Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Françoise X…, demeurant … (12e), en cassation d’un jugement rendu le 8 avril 1992 par le tribunal de grande instance de Paris (2e chambre, 1re section, au profit de M. le directeur général des Impôts, ministère de l’Economie, des Finances et du Budget, domicilié … (12e), défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 9 mars 1994, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Vigneron, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Vigneron, les observations de Me Cossa, avocat de Mme X…, de Me Goutet, avocat du directeur général des Impôts, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Paris, 8 avril 1992), que Mme X… a reçu en 1981, à la suite d’un acte de donation-partage, la nue-propriété d’appartements situés dans un immeuble de rapport et un appartement ; que l’évaluation portée en l’acte soumis à enregistrement était celle qu’avait retenue en 1979 le cabinet d’expertises Roux, augmentée de 25 % ;
que l’administration des Impôts n’a pas accepté cette évaluation et a procédé à un redressement ; que Mme X…, n’ayant accepté à son tour ni cette évaluation ni celle retenue par la commission départementale de conciliation, a demandé en justice l’annulation de l’avis de mise en recouvrement des droits complémentaires résultant du redressement ; que le Tribunal a ordonné une expertise et a statué au vu du rapport des experts ;
Attendu que Mme X… reproche au jugement sa décision quant à la valeur vénale de la nue-propriété des deux biens immobiliers, alors, d’une part, selon le pourvoi, qu’en lui imposant la preuve du caractère inadapté des éléments de comparaison fournis par l’Administration et retenus par les experts, tandis qu’il incombait à l’administration des Impôts d’établir le bien-fondé de ses évaluations, le Tribunal a violé les articles 666 et 669 du Code général des impôts, ainsi que l’article L. 17 du Livre des procédures fiscales ; alors, d’autre part, qu’en se bornant à relever qu’aucune vente publique n’était intervenue à l’époque considérée à proximité de l’immeuble litigieux, que les experts ont également procédé à une évaluation par capitalisation du revenu, et qu’ils ont aussi fait observer le prix de vente de l’appartement en 1985, sans rechercher si la valeur retenue par les experts constituait le prix qui pouvait être obtenu, au jour de la mutation, par le jeu de l’offre et de la demande dans un marché réel, tandis qu’elle soutenait qu’il existait une atonie générale du marché immobilier à l’époque de la donation en 1981, le Tribunal a privé sa
décision de base légale au regard des dispositions de l’article L. 17 du Livre des procédures fiscales ;
alors, en outre, que le rapport du cabinet Roux précisait, à propos de l’immeuble de la rue Emile-Gilbert :
« Il manque des éléments essentiels de confort, pas d’ascenseur, pas de chauffage central, salles de bains d’origine sommaires, à moins qu’elles n’aient rénovées aux frais du locataire » ; qu’en réduisant cette énumération précise d’éléments essentiels de confort faisant défaut à la formule vague « sans confort collectif » ne permettant pas d’apprécier la moins-value en résultant, le Tribunal a dénaturé par omission ce document, en violation de l’article 1134 du Code civil ; alors, enfin, qu’en ne répondant pas aux conclusions par lesquelles elle soutenait que, avisés de ce que leur pré-rapport mentionnait à tort que les appartements bénéficiaient du chauffage urbain, les experts n’avaient pas tenu compte de l’absence de cet élément important d’équipement dans leur estimation définitive, le Tribunal a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu’il incombait à Mme X…, qui avait estimé opportun de produire d’autres éléments de comparaison de nature à infirmer l’évaluation faite par l’Administration, d’en justifier concrètement la pertinence au regard du litige ;
Attendu, en second lieu, que, sans se borner à des méthodes d’évaluation tirées du revenu des immeubles, le Tribunal a déterminé la valeur vénale de ces derniers après avoir d’abord examiné les éléments de comparaison fournis par l’Administration relatifs à des mutations de biens similaires intervenues à des dates antérieures les plus proches possibles de celle de la donation-partage, puis, adoptant les conclusions des experts, a procédé à un examen comparatif concret des situations et des états respectifs de ces biens ; qu’il a ainsi, sans dénaturer les pièces ni omettre de répondre aux conclusions qui lui étaient soumises, légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X…, envers le directeur général des Impôts, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix mai mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.