Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 16 juin 2004, 03-83.949, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 16 juin 2004, 03-83.949, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize juin deux mille quatre, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE, les observations de Me BOUTHORS et de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

– X… Christian,

– Y… Marie-Madeleine,

– Z… Agnès,

– A… Béatrice, épouse B…,

– C… Roger,

– D… Jean,

– E… Annie,

– F… Paul,

– G… Marguerite,

– H… Hélène,

– I… Théo,

– J… Jean-Louis, parties civiles,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 2 mai 2003, qui, dans la procédure suivie contre Alain K… et Jacques L… pour abus de position dominante et d’un état de dépendance économique, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme, article 1er du Protocole additionnel à ladite Convention, L. 420-1, L. 420-2, L. 420-4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté les parties civiles de leur demande visant à être indemnisées de leur préjudice subi du fait des agissements de Jacques L… et d’Alain K… susceptibles de recevoir la qualification d’abus de position dominante des NMPP au préjudice des parties civiles, pratique ayant pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché, en profitant de l’état de dépendance économique dans laquelle se trouvaient les dépositaires centraux ;

« aux motifs propres que les dispositions de la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 ne sont directement applicables qu’aux seules sociétés coopératives de messageries de presse et non à l’organisation de la distribution mise en place en aval de ces sociétés pour assurer le respect des principes fondamentaux d’égalité et d’impartialité de traitement des éditeurs ; qu’il est constant, par ailleurs, d’une part, que la presse reste la propriété de l’éditeur jusqu’à l’achat par le lecteur, d’autre part, que les dépositaires de presse ont la qualité juridique de commissionnaires, au sens de l’article L. 131-2 du Code de commerce et que le contrat de dépositaire de presse, conclu intuitu personae est révocable ad nutum sous préavis de 48 heures ; que les dépositaires de presse, dont les contrats, conclus intuitu personae et révocables ad nutum ne sont pas cessibles, ne se trouvent dès lors pas placés en situation de revendeur sur un marché concurrentiel, la presse étant remise en dépôt par l’éditeur, qui reste maître de la distribution et de la répartition de ses titres dont il fixe seul le prix de vente, à tous les stades de la distribution jusqu’à son achat par le public ; que, dans ces conditions, il y a lieu, sans qu’il soit nécessaire d’examiner plus avant les griefs des parties civiles, de confirmer la décision des premiers juges qui, après avoir exactement constaté que les conditions d’application des articles L. 420-1 et L. 420-2 n’étaient pas réunies en l’absence d’existence d’un marché concurrentiel des dépositaires centraux de presse, lesquels restent de simples intermédiaires entre les éditeurs et les consommateurs et après avoir relaxé Jacques L… et Alain K… des fins de la poursuite, ont débouté les parties civiles de leurs demandes ;

« aux motifs adoptés que les pratiques anticoncurrentielles visées par les articles L. 420-1 et L 420-2 du Code du commerce ne peuvent être réprimées que sous condition de leur effet « sur un marché », ce qui signifie clairement que les infractions visées à l’ordonnance de renvoi exigent, pour être constituées, la double condition d’atteinte à la concurrence appréciée par rapport à un marché ; qu’en l’état des éléments de la procédure et des arguments développés lors des débats, il n’est pas établi que le réseau des dépositaires de presse puisse être considéré comme un marché pertinent sur lequel la politique de restructuration a eu effectivement un effet de pratique anti-concurrentielle ; qu’il en résulte que c’est à bon droit qu’il est soutenu en défense qu’à défaut de marché, il ne peut y avoir d’atteinte à la concurrence ;

« alors que le marché pertinent au sens du droit de la concurrence est le lieu où se rencontrent l’offre et la demande pour un produit ou un service spécifique ; que la Cour de Paris était saisie de conclusions l’invitant à rechercher si, lors de la restructuration du réseau des dépositaires de presse, le marché constitué par les fonds de commerce des dépositaires de presse sur lequel la SAD, filiale des NMPP, était acquéreur, avait été soumis à la libre concurrence ; que la cour d’appel ne pouvait, dès lors, se borner à affirmer que les dépositaires de presse en tant que tels ne constituaient pas un marché pertinent » ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et du jugement qu’il confirme que les parties civiles, dépositaires centraux de presse, ont porté plainte pour exploitation abusive d’une position dominante et d’un état de dépendance économique contre les dirigeants des Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne (NMPP) en position de monopole sur le marché de la distribution de la presse, reprochant à ceux-ci de leur avoir imposé le rattachement des dépôts de presse dont ils avaient la gestion à d’autres dépositaires et la détermination unilatérale, à leur préjudice, du montant de l’indemnité compensatrice de la perte d’activité ;

que, renvoyés devant le tribunal correctionnel pour abus de position dominante ayant eu pour effet de fausser la concurrence sur le marché, Alain K… et Jacques L…, respectivement directeur général et directeur commercial des NMPP, ont été relaxés aux motifs que le réseau des dépositaires de presse ne constitue pas un marché pertinent vis-à-vis duquel les restructurations incriminées auraient eu un effet anticoncurrentiel, et que les dépositaires de presse dont les contrats avec les NMPP, conclus intuitu personnae et révocables ad nutum, ne sont pas cessibles, ne se trouvaient pas en situation de revendeurs sur un marché concurrentiel ;

Attendu qu’en prononçant ainsi, la cour d’appel a jugé, à bon droit, que les mesures critiquées de réorganisation du réseau des dépositaires de presse n’entraient pas dans les prévisions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce ;

D’où il suit que le moyen, qui invoque l’existence d’un marché concurrentiel de fonds de commerce de dépositaires de presse auquel il aurait été porté atteinte, alors que les caractéristiques du contrat de dépositaire de presse conclu avec les NMPP excluent qu’il puisse constituer un élément, même partiel, d’un fonds de commerce, ne peut être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Challe conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


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