il n’est cependant pas établi que cette donation ait épuisé les collections de la société The Arts Limited qui demeure propriétaire d’objets d’art au sein de la Villa ; en outre, la convention de 1970 stipule que la mise à disposition a été consentie sans limitation de durée, reconductible tacitement de deux ans en deux ans et tant que l’une des deux sociétés contractantes ne révoquera pas la convention ; il apparaît que la SCI… n’a jamais dénoncé la convention, ce même après 1983 ; Arnold B… fait référence aux dispositions résultant du règlement de la Fondation Beaux-Arts Stiftung qui détient la société Coopération Verlags, pour soutenir que Wendy X… a un droit de propriété sur la Villa… ; il est cependant rappelé dans ces dispositions (art. 3) que la SCI… est l’unique propriétaire de…, et que si la société « The Arts Limited perd le droit d’utiliser la Villa accordé par la SCI… en vertu de l’accord conclu entre les deux sociétés, la Fondation prendra les mesures nécessaires afin de s’assurer qu’Emery X… et Wendy X… ou celui ou celle d’entre eux qui survivra, soi (en) t autorisé (es) à rester et résider dans la Villa ; si Wendy X… survit à son époux et souhaite renoncer à son droit de rester et résider dans la Villa, la Fondation peut vendre la Villa… soit par le biais de la vente des actions de la SCI…, par le biais de la vente des actions de la société Coopération Verlagsaktiengesellschaft Vaduz ou de toute autre manière » (art 4) ; il convient d’observer que Wendy X…, à la suite du décès de son mari survenu en 1981, n’a jamais remis en cause le système juridique en vertu duquel elle occupait la Villa… et le droit de propriété de la SCI… sur celle-ci ; Wendy X… n’a d’ailleurs jamais effectué aucune dépense incombant normalement à un propriétaire pour l’entretien de la Villa, ni jamais payé aucune taxe foncière relativement à cet immeuble ; il résulte de l’ensemble des pièces versées aux débats que les époux X… ont eu une possession de la Villa… exclusive de tout animus domini ; il convient donc de débouter Arnold B… de sa demande fondée sur l’usucapion ;
1°/ ALORS QUE M. B… faisait valoir, dans ses dernières conclusions d’appel déposées et signifiées le 18 février 2011 (p 6-9), que la mise à disposition figurant dans la convention du 23 avril 1970 conclue entre la SCI… et la société The Arts Lim