Marco Polo : une marque Mariage Frères

Marco Polo : une marque Mariage Frères

La marque “Marco Polo” utilisée par la société Mariage Frères ne porte pas atteinte aux droits antérieurs de la société OTG dès lors qu’aucune pièce n’est produite pour démontrer la promotion et la commercialisation des produits revêtus de la marque Marco Polo auprès du public pertinent,


 

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 1er février 2023

Rejet non spécialement motivé

M. VIGNEAU, président

Décision n° 10103 F

Pourvoi n° R 21-19.947

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 1ER FÉVRIER 2023

La société Ostfriesische Tee Gesellschaft GmbH & co.Kg (OTG), dont le siège est [Adresse 3] (Allemagne), a formé le pourvoi n° R 21-19.947 contre l’arrêt rendu le 2 mars 2021 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Mariage Frères, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société French Tea Emporium Mariage Frères, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée société Maisons de thé Mariage Frères,

défenderesses à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Ostfriesische Tee Gesellschaft GmbH & co.Kg, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Mariages Frères et de la société French Tea Emporium Mariage Frères, après débats en l’audience publique du 6 décembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ostfriesische Tee Gesellschaft GmbH & co.Kg aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ostfriesische Tee Gesellschaft GmbH & co.Kg et la condamne à payer aux sociétés Mariage Frères et French Tea Emporium Mariage Frères la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille vingt-trois.

 

MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat aux Conseils, pour la société Ostfriesische Tee Gesellschaft GmbH & co.Kg (OTG).

L’exposante fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir prononcé la déchéance de ses droits sur la partie française des marques verbales internationales « Marco Polo » n° 248068 et n° 405 678, à compter respectivement du 1er décembre 1986 et du 1er mai 1979, et de l’avoir, en conséquence, déclarée irrecevable en sa demande reconventionnelle en nullité de la marque verbale « Marco Polo » n° 14 4 071 251 appartenant à la société Mariage Frères ;

1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en l’espèce, aucune des parties n’avait soutenu que les preuves d’usage produites ne permettraient pas de justifier d’un usage du signe « Marco Polo » fait à titre de marque à l’égard du consommateur final ; qu’en relevant d’office, pour écarter l’existence d’un usage sérieux des marques « Marco Polo », que le moyen tiré de ce que, les sachets de thé contenus dans la boîte de thé breakfast revêtue de la marque « Marco Polo » produite aux débats ne comportant pas la marque « Marco Polo », le consommateur final ne pouvait avoir connaissance de cette marque et identifier l’origine des produits, sans inviter les parties à s’expliquer sur ce point, la cour d’appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l’article 16 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l’usage effectif de la marque se rapporte au marché sur lequel le titulaire de la marque exerce ses activités commerciales et sur lequel il espère exploiter sa marque ; qu’ainsi, l’usage sérieux d’une marque ne correspond pas nécessairement à un usage orienté vers les consommateurs finaux ; qu’un usage démontré par des actes commerciaux adressés uniquement à des professionnels du secteur concerné peut être considéré comme étant un usage conforme à la fonction essentielle de la marque ; qu’en relevant, pour écarter l’existence d’un usage sérieux des marques « Marco Polo », qu’en l’absence d’apposition de la marque « Marco Polo » sur les sachets de thé, le consommateur final ne pourra avoir connaissance de cette marque et identifier l’origine des produits, tout en constatant que le thé commercialisé par la société OTG en France, par l’intermédiaire de la société Pagès, correspond au secteur de la vente de thé aux cafés, hôtels et restaurants, ce dont il résulte que la marque « Marco Polo » avait vocation à s’adresser à des professionnels de ce secteur, et non spécifiquement aux consommateurs finaux, la cour d’appel a violé l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019 ;

3°) ALORS QU’en relevant que « l’attestation du cabinet d’expertise-comptable ne peut valoir à elle seule preuve d’un usage sérieux de la marque considérée, alors qu’aucune pièce, en dehors d’une boîte de thé et d’un extrait en anglais du site internet de la société OTG, inopérant pour démontrer une exploitation sérieuse en France, n’est produite (photographies du packaging dans la presse, campagne promotionnelle…) pour démontrer la promotion et la commercialisation des produits revêtus de la marque auprès du public pertinent », sans définir le public pertinent auquel elle fait ainsi référence, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019 ;

4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU’il résulte des propres constatations de l’arrêt que le thé commercialisé par la société Pagès sous la marque « Marco Polo » s’adresse à un public de professionnels du secteur des cafés, hôtels et restaurants ; qu’en relevant qu’en dehors de la boîte de thé et de l’extrait du site internet de la société OTG, aucune pièce ne serait produite pour démontrer la promotion et la commercialisation des produits revêtus de la marque auprès du public pertinent, sans rechercher si la société OTG ne justifiait pas de la commercialisation des boîtes de thé revêtues de la marque « Marco Polo » auprès des professionnels du secteur des restaurants, hôtels et bars, non seulement par la production des factures adressées aux grossistes, mais aussi par la production des extraits du site internet de la société Cafés Fraica lesquels présentent la boîte de thé « Marco Polo » produite aux débats, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019 ;

5°) ALORS QU’une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée aux fins de créer ou de conserver un débouché pour les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul but le maintien des droits conférés par la marque ; que l’appréciation de l’usage sérieux doit reposer sur l’ensemble des faits et circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires ; qu’il convient de procéder à une appréciation globale de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce en tenant compte de leur interdépendance ; qu’en relevant que « l’attestation du cabinet d’expertise-comptable ne peut valoir à elle seule preuve d’un usage sérieux de la marque considérée », sans rechercher, comme elle y était invitée, en se livrant à une appréciation globale des différents éléments invoqués par la société OTG, si, pris dans leur ensemble, les extraits de site internet montrant la présence du thé « Marco Polo » sur le site internet de la société Cafés Fraica depuis au moins le 31 décembre 2013, l’échantillon de factures produites destinées à des grossistes établis dans différentes zones du territoire français (Louvres, Villeneuve d’Ascq, Marseille), montrant la régularité et la constance de l’exploitation, ainsi que l’attestation du cabinet d’expertise comptable montrant un chiffre d’affaires de 443 000 euros réalisé sur la période du 1er janvier 2010 au 16 septembre 2014, n’établissaient pas la réalité et le sérieux de l’exploitation commerciale de la marque « Marco Polo » auprès de la clientèle professionnelle du secteur des cafés, restaurants et hôtels, en France, au cours de la période de référence, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019 ;

6°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU’une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée aux fins de créer ou de conserver un débouché pour les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul but le maintien des droits conférés par la marque ; que lorsqu’il répond à une réelle justification commerciale, un usage même minime peut être suffisant pour établir l’existence d’un usage sérieux ; qu’un faible volume de produits commercialisés sous la marque contestée peut être compensé par une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque ; qu’en affirmant que « les 21 factures produites concernant la période de référence de cinq années ne portent que sur 24 540 boîtes de thé, ce qui est peu eu égard au fait qu’il s’agit d’un produit de très grande consommation et qu’elles sont adressées à trois grossistes seulement », sans rechercher, en se livrant à une appréciation globale de l’ensemble des pièces produites par la société OTG, si alors même que cette exploitation n’était pas quantitativement importante, les éléments produits ne montraient pas que la marque « Marco Polo » avait été utilisée aux fins de créer ou de conserver un débouché pour les produits en cause et non dans le seul but de maintenir les droits conférés par les marques en cause, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019 ;

7°) ALORS QUE des circonstances postérieures à la période pertinente au cours de laquelle doit être apprécié l’usage sérieux de la marque peuvent permettre de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’utilisation de la marque au cours de la période pertinente ainsi que les intentions réelles du titulaire au cours de la même période ; que dès lors, les pièces ne relevant pas de la période définie comme pertinente, loin d’être dépourvues d’intérêt, doivent être prises en compte et évaluées en combinaison avec les autres éléments, car elles peuvent apporter la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque ; qu’en retenant que la société OTG échouerait à faire la démonstration d’un usage sérieux de ses marques internationales « Marco Polo » n° 248 068 et n° 405 678 pour le thé, sans rechercher si l’échantillon de 40 factures établies par la société Pagès au cours de la période 2017/2019, prises conjointement avec les preuves d’usage se rapportant à la période pertinente, ne permettaient pas de rapporter la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019 ;

8°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU’une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée aux fins de créer ou de conserver un débouché pour les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul but le maintien des droits conférés par la marque ; que l’existence d’un commencement ou d’une reprise d’usage sérieux n’est ainsi aucunement subordonnée à l’existence d’une « part de marché stable » sur le marché français ; qu’en relevant, par des motifs éventuellement adoptés, que la société OTG échouerait à démontrer qu’elle a acquis une part de marché stable en France et qu’elle a exploité sa marque, à travers la société Pagès, pour maintenir ou augmenter cette part de marché, la cour d’appel a violé l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019.


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