Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 mai 2018, 17-17.792, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 mai 2018, 17-17.792, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 9 novembre 2016), qu’un jugement a prononcé le divorce de M. Y… et de Mme X… ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt de limiter à une somme de 45 000 euros le montant de la prestation compensatoire mise à la charge de M. Y… ;

Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de dénaturation, de violation de l’article 271 du code civil et des articles 4 et 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, le pouvoir souverain des juges du fond qui, après avoir constaté que le divorce créait une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au préjudice de l’épouse, ont fixé comme ils l’ont fait, le montant de la prestation compensatoire ; qu’il ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Y… la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR prononcé, à l’égard de Monsieur Y… et Madame X…, un divorce aux torts partagés des époux ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l’arrêt attaqué, « Il résulte des dispositions de l’article 242 du code civil que le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et

Madame X… sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusif de son époux, invoquant l’adultère de ce dernier, l’interdiction qui lui a imposée d’accéder au domicile conjugal et l’abandon financier dans lequel il l’a laissée.

Pour sa part, Monsieur Y… réclame que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs de Madame X…, en faisant état de son abandon du domicile conjugal et de la liaison qu’elle entretenait avec un dénommé Jeff.

Il est tout d’abord certain que les relations entre les époux se sont fortement dégradées à partir du milieu de l’année 2011.

Il ressort de divers courriels, du témoignage d’un Monsieur A… daté du 02 février 2015 et de rapports d’enquêteurs privés que Monsieur Y… a entretenu une relation extra-conjugale avec une dame B… depuis le mois de novembre 2011, c’est-à-dire antérieurement à l’ordonnance de non-conciliation.

Mais de son côté, Madame X… n’est pas fondée à soutenir que la nature de la relation qu’elle entretenait avec le dénommé Jeff était amicale et surtout, compatible avec ses obligations de loyauté et de respect issues du mariage.

En effet, même à considérer qu’il n’y a pas eu avec cette personne un adultère consommé, la nature des propos échangés avec ce dernier atteste que l’appelante avait un comportement de recherches de rencontres avec un homme autre que son mari, parfois en passant des soirées en tête-à-tête avec lui avant de rentrer au domicile conjugal à 02 heures.

Un tel comportement est d’une part, sans rapport avec l’état anxio-dépressif que Madame X… invoque par ailleurs, et caractérise d’autre part, une attitude injurieuse vis-à-vis de son mari, peu compatible avec l’obligation de respect imposée par l’article 212 du code civil.

C’est donc à bon droit que la décision dont appel a constaté qu’il existe en l’espèce des faits imputables à chacun des époux, constituant une cause de divorce au sens de l’article 242 du code civil et qu’en conséquence, le divorce devait être prononcé aux torts partagés des époux » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « Selon les dispositions de l’article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune.

Chacun des époux sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusifs de l’autre. Monsieur Olivier Y… invoque l’abandon du domicile conjugal, l’adultère et un comportement injurieux. Madame Marylène X… fait valoir une attitude de délaissement et les infidélités de son époux.

Le délaissement de l’épouse par l’époux de même que l’absence de soutien matériel ne sont pas établis. Mesdames C… et D… ne rapportent en réalité sur ce point que les propos et le ressenti de Madame Marylène X…. En réalité, les éléments produits par cette dernière elle-même comme le témoignage de Madame D… font état des nombreux voyages du couple à travers le monde, des sorties, de la passion certes de Monsieur Olivier Y… pour la chasse mais dans le même temps d’une épouse qui avait ses propres occupations, aimant la mode, les vêtements, les chaussures, les bijoux, cadeaux souvent offerts par son époux. Les éléments produits de part et d’autre révèlent en réalité une dégradation dans la vie du couple à partir du milieu de l’année 2011, ce que ne fait d’ailleurs que constater Madame E….

Il ressort des courriels adressés par Monsieur Olivier Y… ainsi que du témoignage de Monsieur David A… comme des rapports d’enquête privée que l’époux entretient une relation adultère avec Madame Séverine B… depuis le mois de novembre 2011.

Si les échanges sur Facebook des 17 février, 27 février, 8 mars, 9 mars 2012 entre Madame Marylène X… et Madame Isabelle G… ne font pas la preuve d’un adultère consommé avec « Jeff », ils témoignent néanmoins de comportements équivoques de l’épouse qui n’ont peut être pas été jusqu’à la réalisation de relations sexuelles mais n’en sont pas moins injurieux pour l’autre conjoint. Les autres échanges sur le même réseau social et aux mêmes dates révèlent pour leur part les velléités financières de l’épouse dans un contexte de séparation. Si les certificats médicaux produits font mention d’un état anxio-dépressif de l’épouse, réactionnel à la situation conjugale et confirmé par ses proches, il n’est pas justifié que l’éloignement du domicile conjugal à la fin du mois de mai 2012 relèverait de ce seul état au demeurant résultant de l’oeuvre conjointe des époux et aucun élément ne démontre que l’épouse était désireuse en réalité de sauver son couple.

Il convient de constater qu’il existe en l’espèce des faits imputables à chacun des époux, et constituant une cause de divorce au sens de l’article 242 du code civil. En conséquence, le divorce est prononcé aux torts partagés des époux » ;

ALORS en premier lieu QUE les fautes de l’époux qui a pris l’initiative du divorce n’empêchent pas d’examiner sa demande ; qu’elles peuvent, cependant, enlever aux faits qu’il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce ; qu’en omettant de rechercher, comme l’y invitait pourtant Madame X…, si la relation qui lui est reprochée avec un certain « Jeff » n’était pas dépouillée de son caractère fautif du fait de l’adultère antérieur et prolongé de son époux, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 242 et 245 du Code civil ;

ALORS en deuxième lieu QUE, en tout état de cause, les juges du fond doivent rechercher si les faits invoqués au soutien d’une demande de divorce pour faute remplissent la double condition qu’ils constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et qu’ils rendent intolérable le maintien de la vie commune ; qu’en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, en quoi le fait que Madame X… ait pu avoir « un comportement de recherches de rencontres avec un homme autre que son mari, parfois en passant des soirées en tête-à-tête avec [Jeff] avant de rentrer au domicile conjugal à 02 heures » (arrêt, p. 8, § 6), sans qu’il y ait pourtant jamais eu de relations intimes entre eux, rendait intolérable le maintien de la vie commune entre les époux, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 242 du Code civil ;

ALORS en troisième lieu QUE, en tout état de cause, les juges du fond doivent rechercher si les faits invoqués au soutien d’une demande de divorce pour faute remplissent la double condition qu’ils constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et qu’ils sont effectivement à l’origine de la rupture du couple ; qu’en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, en quoi le fait que Madame X… ait pu avoir « un comportement de recherches de rencontres avec un homme autre que son mari, parfois en passant des soirées en tête-à-tête avec [Jeff]

avant de rentrer au domicile conjugal à 02 heures » (arrêt, p. 8, § 6), ce dont son époux était parfaitement au courant, sans qu’il ne s’en plaigne, puisque l’objectif de la démarche « n’était que de provoquer une réaction de jalousie chez son époux, par tout moyen, afin de tenter une ultime fois de le faire réagir et de sauver son couple » (conclusions d’appel de l’exposante, p. 21, § 7), était effectivement à l’origine de la rupture du couple, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 242 du Code civil ;

ALORS en quatrième lieu QUE le jugement doit être motivé ; que ne satisfait pas à cette exigence la cour d’appel qui statue par des motifs inintelligibles ; qu’en décidant qu’« il résulte des dispositions de l’article 242 du code civil que le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et » et « Madame X… sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusif de son époux, invoquant l’adultère de ce dernier, l’interdiction qui lui a imposée d’accéder au domicile conjugal et l’abandon financier dans lequel il l’a laissée » (arrêt, p. 7, dernier §, et p. 8, § 1er), la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR alloué à Madame X… une prestation compensatoire, sous la forme d’un capital, d’un montant de 45.000 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l’arrêt attaqué, « Il résulte des dispositions de l’article 270 du code civil que l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux.

Cette prestation compensatoire est fixée, aux termes de l’article 271 du même code, selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

Dans la détermination des besoins et des ressources, le juge prend en considération divers critères figurant au même texte, notamment la durée du mariage, l’âge et l’état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, leur patrimoine estimé ou prévisible, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles et leur situation respective en matière de pensions de retraite.

Enfin, dans le cadre de la fixation d’une prestation compensatoire, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant sur l’honneur l’exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie.

Les époux X… Y… n’ont pas eu d’enfant. Le mariage aura duré 11 ans. Madame X… est âgée de 44 ans et Monsieur Y… de 41 ans.

En première instance, les époux ne faisaient état d’aucun problème de santé susceptible d’avoir une quelconque influence sur la détermination de la prestation compensatoire. C’est toujours le cas en appel pour Madame X…. En revanche, Monsieur Y… affirme désormais, que la procédure de divorce et son licenciement l’ont plongé dans un état dépressif sévère, sans pour autant justifier que le premier de ces motifs a une incidence particulière sur son état.

Le jugement déféré a pertinemment relevé que l’acte de mariage mentionnait que Monsieur Y… était directeur financier et Madame X…, assureur. En première instance, il était directeur salarié de clinique, mais il a fait l’objet d’une procédure de licenciement pour faute lourde, suite à des difficultés financières rencontrées par la clinique qu’il dirigeait. L’intimé a entamé une procédure devant le conseil de prud’hommes qui n’est pas terminée. Il se trouve actuellement en arrêt de travail pour un état dépressif et il est placé en affection longue durée.

Malgré les nombreuses pièces mises aux débats par Monsieur Y…, son avis d’imposition 2015 et 2016 n’y figure pas. Depuis le mois de mars 2016, il perçoit des indemnités journalières, pour un montant de 40,23 € brut par jour, soit 1 200 € environ par mois. Il n’est pas justifié qu’il bénéficie d’un maintien de ses revenus de directeur de clinique, dès lors qu’il a été licencié en février 2016 et qu’il n’a donc plus le statut de salarié aux yeux de l’assurance complémentaire souscrite par l’employeur.

Selon l’avis d’impôt 2014 l’intimé a perçu au titre des revenus 2013 une rémunération de 105 000 € lorsqu’il était encore directeur de clinique. Son bulletin de salaire de décembre 2014 mentionne un revenu net imposable annuel de 107 266 €, soit un salaire mensuel de 8 938 €. Son emploi était à temps complet et il ne bénéficiait d’aucune autre rémunération.

Monsieur Y… supporte les dépenses habituelles de la vie quotidienne, outre les impôts et frais des immeubles dont il est propriétaire, notamment celui qui lui a été attribué, ayant constitué le domicile conjugal.

Les époux sont associés d’une SCI De l’Ayet dont Monsieur Y… détient la quasi-totalité des parts. Cette société est propriétaire de deux maisons, de ville ou de village. L’intimé ne conteste pas l’estimation proposée par Madame X… pour ces deux biens immobiliers, à savoir 450 000 €. Monsieur Y… rembourse des emprunts souscrits par la SCI De l’Ayet pour l’acquisition des deux maisons.

L’intimé possède en outre la nue-propriété de trois biens immobiliers, sa mère étant usufruitière : une maison individuelle à […] (Hérault) et un appartement à Montpellier, outre diverses parcelles de terre. Même si ce patrimoine ne lui procure aucun revenu, il sera, à terme, propriétaire de ces biens.

Monsieur Y… affirme vivre actuellement sur ses économies et son épargne, relevé par le premier juge à la date du 31 décembre 2013, soit un placement de 14 884 € sur plan épargne retraite complémentaire et diverses autres sommes, 500 € sur un livret A, 300 € sur un CEL, une épargne salariale d’un montant de 6 585 € et un PEA d’une somme égale.

Il fait aujourd’hui état de son endettement et de ses engagements de caution pour un montant mensuel de 4 617 €, outre ses charges courantes qu’il évalue à 2 478 €. Mais force est de constater que ce n’est pas avec ses seules indemnités journalières qu’il va pouvoir faire face longtemps à de telles charges. La Cour doit donc en conclure, même si l’intimé ne l’évoque pas dans ses écritures, que celui-ci compte fortement, compte tenu de ses qualifications, de son expérience professionnelle et de son âge, encore jeune, retrouver un poste dans le secteur d’activité qui était le sien, avec un salaire semblable à celui qu’il percevait avant son licenciement.

Pour autant, Madame X… n’est pas fondée à soutenir que Monsieur Y… « fait preuve d’une opacité sur l’étendue et la réelle consistance de ses ressources et de son patrimoine pour se soustraire à ses obligations envers son épouse ».

En effet, le premier juge, et la Cour à sa suite, sont en mesure d’apprécier la situation de fortune de l’intimé avec suffisamment de précision.

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’expertise sollicitée par l’appelante, étant au surplus rappelé qu’en aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer à la carence de la partie dans l’administration de la preuve.

Madame X…, quant à elle, exerce depuis plusieurs années une activité professionnelle d’assistante de direction au sein d’une société de prestations de services. Elle bénéficie d’un contrat de travail à durée déterminée et son salaire mensuel est de 1 500 € environ. Elle affirme que ses perspectives d’évolution de carrière sont très modestes et ses chances d’accroître sensiblement ses revenus, extrêmement modérées, sans verser le moindre document à l’appui de cette affirmation et alors qu’elle est titulaire d’un BTS actions commerciales et qu’elle n’a que 44 ans.

Elle est nue-propriétaire de l’habitation occupée par ses parents à […] qu’elle évalue à 105 000 €. Son véhicule a été financé par ses parents à hauteur de 10 000 € et le solde du prix, soit 12 000 € au moyen d’un prêt dont le remboursement est en cours. Elle a pu changer de véhicule en mai 2015.

L’appelante supporte également les charges quotidiennes de la vie courante, notamment un loyer de 560 €.

Il n’est pas contesté que les époux ont toujours travaillé et régulièrement cotisé, de sorte qu’ils bénéficieront chacun, d’une retraite à taux plein, même si elles ne seront pas de même niveau.

Au vu de ces différents éléments, c’est à juste titre que le jugement déféré a constaté que la rupture du mariage va créer une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de l’épouse.

En allouant à Madame X… une prestation compensatoire sous la forme d’un capital d’un montant de 45 000 € le tribunal a suffisamment pris en compte l’importance de cette disparité, au vu notamment de la durée limitée du mariage, de la situation respective des époux, encore loin de l’âge de la retraite et qui pourront travailler pendant plusieurs années encore compte tenu de leurs qualifications professionnelles, et du fait que le couple n’a pas eu d’enfant, de sorte que ni l’un, ni l’autre n’a dû faire des choix professionnels pendant la vie commune pour leur éducation.

Il convient à cet égard de rappeler que prestation compensatoire a pour objet de compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage va créer dans les conditions de vie respectives des parties et qu’elle n’a pas pour vocation de niveler les situations de fortune des ex-époux.

Il y a également lieu, en conséquence, de confirmer le jugement déféré sur ce point » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « L’article 270 du code civil énonce que l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives.

Selon l’avis d’imposition 2014 sur l’année 2013, Madame Marylène X… a perçu un revenu annuel (csg et crds réintégrées) de 15 477 euros soit mensuellement 1289,75 euros. Au titre de 2014, elle a déclaré 16 758 euros soit mensuellement 1396.50 euros. Elle fait état de charges de 2787.66 euros dont un loyer de 698,90 euros, certaines n’étant pas des charges fixes essentielles mais liées à son train de vie. S’agissant de l’impôt sur le revenu de 5244 euros soit mensuellement 437 euros, ce montant est essentiellement dû à la perception de la pension alimentaire au titre du devoir de secours.

L’épouse bénéficie de la nue-propriété de l’habitation occupée par ses parents et évaluée à la somme de 105 000 euros. Elle est propriétaire de son véhicule Citroën DS 3 d’une valeur actuelle de 14 000 euros dont l’achat a été financé par un apport de ses parents de 10 000 euros et d’un prêt de 12 000 euros non encore soldé. Elle dispose d’une somme de 825,74 euros sur son livret A et 5503,26 euros sur un plan épargne entreprise.

Selon l’avis d’impôt 2014 sur l’année 2013, Monsieur Olivier Y… a perçu un revenu annuel de 104 737 euros soit mensuellement 8728.08 euros. Son bulletin de salaire de décembre 2014 fait mention d’un net imposable de 107 266 euros soit mensuellement 8938,83 euros. Il n’est pas démontré qu’il bénéficierait d’autres rémunérations. Il fait état de charges fixes de 6065 euros dont un loyer SCI DE L’AYET de 2037 euros (avance en compte courant), versements de crédit de 1113 euros et 1467 euros, étant relevé que ces différentes charges ont été librement réévaluées en 2014 ou 2015. En outre, l’apport en compte courant d’associé est une créance de l’associé sur la société.

Monsieur Olivier Y… dispose au 31 décembre 2013 d’un placement de 14 884 euros sur un plan épargne retraite complémentaire et de diverses sommes, 500 euros sur un livret A, 300 euros sur un CEL, une épargne salariale de 6585 euros et un PEA de 6585 euros. Il possède deux véhicules d’une valeur de 20 000 euros et 10 000 euros selon sa déclaration sur l’honneur. Son patrimoine immobilier propre est composé d’une maison individuelle à […], Monsieur Olivier Y… faisant état d’une estimation de 170 000 euros et Madame Marylène X… de 350 000 euros ainsi que d’un appartement […] à […] estimé à 245 00.0 euros. Il existe également plusieurs biens immobiliers dont il possède la nue-propriété, sa mère étant usufruitière (Maison individuelle […], appartement […] à Montpellier , diverses parcelles de terre), le tout serait estimé à 260 000 euros. Il fait état d’un passif (crédits) de 603 283 euros et de dettes (cautions solidaires) de 562 035 euros.

Enfin les époux sont associés d’une SCI DE L’AYET dont il n’est fourni que peu d’éléments, dont l’un est illisible, l’épouse indiquant que Monsieur Olivier Y… détient la quasi-totalité des parts ; société qui serait propriétaire de plusieurs biens immobiliers qu’elle estime à la somme de 450 000 euros. L’époux restant ici évasif.

Il résulte de l’ensemble des éléments précédemment examinés, que la preuve d’une disparité dans les conditions de vie respectives des époux est rapportée.

Selon l’article 271 dudit code, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. A cet effet, le juge prend en considération, notamment : la durée du mariage ; l’âge et l’état de santé des époux ; leur qualification et leur situation professionnelles ; les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ; le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ; leurs droits existants et prévisibles ; leur situation respective en matière de pensions de retraite.

La durée de la vie commune est de 7 ans. Les époux sont âgés respectivement de 39 ans pour l’épouse et de 42 ans pour l’époux. Il n’est pas justifié de problèmes santé susceptibles d’influer sur le calcul de la prestation compensatoire. Aucun enfant n’est issu du mariage.

L’acte de mariage mentionne que Monsieur Olivier Y… était directeur financier et Madame Marylène X… assureur. L’époux est actuellement directeur de Clinique. L’épouse est aujourd’hui assistante de direction au sein de la société RECREACTIV. Elle ne justifie pas avoir délaissé sa carrière au profit de celle de l’époux et le moment de la rupture conventionnelle de son contrat de travail auprès de la Mutuelle des Motards pose question au regard des propos tenus par elle sur Facebook. Aucun des deux époux ne justifie de sa situation au regard de sa retraite mais il apparait qu’ils ont toujours cotisé et bénéficieront d’une retraite à taux plein. Le patrimoine des époux mariés sous le régime de la séparation a été précédemment examiné.

Compte tenu de ces éléments, il convient de compenser la disparité créée par la rupture du lien matrimonial dans les conditions de vie respectives des époux par le versement par Monsieur Olivier Y… à Madame Marylène X… d’une prestation sous la forme d’un capital mais limité à un montant de 45 000 euros » ;

ALORS en premier lieu QUE, si la prestation compensatoire n’est due qu’à compter de la date à laquelle la décision prononçant le divorce est devenue irrévocable, son montant en est fixé au moment du prononcé du divorce, c’est-à-dire lorsque le principe même du divorce est définitivement acquis ; qu’en l’espèce, ledit principe du divorce a été acquis dès le jugement de premier instance, le 8 juin 2015, aucune des parties, lors de l’appel, n’ayant remis en cause le prononcé d’un divorce entre les époux, seules ses modalités étant débattues ; qu’en prenant pourtant en considération, pour fixer le montant de la prestation compensatoire, le licenciement de Monsieur Y…, survenu en mars 2016 (cf. arrêt, p. 9, pénultième et dernier §), soit postérieurement au jugement du 8 juin 2015, la cour d’appel a violé l’article 271 du Code civil ;

ALORS en deuxième lieu QUE, en tout état de cause, si le juge est souverain quant à l’interprétation des documents de la cause, il ne lui est cependant pas permis de les dénaturer, lorsque ceux-ci sont clairs et précis et ne nécessitent aucune interprétation ; qu’en l’espèce, Monsieur Y… reconnaissait, dans un courrier adressé à son employeur le 9 mars 2016, que, « durant [sa] période d’arrêt de travail, [il] souhaite bénéficier des indemnités journalières de sécurité sociale ainsi que des indemnités complémentaires versées par l’organisme assureur » et qu’il « [bénéficierait] effectivement du maintien des garanties de prévoyance et de complémentaire santé dès la fin de [sa] période d’incapacité temporaire de travail et ce pendant une durée de 12 mois » (lettre du 9 mars 2016 de Monsieur Y…, cf. prod.), ce dont il résulte qu’il avouait, sans la moindre ambiguïté, qu’il allait pouvoir maintenir son salaire tant durant son arrêt maladie qu’après son licenciement ; qu’en décidant toutefois que, « depuis le mois de mars 2016, [Monsieur Y…] perçoit des indemnités journalières, pour un montant de 40,23 € brut par jour, soit 1 200 € environ par mois » et qu’« il n’est pas justifié qu’il bénéficie d’un maintien de ses revenus de directeur de clinique, dès lors qu’il a été licencié en février 2016 et qu’il n’a donc plus le statut de salarié aux yeux de l’assurance complémentaire souscrite par l’employeur » (arrêt, p. 9, dernier §), la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis du courrier adressé par Monsieur Y… à son employeur en date du 9 mars 2016 ;

ALORS en troisième lieu QUE le jugement doit être motivé ; que le juge doit donc s’expliquer sur les éléments, et leur valeur, qu’il prend en considération pour fixer le montant de la prestation compensatoire ; qu’en décidant uniquement, à propos de Monsieur Y…, que « son patrimoine immobilier propre est composé d’une maison individuelle à […], Monsieur Olivier Y… faisant état d’une estimation de 170 000 euros et Madame Marylène X… de 350 000 euros » (jugement entrepris, p. 7, § 1er), sans préciser laquelle de ces deux valeurs elle va finalement prendre en considération pour le calcul de la prestation compensatoire, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en quatrième lieu QUE le jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu’en l’espèce, Madame X… faisait valoir que Monsieur Y… disposait de trois véhicules, un 4X4 Mitsubishi, un coupé Seat Léon et une Peugeot 107, pour un montant total de 74.000 euros (cf. conclusions d’appel de l’exposante, p. 32, § 8 à 15) ; qu’en se contentant d’affirmer, par motifs adoptés, qu’« il possède deux véhicules d’une valeur de 20 000 euros et 10 000 euros selon sa déclaration sur l’honneur » (jugement entrepris, p. 7, § 1er), sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en cinquième lieu QUE le jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu’en l’espèce, Madame X… faisait valoir, au soutien de ses prétentions, que Monsieur Y… « est actionnaire de deux GIE de radiothérapie et robotique dans lesquels il occupe un poste d’administrateur et de contrôleur des comptes (pièces n° 136, 174, 175) » (conclusions d’appel de l’exposante, p. 31, dernier §) ; qu’en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en sixième lieu QUE le jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu’en l’espèce, Madame X… faisait valoir, au soutien de ses prétentions, que Monsieur Y… « détient la quasi-intégralité des parts sociales de la « SCI DE L’AYET » (soit 99 parts sur 100) dont le siège social est situé […] propriétaire (pièce n° 136) : D’une maison de ville située à […] (34) rue de la tuilière et composée de trois appartements (T1, T2 et T3) mis à la location (bien propre acquis en viager) ; D’une maison de ville (T3) située à […] (34) rue de l'[…], mise à la location. Ces biens générant des revenus locatifs » (conclusions d’appel de l’exposante, p. 31, § 4 à 7) ; qu’en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en septième lieu QUE l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense ; qu’en retenant qu’« il n’est pas contesté que les époux ont toujours travaillé et régulièrement cotisé, de sorte qu’ils bénéficieront chacun, d’une retraite à taux plein, même si elles ne seront pas de même niveau » (arrêt, p. 11, antépénultième §), tandis que Madame X… faisait pourtant valoir qu’il « n’est pas certain [qu’elle] puisse bénéficier, in fine, d’une retraite à taux plein » et qu’« en tout état de cause, elle n’est hélas pas à même, en l’état, de connaître ses droits » (cf. conclusions d’appel de l’exposante, p. 30, § 2 à 5), la cour d’appel a méconnu les termes du litiges, violant l’article 4 du Code de procédure civile ;

ECLI:FR:CCASS:2018:C100486


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