Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 20 septembre 2000, 99-83.911, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 20 septembre 2000, 99-83.911, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt septembre deux mille, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LUCAS ;

Statuant sur les pourvois formés par :

– E… Etienne,

– B… Daniel,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 17 mai 1999, qui, pour présentation de comptes annuels infidèles, diffusion de fausses informations en matière boursière, faux et usage, les a condamnés chacun à 1 an d’emprisonnement avec sursis et 200 000 francs d’amende ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour Etienne E…, pris de la violation des articles 437, 463 et 464 de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de la procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Etienne E… coupable de présentation de comptes annuels inexacts pour dissimuler l’état d’une société par actions ;

 » alors que le délit de présentation de compte inexacts suppose que le prévenu a participé personnellement à l’établissement des comptes ; qu’en l’espèce, comme le faisait valoir Etienne E… dans ses conclusions d’appel, il n’entre pas dans les attributions du président du conseil de surveillance d’établir les comptes de la société ; qu’en se bornant à retenir, pour déclarer Etienne E…, président du conseil de surveillance de la société SDS, coupable d’avoir présenté un faux bilan en comptabilisant des ventes fictives pour 22 800 000 francs, en omettant de passer une provision pour dépréciation de stock pour un montant de 7 000 000 francs, et en comptabilisant par anticipation une somme de 18 000 000 francs au titre d’un contrat avec le ministère de la justice, qu’il était codirigeant de fait de cette société et supervisait les comptes, sans rechercher s’il avait lui-même passé ou fait passer les écritures comptables litigieuses, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision  » ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Etienne E…, pris de la violation des articles 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Etienne E… coupable de diffusion de fausses informations susceptibles d’agir sur le cours des titres ;

 » alors que, comme le faisait valoir Etienne E… dans ses conclusions d’appel, les comptes consolidés de la SDS au 30 juin 1990 ont été approuvés par les commissaires aux comptes ;

que c’est à cette date du 30 juin 1990 qu’il convenait d’apprécier leur sincérité ; qu’en retenant qu’Etienne E… ne pouvait ignorer, lors de la conférence de presse du 17 janvier 1991 sur les résultats de la société au 30 juin 1990, que les informations divulguées étaient inexactes, puisqu’à cette date SDS avait déjà émis les avoirs annulant les ventes fictives (6 et 31 octobre 1990), ainsi que les chèques en remboursement des lettres de change escomptées (octobre 1990), et en se fondant ainsi, pour apprécier la sincérité des informations présentées sur la situation de la société au 30 juin 1990, sur des éléments comptables postérieurs à cette date, la cour d’appel a violé les textes susvisés  » ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Etienne E…, pris de la violation des articles 150 du Code pénal (ancien), 441-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Etienne E… coupable de faux ;

 » alors que le fait, à le supposer établi, qu’Etienne E… était le codirigeant de fait de la société SDS n’implique nullement qu’il ait donné l’ordre de fabriquer des fausses factures ; qu’en se fondant, pour considérer qu’Etienne E… avait ordonné la fabrication de factures constatant des ventes fictives par SDS et était ainsi l’auteur intellectuel du faux, sur les seules déclarations des membres de cette société indiquant qu’il en était le dirigeant de fait, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision  » ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Etienne E…, pris de la violation des articles 151 du Code pénal (ancien), 441-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Etienne E… coupable d’usage de faux ;

 » alors qu’en statuant ainsi, sans expliquer en quoi avait consisté l’usage frauduleux des fausses factures par Etienne E…, la cour d’appel a privé sa décision de motifs  » ;

Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour Etienne E…, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Etienne E… coupable de présentation de comptes annuels inexacts, diffusion de fausses informations susceptibles d’agir sur le cours des titres et faux ;

 » alors qu’Etienne E… faisait valoir, dans ses écritures d’appel, qu’il ignorait les écritures comptables qui lui étaient imputées ; qu’en se bornant à retenir, pour le déclarer coupable de l’ensemble des infractions qui lui étaient reprochées, qu’il ne pouvait  » valablement prétendre avoir ignoré l’existence des ventes fictives à la société TMM « , qu’il ne  » pouvait que s’apercevoir  » de l’émission des factures d’avoirs, qu’il ne  » pouvait ignorer  » l’inexactitude des comptes, et enfin qu’il était  » indéniable  » qu’il était l’auteur intellectuel du faux, la cour d’appel, qui n’a relevé aucun élément de preuve dont résulterait la connaissance par Etienne E… des faits incriminés, dont la charge incombait au ministère public, a violé la présomption d’innocence  » ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour Daniel B…, pris de la violation des articles 437-2 de la loi du 24 juillet 1967, 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, 441 et suivants du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Daniel B… coupable des délits reprochés et l’a condamné de ce chef à la peine d’un an d’emprisonnement avec sursis et à 200 000 francs d’amende ;

 » aux motifs que selon les dispositions de l’article 437 de la loi du 24 juillet 1966 les présidents, administrateurs ou directeurs généraux d’une société anonyme sont responsables pour avoir sciemment publié ou présenté aux actionnaires, dans le but de dissimuler la véritable situation de la société, des comptes annuels inexacts et que l’article 464 de cette même loi précise que les peines peuvent être appliquées aux membres du directeur comme à ceux du conseil de surveillance ; qu’il résulte des déclarations concordantes des commissaires aux comptes de la société SDS, MM. F… et Z…, des affirmations de l’ancien Président du directoire, M. X… et des précisions de M. D…, expert-comptable de SDS, la comptabilité et le service financier étaient dirigés par les membres du conseil de surveillance, MM. E… et C… tandis que le service commercial était dirigé par MM. B… et Y… ; que ces déclarations sont confortées par des constatations matérielles démontrant l’importance du rôle tenu par M. E… au sein de la société, en l’espèce par la détention de près de la moitié du capital social de la société, la perception d’un salaire mensuel de 50 000 francs égal à celui de Daniel B… et par l’indication sur la plaquette de la société SDS le désignant comme le responsable de l’information de la société ;

 » alors que la cour d’appel ne pouvait, sans se contredire, admettre que les déclarations des différents témoins démontraient l’importance du rôle joué par Etienne E… au sein de la société SDS, comme dirigeant de fait, pour tout ce qui avait trait aux questions financières et comptables et confortaient l’affirmation de Daniel B… selon laquelle il se bornait lui-même à diriger le service commercial de la société, tout en déclarant par ailleurs que Daniel B… et Etienne E…, prenaient ensemble toutes les décisions intéressant la société pour en conclure à l’imputation des infractions aux deux prévenus ; qu’en se prononçant de la sorte, les juges d’appel n’ont pas légalement justifié leur décision  » ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, et en répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables ;

D’où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la formes ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Martin conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Lucas ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


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