Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Saint-Denis, 7 octobre 2015), que les sociétés Nouvelles Frontières et Sucreries de Bourbon Madagascar, devenue la société Bourbon Madagascar, filiale de la société Bourbon, ont créé, en septembre 1997, la Société de développement hôtelier de Madagascar (la société SDHM), dont le capital était détenu pour moitié par chacune d’elles, dans le but de construire et exploiter deux complexes hôteliers à Madagascar ; que la société Tecnova architecture (la société Tecnova) a été chargée de la maîtrise d’oeuvre de conception et de la décoration sans qu’aucun contrat soit signé ; qu’après le désengagement de la société Nouvelles Frontières et la cession par celle-ci de ses parts de la société SDHM à la société Bourbon, le projet a été abandonné ; que la société Tecnova, non payée de ses honoraires par la société SDHM, l’a assignée en paiement, ainsi que les sociétés Bourbon et Bourbon Madagascar ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que la société Tecnova fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande en paiement contre la société Bourbon ;
Mais attendu qu’ayant retenu que la société Tecnova avait, en parfaite connaissance de cause, émis ses factures au nom de la société SDHM, bénéficiaire des permis de construire, qu’elle présentait, elle-même, comme le maître d’ouvrage de l’opération sur les documents qu’elle avait rédigés et qu’elle ne rapportait pas la preuve que la société Bourbon, simple associée par sa filiale de la société SDHM, eût été le véritable maître d’ouvrage, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre la société Tecnova dans le détail de son argumentation, ni de s’expliquer sur les pièces qu’elle décidait d’écarter, en a souverainement déduit, sans dénaturation, que la société Tecnova ne pouvait demander le paiement de ses honoraires à la société Bourbon ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que la société Tecnova fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande en paiement contre la société Bourbon Madagascar ;
Mais attendu qu’ayant retenu que les projets de contrat mentionnaient la société Bourbon Madagascar tantôt comme maître d’ouvrage délégué, tantôt comme maître d’oeuvre d’exécution, qu’un courrier de la société Tecnova la présentait comme représentant du maître d’ouvrage dont elle ne pouvait ignorer qu’il s’agissait de la société SDHM désignée comme telle dans ses autres écrits et que la société SDHM, seule à tirer profit des ouvrages, devait devenir propriétaire des terrains au terme d’un montage complexe, la cour d’appel, qui, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a souverainement déduit que la société Bourbon Madagascar était intervenue pour le compte de la société SDHM, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Tecnova aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille dix-sept.MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Tecnova architecture.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté la société Tecnova architecture, maître d’oeuvre, de ses demandes en paiement contre la société Bourbon anciennement dénommée Groupe Bourbon ;
AUX MOTIFS QUE sur les demandes en paiement : attendu qu’il est constant que la société de développement Hôtelier de Madagascar (SDMH) a été constituée le 19/09/1997, qu’elle avait pour objet la construction puis l’exploitation de deux ensembles hôteliers sur Madagascar, Que le capital de cette personne morale était partagé à parts égales entre la société Nouvelles Frontières (international), représentée M. [W] [J] et la société Sucrerie de Bourbon Madagascar, devenue Bourbon Madagascar, filiale de la société Groupe Bourbon, devenue société Bourbon, dirigée par M. [W] [N], Que courant juillet 2000, Nouvelles Frontières a revendu la totalité de ses parts dans la capital de SDMH, cf ; lettre du 7/1/00 dans laquelle M. [W] [N] s’adresse à [W] [J] (Nouvelles Frontières) pour confirmer que la réalisation du projet de [Localité 1] va se faire avec un nouvel opérateur ( en raison du départ de Nouvelles Frontières), en substituant la cogérance à une gérance « Groupe Bourbon », que cette cession serait intervenue en juillet 2000, cf ; pièce 95, de la société Tecnova Architecture, Que depuis 2001, la société Tecnova Architecture poursuit le paiement de notes d’honoraires en dates des 9 et 13 août 1999 relatifs à la maîtrise d’oeuvre de conception, un contrat de décoration, la convention d’étude des équipements de cuisine et de buanderie concernant l’hôtel [Localité 1] ainsi que les honoraires relatifs au contrat de maîtrise d’oeuvre de conception pour l’hôtel [Localité 2], à Madagascar, Attendu que conformément à l’article 1315 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ; Attendu que de nombreuses pièces ont été produites par les parties parmi lesquelles on trouve plusieurs projets de missions confiées à la société Tecnova architecture SA, Qu’aucun d’entre eux n’a été signé par les parties, que tout porte à croire que ces documents ont été établis par la société Tecnova architecture SA, Attendu que la société Tecnova Architecture sollicite notamment le paiement des 2 notes d’honoraires des 9 2 et 13 août 1999 qu’elle a établies à l’ordre de « la Société des Hôtels de Madagascar » (Sdhm), Que l’objet de ces deux notes est identique ; à « Construction d’un ensemble hôtelier 3*** de 150 chambres à [Localité 1] Madagascar »; qu’elles portent sur l’avancement des études de Tecnova Architecture SA au jour de leur émission : « APS – APD – dossier de permis de construire et dossier DCE réalisé » et correspondent à la « rémunération de Tecnova Architecture SA pour la mission de maîtrise d’oeuvre de conception », Que le préprogramme prévisionnel établi par Tecnova architecture SA (et non signé) du 11/02/98 désigne « SDMH », en qualité de maître d’ouvrage, Sovic maître d’ouvrage délégué, Tecnova architecture SA, maître d’oeuvre , et maître d’oeuvre d’exécution SBMAD pour le complexe hôtelier Club 3*** [Établissement 1], Qu’il en est de même du préprogramme prévisionnel [Localité 2] daté du 17/02/98, du préprogramme prévisionnel, non signé daté 12/05/98 pour le complexe hôtelier Club 3*** [Établissement 1], Que le contrat de maîtrise d’oeuvre relatif au projet de construction du 21/05/99 d’un hôtel de 150 chambres et 130 appartements à [Localité 1] à Madagascar, établi par Tecnova architecture SA désigne toujours la société des Hôtels de Madagascar (Sdhm) en qualité de maître de l’ouvrage, et la société Sovic comme maître de l’ouvrage délégué, cette dernière étant représentant la société des Hôtels de Madagascar (Sdhm), en qualité de maître de l’ouvrage, que ce document n’est pas signé, Que la rémunération de Tecnova architecture SA était fixée à 5,2% du coût des travaux, Qu’il a été aussi établi un contrat de décoration le 21/05/99 relatif aux mêmes ouvrages pour un montant forfaitaire, que ce contrat est resté lui aussi à l’état de projet puisque non signé, Qu’il en va de même d’une convention d’étude des équipements de cuisine et buanderie du même jour, Que Tecnova Architecture SA soutient qu’elle a tenu compte des observations de ses adversaires en ramenant le montant de ses honoraires à 5% du coût des travaux, Qu’il résulte des pièces versées aux débats par les parties en présence que la société Tecnova Architecture avait commencé l’exécution de la maîtrise d’oeuvre; que la réalité des prestations effectuées par l’architecte dont le paiement est réclamé n’est nullement contestée, mais que tant la société Bourbon que la société sucrerie de Bourbon soutiennent qu’elles sont intervenues pour le compte de la société des Hôtels de Madagascar (Sdhm) en qualité d’actionnaires, et qu’elles ne sont pas personnellement débitrices des sommes réclamées ;
ET AUX MOTIFS QUE s’agissant de la société Bourbon : Attendu que la société Tecnova Architecture soutient que les véritables maîtres de l’ouvrage étaient les sociétés Bourbon et Sucrerie de Bourbon Madagascar, Attendu qu’un document mentionne effectivement la société Bourbon en qualité de maître de l’ouvrage, mais qu’il s’agit que d’une télécopie du 24 septembre 1998 ayant pour objet « galerie commerciale [Adresse 4] »; ouvrage qui ne peut être rattaché aux projets objet du litige ; Que par ailleurs sur les trois cartouches (pièces N°76,77,78 de Tecnova architecture SA), Groupe Bourbon apparaît en qualité de maître de l’ouvrage de la construction d’un complexe touristique club 3*** et résidence 3*** aux cotés de Nouvelles Frontières pour le permis de construire de l’hôtel dans des documents du 14/11/98 mais que sur d’autres cartouches datés de juillet 99, (Pièces N°74, 75 de Tecnova architecture SA) le Groupe Bourbon n’a plus cette qualité, Sdhm étant alors désignée par la société Tecnova Architecture maître de l’ouvrage et Sovic maître de l’ouvrage délégué (construction d’un hôtel [Établissement 2] 150 ch), et que du reste dès février 1998, la société Tecnova Architecture avait elle-même désigné comme maître de l’ouvrage la société Sdhm dans son pré-programme prévisionnel ; Attendu que la société Tecnova Architecture ne rapporte pas la preuve de ce que le véritable maître d’ouvrage aurait été la société Bourbon ; Que la société Bourbon par sa filiale est associée de la société Sdhm, mais qu’elle ne peut être poursuivie en paiement à raison de cette qualité alors que la société Tecnova n’ignorait pas que le maître d’ouvrage était la société Sdhm comme l’indique de nombreuses pièces versées et établies par elles, notamment deux des trois notes d’honoraires dont elle réclame le paiement ; Que cela est notamment confirmé par les dires de la société Nouvelles Frontières, (qui n’a pas été mise en cause dans la présente procédure), dans un courrier en date du 10 décembre 2002 rédigé en ces termes : « Si notre groupe a bien détenu une participation dans la société Sdhm en charge d’un projet de construction d’hôtel sur le site de [Localité 1], nous avons, en juillet 2000, cédé cette participation au Groupe Bourbon qui détenait déjà la moitié du capital de Sdhm. En tout état de cause, nous n’avons jamais participé à la préparation du projet de construction d’un hôtel [Localité 1], le maître de l’ouvrage de ce projet et donc votre client, étant la société Sdhm, ce que vous ne pouvez ignorer. Sauf erreur de notre part, c’est d’ailleurs cette société que vous avez toujours facturée pour les prestations réalisées dans le cadre de ce projet ». Que le 1/06/99, Le Groupe Bourbon sous la signature de [W] [N] dans un courriel adressé à MM. [B] et [H] et en copie à M. [C] déclare : « Le leadership est assuré par M. [C] pour le compte de Nouvelle frontières. Il est donc hiérarchiquement sur les sous-traitants intervenants su rie projet et sur le personnel d’exploitation des hôtels. Il pilote le projet dans tous ses aspects en accord et pour le compte des actionnaires. En tant qu’actionnaire et partenaire important participant à la définition du projet et défendant ses idées et ses intérêts, Groupe Bourbon est représenté par M. [B]. C’est donc lui qui doit prendre les décisions du sort de l’actionnaire et (qui doit) être suffisamment informé pour le faire. De son Côté. Bourbon Madagascar intervient, sous la responsabilité de M. [H] et comme sous-traitant du maître d’ouvrage et à la demande des promoteurs comme apporteurs de services dans les autres domaines où son expérience locale peut être utile au projet ». Que ses demandes à rencontre de la société Bourbon seront donc rejetées ;
ET AUX MOTIFS QUE Sucrerie de Bourbon devenue Bourbon Madagascar et Groupe Bourbon devenue la société Bourbon ont agi pour le compte de la société SHDM et non en leur nom personnel, que par conséquent, la société Tecnova Architecture sera aussi déboutée de ses demandes à rencontre de la société Bourbon Madagascar. A l’encontre de la société Sdhm : Attendu qu’il résulte des éléments analysés précédemment que seule la société SHDM disposait de la qualité de maître de l’ouvrage ; que les prestations réalisées par la société Tecnova Architecture ne sont pas contestées ; que la société SHDM est tenue au paiement des honoraires de la société Tecnova Architecture qui a effectué des prestations pour son compte ;
1) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que la société Tecnova architecture faisait valoir dans ses conclusions d’appel, sans être contestée, que la Sdhm était une société écran de droit malgache constituée entre la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar, filiale à 100 % de la société Groupe Bourbon, et la société Nouvelles Frontières, pour satisfaire aux exigences de la législation malgache sur la réalisation d’un investissement à Madagascar par des opérateurs étrangers, que c’est pour cette raison qu’il lui avait été demandé de faire figurer le nom de la Sdhm sur les projets de contrats et ses factures, que le siège social de cette société était situé dans les locaux de la société Bourbon Madagascar, et que la Sdhm ne lui avait jamais adressé la moindre directive ni correspondance ; qu’en se bornant à relever, pour considérer que la Sdhm était le seul maître de l’ouvrage, que les projets de contrats, non signés, préparés par la société Tecnova architecture mentionnaient la Sdhm comme maître de l’ouvrage, et que deux de ses notes d’honoraires lui étaient adressées, sans répondre au moyen soulevé par la société Tecnova architecture, faisant valoir que la Sdhm n’était qu’une société écran, sans activité réelle, constituée pour satisfaire à la législation malgache, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu’en l’espèce, pour démontrer que les sociétés Groupe Bourbon et Nouvelles Frontières étaient les véritables maîtres de l’ouvrage du projet, la société Tecnova architecture faisait valoir que la société Nouvelles Frontières lui avait réglé une partie des honoraires dus, et versait aux débats la copie de deux chèques de 301.500,00 francs tirés à son ordre par la société Nouvelles Frontières le 4 août 1999, portant la mention « [Localité 1] Madagascar » (pièce n° 50) ; qu’elle produisait également une facture adressée par la société Sucreries de Bourbon Madagascar à la société Nouvelles Frontières pour règlement de la « quote-part de NFI-50% » pour son « étude sur le développement hôtelier à Madagascar » (pièce n° 82) ; que règlement, invoqué expressément par la société Tecnova architecture, expliquait que la société Nouvelles Frontières n’avait pas été mise en cause dans la procédure, dès lors qu’elle s’était acquittée de sa quote-part des honoraires dus ; qu’en relevant, pour considérer que la société Tecnova architecture ne démontrait pas que la société Bourbon et la société Nouvelles Frontières étaient les véritables maîtres de l’ouvrage de l’opération, que la société Nouvelles Frontières, qui n’était pas mise en cause dans la procédure, avait indiqué n’avoir jamais participé à l’opération et que la société Tecnova architecture avait toujours facturé la société Sdhm, sans répondre à ce chef déterminant des conclusions d’appel de la société Tecnova architecture tiré du règlement par la société Nouvelles Frontières des notes d’honoraires des maîtres d’oeuvre, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent débouter les parties de leurs demandes sans analyser, fut-ce de façon sommaire, les pièces par elles versées aux débats ; qu’en l’espèce, pour démontrer que les sociétés Groupe Bourbon et Nouvelles Frontières étaient les véritables maîtres de l’ouvrage du projet, la société Tecnova architecture faisait valoir que la société Nouvelles Frontières lui avait réglé une partie des honoraires dus, et versait aux débats la copie de deux chèques de 301.500,00 francs tirés à son ordre par la société Nouvelles Frontières le 4 août 1999, portant la mention « [Localité 1] Madagascar » (pièce n° 50) ; qu’elle produisait également une facture adressée par la société Sucreries de Bourbon Madagascar à la société Nouvelles Frontières pour règlement de la « quote-part de NFI-50% » pour son « étude sur le développement hôtelier à Madagascar » (pièce n° 82) ; qu’en relevant, pour considérer que la société Tecnova architecture ne démontrait pas que la société Bourbon et la société Nouvelles Frontières étaient les véritables maîtres de l’ouvrage de l’opération, que la société Nouvelles Frontières, qui n’était pas mise en cause dans la procédure, avait indiqué n’avoir jamais participé à l’opération et que la société Tecnova architecture avait toujours facturé la société Sdhm, sans s’expliquer sur ces pièces démontrant que la société Nouvelles Frontières avait réglé les notes d’honoraires des maîtres d’oeuvre, et avait bien la qualité de maître de l’ouvrage, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
4) ALORS QUE le maître de l’ouvrage est la personne pour laquelle l’ouvrage est construit ; qu’en l’espèce, afin de démontrer que les véritables maîtres de l’ouvrage de l’opération étaient les sociétés Groupe Bourbon et Nouvelles Frontières, la société Sdhm n’étant qu’une société écran constituée pour les besoins de la législation malgache, la société Tecnova architecture versait aux débats un projet de protocole d’accord du 30 juillet 1999 entre les sociétés Groupe Bourbon et Nouvelles Frontières prévoyant qu’elles étaient convenues de participer à la réalisation d’une unité hôtelière de standard trois étoiles à Madagascar, qu’elles avaient à cet effet créé différentes sociétés dont la Sdhm, et que l’ensemble des structures juridiques avait été constitué « à l’initiative et sous la responsabilité de la société Groupe Bourbon » (pièce n° 88) ; qu’en se bornant à relever que si la société Bourbon apparaissait sur trois « cartouches » en qualité de maître de l’ouvrage aux côtés de Nouvelles Frontières (pièces n° 76, 77 et 78), sur d’autres « cartouches » de juillet 1999, c’est la Sdhm qui avait cette qualité (pièces n° 74 et 75), pour décider que la société Tecnova architecture ne rapportait pas la preuve que la société Bourbon avait la qualité de maître de l’ouvrage, sans s’expliquer sur ce protocole d’accord et rechercher s’il ne démontrait pas que les sociétés Groupe Bourbon et Nouvelles Frontières étaient les véritables bénéficiaires du projet, qu’elles avaient réalisées par l’intermédiaire de plusieurs sociétés écran de droit malgache, dont la Sdhm, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1134 du code civil ;
5) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation, sans analyser, même de façon sommaire, les pièces versées aux débats par les parties ; qu’en l’espèce, la société Tecnova architecture faisait valoir que les sociétés Bourbon et Nouvelles Frontières s’étaient assurées la maîtrise du foncier à travers les sociétés Ylang Marine et Sir, par un montage juridique complexe destiné à satisfaire la législation malgache ; qu’elle versait aux débats une télécopie adressée par la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar à la société Groupe Bourbon indiquant que « nous devrions constituer le plus rapidement le mécanisme qui nous permettra de recevoir et de contrôler le titre foncier de 13 Ha en respectant la législation malgache », décrivant le montage destiné à satisfaire à l’exigence selon laquelle « c’est une société à capitaux malgaches qui doit détenir le foncier », montage destiné à permettre, à travers un pacte d’actionnaires, de « verrouiller de manière irrévocable la cession des actions » de la société détentrice du terrain (pièce n° 84) ; qu’elle versait encore aux débats un projet de protocole d’accord entre les sociétés Ylang Ylang Marine et Sir d’une part, et une entité « SB/NF » (Sucreries Bourbon/Nouvelles Frontières) d’autre part, adressé par la société Groupe Bourbon, prévoyant l’acquisition du terrain par la société de droit malgache Ylang Ylang Marine, l’apport du terrain par celle-ci à une société commerciale dont les parts seraient ensuite rétrocédées à l’entité SB/NF (pièce n° 83) ; qu’elle versait encore aux débats le reçu par cette société Ylang Ylang Marine d’une somme de 5 millions de francs de société Sucreries de Bourbon Madagascar pour le compte du groupe SB/NF (pièce n° 83 bis), et une télécopie de la société Sucreries de Bourbon Madagascar relative au règlement du prix du terrain (pièce n° 86) ; qu’en se bornant à affirmer, pour considérer que la Sdhm était le seul maître de l’ouvrage de l’opération, que celle-ci était seule à devoir tirer profit des ouvrages qui devaient être construits et qu’elle devait devenir propriétaire des terrains achetés dans le cadre d’un montage complexe, sans analyser les pièces versées aux débats par la société Tecnova architecture, démontrant que le montage mis en place par les sociétés Groupe Bourbon, les Sucreries de Bourbon Madagascar et Nouvelles Frontières prévoyait la rétrocession à leur profit du terrain détenu par la société Ylang Ylang Marine, par le biais d’une convention de portage et de rétrocession de parts, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
6) ALORS QUE les juges du fond ont l’obligation de ne pas dénaturer les éléments de la cause ; que le projet de protocole d’accord établi entre les sociétés Ylang Ylang Marine et Sir d’une part, et une entité « SB/NF » (Sucreries Bourbon/Nouvelles Frontières) d’autre part, adressé par la société Groupe Bourbon, prévoyait l’acquisition du terrain servant d’assiette au projet par la société de droit malgache Ylang Ylang Marine puis l’apport du terrain par celle-ci à une société commerciale dont les parts seraient ensuite rétrocédées à l’entité SB/NF (pièce n° 83) ; qu’en énonçant que la Sdhm devait devenir propriétaire des terrains achetés dans le cadre d’un montage complexe, quand le protocole d’accord désignait les sociétés Ylang Ylang Marine et Sircomme propriétaires du foncier, lequel devait être apporté à une société dont les parts devaient ensuite être rétrocédées à l’entité SB/NF, sans aucune mention de Sdhm, la cour d’appel a dénaturé ce document et violé l’article 1134 du code civil ;
7) ALORS QUE le mandat est un acte par lequel donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ; qu’en se bornant à affirmer que la société Groupe Bourbon avait agi pour le compte de la Sdhm et non en son nom personnel, sans relever aucun acte par lequel la Sdhm aurait donné pouvoir à la société Groupe Bourbon d’agir en son nom et pour son compte, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard de l’article 1984 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté la société Tecnova architecture, maître d’oeuvre, de ses demandes en paiement contre la société Bourbon Madagascar ;
AUX MOTIFS QUE S’agissant de la société Bourbon Madagascar : Attendu que la société Tecnova Architecture soutient que la société Bourbon Madagascar serait aussi le maître d’ouvrage ; Que la société Bourbon Madagascar verse des projets de contrat où elle est mentionnée comme maître de l’ouvrage délégué; qu’il était prévu qu’elle agisse aux côtés de la société Sovic afin de veiller à la bonne direction du projet pour le nom et pour le compte de la société SHDM ; Que c’est notamment pour cela qu’un projet de contrat de maîtrise d’ouvrage avait été rédigé pour régir les relations entre la société Bourbon Madagascar et Tecnova Architecture ; Que comme il l’a été mentionné, la société Tecnova a elle-même dressé des contrats relatifs à la maîtrise d’oeuvre de conception où elle indique la société Sdhm comme maître de l’ouvrage et la société Sovic comme maître de l’ouvrage délégué; Que la discussion sur les honoraires de l’architecte n’a pas été pas conduite par la Société de Développement Hôtelier de Madagascar (Sdhm), que le 22/1/99, c’est M. H. [H] de la Sucrerie de Bourbon Madagascar qui observe au sujet du contrat de maîtrise d’oeuvre établi par Tecnova architecture SA que le montant des honoraires doit être calculé sur une base de 4,1 % HT à l’exception des VRD 2 , 1% HT (et non 5,2 %), cette rémunération ne comprenant pas notamment la mission de maîtrise d’oeuvre d’exécution qui sera confiée par un contrat distinct à SBM, ce qui confirme que la société Bourbon Madagascar avait la qualité de maître d’oeuvre d’exécution chargé de diriger matériellement la tenue des travaux aux côtés de la société Technova Architecture ; Que dans un courrier de la société Tecnova Architecture en date du 1er décembre 2000, celle-ci affirme: « L’ensemble des documents ci-joint a été remis à la maîtrise d’ouvrage (représentée par Sovic & Sucrerie de Bourbon devenue Bourbon Madagascar », ce qui établit une fois encore que la société Tecnova Architecture ne se méprenait pas sur l’identité du maître de l’ouvrage ; Que la Société de Développement Hôtelier de Madagascar (Sdhm) était seule à devoir tirer profit des ouvrages qui devaient être construits, qu’elle devait par ailleurs devenir propriétaire des terrains achetés dans la cadre d’un montage complexe, Que Sucrerie de Bourbon devenue Bourbon Madagascar et Groupe Bourbon devenue la société Bourbon ont agi pour le compte de la société SHDM et non en leur nom personnel, que par conséquent, la société Tecnova Architecture sera aussi déboutée de ses demandes à rencontre de la société Bourbon Madagascar.
ET AUX MOTIFS QUE A l’encontre de la société Sdhm : Attendu qu’il résulte des éléments analysés précédemment que seule la société SHDM disposait de la qualité de maître de l’ouvrage ;
1) ALORS QUE le mandat est un acte par lequel donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ; qu’en l’espèce, la société Tecnova architecture versait aux débats de nombreuses télécopies qui lui avaient été adressées par la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar relatives à la définition de sa mission de maîtrise d’oeuvre et à son exécution (pièces n° 12, 15, 17, 30, 33), ne faisant aucune référence à Sdhm ; que sa télécopie du 21 septembre 1998 portant différentes remarques sur les travaux indiquait à plusieurs reprises : « à valider par NF ET SBM » (pièce n° 12) soit la société Nouvelles Frontières et la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar ; qu’elle versait encore aux débats la facture adressée par la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar à la société Nouvelles Frontières lui demandant paiement de sa quote-part de 50 % pour son « étude sur le développement hôtelier à Madagascar » (pièce n° 82) ; qu’en affirmant, pour débouter la société Tecnova architecture de ses demandes à l’encontre de la société Bourbon Madagascar, que celle-ci apparaissait comme maître d’oeuvre d’exécution sur les projets de contrats établis par la société Tecnova architecture sans rechercher si, comme le soutenait la société Tecnova architecture, preuves à l’appui, la société Bourbon Madagascar n’avait pas la qualité de maître d’ouvrage déléguée, non pas de Sdhm qui n’était qu’une société écran, mais de sa société-mère Groupe Bourbon et de la société Nouvelles Frontières, véritables maîtres d’ouvrage, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1984 du code civil ;
2) ALORS QUE le mandat est un acte par lequel donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ; qu’en se bornant à relever, pour débouter la société Tecnova architecture de ses demandes à l’encontre de la société Bourbon Madagascar, que cette dernière apparaissait comme maître d’oeuvre d’exécution sur les projets de contrats établis par la société Tecnova architecture, sans relever aucun acte par lequel la Sdhm aurait donné pouvoir à la société Bourbon Madagascar d’agir en son nom et pour son compte, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1984 du code civil ;
3) ALORS QUE le mandat est un acte par lequel donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ; qu’en déduisant du courrier de la société Tecnova Architecture du 1er décembre 2000, qui indiquait que la maîtrise d’ouvrage était « représentée par Sovic et Sucreries de Bourbon », qu’elle ne pouvait pas se méprendre sur l’identité du maître de l’ouvrage, la Sdhm, sans rechercher, comme elle y était invitée par la société Tecnova architecture, si la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar n’était pas le maître d’ouvrage délégué de la société Groupe Bourbon, dont elle était la filiale à 100 %, et non de la Sdhm qui n’était qu’une société écran, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1984 du code civil ;
4) ALORS QUE le mandat est un acte par lequel donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ; qu’en déduisant du courrier de la société Tecnova Architecture du 1er décembre 2000, qui indiquait que la maîtrise d’ouvrage était « représentée par Sovic et Sucreries de Bourbon », qu’elle ne pouvait pas se méprendre sur l’identité du maître de l’ouvrage, la Sdhm, sans expliquer en quoi cette lettre démontrait que la société Les Sucreries de Bourbon Madagascar était le mandataire de Sdhm, la cour d’appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l’article 1984 du code civil.
ECLI:FR:CCASS:2017:C300352