Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 13 mars 2019, 18-13.732, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 13 mars 2019, 18-13.732, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Donne acte à la société CBTG du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société Actiim ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Pau, 28 novembre 2017), que, suivant acte reçu les 12 et 17 novembre 2003 par M. T… (le notaire), la société Saint Lary village a vendu à la société CBTG deux lots à usage d’appartements dans un immeuble en copropriété à usage de résidence de tourisme ; que des travaux d’étanchéité ont été réalisés en 2009 ; que la société CBTG a assigné la société Actiim (le syndic) et le notaire en responsabilité et indemnisation de la perte de chance de faire prendre en charge ces travaux par une assurance dommages-ouvrage ;

Attendu que la société CBTG fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes à l’encontre du notaire, alors, selon le moyen, que le notaire qui manque à son obligation de conseil prive le créancier de cette obligation d’une chance de contracter à des conditions différentes ou de ne pas contracter ; qu’en déboutant la société CBTG de ses demandes à l’encontre du notaire, au motif que l’absence d’assurance dommages-ouvrage était impossible à régulariser au jour où le notaire avait reçu l’acte de vente, de sorte que son défaut de conseil n’avait aucun lien de causalité avec le préjudice allégué, alors qu’il ressortait de ses propres constatations que le manquement du notaire à son devoir de conseil n’avait pas permis à la société CBTG de connaître les risques qu’elle prenait lors de l’achat, en sorte qu’elle avait été privée d’une chance de ne pas contracter ou à des conditions différentes, perte de chance qui devait être indemnisée, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Mais attendu qu’il ne résulte ni de l’arrêt ni des pièces de la procédure que la société CBTG ait soutenu devant la cour d’appel que la faute du notaire lui avait causé une perte de chance de ne pas contracter ou à des conditions différentes ; que le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société CBTG aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. T… la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société CBTG.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société CBTG de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de Me T… ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur les demandes formées à l’encontre du notaire ; que sa responsabilité est recherchée sur le fondement de l’article 1382 du code civil ; que le premier juge a jugé : – que l’acte de vente des 17 et 12 novembre 2003, par la Sarl Immobilière Saint-Lary à la Sarl CBTG, fait apparaître que l’immeuble dans lequel se situent les 2 lots vendus a été construit avant 1957 et contient une clause selon laquelle les biens sont délivrés dans l’état où ils seront au jour fixé pour l’entrée en jouissance, – qu’en raison de l’ancienneté de l’immeuble, et en application des dispositions de l’article L.243-2 alinéa 2 du code des assurances, il n’y avait pas lieu de faire mention dans le corps de l’acte ou en annexe, de l’existence ou de l’absence d’assurance, – que le notaire, n’est tenu ni de visiter les lieux, ni de rechercher si le vendeur avait réalisé des travaux pouvant relever de la garantie décennale, – que la mention d’une régularisation au titre de la taxe sur la valeur ajoutée n’avait qu’un intérêt fiscal, sans effet sur la qualification juridique des travaux et la mise en oeuvre de la garantie décennale ; qu’il résulte de la notice de présentation de la demande de permis de construire déposée par M. R…, architecte, que la restructuration du bâtiment afin de le transformer en résidence de tourisme se composant de 44 logement, y compris celui de gardien, tendait à : – rénover 4 logements existants et à en transformer 4 afin de répondre aux normes handicapés – que le volume du bâtiment n’était pas modifié sauf par l’adjonction d’un porche d’entrée accompagné d’une rampe d’accès handicapés et d’un ascenseur, – pour certaines toitures (pente à 25%) dont les couvertures étaient traitées en shingle, l’architecte proposait de les reprendre en bas acier, – la rénovation de l’aspect extérieur par le changement des menuiseries aluminium des terrasses remplacées par des menuiseries en bois, – la modification de l’intérieur des loggias qui devaient être tapissées de vois, – l’habillage du pignon Sud en pierre locale, l’habillage en ardoises des jardinières des loggias côté jardin ; qu’en outre, une piscine était implantée et la clôture était modifiée ; que toutes les parties communes ont été rénovées et réaménagées ; que la notice de sécurité concernant la restructuration partielle du bâtiment visée par la mairie de Saint-Lary Soulan le 31 octobre 2011 précise que l’objet des travaux consiste à restructurer quelques locaux notamment au sous-sol, à réaménager l’entrée au rez-de-chaussée, installer un ascenseur desservant le rez-de-chaussée et les niveaux en élévation, construire un escalier extérieur pour desservir le solarium aménagé sur la terrasse au-dessus des locaux en rez-de-chaussée ; qu’il est précisé, s’agissant de la couverture : dispositions existantes inchangées ; qu’il résulte de la lecture de l’acte notarié : – qu’un certificat d’urbanisme demandé le 4 avril 2002 a été délivré par la mairie de Saint-Lary Soulan le 3 mai 2002 et que le vendeur, la Sarl immobilière Saint-Lary Village avait expressément déclaré avoir effectué des travaux dans l’immeuble vendu ayant donné lieu à une régularisation de TVA, – du rapport de diagnostic technique sur l’état apparent du clos et du couvert de la résidence de tourisme, en date du 3 décembre 2002 de M. K…, ingénieur-conseil, annexé à l’acte authentique, que la plupart des structures sont en excellent état, mais que, concernant le premier étage, partie centrale de la façade Ouest, et à l’extrémité Nord-Ouest, il est expressément mentionné que le cloquage sur la résine d’étanchéité doit être surveillé, de même que l’évacuation unique de certains balcons ; que M. K… a fait la même remarque, pour le 2ème et le 3ème étage (duplex) partie centrale façade Ouest ; qu’il résulte de l’ensemble de ces documents, que le notaire avait connaissance de la réalisation de travaux de transformation effectués par le vendeur avant l’expiration du délai de 10 ans à compter de la réception des travaux, puisque la Sarl immobilière avait elle-même acquis ce bien le 15 juin 2001 ; qu’il résulte des textes et de la jurisprudence applicable : – qu’en application des dispositions du code des assurances article 243-2 alinéa 3, mention doit être faite dans le corps de l’acte ou en annexe, de l’existence ou de l’absence d’assurance, – que sont concernés par les dispositions de l’article L.243-2 alinéa 3 du code des assurances, tant l’assurance dommages ouvrage que l’assurance de responsabilité, – que la vente d’immeubles ayant fait l’objet de travaux depuis moins de 10 ans peut également relever de ces dispositions, dès lors que les ouvrages réalisés à l’aide de travaux de construction peuvent engager la responsabilisé de leur auteur ; qu’en l’espèce, en ayant connaissance de travaux de transformation réalisés par le vendeur (dont il est établi qu’ils ont concerné plusieurs lots, dont 4 ont été transformés, mais également la structure du bâtiment par l’adjonction d’un porche d’entrée, outre le changement de toutes les menuiseries, la reprise de certaines pentes de la toiture) et par le rapport de diagnostic technique, des problèmes des résines d’étanchéité, il appartenait à Me T…, rédacteur de l’acte de vente des 12 et 17 novembre 2003, de s’interroger sur la nature des travaux, afin de déterminer si le propriétaire vendeur devait ou non avoir souscrit les assurances construction obligatoires et, dans l’affirmative, porter la mention de l’absence ou de l’existence de ces assurances, sans pouvoir s’en tenir aux dires du vendeur aux termes desquels il s’agissait de menus travaux ; qu’en n’effectuant aucune vérification du chef des travaux, le notaire n’a pas satisfait à son devoir de conseil puisqu’il n’a pas permis à la Sarl CBTG de connaître les risques qu’elle prenait lors de cet achat, ce qui caractérise une faute engageant sa responsabilité ; sur le préjudice et sur le lien de causalité ; que suivant courrier du 19 décembre 2013, la Sarl CBTG s’adressant à Me H… L… Y… ne contestait pas être redevable d’une somme de 7 822,52 € au titre de charges de copropriété + travaux d’étanchéité et PECS et proposait d’apurer cette somme suivant un échéancier de 6 mensualités de 2 303,77 € ; qu’un premier chèque de 1 303,75 € était joint à ce courrier ; que la Sarl CBTG justifie avoir versé à l’ordre du syndic Actiim 4 chèques de 1 303,75 € entre le 30 mai 2014 et le 5 septembre 2014 pour régulariser son compte ; que les travaux d’étanchéité urgents se sont élevés à la somme de 5 994,70 € TTC ; que les travaux définitifs de réfection de la toiture ont été validés par une assemblée générale du 21 janvier 2011, pour un montant de 103 488,19 € TTC outre 10 000 € TTC de maîtrise d’oeuvre ; que la quote-part à la charge de la société CBTG s’est élevée à la somme de 5 793 € ; que la Sarl CBTG fait valoir qu’elle a perdu une chance de faire jouer la garantie dommages ouvrage pour ces travaux réparatoires or il est établi : 1 – s’agissant de la réfection des toitures qu’hormis certaines d’entre elles qui présentaient une pente à 25 %, qui étaient traitées en shingle, et qui ont été reprises en bac acier, aucun travaux n’étaient prévus lors des travaux de réhabilitation concernant les toitures, les reprises en bas acier ne posent pas de difficultés, 2 – que s’agissant des travaux d’étanchéité, la Sarl CBTG avait connaissance par le rapport de M. K… annexé à l’acte de vente, des problèmes de cloquage de la résine d’étanchéité et de la nécessite de surveiller les évacuations des balcons, 3 – qu’aucune assurance n’a été souscrite à l’occasion des travaux de réhabilitation effectués en 2001 et 2002, de sorte qu’aucune garantie ne pouvait être mise en oeuvre ; qu’ainsi, la cause du préjudice résultant du défaut d’assurance qui aurait permis de prendre en compte les travaux d’étanchéité, était réalisée bien avant l’intervention du notaire puisqu’inhérente à cette inexistence ; que cette absence d’assurance dommages ouvrage était impossible à régulariser ultérieurement, de sorte que la faute commise par le notaire qui aurait dû s’informer sur la nature des travaux réalisés de manière à informer l’acquéreur de l’existence ou de l’absence d’assurance, n’a aucun lien de causalité avec la perte de chance alléguée par la Sarl CBTG ; qu’en conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté la Sarl CBTG de ses demandes à l’encontre de Me T…, les conditions de l’engagement de sa responsabilité n’étant pas remplies à défaut de lien de causalité » (arrêt pages 7 à 9) ;

ALORS QUE le notaire qui manque à son obligation de conseil prive le créancier de cette obligation d’une chance de contracter à des conditions différentes ou de ne pas contracter ; qu’en déboutant la société CBTG de ses demandes à l’encontre de M. T…, pour cela que l’absence d’assurance dommages ouvrage était impossible à régulariser au jour où le notaire avait reçu l’acte de vente, en sorte que son défaut son défaut de conseil n’avait aucun lien de causalité avec le préjudice allégué, quand il ressortait de ses propres constatations que le manquement du notaire à son devoir de conseil n’avait pas permis à la société CBTG de connaître les risques qu’elle prenait lors de l’achat, en sorte qu’elle avait été privée d’une chance de ne pas contracter ou à des conditions différentes, perte de chance qui devait être indemnisée, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Le greffier de chambre

ECLI:FR:CCASS:2019:C100247


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