Cour de Cassation, Chambre sociale, du 18 octobre 1989, 86-43.168, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre sociale, du 18 octobre 1989, 86-43.168, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme SOCOVOI, dont le siège social est à la ZIC n° 2, Le Port (Réunion), représentée par son président-directeur général en exercice domicilié audit siège,

en cassation d’un arrêt rendu le 19 mars 1986 par la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), au profit :

1°/ de Madame Monique Y…, ayant demeurée Cambave Ex RN 1 à Saint-Paul (Réunion),

2°/ de Monsieur Pierre Y…, ayant demeuré Cambave Ex RN 1 à Saint-Paul (Réunion),

tous deux actuellement sans domicile connu,

défendeurs à la cassation.

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 12 juillet 1989, où étaient présents : M. Goudet, conseiller le plus ancien faisant fonction de président ; M. Laurent-Atthalin, conseiller référendaire rapporteur ; MM. Guermann, Valdès, conseillers ; M. Blaser, conseiller référendaire ; M. Franck, avocat général ; Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Laurent-Atthalin, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société anonyme Socovoi, de la SCP Waquet et Farge, avocat des époux Y…, les conclusions de M. Franck, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 19 mars 1986) que M. et Mme Y… ont été engagés en 1972 par la société Réunionnaise de carosserie (SORECA) respectivement en qualité de directeur-technique et de secrétaire de direction, qu’à la fin de l’année 1982 en raison de difficultés économiques, la Soreca cessa ses activités et licencia l’ensemble de son personnel, que concommitemment sous l’impulsion des pouvoirs publics une nouvelle société, la société Socovoi, animée par de nouveaux actionnaires et une nouvelle direction générale fut créee et M. et Mme Y…, ainsi que les membres du personnel de la Soreca qui l’avaient souhaité, furent engagés par la Socovoi pour occuper les mêmes fonctions qu’au sein de la Soreca ; qu’à la fin du mois de mars 1983, M. et Mme Y… perçurent un salaire de 23 000 francs et 9800 francs et des bulletins de paie leur furent remis ; que, le 12 avril, le président-directeur-général de la Socovoi leur fit savoir qu’eu égard au travail qu’ils avaient fourni en mars, ils avaient perçus une indemnité forfaitaire correspondant à leurs salaires à la Soreca mais qu’il ne pouvait, pour sa part, tenir ces sommes pour acquises au sein de la Socovoi ; que, le 16 mai, il fut proposé à M. et Mme Y… des contrats de travail stipulant des rémunérations mensuelles inférieures aux montants précités et que les ayant refusés ils furent licenciés le 26 mai ;

Attendu que, la Socovoi fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à payer à M. et Mme Y… des sommes à titre de rappel de salaire et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d’une part, que le silence gardé par le destinataire d’une offre ne vaut pas acceptation ; qu’ainsi en se déterminant comme elle l’a fait, au motif

que la société Socovoi n’avait ni réagi, ni formulé de réserve, au moment où les prétendues prétentions de salaire des époux Y… avaient été portées à sa connaissance, la cour d’appel a violé l’article 1109 du Code civil ; alors, d’autre part, que l’existence d’une convention ne saurait être déduite de simples pourparlers ; qu’ainsi, la cour d’appel, qui s’est fondée sur de simples pourparlers préalables à l’embauche pour en déduire l’engagement de l’employeur à payer le montant des salaires revendiqués par les époux Y…, a violé les articles 1109, 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ; alors, en outre, qu’en s’abstenant de rechercher si, nonobstant les mentions portées sur les bulletins de salaire de mars 1983 qui n’avaient valeur que de simples présomptions, la société Socovoi ne rapportait pas la preuve, par les déclarations devant le conseil de prud’hommes de M. X…, directeur-départemental du travail et de l’emploi, que les sommes versées à la fin mars 1983 aux époux Y… l’avaient été à titre provisoire et dans l’attente de la détermination contractuelle ultérieure du montant définitif de leur rémunération, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 143-3 du Code du travail ; alors, encore que, la modification unilatérale par l’employeur d’un élément essentiel du contrat de travail ne suffit pas à conférer au licenciement consécutif un caractère illégitime ou abusif ; qu’il appartient aux juges de rechercher si cette modification n’était pas justifiée au regard des intérêts de l’entreprise ; qu’ainsi, à supposer qu’il y ait eu en l’espèce modification de la rémunération initialement convenue, la cour d’appel aurait dû rechercher si le salaire proposé n’était pas justifié par la situation de l’entreprise ; qu’à défaut d’une telle recherche, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 122-4 et suivants du Code du travail ; alors, en fin que, ne commet aucun détournement ou abus de pouvoir justifiant une condamnation à des dommages-intérêts l’employeur qui utilise au profit de l’entreprise les qualités et les compétences particulières pour lesquelles le salarié a été engagé ; qu’ainsi, en se déterminant comme elle l’a fait, au motif que la société Socovoi aurait exploité la position des époux Y… dans le seul but de permettre une rapide reprise de

l’activité de l’entreprise, la cour d’appel a violé les articles L. 121-1 et L. 122-4 et suivants du Code du travail ;

Mais attendu d’abord que recherchant la commune intention des parties en appréciant la valeur et la portée des éléments de preuve produits la cour d’appel a retenu qu’un accord était intervenu entre l’employeur et les époux Y… lors de leur engagement sur le montant de leur rémunération ;

Attendu, ensuite, que, la Socovoi n’ayant pas soutenu que la modification du salaire des époux Y… avaient été justifiée par des motifs réels et sérieux, la cour d’appel n’avait pas à procéder à la recherche prétendumment omise ; qu’ainsi et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la dernière branche du moyen, la cour d’appel a justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Et sur la demande présentée au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, les époux Y… sollicite sur le fondement de ce texte l’allocation d’une somme de 10 000 francs ;

Mais attendu que, leur demande a été présentée après l’expiration du délai prescrit à l’article 991 du nouveau Code de procédure civile ; qu’elle est donc irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

Dit irrecevable la demande présentée par les époux Y… sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société anonyme Socovoi, envers les époux Y…, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix huit octobre mil neuf cent quatre vingt neuf.


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