Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 9 avril 1996, 94-14.221, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 9 avril 1996, 94-14.221, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Stock Inter, société à responsabilité limitée, dont le siège est Les Carreaux à Saint-Gelais, 79410 Echiré,

en cassation d’un arrêt rendu le 9 février 1994 par la cour d’appel de Poitiers (chambre civile section 2), au profit :

1°/ de M. Michel Y…, demeurant Zone Artisanale « les Colonnes », rue François Arago, 79180 Chauray,

2°/ de M. Pierre B…, demeurant …,

3°/ de la société Stock AZ, société à responsabilité limitée, dont le siège est Les Colonnes, rue François Arago, 79180 Chauray,

4°/ de la société Savoie Stockage distribution (SSD), société à responsabilité limitée, dont le siège est …,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt;

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 27 février 1996, où étaient présents : M. Nicot, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Léonnet, conseiller rapporteur, M. Vigneron, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre;

Sur le rapport de M. le conseiller Léonnet, les observations de Me Ricard, avocat de la société Stock Inter, de Me Delvolvé, avocat de M. Y…, de la société Stock AZ, de la SCP Richard et Mandelken, avocat de M. B…, de la société Savoie Stockage distribution (SSD), les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué (Poitiers, 9 février 1994) que M. Pierre B… a créé en 1977 à Saint-Gelais (79), la société Stock Inter, dont il a été le gérant, et qui a pour objet l’entreposage, le stockage et la gestion, ainsi que la manutention de marchandises; qu’en 1986, M. B… et ses associés ont cédé leurs parts à d’autres actionnaires, l’ancien gérant s’interdisant dans sa lettre de démission, de créer, gérer ou administrer un fonds de commerce similaire à celui exploité par la société Stock Inter et à s’y intéresser directement ou comme employé pendant une durée de cinq ans, le tout dans un rayon de 250 kilomètres autour du siège de la société Stock Inter à Saint-Gelais ;

qu’estimant que par l’intermédiaire de diverses sociétés, M. B… avait violé la clause de non-concurrence signée par lui, la société Stock Inter l’a assigné en 1991, en dommages-intérêts, ainsi que M. Y… qui avait été employé antérieurement par l’entreprise;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Stock Inter fait grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de ses demandes, alors, selon le pourvoi, que la cour d’appel ayant constaté tout à la fois que l’objet social comprenait l’achat, la construction ou la location de locaux nécessaires à son activité et que M. B… était associé majoritaire dans une société immobilière qui louait notamment ses locaux à la société Stock AZ, il lui appartenait de rechercher si l’activité de la société Stock Inter, que M. B… s’était interdit de concurrencer, ne comprenait pas également la sous-location de ses entrepôts de stockage, comme le mentionnait le procès-verbal d’assemblée de la SCI Florinter du 17 mai 1983, et si M. B…, associé d’une société immobilière, n’avait pas violé la clause de non-concurrence en louant ses locaux, soit à des sociétés qui sous-louaient jusqu’alors ceux de Stock Inter, soit à des sociétés concurrentes, pour un prix trois fois inférieur au barême, que l’arrêt est entaché de manque de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du Code civil;

Mais attendu que la société Stock Inter n’ayant jamais soutenu dans ses conclusions qu’elle pratiquait une activité professionnelle immobilière de location ou de sous-location de locaux la cour d’appel n’avait pas à effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée; que le moyen n’est pas fondé;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Stock Inter fait grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de ses demandes, alors, selon le pourvoi, d’une part, qu’il résulte explicitement d’une lettre de M. A…, gérant de Vidéomaman, en date du 17 juin 1991, que M. Pierre B… et M. Michel Y…, sont intervenus directement auprès de sa société; que tant le rapport de l’expert X… que le rapport complémentaire, qui établit que M. Pierre B… a soutenu M. Y…, dans l’activité de la société Stock AZ, auprès de M. A…; qu’en affirmant dès lors qu’aucun élément concret ne permet à la cour d’appel de rendre crédible l’intervention (auprès de Vidéomaman) de M. Pierre B… et ce, d’autant plus que dans son rapport complémentaire, Mme X… cite M. Alain B…, la cour d’appel a dénaturé les pièces susvisées en violation de l’article 1134 du Code civil et, alors, d’autre part, qu’il résulte tant de la lettre du 17 juin 1991, de M. A…, gérant de la société Vidéomaman, que d’une lettre de Stock AZ du 27 février 1991, que les relations commerciales entre cette société et la société Stock AZ se sont nouées à la suite d’un appel d’offre, d’un courrier de Stock AZ à Publi-naissance et Pierre B… et M. Pierre Y… ;

qu’en affirmant qu’elles n’existaient en réalité qu’à la suite d’un appel d’offre et d’une lettre de Publi-naissance à Stock AZ, la cour d’appel a dénaturé lesdites pièces en violation de l’article 1134 du Code civil;

Mais attendu que la cour d’appel a écarté ces éléments de preuve en se fondant sur d’autres témoignages versés au débat en relevant « qu’aucun élément concret » ne permettait de rendre crédible l’intervention de M. P. B… ou de la société Stock AZ pour démarcher la clientèle de la société Vidéomaman; que, dès lors, c’est hors toute dénaturation et en appréciant l’ensemble des documents qui lui étaient soumis, que la cour d’appel a statué ainsi qu’elle l’a fait; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Stock Inter fait encore grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de ses demandes, alors, selon le pourvoi, que l’embauche simultanée de plusieurs salariés jusqu’alors employés par une entreprise concurrente, entraînant la désorganisation d’un de ses services essentiels est constitutive de concurrence déloyale; qu’en l’espèce, il appartenait à la cour d’appel de rechercher comme elle y était invitée si le débauchage auprès de la SARL Stock Inter, d’un commercial, chef de bureau et du responsable des trafics, et la tentative de débauchage d’un troisième salarié par la société Stotck AZ, gérée par M. Y…, ancien salarié de Stock Inter, n’avait pas pour but de désorganiser la cellule commerciale de Stock Inter ;

que faute d’avoir procédé à une telle recherche, la cour d’appel ne pouvait débouter la société Stock Inter de son action en concurrence déloyale contre M. Y… sans entacher son arrêt de manque de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil;

Mais attendu que la cour d’appel a procédé à la recherche prétendument omise en vérifiant les conditions dans lesquelles quatre salariés de la société Stock Inter avaient quitté cette entreprise; qu’elle a constaté que deux d’entre eux n’avaient pas été engagés par la société Stock AZ animée par M. Y…; que seul un chauffeur et le fils de M. B…, dont l’arrêt a relevé qu’il n’était pas établi que son père était intervenu pour l’amener à rejoindre la société Stock AZ, avaient été embauchés par cette dernière entreprise; qu’en l’état de ces constatations la cour d’appel a pu en déduire que la preuve n’était pas apportée d’actes de débauchage du personnel à l’encontre de la société Stock Inter; que le moyen n’est pas fondé;

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, enfin, que la société Stock Inter fait grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de ses demandes, alors, selon le pourvoi, d’une part, que constitue un acte de concurrence déloyale, le fait pour un salarié, qui, dans le cadre de son contrat de travail, avait été mis en relation avec une clientèle, fut-elle potentielle, de son employeur, de la détourner et de la démarcher pour son compte personnel; que la cour d’appel qui constate que M. Y… qui a créé une société directement concurrente de celle de son ancien employeur, avait démarché la société Siam avant de partir de chez Stock Inter, son employeur, n’a pas tiré les conséquences légales de ces constatations en jugeant que M. Y… n’avait pas déloyalement concurrencé Stock inter, violant ainsi les articles 1382 et 1383 du Code civil; alors, d’autre part, que, dans ses écritures, la société Stock Inter faisait valoir que M. Y… qui avait été en contact, en sa qualité de chef d’entrepôt, chez Stock Inter, avec la société Siam, avait détourné celle-ci au profit de sa future société en création en utilisant pour ce faire, son temps de travail et les moyens mis à sa disposition par son employeur, ainsi qu’en attestait M. Z…; que la cour d’appel ne pouvait omettre de répondre à ce moyen

pertinent sans violer l’article 455 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu, d’une part, que la cour d’appel, après avoir analysé les pièces versées au débat, a constaté que la société Siam n’était pas cliente de la société Stock Inter lorsque M. Y… avait pris contact avec elle;

Attendu, d’autre part, qu’il ne résulte pas des écritures d’appel, que la société Stock Inter ait offert d’apporter la preuve que M. Y… ait démarché la société Siam durant son préavis;

Que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

Sur la demande présentée par M. B… et la société Savoie Stockage Distribution au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que M. B… et la société Savoie Stockage Distribution sollicitent sur le fondement de ce texte, l’allocation d’une somme de douze mille francs;

Mais attendu qu’il n’y a pas lieu d’accueillir cette demande :

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

REJETTE la demande présentée sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Condamne la société Stock Inter, envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du neuf avril mil neuf cent quatre-vingt-seize.


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