Cour de cassation, Chambre criminelle, du 20 mars 1989, 88-82.680, Inédit

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Cour de cassation, Chambre criminelle, du 20 mars 1989, 88-82.680, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le vingt mars mil neuf cent quatre vingt neuf, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller SOUPPE, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN et GEORGES et de Me ROGER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général ROBERT ; Statuant sur les pourvois formés par :

– 1°)- Y… Michel,

– 2°)- X… René,

– 3°)- A… Georges,

contre l’arrêt de la cour d’appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 25 mars 1988, qui les a condamnés, Michel Y… et René X… pour fausse déclaration concernant la libération de parts sociales, chacun à 10 000 francs d’amende ; Georges A…, pour majoration frauduleuse d’apports, à l’interdiction d’exercer pendant 6 mois l’activité professionnelle de conseil juridique et fiscal et à une amende de 10 000 francs et a statué sur les réparations civiles ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; I.- Sur le pourvoi formé par Michel Y… :

Attendu qu’aucun moyen n’est produit par le demandeur ; II.- Sur le pourvoi formé par X… et A… :

Vu les mémoires produits ; Sur le moyen unique de cassation proposé par A…, et pris de la violation des articles 425-1° de la loi du 24 juillet 1966 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ; « en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré Georges A… coupable en sa qualité de commissaire aux apports, du délit de surévaluation frauduleuse d’un apport en nature ;

« aux motifs que Georges A…, dans son rapport relate avoir estimé la valeur vénale de l’apport en tenant compte de divers facteurs juridiques, physiques et techniques, socio-économiques ; qu’il est établi par les dires de Michel Y… et René X… qu’A… savait que l’immeuble qu’il était chargé d’estimer était hypothéqué et dépendait de la communauté de biens universelle existant entre les époux Z… ; que lui-même a reconnu devant la Cour avoir pris connaissance du titre de propriété de ces derniers ; qu’il disposait donc de tous les éléments nécessaires pour renseigner utilement les coassociés ; qu’il n’a cependant pas fait état de ces deux éléments dans son rapport ; qu’il s’agit là, non d’une simple légèreté, mais d’une réticence volontaire et dolosive, puisqu’elle n’avait et ne pouvait avoir d’autre but que de tromper les coassociés, c’est-à-dire de leur faire attribuer à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle lors de la constitution de la société Framia ; que Georges A… avait une parfaite connaissance de l’acte constitutif de la société du 3 janvier 1984 puisqu’il avait antérieurement attesté que tous les travaux juridiques effectués par René X… le seraient « sous sa surveillance et contrôle directs » ; « alors que, si le commissaire aux apports est tenu d’évaluer sans exagération la valeur desdits apports, l’omission de mentionner une charge ne peut constituer la surévaluation prohibée s’il a été tenu compte de ladite charge dans la détermination de ladite valeur ; que l’arrêt constate seulement qu’il n’est pas fait état de l’existence et du montant du passif ni de l’appartenance de l’immeuble à une communauté dans le rapport qui a déclaré fixer la valeur compte tenu de la situation juridique de l’immeuble ; qu’il n’a pas ainsi caractérisé l’élément matériel du délit ; « et alors encore que l’intention frauduleuse, élément constitutif du délit de surévaluation d’un apport en nature, suppose la dissimulation volontaire des éléments d’appréciation de la valeur du bien, dans le but de tromper les coassociés ou les créanciers ; qu’en l’espèce, la cour d’appel ne pouvait déduire l’existence d’une prétendue volonté de tromper les coassociés de la simple omission par le prévenu de signaler tant les charges grevant l’immeuble apporté que l’appartenance de ce bien à la communauté conjugale des époux Y…, dont il aurait eu connaissance ; qu’en se bornant à affirmer que le comportement du prévenu ne pouvait avoir d’autre but que de tromper les coassociés, sans préciser les éléments de fait de nature à caractériser une dissimulation frauduleuse, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de Cassation en mesure d’exercer son contrôle ; Et sur le moyen unique de cassation proposé en faveur de X…, et pris de la violation de l’article 423 de la loi du 24 juillet 1966, des articles 575 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, contradiction de motifs et manque de base légale ;

« en ce que l’arrêt attaqué a condamné X… du chef de fausse déclaration de libération de parts sociales ; « aux motifs que les 170 parts sociales attribuées à Michel Y… en contrepartie de son apport en nature n’ont pas été libérées ; que la mention dans l’acte constitutif de la société « Framia » du 3 janvier 1984, signé, entre autres, par Michel Y… et René X…, selon laquelle les parts sociales « sont toutes entièrement libérées » est dès lors fausse ; que René X… qui se dit ingénieur-conseil en gestion administrative et comptable des entreprises, à l’initiative duquel a été créée la société « Framia », et qui en a rédigé les statuts datés du 3 janvier 1984, reconnaît avoir su, en signant ceux-ci, que les parts sociales attribuées à Michel Y… en contrepartie de son apport en nature n’étaient pas libérées ; que Georges A…, conseil juridique et fiscal, atteste dans un écrit daté du 28 octobre 1983 qu’à partir du 2 novembre 1983 tous les travaux juridiques effectués par René X… le seront « sous sa surveillance et son contrôle directs » ; qu’il avait donc une parfaite connaissance de l’acte constitutif de la société Framia du 3 janvier 1984 ; « alors d’une part, que dans ses conclusions régulièrement déposées X… faisait valoir qu’il avait seulement eu la charge des travaux de dactylographie des statuts de la société Framia, leur rédaction ayant été faite sous la surveillance et le contrôle directs de Georges A… ainsi que l’atteste un écrit daté du 28 octobre 1983 ; qu’en omettant de répondre à ce moyen péremptoire, la cour d’appel a violé les dispositions visées au moyen ; « alors d’autre part, que la Cour a constaté que X… a rédigé les statuts datés du 3 janvier 1984 puis, que Georges A… atteste dans un écrit daté du 28 octobre 1983 qu’à partir du 2 novembre 1983 tous les travaux juridiques effectués par René X… seront « sous sa surveillance et son contrôle directs » ; d’où il résultait que X… n’avait pas rédigé les statuts mais les avait seulement dactylographiés sous le contrôle et la direction directs de A…, la Cour a entaché sa décision d’une contradiction de motifs ; « alors enfin, que le fondateur n’est répréhensible que s’il a conscience de l’inexactitude de la déclaration et si celle-ci est sciemment mensongère ; que X… ne saurait engager sa responsabilité en raison de la fausseté de la déclaration de son coassocié afférente à un apport en nature effectué sous le contrôle du commissaire aux apports, A…, dès lors qu’il n’avait pas conscience du vice dont elle était entachée, A…, sous le contrôle direct duquel les statuts ont été rédigés, ayant prétendu devant les associés, ainsi que l’a reconnu Y…, que l’apport litigieux pouvait être régularisé dans un délai de six mois à compter de la signature des statuts ; qu’ainsi la Cour a violé les textes visés au moyen » ;

Les moyens étant réunis ; Attendu que les motifs de l’arrêt attaqué, tels que reproduits aux moyens eux-mêmes, mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que pour condamner X… du chef de fausse déclaration concernant la libération de parts sociales et A… du chef de majoration frauduleuse d’apports en société, la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction et en répondant comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie, caractérisé en tous leurs éléments constitutifs tant matériels qu’intentionnel, les deux délits respectivement retenus ; que les moyens, qui se bornent à contester devant la Cour de Cassation l’appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ; Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ; REJETTE les pourvois ;


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