Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société civile immobilière (SCI) Codiho, dont le siège social est 6, rue d’En Haut à Bucquoy (Pas-de-Calais), en cassation d’un jugement rendu le 24 novembre 1993 par le tribunal de grande instance d’Arras (1re chambre), au profit de la Direction générale des Impôts, ministère du Budget, … (12e), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 6 juin 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Poullain, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. de Gouttes, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Poullain, les observations de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de la SCI Codiho, de Me Goutet, avocat de la Direction générale des Impôts, les conclusions de M. de Gouttes, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance d’Arras, 24 novembre 1993), que les associés de la société civile immobilière Cohido (la SCI), constituée par acte du 8 août 1986, au capital de 1 200 000 francs, devaient libérer leurs apports en numéraire ;
qu’ils ont acquis en indivision, pour le même montant, un immeuble à usage d’habitation ;
que, lors d’une assemblée générale extraordinaire du 3 mars 1987, ils ont décidé une augmentation du capital de la SCI, de 1 200 000 francs à 2 400 000 francs, couverte par apport de cet immeuble, puis la réduction de ce capital de 2 400 000 à 1 200 000 francs, par suppression des parts sociales représentant le capital initial ;
que l’administration fiscale, estimant que l’immeuble avait fait l’objet d’une dation en paiement, a procédé à un redressement puis a notifié à la SCI un avis de recouvrement de droits de mutation à titre onéreux ;
que la SCI a assigné le directeur des services fiscaux du Pas-de-Calais pour être déchargée de cette imposition ;
Attendu que la SCI reproche au jugement d’avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d’une part, que le Tribunal, saisi d’une demande tendant à voir qualifier de dation en paiement l’apport en nature effectué par ses associés, a excédé les limites du litige telles que définies par les conclusions des parties et violé l’article 4 du nouveau Code de procédure civile en prononçant la nullité des dispositions de l’acte du 3 mars 1987 relatives à l’augmentation et à la diminution du capital ;
et alors, d’autre part, que la libération du capital par les associés d’une SCI au moyen de l’apport en nature d’un immeuble d’une valeur égale au montant dudit capital ne constitue pas une dation en paiement dudit bien ;
que, dès lors, le Tribunal, qui constatait lui-même que demeuraient l’apport de l’immeuble et la libération des associés, n’a pas tiré les conséquences légales qui en découlaient au regard de l’article 810-II du Code général des Impôts en décidant que ces opérations ne pouvaient être analysées que comme une dation en paiement d’une dette passible d’un droit de mutation à titre onéreux ;
Mais attendu qu’ayant relevé que les associés n’avaient pas libéré leur souscription à la date où, réunis en assemblée générale extraordinaire, ils ont décidé une augmentation de capital, du même montant, couverte par l’apport de l’immeuble dont ils étaient propriétaires indivis, puis la réduction du capital par renonciation à la partie souscrite à la constitution de la SCI, le jugement retient que la simultanéité des opérations démontre que les associés n’avaient pas l’intention véritable d’augmenter le capital ;
qu’au vu de ces constatations et de cette appréciation, abstraction faite des motifs surabondants visés à la première branche, le Tribunal a pu décider que « l’apport de l’immeuble » et la « libération des associés » constituaient, non un apport en capital, mais le règlement d’une dette par une dation en paiement soumise aux droits de mutation à titre onéreux ;
que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Codiho, envers la Direction générale des Impôts, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du trois octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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