Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 12 mai 2010, 09-14.747, Publié au bulletin

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Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 12 mai 2010, 09-14.747, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l’article 1869, alinéa 2, du code civil, ensemble l’article 1844-9, alinéa 3, du même code ;

Attendu qu’à moins qu’il ne soit fait application de l’article 1844-9 (3e alinéa), l’associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d’accord amiable, conformément à l’article 1843-4 ; que les associés peuvent valablement décider, soit dans les statuts, soit par une décision ou un acte distinct, que certains biens seront attribués à certains associés ; qu’à défaut, tout bien apporté qui se retrouve en nature dans la masse partagée est attribué, sur sa demande, et à charge de soulte s’il y a lieu, à l’associé qui en avait fait l’apport ; que cette faculté s’exerce avant tout autre droit à une attribution préférentielle ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Amiens, 26 mars 2009), que les époux X… ont participé en 1971 à la constitution de la société civile immobilière Villeteint, à laquelle ils ont apporté en nature des terrains en contrepartie desquels ils ont reçu des parts sociales ; que les époux X…, invoquant de justes motifs de retrait, ont assigné la SCI et ses autres associés pour obtenir l’autorisation de se retirer de la société et la restitution en nature des biens apportés ;

Attendu que pour débouter les époux X…, autorisés à se retirer, de leur demande d’attribution en nature, l’arrêt retient que le retrait d’un seul associé n’entraîne pas dissolution de la société, qui subsiste, que son exercice implique une réduction du capital social par annulation des parts sociales de l’associé se retirant, opération assimilable à un rachat de droits sociaux et non constitutive d’un partage partiel anticipé et que les dispositions de l’article 1844-9 du code civil ne peuvent recevoir application que lorsque l’actif social a été établi après paiement des dettes et remboursement du capital social, de sorte qu’un seul associé retrayant ne peut prétendre qu’au remboursement de ses droits sociaux mais pas à la reprise de son apport en nature ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’associé qui se retire d’une société civile peut obtenir que lui soient attribués les biens qu’il a apportés lorsqu’ils se retrouvent en nature dans l’actif social, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il a confirmé le jugement ayant autorisé les époux X… à se retirer de la société Villeteint, l’arrêt rendu le 26 mars 2009, entre les parties, par la cour d’appel d’Amiens ; remet, en conséquence, pour le surplus, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens, autrement composée ;

Condamne, ensemble, la société civile immobilière Villeteint, M. Y…, M. Z… et Mme Z… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société civile immobilière Villeteint, de M. Y…, de M. Z… et de Mme Z… et les condamne, ensemble, à payer aux époux X… la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux conseils pour les époux X…,

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu’il avait attribué, à charge de soulte, aux époux X…, les immeubles affectés à l’exploitation du camping PARC NATUREL WEEKEND et, statuant à nouveau, d’avoir débouté les époux X… de leur demande d’attribution en nature des parcelles de terre affectées à l’exploitation du terrain de camping-caravaning et d’avoir dit que les époux X… auraient droit au remboursement de la valeur de leurs droits sociaux, qui sera fixée selon les modalités prévues par l’article 1843-4 du Code civil ;

Aux motifs que « aux termes de l’article 1869 du code civil, « sans préjudice des droits des tiers, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, après autorisation donnée par une décision unanime des autres associés. Ce retrait peut également être autorisé pour justes motifs par une décision de justice. A moins qu’il ne soit fait application de l’article 1844-9 (3ème alinéa), l’associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d’accord amiable, conformément à l’article 1843-4 » ; que selon l’article 1844-9 du dit code, « après paiement des dettes et remboursement du capital social, le partage de l’actif est effectué entre les associés dans les mêmes proportions que leur participation aux bénéfices, sauf clause ou convention contraire. Les règles concernant le partage des successions, y compris l’attribution préférentielle, s’appliquent aux partages entre associés. Toutefois, les associés peuvent valablement décider, soit dans les statuts, soit par une décision ou un acte distinct, que certains biens seront attribués à certains associés. A défaut, tout bien apporté qui se retrouve en nature dans la masse partagée est attribué, sur sa demande, et à charge de soulte s’il y a lieu, à l’associé qui en avait fait l’apport. Cette faculté s’exerce avant tout autre droit à une attribution préférentielle. Tous les associés, ou certains d’entre eux seulement, peuvent aussi demeurer dans l’indivision pour tout ou partie des biens sociaux. Leurs rapports sont alors régis, à la clôture de la liquidation, en ce qui concerne ces biens, par les dispositions relatives à l’indivision » ; que la SCI VILLETEINT, Mme Martine Z…, M. Pascal Z… et M. Gérard Y… ne remettent plus en cause devant la cour le droit de retrait des époux X…, de sorte qu’il convient de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions qui ont autorisé les époux X… à se retirer de la SCI VILLETEINT ; que le retrait d’un seul associé n’entraîne pas dissolution de la société, qui subsiste ; que l’exercice du droit de retrait implique une réduction du capital social par annulation des parts sociales de l’associé se retirant, opération assimilable à un rachat de droits sociaux et non constitutive d’un partage partiel anticipé ; que les dispositions de l’article 1844-9 du code civil ne peuvent recevoir application que lorsque l’actif social a été établi après paiement des dettes et remboursement du capital social ; que la liquidation de la société ne se confond pas avec le retrait d’associé ; qu’il s’ensuit qu’un seul associé retrayant ne peut prétendre qu’au remboursement de ses droits sociaux mais pas à la reprise de son apport en nature ; qu’il y a donc lieu d’infirmer le jugement en ses dispositions qui ont attribué, à charge de soulte, aux époux X… les immeubles affectés à l’exploitation du camping PARC NATUREL WEEKEND et, statuant à nouveau, de débouter les époux X… de leur demande à ce titre et de dire qu’ils ont seulement droit au remboursement de la valeur de leurs droits sociaux, qui sera fixée, comme le tribunal l’a indiqué, selon les modalités prévues par l’article 1843-4 du code civil » (arrêt attaqué, p. 4, alinéas 6 et suivants, et p. 5, alinéas 1 à 6) ;

Alors qu’en cas de retrait d’une société civile, tout bien apporté qui se retrouve en nature dans le capital de la société est attribuée, à sa demande, à l’associé retrayant qui en avait fait l’apport ; que l’exercice de cette faculté n’est pas subordonné à la liquidation de la société elle-même et au partage du boni de liquidation ; qu’au cas présent, en écartant la demande des époux X…, aux termes de laquelle ceux-ci demandaient l’attribution du bien qu’ils avaient apporté, au motif qu’un associé retrayant ne peut prétendre qu’au remboursement de ses droits sociaux mais pas à la reprise de son apport en nature, laquelle ne serait possible qu’en cas de liquidation de la société, et d’établissement de l’actif net social, la cour d’appel a violé les articles 1869 et 1844-9 du Code civil.


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