Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Michel D…, demeurant … (16e),
2°/ M. Michel Y…, pris tant en son nom personnel qu’en sa qualité de gérant de la société à responsabilité Au Funerarium, dont le siège est …, demeurant … ,
3°/ M. Z…, mandataire liquidateur, pris en sa qualité de représentant des créanciers liquidateur de la société « Au Funérarium », prononcé par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 28 octobre 1987 en ses bureaux sis …,
4°/ M. X…, mandataire liquidateur, pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. Michel D…, prononcée par jugement rendu le 22 mai 1986 par le tribunal de commerce de Nanterre en ses bureaux sis … (Hauts-de-Seine),
en cassation d’un arrêt rendu le 25 janvier 1990 par la cour d’appel de Lyon (6e chambre civile), au profit de la société anonyme Pompes funèbres générales (PFG), dont le siège est … (11e),
défenderesse à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l’audience publique du 20 novembre 1991, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Léonnet, conseiller rapporteur, M. B…, Mme E…, MM. Vigneron, Leclercq, Gomez, conseillers, M. C…, Mme A…, M. Reméry, conseillers référendaires, M. Jéol, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Léonnet, les observations de Me Foussard, avocat de M. D… et de MM. Y…, Z… et X…, ès qualités, de Me Luc-Thaler, avocat de la société PFG, les conclusions de M. Jéol, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur la recevabilité du pourvoi formé par M. Y… :
Attendu qu’une personne, agissant en la même qualité, ne peut former qu’un seul pourvoi en cassation contre la même décision ; Attendu que M. Y…, agissant avec d’autres parties, a formé, le 25 mai 1990, contre un arrêt de la cour d’appel de Lyon du 25 janvier 1990, un pourvoi enregistré sous le n° P 90-15.322 ; Attendu que M. Y…, qui, agissant seul et en la même qualité, avait déjà formé contre la même décision, le 17 mai 1990, un pourvoi
enregistré sous le n° C 90-14.983, n’est pas recevable à former un nouveau recours en cassation ; Sur les trois moyens, pris en leurs diverses branches du pourvoi formé par M. Michel D… :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 25 janvier 1990, n° 2314/85), que M. Michel D…, la société Au Funénarium (société Funénarium), dont le gérant était M. Y…, ont entrepris en 1984 et 1985 dans un certain nombre de communes de l’agglomération lyonnaise des activités comprises dans le service extérieur des pompes funèbres dont la société Pompes funèbres générales (société PFG) était le concessionnaire exclusif en application des articles L. 362-1 et suivants du Code des communes reprenant l’article 2 de la loi du 28 décembre 1904 ; que la cour d’appel a fixé à la somme de 427 814,23 francs le montant de la réparation qui était dûe à la société des Pompes funèbres générales à la suite de ces agissements ; Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir accueilli la demande de la société Les Pompes funèbres générales, alors, selon le pourvoi, d’une part, que dès lors que les pompes funèbres générales se prévalaient du monopole dont elles jouissaient, à raison des contrats de concession exclusive conclus avec les communes il leur appartenait d’établir qu’elles exerçaient ce monopole sans abus de position dominante tant au regard du droit communautaire qu’au regard du droit français ; qu’en faisant peser la charge de la preuve sur M. Michel D… et ses franchisés, les juges du fond ont violé les articles 1315 du Code civil, 86 du Traité de Rome et 50 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ; alors, d’autre part, que, faute d’avoir procédé à une comparaison des prix, en mettant en oeuvre les critères résultant de la jurisprudence communautaire à l’effet de rechercher par une appréciation concrète des circonstances de fait, l’existence d’un éventuel abus de position dominante, pour se contenter d’énoncer des motifs vagues, généraux et abstraits, rendant impossible tout contrôle, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 86 et 90 du Traité de Rome ; alors, en outre, qu’ayant omis de rechercher si la situation de monopole de la société Pompes funèbres générales avait des effets sur l’importation de marchandises en provenance d’autres Etats membres et sur la possibilité pour des entreprises concurrentes établies dans ces Etats membres d’assurer des prestations sur le territoire français, puis de vérifier si la position économique de cette société lui fournissait le pouvoir de faire obstacle à une concurrence effective sur le
marché des pompes funèbres, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des articles 86 et 90 du Traité de Rome ; et alors, enfin, que faute d’avoir recherché si les prix pratiqués étaient équitables eu égard aux prix observés là où les Pompes funèbres générales ne disposent pas de monopole, et d’avoir vérifié si la situation dont elle bénéficiait affectait la concurrence à l’intérieur du territoire national, les juges du fond ont privé leur
décision de base légale au regard des articles 50 et 51 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ; Mais attendu que l’arrêt, après s’être référé à la décision de la Cour de justice des communautés européennes du 4 mai 1988, a relevé qu’il n’était pas discutable que la société PFG avait commis des actes constitutifs sur le plan national d’abus de position dominante ; que, toutefois, après s’être livré à une analyse concrète des clauses qualifiées d’abusives et des prix pratiqués il a considéré que ceux-ci n’étaient pas critiquables dès lors qu’ils apparaissaient justifiés par un amortissement normal des investissements du commissionnaire et étaient la contrepartie imposée par les obligations du service public ; qu’en l’état de ces motifs, et sans avoir méconnu la charge de la preuve, en dépit d’un motif erroné de principe sur ce point, la cour d’appel n’a pas méconnu les dispositions de l’article 86 du Traité ; PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en tant que formé par M. Y… ; Et, en ce qui concerne les autres parties, REJETTE le pourvoi ;