Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 25 avril 2006, 04-19.297, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 25 avril 2006, 04-19.297, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 9 septembre 2004), que les sociétés de droit italien Ammogas, Etilgas, SGN et leurs actionnaires respectifs, MM. X… et Sergio Y…, Mme Z…, la société Margas, la société Setco et la société Anchor Overseas ltd (les consorts Y…), ont saisi le tribunal de commerce de Lyon d’une action en responsabilité contre le Crédit lyonnais, la société Fortis banque et le CDR Créances devenu la société CDR France, leur reprochant de les avoir fautivement privés de la possibilité de mener à bonne fin un important projet de construction navale et, s’agissant plus spécialement de la société Fortis Banque venue aux droits du Crédit lyonnais Bank Nederland, filiale néerlandaise du Crédit lyonnais, d’avoir manqué aux obligations qu’elle avait souscrites à leur égard aux termes de deux contrats de prêt consentis à la société SGN, les 9 juin et 25 septembre 1992 ; que, se prévalant d’une clause de ces deux conventions attribuant compétence aux tribunaux de Rome pour juger « tout litige né ou à naître de leur exécution » et des dispositions de l’article 23 du Règlement communautaire n° 44/2001, les trois établissements ont soulevé l’incompétence de la juridiction lyonnaise pour statuer sur le litige, le Crédit lyonnais et le CDR Créances faisant valoir que cette élection de for les concernait aussi dès lors que le Crédit lyonnais avait cautionné les prêts accordés par sa filiale néerlandaise ; qu’accueillant cette exception en tant qu’elle concernait les seules demandes formées par la société SGN et les consorts Y… contre la société Fortis Banque, la cour d’appel a dit qu’en revanche le tribunal de commerce de Lyon était compétent pour statuer sur toutes les autres, et notamment sur celles formées contre le Crédit lyonnais et le CDR Créances, compte tenu de la nature du litige et ni l’un ni l’autre de ces établissements n’ayant été parties aux conventions comportant la clause litigieuse ;

Attendu que le Crédit lyonnais et le CDR Créances font grief à l’arrêt d’avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / qu’aux termes de l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000, si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un Etat membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un Etat membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat membre sont compétents ; que lorsqu’une société mère établit un rapport de droit au sens de l’article 23 précité au regard d’un litige relatif aux accords de prêts de sa filiale, ce litige doit être porté au titre de la matière litigieuse contractuelle devant le juge convenu ;

qu’il était acquis aux débats que le Crédit lyonnais garantissait les prêts accordés par sa filiale, le Crédit lyonnais Bank Nederland ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000, tel qu’interprété à la lumière de l’article 5.1 de ce même texte ;

2 / qu’en ne recherchant pas si les relations entre le Crédit lyonnais et le Crédit lyonnais Bank Nederland ne s’intégraient pas dans le rapport de droit déterminé relevant de la matière contractuelle et justifiant que celui-ci soit porté dans son ensemble devant le juge convenu, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000, tel qu’interprété à la lumière de l’article 5.1 de ce même texte ;

3 / qu’il était acquis aux débats que le Crédit lyonnais, actionnaire du Crédit lyonnais Bank Nederland à 94 %, avait garanti les prêts octroyés par ce dernier ; qu’en refusant pourtant de lui opposer les clauses attributives de juridiction figurant dans les accords conclus par le Crédit lyonnais Bank Nederland, la cour d’appel a violé l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

4 / qu’il était acquis aux débats que le Crédit lyonnais, actionnaire du Crédit lyonnais Bank Nederland à 94 %, avait garanti les prêts octroyés par ce dernier à SGN ; qu’il en résultait l’existence de relations commerciales entre ces sociétés ; qu’en refusant de lui opposer les clauses attributives de juridiction figurant dans les accords de prêt conclus par le Crédit lyonnais Bank Nederland en dépit de l’existence de relations commerciales, la cour d’appel a violé, par fausse application, l’article 1165 du Code civil ;

5 / qu’aux termes de l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000, si les parties, dont l’une au moins a son domicile dans un Etat membre, sont convenues d’un tribunal ou des tribunaux d’un Etat membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat membre sont compétents ; qu’il était acquis aux débats que le Crédit lyonnais était, à l’époque des faits, actionnaire à 94 % du Crédit lyonnais Bank Nederland ; qu’en refusant pourtant de lui opposer les clauses attributives de juridiction figurant dans les accords de prêts consentis par le Crédit lyonnais Bank Nederland, la cour d’appel a violé l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

6 / qu’en ne recherchant pas si, en l’état des relations constatées entre le Crédit lyonnais et le Crédit lyonnais Bank Nederland, les clauses attributives de juridiction figurant dans les accords de prêts consentis par le Crédit lyonnais Bank Nederland à SGN n’étaient pas opposables au Crédit lyonnais et au CDR, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 23 du règlement du conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

7 / qu’en ne recherchant pas si, en l’état des relations constatées entre le Crédit lyonnais et le Crédit lyonnais Bank Nederland, les clauses attributives de juridiction figurant dans les accords de prêts consentis par le Crédit lyonnais Bank Nederland à SGN n’étaient pas opposables au Crédit lyonnais et à CDR, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1165 du Code civil ;

Mais attendu que l’arrêt relève que le Crédit lyonnais et le CDR Créances n’étaient parties à aucun des accords comportant la clause attributive de juridiction litigieuse et que leur responsabilité n’était pas recherchée pour d’éventuels manquements contractuels mais sur un terrain exclusivement délictuel ou quasi délictuel, le Crédit lyonnais se voyant notamment reprocher d’avoir privé de toute autonomie sa filiale, le Crédit lyonnais Bank Nederland, pris les décisions à sa place et exercé une mainmise sur les opérations de la société SGN par l’intermédiaire de l’actionnaire suisse de celle-ci, la société Sasea, dont la banque française aurait été gérant de fait ; qu’en l’état de ces constatations dont il se déduisait que les demandes formées contre le Crédit lyonnais étaient étrangères aux conditions d’exécution des contrats liant exclusivement, depuis 1992, le Crédit lyonnais Bank Nederland à la société SGN et, par voie de conséquence et à supposer même qu’il s’intègre dans un ensemble contractuel complexe, à l’engagement accessoire et général de cautionnement souscrit plus de deux ans auparavant par l’établissement français au profit de sa filiale néerlandaise de sorte qu’en tout état de cause, qu’elle ait ou non consenti à la clause d’élection de for et que celle-ci lui soit ou non opposable, la banque française n’était pas fondée à en revendiquer le bénéfice pour un litige qui n’était pas né à l’occasion du rapport de droit qui en faisait l’objet, la cour d’appel, qui n’a violé aucun des textes visés au moyen, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le Crédit lyonnais, la société CDR France et la société Fortis Banque aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, les condamne à payer aux consorts Y… la somme globale de 2 500 euros ; Rejette la demande qu’eux-mêmes formulent sur ce fondement ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille six.


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