Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit octobre mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de MORDANT de MASSIAC, les observations de Me RYZIGER, de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, et de Me VUITTON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général GALAND ; Statuant sur les pourvois formés par :
X… Pierre,
Y… Jean, 2 2K
contre l’arrêt de la cour d’appel d’ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 13 avril 1989 qui les a condamnés, X… à 2 ans d’emprisonnement avec sursis, 100 000 francs d’amende, 5 ans de faillite personnelle pour abus de biens sociaux, banqueroute, Y… à 13 mois d’emprisonnement avec sursis, 10 000 francs d’amende pour complicité d’abus de biens sociaux et banqueroute d et a prononcé sur les demandes de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles ; Joignant les pourvois en raison de leur connexité ; Vu les mémoires produits en demande et en défense ; Sur les moyens produits par X… :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l’article 3 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, de l’article 197 de la même loi, des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable de banqueroute ; » aux motifs que, lors de la création de la société anonyme » Couvoir du Val-de-Loire « , l’entreprise personnelle de X… présentait, au bilan du 31 décembre 1981, une perte comptable de 4 238 000 francs, des capitaux propres et négatifs, et un fonds de roulement négatif de 5 794 290 francs ; qu’il a été établi qu’à cette date la perte en capital représentait 35 % du total de l’actif de l’entreprise, et que l’endettement de l’entreprise, entre le 1er octobre 1980 et le 31 décembre 1981, s’élevait à 6 701 372 francs ; que la situation comptable de la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire, arrêtée au 30 septembre 1982, faisait apparaître, pour les cinq premiers mois d’activité, une perte d’exploitation de 1 668 960 francs, et que l’exercice clos le 30 avril 1983 révélait un déficit de 3 366 684 francs ; qu’il est, dès lors, établi qu’au 30 avril 1983 la valeur ajoutée produite par la société qui n’était que de 1 210 417 francs pour l’exercice ne couvrait pas les frais financiers qui s’élevaient à 1 536 206 francs, que la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire se trouvait donc en état de cessation de paiement ; » alors que le délit de banqueroute suppose, lorsque l’action publique a été mise en mouvement avant l’entrée en vigueur de la loi du 25 janvier 1985, la constatation, à défaut de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, de l’existence d’un état de cessation de paiement ; que se trouvent en état de cessation des paiements, le commerçant, l’artisan ou la personne morale de droit privé qui sont dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec d son actif disponible ; qu’en l’espèce actuelle, en se contentant de relater les pertes d’exploitation et le déficit de la société Couvoir du Val-de-Loire et le fait que la valeur ajoutée produite par la société ne couvrait pas les frais financiers de l’exercice clos le 30 avril 1983, la cour d’appel, qui ne fait aucune analyse de l’actif disponible, ni du passif exigible, n’établit pas que la société se trouvait dans
l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible, et se trouvait donc en état de cessation des paiements » ; Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 196, 197 de la loi du 25 janvier 1985, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable de banqueroute ; » aux motifs que la situation comptable de la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire, arrêtée au 30 septembre 1982, faisait apparaître, pour les cinq premiers mois d’activité, une perte d’exploitation de 1 668 960 francs, et que l’exercice clos le 30 avril 1983 révélait un déficit de 3 366 684 francs ; qu’il est, dès lors, établi qu’au 30 avril 1983 la valeur ajoutée produite par la société qui n’était que de 1 210 417 francs pour l’exercice ne couvrait pas les frais financiers qui s’élevaient à 1 536 206 francs, que la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire se trouvait donc en état de cessation de paiement ; qu’en dépit de cette situation, la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire continua à vendre sa production, mais le faisait à perte ; en effet, du 1er mai 1983 au 2 novembre 1983, le chiffre d’affaires de la société concernant des produits dont le prix de revient, frais généraux exclus, s’élevait à 15 583 753 francs, n’était que de 14 191 563 francs ; » alors, d’une part, qu’au cas de cessation des paiements d’une personne morale de droit privé ayant une activité économique, ne peuvent être prévenues de banqueroute que les personnes qui, directement ou indirectement, en droit ou en fait, ont dirigé ou liquidé ladite personne ; qu’en l’espèce actuelle, la décision attaquée est muette sur le rôle qu’aurait joué X… pendant la période du 1er mai 1983 au 2 novembre 1983, pendant laquelle auraient été commis les faits poursuivis ; d » alors, d’autre part, que la vente à perte n’est constitutive du délit de banqueroute que lorsque le prévenu a, dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire (ou dans le cas où celle-ci n’est pas obligatoire, au cas de cessation des paiements, en vue de retarder la cessation des paiements) fait des achats en vue d’une revente au dessous du cours ; qu’en l’espèce actuelle, si la décision attaquée constate que la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire a vendu sa production en dessous du cours, il ne résulte nullement des constatations des juges du fond que le demandeur ait fait acheter par la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire des produits en vue de leur revente au dessous du cours, et en vue de retarder la cessation des paiements » ; Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 437 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d’abus de biens sociaux ;
» aux motifs qu’en dépit des conditions financières critiques dans lesquelles se faisait la constitution de la société anonyme Pierre X…, cette société devait, dès sa création, par un découvert bancaire, par un ordre de virement du 10 mai 1982 à effet du 30 avril 1982, de la caisse syndicale des crédits mutuels agricoles d’Anjou, régler à Pierre X…, en paiement des stocks, la somme de 5 000 000 francs, puis celle de 1 900 000 francs, par un virement du 22 octobre 1982 à effet au 30 septembre 1982 ; que le règlement du matériel s’effectuait par un virement sur le compte personnel X…, d’un montant de 1 200 000 francs du 25 juin 1982, avec valeur au 1er juin 1982 ; que les virements faits dans l’intérêt de X…, dont le compte bancaire personnel présentait un découvert d’environ 600 000 francs au 30 avril 1982, créaient pour la société un endettement excessif, compromettant, dès sa création, ses chances de succès ; » alors d’une part qu’il résulte des constatations de l’arrêt qu’à la date du 22 octobre 1982, le demandeur n’était plus président de la société ; que les juges du fond n’ont donc pu retenir comme un fait d’abus de biens sociaux, un paiement qui n’a pas été effectué sous la signature de X… ; d » alors d’autre part que le demandeur avait fait observer dans un chef péremptoire de ses conclusions auquel les juges du fond n’ont pas répondu, que les dispositions prises par lui l’avaient été sur l’instigation du cabinet GCE et de la caisse syndicale du crédit mutuel de l’Anjou, que l’inventaire physique et la valorisation SITOC avaient été fait en accord et en présence de Gonet, professionnel qualifié (cf. :
conclusions p. 4 et 5) et qu’il n’avait aucunement conscience de commettre des délits en procédant à une opération recommandée et calculée par des professionnels de l’organisation du droit et de la finance (cf. :
conclusions p. 4) ; qu’en ne s’expliquant pas sur ce chef péremptoire des conclusions du demandeur, et en n’expliquant pas, en particulier, pourquoi le demandeur avait conscience de ce qu’il agissait intentionnellement, la décision attaquée n’a pas justifié l’existence de l’élément moral de l’abus de biens » ; Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 437 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 ; » en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d’abus de biens sociaux ; » aux motifs qu’il aurait cédé son matériel de transport et son mobilier de bureau à la société à un prix qui a été estimé supérieur à sa valeur comptable ; » alors que l’abus de biens sociaux suppose que le prévenu ait fait des biens de la société un usage qu’il savait contraire à l’intérêt de celle-ci et à des fins personnelles ; que le demandeur avait fait valoir (conclusions p. 6) que c’est à tort que le prix de vente du matériel était critiqué par la
prévention (cependant que les experts n’y font aucune allusion) ; qu’en effet la notion de valeur comptable correspond à la valeur résiduelle après imputation des amortissements fiscaux dégressifs opérés par l’entreprise X…, que cette valeur fiscale ne correspond pas à la valeur économique ou d’usage du matériel cédé, et que cette opération correspondait à une transaction normale à des conditions normales ; qu’en retenant l’abus de biens sociaux, au motif que le demandeur aurait vendu son matériel de transport et son mobilier à la société à un prix qui a été estimé supérieur à sa valeur comptable, sans rechercher quelle était la valeur économique de celui-ci, la Cour n’a pas répondu à un chef péremptoire des conclusions du demandeur, et a, du reste, privé son d arrêt de base légale » ; Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 437 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 ; » en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d’abus de biens sociaux ; » aux motifs que le couvoir et le matériel d’incubation, propriété de X…, ont été loués à la société, moyennant un loyer annuel de 310 000 francs pour le couvoir et celui de 427 000 francs pour le matériel d’incubation ; que ces loyers ont été fixés le 30 avril 1982, d’après leur valeur » à neuf « , cependant qu’aux termes d’une expertise comptable, ils étaient anciens et déjà largement amortis ; » alors que le demandeur avait fait valoir qu’en ce qui concerne la valeur des biens loués, le problème était le même qu’en ce qui concerne le prix de vente du matériel ; que le calcul a été explicité par le groupe conseil entreprise, dans une lettre du 21 juillet 1982 ; qu’en ne s’expliquant pas sur ce chef péremptoire des conclusions et sur le calcul invoqué effectué par le groupe conseil entreprise, la cour d’appel a omis de répondre à un chef péremptoire des conclusions du demandeur et au moins omis de motiver suffisamment sa décision » ; Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 437 de la loi n° 66-6537 du 24 juillet 1966, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaquée a déclaré X… coupable d’abus de biens sociaux ; » aux motifs que lors de la création de la société, il avait conservé la partie de l’élevage pour laquelle il était prestataire de services ; que pour cette partie d’activité, X… s’est fait rémunérer par la société Couvoir du Val-de-Loire, sans fournir une quelconque justification, sur la base de 0, 13 francs l’oeuf, cependant que le prix couramment pratiqué n’était que de 0, 10 francs l’oeuf ; » alors d’une part que ne peuvent être déclarés coupables d’abus de biens sociaux que les dirigeants de fait ou de droit d’une société anonyme ; que, dès lors qu’il résulte des constatations de fait que l’infraction d reprochée au demandeur visait ses relations avec » la société Couvoir du Val-de-Loire » ;
qu’il résulte, par ailleurs des constatations de fait de l’arrêt que X… a été président de la société anonyme Pierre X…, mais n’était plus président du conseil, lorsque celle-ci a pris la dénomination de Couvoir du Val-de-Loire, la décision attaquée ne pouvait condamner le demandeur pour abus de biens sociaux, au profit de la société Couvoir du Val-de-Loire sans établir qu’il était dirigeant de fait ou de droit de cette société, une fois que l’ancienne société anonyme Pierre X… avait pris le nom de société Couvoir du Val-de-Loire ; que l’arrêt ne comporte aucune constatation sur ce point ; que l’un des éléments constitutifs du délit ne résulte donc pas de la décision attaquée ; » alors d’autre part que le demandeur avait fait valoir qu’en toute hypothèse, le prix de 0, 13 francs était justifié ; qu’en effet, la société était obligée de procéder au ramassage des oeufs des divers éleveurs, ce qui entraînait des frais qui pesaient sur le prix payé ; mais qu’en ce qui le concerne, compte tenu de la proximité de son élevage, il livrait directement sa production, ce qui justifiait le prix de 0, 13 francs ; qu’en ne s’expliquant pas sur point, la cour d’appel a omis de répondre à un chef péremptoire des conclusions du demandeur ; » alors de troisième part que la charge de la preuve repose sur la partie poursuivante ; qu’en reprochant au demandeur de ne pas fournir une quelconque justification quant au prix obtenu par lui pour ses oeufs, la décision attaquée a interverti la charge de la preuve » ; Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 437 de la loi du 24 juillet 1966, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaqué a déclaré le demandeur coupable d’abus de biens sociaux ; » aux motifs qu’il résulte du rapport du commissaire aux comptes, que la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire a honoré, entre le 1er mai 1982 et le 31 décembre 1982, un contrat de travaux à façons conclu à l’origine entre le prévenu et son fils, président-directeur général de la société Couvoir de la Ferté ; que cette opération a contraint la société à payer à la société anonyme Couvoir de la Ferté, la somme de 737 306 francs, cependant qu’elle n’était pas d elle-même en pleine capacité de production ; » alors d’une part que le délit d’abus de biens sociaux suppose que le prévenu ait agi à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société, ou entreprise, dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ; qu’en l’espèce actuelle, la décision attaquée n’établit pas que X… ait eu des intérêts quelconque dans la société Couvoir de la Ferté, dont son fils était président-directeur général ; que le délit d’abus de biens sociaux n’est donc pas caractérisé ; » alors d’autre part que la décision attaquée, qui est muette sur la date du contrat passé entre la société Couvoir du Val de Loire et la société Couvoir de la Ferté, et sur les conditions dans lesquelles ce
contrat aurait été passé ne permet pas à la Cour de s’assurer que le délit d’abus de biens sociaux est constitué, l’arrêt étant entaché d’un défaut de motifs sur ce point » ; Sur le huitième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 437 et 463 de la loi du 24 juillet 1966, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d’abus de biens sociaux ; » au motif qu’en dépit de graves difficultés rencontrées par la société anonyme Couvoir du Val-de-Loire, X… se faisait verser, sans y avoir été autorisé par le Crédit agricole, une rémunération mensuelle de 25 000 francs ; » alors d’une part que seuls les présidents-directeurs généraux administrateurs, et d’une façon générale les dirigeants de fait ou de droit d’une société peuvent être poursuivis pour abus de biens sociaux ; qu’en l’espèce actuelle, la Cour ne précise pas quelle aurait été la qualité de X…, dans la société anonyme Couvoir du Val de Loire, (ancienne société Pierre X…), dont il n’était pas le président, puisque d’après les constatations de l’arrêt, Gonet avait été nommé à ces fonctions dès le changement de dénomination sociale ; » alors d’autre part que la décision attaquée ne précise pas en quoi le fait que l’autorisation du Crédit agricole n’ait pas été obtenue, rendait d irrégulière la rémunération versée à X…, ni les raisons pour lesquelles cette autorisation aurait été nécessaire ; qu’ainsi la décision attaquée est entachée, pour le moins, d’un défaut de motifs certain » ; Sur le neuvième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 3 du Code de procédure pénale, de l’article L. 411-11 du Code du travail, les articles 485, 593 du Code de procédure pénale ; » en ce que la décision attaquée a déclaré la FDSEA recevable et bien fondée en son action civile et lui a alloué une somme de 10 000 francs à titre de dommages-intérêts ; » aux motifs que la FDSEA, qui est un syndicat d’agriculteurs, a pour mission la défense des intérêts généraux de la profession ; que, compte tenu du préjudice subi par des éleveurs de volailles, à la suite des agissements des prévenus, il y a lieu de les condamner à payer au syndicat requérant, la somme de 10 000 francs, en réparation de son préjudice moral ; » alors que si les syndicats peuvent obtenir réparation du préjudice direct ou indirect subi par la profession qu’il représente, les juges doivent caractériser l’existence de ce préjudice, qu’en l’espèce actuelle, le syndicat qui s’était constitué partie civile est » la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles » ; que la décision attaquée affirme que la FDSEA a pour mission la défense des intérêts généraux de la profession ; qu’elle constate, par ailleurs, que seuls les éleveurs de volailles auraient subi un préjudice ; qu’elle ne caractérise donc pas un préjudice permettant à la FDSEA dont elle ne constate pas qu’elle ait comporté un syndicat d’éleveurs de volailles qui a pour mission la défense des intérêts généraux des exploitants agricoles, d’intervenir comme partie civile ;
» alors, d’autre part, qu’est irrecevable en sa constitution de partie civile le syndicat qui dénonce des infractions intentionnelles, lesquelles, à les supposer établies, n’auraient atteint qu’individuellement les victimes et n’auraient pu causer de préjudice à l’ensemble de la profession ; que c’est le cas en l’espèce, les infractions reprochées à X… et contestées par lui n’ayant, si elles avaient été connues, nui qu’à la société X… (devenue la société Couvoir du Val-de-Loire) ou à la masse de ses créanciers ; d
» alors, enfin, qu’en toute hypothèse, toute décision doit être motivée, que l’insuffisance de motifs équivaut au défaut de motifs, qu’en ne précisant pas la nature du préjudice subi par les éleveurs de volailles du fait des délits reprochés au demandeur, la cour d’appel n’a pas suffisamment motivé sa décision » ; Sur le pourvoi de Gonet :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 59 et 60 du Code pénal, 437-3 et 4 de la loi du 24 juillet 1966, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ; » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Gonet coupable de complicité d’abus de biens sociaux commis par X… ; » aux motifs que Pierre X… s’est fait régler en paiement de ses stocks la somme de 5 millions de francs puis celle de 1 910 000 francs par un virement du 22 octobre 1982 à effet au 30 septembre 1982 ; » qu’il a ainsi abusé des biens et du crédit de la société dans son intérêt personnel, puisqu’il a immédiatement été payé par le recours à des emprunts bancaires de la société anonyme dans ses apports en nature évalués au prix fort ; » qu’il est établi que c’est Gonet lui-même qui a signé l’ordre de virement de 1 910 000 francs le 22 octobre 1982 avec comptabilisation anticipée au 30 septembre 1982 ; » qu’il s’est ainsi rendu coupable de complicité d’abus de biens sociaux commis par X… ; Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision prononcée et à permettre à la Cour de Cassation d’exercer son contrôle sur la légalité de celle-ci ; Attendu que les énonciations de l’arrêt telles que reproduites aux différents moyens caractérisent insuffisamment en leurs éléments constitutifs les infractions de banqueroute, d’abus de biens sociaux et de complicité de ces délits reprochés aux demandeurs et d’autre part ne s’expliquent pas sur l’existence d’un lien de causalité entre lesdites infractions et le préjudice allégué par la Fédération départementale des d syndicats des exploitants agricoles, partie civile ; que par ailleurs les juges du fond ont cru devoir prononcer, en ce qui concerne X… la sanction de la faillite qu’ils ne pouvaient prononcer compte tenu de la date des faits poursuivis ; Que dès lors la cassation est encourue tant sur l’action pénale que sur l’action civile ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE l’arrêt de la cour d’appel d’Angers, en date du 13 avril 1989, mais en ses seules dispositions pénales et civiles concernant X… et Gonet, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, et pour qu’il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel d’Angers, sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :
M. Tacchella conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. de Mordant de Massiac conseiller rapporteur, MM. Souppe, Gondre, Hébrard, Hecquard, Culié, Guerder conseillers de la chambre, M. Bayet conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;