Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ la société anonyme Meta Ceram, dont le siège social est … (Val-de-Marne),
2°/ la société anonyme Atmostat, dont le siège social est … (Val-de-Marne),
en cassation d’un arrêt rendu le 8 novembre 1990 par la cour d’appel de Paris (4ème chambre, section B), au profit :
1°/ de M. Michel Y…, demeurant … (Hauts-de-Seine),
2°/ de la société anonyme Quartex, dont le siège social est … (5ème),
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 13 octobre 1992, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Léonnet, conseiller rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Jéol, Premier avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Léonnet, les observations de Me Vuitton, avocat de la société Meta Ceram et de la société Atmostat, de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de M. Y… et de la société Quartex, les conclusions de M. Jéol, Premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
! – Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que la société Quartex a été fondée en 1948 par M. Y… pour fabriquer et commercialiser des pièces mettant en oeuvre le travail du quartz dans deux domaines précis : les prothèses chirurgicales et l’usinage des céramiques-métaux destinés à l’aviation, et aux industries nucléaires ou d’armement ; que les premières de ces fabrications étaient commercialisées par la société de fournitures hospitalières (SFH), les autres par la société Seiv Atmostat ; qu’en 1983 et 1984, les principaux actionnaires de Quartex, la société Saint-Gobain et M. Y… ont vendu leurs actions à la société SFH ; que celle-ci spécialisée dans les produits à usage médical chercha à vendre le département métal de la société Quartex ; que la société Seiv Atmostat a fait une proposition qui ne fut pas retenue ; que d’autres repreneurs ne donnèrent pas suite à leurs propositions ; que pendant cette période cinq cadres, dont le plus important était M. X…, quittèrent la société Quartex durant le dernier trimestre de l’année 1984 et au cours du premier semestre de l’année 1985 ; qu’ils furent alors engagés par la société Seiv Atmostat, et, ultérieurement par la société Meta Ceram constituée en 1985 à l’instigation de la société Seiv Atmostat ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l’article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour accueillir la demande de condamnation des sociétés Seiv Atmostat et Meta Ceram
en dommages et intérêts pour actes constitutifs de concurrence déloyale par débauchage du personnel l’arrêt retient que l’engagement des cinq cadres démissionnaires s’est effectué à
l’expiration de leur préavis, entre les mois de septembre 1984 et juin 1985, et que cette circonstance « ne saurait résulter que d’une manoeuvre de débauchage » ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si l’embauche de ces cinq cadres, dont le contrat de travail qui les liait antérieurement à la société Quartex ne comportait pas de clause de non-concurrence, s’était accompagnée, de la part des sociétés Seiv Atmostat et Meta Ceram, d’agissements déloyaux tendant à les inciter à partir, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Vu l’article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour accueillir la demande de condamnation des sociétés Seiv Atmosta et Meta Ceram en dommages et intérêts pour actes constitutifs de concurrence déloyale par démarchage des clients de la société Quartex, l’arrêt retient que ces agissements n’ont été rendus possibles que parce que ces sociétés s’étaient servis des références des plans d’exécution établis par la société Quartex, malgré les démentis de la société Meta Ceram, qui, revendiquant la propriété de ces plans l’avait assignée en contrefaçon, et que parce que la liste des anciens clients de la société Quartex n’avait pu être acquise que par le démarchage systématique de la clientèle ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, alors en premier lieu, que la prospection de la clientèle en l’absence d’une clause de non-concurrence reste libre sauf si elle s’accompagne d’agissements déloyaux viciant cette prospection, et alors en second lieu qu’en ne recherchant pas si l’utilisation des procédés de travail dénoncés et faisant l’objet d’une autre instance en contrefaçon, avaient pu créer une confusion entre ces diverses entreprises dans l’esprit de la clientèle, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen et sur le troisième moyen de cassation pris en ses deux branches :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 8 novembre 1990, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles ;
Condamne M. Y… et la société Quartex, envers la société Meta Ceram et la société Atmostat, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d’appel de Paris, en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;