Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 9 mai 1990, 88-14.203, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 9 mai 1990, 88-14.203, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Gatoil Anstalt, dont le siège social est à Vaduz (94490) (Liechtenstein), postach 685 Staedel,

en cassation d’un arrêt rendu le 15 janvier 1988 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (2e chambre civile), au profit de la société Neptune shipping, société de droit panaméen, dont le siège social est à Panama City (République de Panama), Calle 51, avenida Frédérico X… n° 20, … 5,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l’audience publique du 27 mars 1990, où étaient présents : M. Defontaine, président, M. Nicot, rapporteur, MM. Hatoux, Le Tallec, Peyrat, Bodevin, Sablayrolles, Plantard, Mme Loreau, MM. Vigneron, Edin, Apollis, Leclercq, conseillers, M. Lacan, conseiller référendaire, M. Montanier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Nicot, les observations de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Gatoil Anstalt, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de la société Neptune shipping, les conclusions de M. Montanier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations de l’arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 15 janvier 1988), qu’en vertu d’un contrat d’affrêtement assorti d’une promesse de vente, la société Gatoil Anstalt (Gatoil), a affrêté le navire Garlinka, ensuite dénommé Spica, ayant pour propriétaire la société ABO Shotten et pour affrêteur antérieur la société Fareast shipping (Fareast) ; que, soutenant que les sociétés Fareast et ABO Shotten n’avaient pas rempli leurs obligations contractuelles et avaient vendu le navire à la société Neptune shipping (Neptune) en fraude de ses droits, la société Gatoil a obtenu sur requête la saisie conservatoire du navire ; que, sur la demande de la société Neptune, le juge des référés a ordonné la mainlevée de cette saisie ;

Attendu que la société Gatoil reproche à l’arrêt d’avoir confirmé la décision du juge des référés alors, selon le pourvoi, d’une part, qu’il résulte de l’article 29 du décret du 27 octobre 1967 modifié, que la saisie conservatoire est subordonnée à la constatation par le juge d’une créance paraissant fondée en son principe ; qu’en relevant que le juge des référés ne peut admettre que sa créance est suffisamment fondée dans son principe pour motiver une saisie, la cour d’appel a recherché un principe certain de créance et non seulement une créance paraissant fondée, violant ainsi le texte susvisé ; alors, d’autre part, que la saisie conservatoire est subordonnée à la seule constatation par le juge d’une créance paraissant fondée ; qu’en se bornant à invoquer la complexité du litige résultant, selon elle, d’une créance de la société Fareast contre elle et de la différence des rapports juridiques la liant à ses deux débiteurs, sans faire état d’élément de nature à remettre en cause le principe même de la créance, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au

regard de l’article 29 du décret du 27 octobre 1967 ; alors, en outre, que dans ses conclusions, elle avait fait valoir que la société Neptune se confondait manifestement avec la société ABO Shotten en raison de l’identité de dirigeants, d’actionnaires et de capital, ce qui tendait à faire ressortir le caractère manifestement fictif de la société Neptune ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen, de nature à justifier le maintien de la mesure de saisie conservatoire pratiquée entre les mains de la société Neptune, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que l’action paulienne lorsqu’elle tend à faire déclarer inopposable une vente à titre gratuit, n’est pas subordonnée à la preuve de la complicité du tiers dans la fraude ; qu’ainsi en subordonnant à la démonstration d’une complicité frauduleuse de la société Neptune le sort de l’action paulienne sans rechercher si la vente du navire à cette société au prix symbolique d’un dollar ne constituait pas un acte à titre gratuit, ce qui rendait inutile une telle démonstration, la cour d’appel n’a pas donné une base légale à sa décision au regard des articles 1167 du Code civil et 872 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d’appel n’était pas saisie de conclusions invoquant le caractère fictif de la société Neptune ;

Attendu, en second lieu, que la cour d’appel, qui n’a pas subordonné le sort de l’action paulienne à la démonstration d’une complicité frauduleuse, mais s’est bornée à relever qu’au cas où la vente aurait été réelle, pareille preuve aurait à être rapportée, et qui a retenu qu’un tel examen ne ressortait pas à la compétence du juge des référés, n’avait pas à procéder à la recherche visée au moyen ;

Attendu, enfin, qu’ayant retenu, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, après avoir analysé les données de fait qui lui étaient soumises, que la société Gatoil n’apportait pas des éléments suffisamment probants pour faire état d’une créance paraissant fondée en son principe, la cour d’appel a justifié sa décision au regard du texte visé au pourvoi ;

D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses quatre branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

! Condamne la société Gatoil Anstalt, envers la société Neptune shipping, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du neuf mai mil neuf cent quatre vingt dix.


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