Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre septembre deux mille deux, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI, avocat en la Cour ;
Vu la communication faite au procureur général ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
– La SOCIETE SIMVEST,
– La SOCIETE COGIT,
– X… Sylvain, parties civiles,
contre l’arrêt de la chambre d’accusation de la cour d’appel de PARIS, en date du 9 novembre 2000, qui, dans l’information suivie sur leur plainte contre personne non dénommée du chef, notamment, d’abus de biens sociaux, a déclaré irrecevable leur appel d’une ordonnance de non-lieu rendue par le juge d’instruction ;
Vu l’article 575, alinéa 2, 2 , du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 2, 85, 575-2 et 591 du Code de procédure pénale, L. 242-6 du Code des sociétés et des marchés financiers, défaut de motifs et manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt a déclaré les parties civiles partiellement irrecevables en leur appel ;
« aux motifs que sur l’abus de biens sociaux que la SCI La Porte de La Villette, filiale de la société Simvest et cessionnaire le 9 octobre 1989 des terrains sis à Aubervilliers, précédemment acquis pour la réalisation d’un programme immobilier, moyennant en paiement au vendeur de locaux commerciaux, cédait le 10 avril 1994 l’ensemble du programme pour la somme de 100 000 francs à la société Paris Ouest Immobilier qui avait cependant présenté une offre de 10 000 000 francs ; qu’à la date de la cession contestée, qui au demeurant s’était faite à des conditions beaucoup plus désavantageuse pour la société Paris Ouest Immobilier que celle prévue lors de la première offre, la société Simvest avait cédé depuis le 23 mars 1994 l’ensemble des parts sociales qu’elle détenait dans la SCI à hauteur de 66% et Sylvain X…, co-gérant, son compte courant pour 1 franc symbolique ; qu’aucune des parties civiles, Sylvain X…, en tant qu’actionnaire de la société GAN impliqué dans ladite cession, ne pouvant éventuellement justifier que d’un préjudice indirect, n’est par conséquent recevable à agir ; que l’appel est, dès lors, irrecevable ;
« alors que, jusqu’au mois de juillet 1994, date de la cession, Sylvain X… était associé de la SCI de La Porte de La Villette, le protocole du 23 mars 1994 n’ayant été exécuté qu’à cette date ; qu’en retenant qu’à la date de la cession contestée, soit le 10 avril 1994, la société Simvest avait cédé depuis le 23 mars l’ensemble des parts sociales qu’elle détenait et Sylvain X…, co-gérant, son compte courant pour le franc symbolique, cependant que la cession des parts de la société Simvest s’est réalisée au mois de juillet 1994, soit postérieurement à l’acte du 10 avril 1994, la cour d’appel qui décide que les demandeurs n’étaient pas recevables à agir en se fondant sur le seul protocole du 23 mars 1994 n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
« alors, d’autre part, qu’en retenant qu’aucune des parties civiles, Sylvain X… en tant qu’actionnaire du GAN, impliqué dans ladite cession, ne pouvant éventuellement justifier que d’un préjudice indirect, n’est recevable à agir sans préciser en quoi ce préjudice était indirect eu égard à l’importance de la perte subie par le GAN, maison mère de la banque Sofal, dans le cadre d’une cession faite à un prix dérisoire en présence d’une offre faite pour 10 millions de francs, la chambre d’accusation a violé lesdits textes » ;
Attendu que Sylvain X… et les sociétés Cogit et Simvest ont déposé plainte avec constitution de partie civile notamment pour abus de biens sociaux ; qu’elles exposaient que la cession, le 10 avril 1996, par la banque Sofal, filiale du GAN, à une société Paris Ouest Immobilier, du programme de construction du Parc de la Villette, avait été négociée à un prix très faible ne correspondant pas à sa valeur réelle ; qu’au terme de l’information, le juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu dont les parties civiles ont interjeté appel ;
Attendu que, pour déclarer les parties civiles irrecevables en leur appel, la chambre d’accusation énonce, d’une part, qu’à la date de la cession litigieuse, les parties civiles avaient, en exécution d’un protocole d’accord du 23 mars 1994, cédé à la banque Sofal l’ensemble des intérêts financiers qu’elles possédaient dans l’opération immobilière en cause, et, d’autre part, que Sylvain X…, en tant qu’actionnaire de la société GAN, impliquée dans ladite cession, ne pouvait éventuellement justifier que d’un préjudice indirect ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a justifié sa décision, dès lors, d’une part, qu’elle a, par des constatations souveraines, estimé qu’à la date de commission des abus de biens sociaux dénoncés, les parties civiles n’avaient plus d’intérêts financiers dans l’opération immobilière en cause, et, d’autre part, que la dévalorisation du capital social découlant d’un délit d’abus de biens sociaux constitue non pas un dommage propre à chaque actionnaire, mais un préjudice subi par la société elle-même ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;