Cour de cassation, Chambre commerciale, du 31 janvier 1989, 87-12.599, Inédit

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Cour de cassation, Chambre commerciale, du 31 janvier 1989, 87-12.599, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°) la société LEONARD – GEORGES Z…, société anonyme, dont le siège est à Paris (17e), …,

2°) la société ETABLISSEMENTS E. BOURBIE, société anonyme, dont le siège est à Issoire (Puy-de-Dôme), …,

3°) la société BERNON ET CIE, société anonyme, dont le siège est à Le Gond Pontouvre (Charente), …,

4°) la SOCIETE PICTAVIENNE de RECUPERATION (S.O.P.I.R.E.C), société anonyme, dont le siège est à Mignaloux-Beauvoir (Vienne), Saint-Julien-l’Ars,

5°) la société FER METAUX POITOU CHARENTES, société anonyme, dont le siège est à Chatellerault (Vienne), Zone Industrielle du Sanital, rue du Pin,

en cassation d’un arrêt rendu le 22 janvier 1987 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (8e Chambre civile), au profit de :

1°) LE CREDIT DU NORD, Société bancaire, dont le siège est à Lille (Nord), 28, Place Rihour,

2°) L’UNION des BANQUES SUISSES, Société bancaire de droit suisse, dont le siège est à Zurich (Suisse), 45, Bahnhofstrasse,

3°) La BANQUE du SIMPLON, société anonyme de droit suisse, dont le siège est à Lugano (Suisse), Via P. Peri n° 5,

défendeurs à la cassation ; Les demandeurs invoquent à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l’audience publique du 3 janvier 1989, où étaient présents :

M. Baudoin, président, M. Peyrat, conseiller rapporteur, MM. X…, A…, Le Tallec, Bodevin, Sablayrolles, Plantard, Mme B…, M. Vigneron, conseillers, Mlle Y…, M. Lacan, conseillers référendaires, M. Montanier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Peyrat, les observations de la SCP Michel et Christophe Nicolay, avocat des demandeurs, de Me Spinosi, avocat du Crédit du Nord, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de l’Union des Banques Suisses, de Me Boullez, avocat de la Banque du Simplon, les conclusions de M. Montanier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 janvier 1987) que le Crédit du nord, l’Union des banques suisses et la banque du Simplon (les banques) ont apporté leur concours lors de la constitution et du fonctionnement de la société Sudacier ; que celle-ci a été mise en règlement judiciaire puis en liquidation des biens ; que la demande du syndic en paiement des dettes sociales dirigée contre les administrateurs de la société Sudacier, dont certains étaient fondés de pouvoir ou actionnaires des banques, a été accueillie ; que la société Léonard Georges Z…, la société Etablissements E. Bourbie, la société Bernon et compagnie, la société Pictavienne de récupération, la société fer-métaux Poitou-Charentes (les sociétés), créancières de la société Sudacier, ont assigné les banques en paiement de dommages-intérêts réparant le préjudice prétendûment causé par leurs fautes ; Attendu que les sociétés font grief à la cour d’appel de les avoir déboutées de leur demande, alors, selon le pourvoi, d’une part, que les juges d’appel qui se sont bornés à énoncer que les éléments constitutifs d’une société de fait n’étaient pas réunis, n’ont pas mis la Cour de Cassation en mesure d’exercer son contrôle et n’ont pas légalement justifié leur décision au regard des articles 1134 et 1832 du Code civil ; alors, d’autre part, qu’une personne peut engager un tiers sur le fondement d’un mandat apparent, même en l’absence d’une faute susceptible de lui être reprochée, si la croyance du tiers à l’étendue des pouvoirs de la personne avec laquelle il traite est légitime ; qu’ainsi la cour d’appel, qui n’a pas recherché si la présence, dans les organes de direction de la société Sudacier, de personnes, membres des organes directeurs des banques, qui avaient créé l’entreprise et lui facilitaient la poursuite de ses activités, n’étaient pas de nature à induire en erreur les tiers qui traitaient avec elle sur sa véritable identité, n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1998 du Code civil ; et alors, enfin, que, dans ses conclusions demeurées sans réponse, les sociétés avaient fait valoir que les banques avaient, en parfaite connaissance de la situation dans laquelle se débattait la société Sudacier, tout fait pour créer une apparence de solidité et de solvabilité dans le but de tromper les fournisseurs ; que le capital avait été souscrit presque en totalité par la banque du Simplon, que les investissements et immobilisations avaient été financés avec l’accord des organismes bancaires qui

avaient accordé des cautionnements, emprunts, crédits variés… qu’ainsi, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d’une part, que la cour d’appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que les allégations des sociétés concernant l’existence d’une société créée de fait entre la société Sudacier et les banques étaient dénuées de tout commencement de preuve ; que par ces seuls motifs elle a justifié sa décision du chef critiqué ; Attendu, d’autre part, qu’il ne résulte ni de l’arrêt ni des conclusions d’appel des sociétés que celles-ci aient soutenu le moyen présenté par la deuxième branche ; Attendu, enfin, qu’ayant retenu que la société Sudacier n’avait pas eu les apparences de la prospérité pouvant induire les tiers en erreur et que les banques n’avaient pas dépassé leur rôle, la cour d’appel a répondu aux conclusions invoquées ; D’où il suit que le moyen qui, pris en sa deuxième branche, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable, n’est pas fondé en ses autres branches ; Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que les sociétés reprochent aussi à la cour d’appel d’avoir statué ainsi qu’elle l’a fait, alors, selon le pourvoi, d’une part, que la cour d’appel, qui n’a pas recherché si la société Sudacier n’avait pas, après sa constitution, tandis que l’environnement était, dès 1974, devenu défavorable et que la situation de l’entreprise, qui avait immédiatement subi des pertes d’exploitation considérables, se trouvait irrémédiablement compromise, bénéficié de crédits et facilités inconsidérés qui avaient, en prolongeant artificiellement son activité, aggravé son passif, n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1382 du Code civil ; et alors, d’autre part, que, dans des conclusions demeurées sans

réponse, les sociétés avaient fait valoir que les organismes bancaires auraient dû suivre l’évolution de la situation de la société Sudacier ; qu’elles n’ignoraient pas, puisqu’elles avaient financé sa création et son installation, que cette situation ne correspondait pas aux prévisions, l’entreprise se trouvant, dès les premiers mois de 1975, dans une situation irrémédiablement compromise ; qu’elles n’en avaient pas moins persisté à accorder des crédits de trésorerie et fonctionnement hors de proportion avec les possibilités de la société, maintenant artificiellement la survie de celle-ci et provoquant l’aggravation du passif ; qu’ainsi, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu’ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que le reproche fait aux banques d’avoir accordé des crédits inopportuns du point de vue économique, eu égard à la crise de la sidérurgie dans le années 1974-1975, n’était pas fondé, que les effets de la crise économique avaient été déterminants, que n’étaient pas rapportée la preuve d’une immixtion des banques dans la gestion et l’exploitation de la société Sudacier et que, lors de l’octroi de leurs concours, aucun élément extérieur ne laissait présumer que la situation était compromise, la cour d’appel, qui a répondu aux conclusions invoquées, a pu décider que la banque n’avait pas engagé sa responsabilité ; d’où il suit que le moyen n’est fondé ni en l’une ni en l’autre de ses branches ; PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le premier moyen auquel les demandeurs ont déclaré renoncer ; REJETTE le pourvoi ;


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