Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
18/ la société civile immobilière des Bourrets, dont le siège social est à Suresnes (Hauts-de-Seine), rue des Bourrets,
28/ la société Unimag, dont le siège social est à Suresnes (Hauts-de-Seine), centre commercial Pont de Suresnes, boulevard Henri Sellier,
en cassation d’un arrêt rendu le 12 avril 1991 par la cour d’appel de Versailles (4e chambre), au profit :
18/ de la Caisse de retraite des notaires, organisme d’assurance vieillesse, dont le siège social est à Paris (8e), …,
28/ du syndicat des copropriétaires de la résidence « Les Rives de Bagatelle », dont le siège est à Suresnes (Hauts-de-Seine), pris en la personne de son syndic, la société anonyme Cabinet Villa, dont le siège social est à Paris (9e), …,
38/ de la société Sepimo, dont le siège social est à Paris (8e), …,
48/ de la société civile immobilière Tête de Pont de Suresnes, dont le siège social est à Paris (8e), …,
défendeurs à la cassation ;
La société Sepimo et la SCI Tête de Pont de Suresnes ont formé, par un mémoire déposé au greffe le 24 mars 1992, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Les demanderesses au pourvoi principal, invoquent, à l’appui de leur recours, un moyen unique de cassation anexé au présent arrêt ;
Les demanderesses au pourvoi incident, invoquent, à l’appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l’audience publique du 24 mars 1993, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Chemin, conseiller rapporteur, MM. Cathala, Capoulade, Deville, Darbon, Mlle Fossereau, M. Fromont, conseillers, Mme Cobert, M. Chapron, conseillers référendaires, M. Mourier, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Chemin, les observations de Me Copper-Royer, avocat de la SCI des Bourrets et de la société Unimag, de Me Foussard, avocat de la Caisse de retraite des notaires, de Me Choucroy, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence « Les Rives de Bagatelle », de la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, avocat de la société Sepimo et de la SCI Tête de Pont de Suresnes, les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal et du pourvoi incident, réunis :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 12 avril 1991), qu’une assemblée générale des copropriétaires du syndicat principal des copropriétaires de la résidence Tête de Pont de Suresnes, dénommée, depuis lors, résidence des Rives de Bagatelle, réunie le 17 avril 1985, et une assemblée générale, de la même date, du syndicat secondaire garage de cette résidence, ayant autorisé la société en nom collectif Tête de Pont de Suresnes (SNC), qui avait pour gérante la société Sepimo, à effectuer le
percement de deux dalles, situées respectivement au niveau 29 et au
niveau 32-30, pour permettre le passage d’un ascenseur et d’un escalier de secours, destinés à assurer une meilleure desserte des sous-sols à usage d’emplacements de stationnement de voiture, la société civile immobilière des Bourrets (SCI), venant aux droits de la SNC, et la société Unimag, locataire de cette SCI, ont, outre les travaux expressément autorisés, exécuté d’autres aménagements entraînant l’impossibilité, pour les propriétaires des emplacements de stationnement situés au deuxième sous-sol, d’utiliser la rampe constituant l’accès initial à ce niveau et certains couloirs de circulation de ce même niveau ; que la Caisse de retraite des notaires, propriétaire de 230 emplacements de stationnement, répartis entre les deux sous-sols, a assigné la SCI des Bourrets, la société Unimag, la SNC Tête de Pont de Suresnes, la société Sepimo et le syndicat des copropriétaires aux fins de remise des lieux en l’état initial, à l’exclusion du percement des dalles, régulièrement autorisé ;
Attendu que la SCI des Bourrets, la société Unimag, la SNC et la société Sepimo font grief à l’arrêt de condamner, in solidum, les trois premières d’entre elles, à remettre les parkings dans leur état antérieur, sauf le percement des dalles, à rétablir notamment l’utilisation commune de la rampe d’accès au deuxième sous-sol et à protéger l’accès des usagers par une porte à carte magnétique ou par tout autre système de sécurité similaire, alors, selon le moyen, « 18) que les délibérations d’assemblées générales de copropriétaires doivent être interprétées comme tout autre acte juridique ; qu’elle peuvent fort bien contenir des dispositions implicites mais nécessaires, résultant sans équivoque d’une disposition qui ne pourrait avoir de signification sans son complément implicite ; qu’en refusant, par une pétition de principe erronée, de rechercher si l’autorisation expressément donnée pour le percement de la dalle, totalement inutile si elle n’était pas liée à la création des parkings, n’impliquait pas nécessairement l’autorisation de l’ensemble indivisible des travaux incluant cette création, comme l’avaient retenu les premiers juges, la cour d’appel a violé, ensemble, les articles 1156 et suivants du Code civil, 17 de la loi du 10 juillet 1965 et 455 du nouveau Code de procédure civile ; 28) qu’en condamnant in solidum les sociétés Unimag, SCI des Bourrets et SCI Tête de Pont de Suresnes à remettre les parkings dans leur état antérieur, sans limiter sa condamnation à la seule
société ayant la qualité de copropriétaire, laquelle est seule bénéficiaire de l’autorisation donnée par l’assemblée générale des copropriétaires et responsable de sa correcte exécution, la cour d’appel a violé l’article 1165 du Code civil ; 38) qu’en condamnant les mêmes sociétés à mettre en place un système de porte à carte magnétique, sans fournir aucune explication sur le fondement juridique de cette condamnation, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 48) que la résolution votée par l’assemblée des copropriétaires le 17 avril 1985, tant par le syndicat principal que par le syndic secondaire garage n’est pas limitée à ce qu’a retenu la cour d’appel ; qu’en effet, aux termes de la résolution votée :
« Autorisation est donnée à la SCI (Sepimo) de procéder au percement de la dalle située au niveau 32-30, permettant le passage d’un ascenseur et d’un escalier de secours ; en conséquence de quoi, il
sera apporté, au règlement de copropriété et à l’état descriptif de division, les modifications nécessaires (qui auront lieu sans charges augmentatives pour les copropriétaires) ; cette autorisation est donnée sous réserve de la signature par la SCI (Sepimo) du cahier des charges annexé au présent procès-verbal ; le cabinet Villa et le conseil syndical sont mandatés pour renégocier éventuellement ce cahier des charges au mieux des intérêts de la copropriété et selon les bases qui viennent d’être présentées » ; qu’en limitant expressément la résolution votée, sans prendre en compte la condition suspensive de la signature du cahier des charges, qui décrit précisément la totalité des travaux à effectuer et leurs conséquences et dont il avait été débattu lors de l’assemblée générale, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1156 du Code civil ; 58) que les délibérations d’assemblées générales de copropriétaires doivent être interprétées comme tout acte juridique ; qu’elles peuvent contenir des autorisations implicites, mais nécessaires pour mettre en oeuvre la décision explicite ; qu’en refusant de rechercher que l’autorisation, donnée pour le percement de la dalle, impliquait nécessairement les travaux qui ont été exécutés conformément au cahier des charges, auquel il est fait référence dans la résolution, la cour d’appel a violé les articles 1156 du Code civil, 17 de la loi du 10 juillet 1965 et 455 du nouveau Code de procédure civile ; 68) qu’en condamnant in solidum les sociétés Unimag, SCI des Bourrets et SNC Tête de Pont de Suresnes à remettre les parkings dans leur état antérieur, sans limiter la condamnation à la société actuellement copropriétaire et à son locataire seuls bénéficaires de l’autorisation donnée, la cour d’appel a violé l’article 1121 du Code civil » ;
Mais attendu qu’ayant exactement retenu, sans dénaturation, que l’autorisation de travaux, accordée à la SNC par les assemblées générales de copropriétaires du 14 avril 1985, ne portait explicitement que sur le percement de deux dalles et ne comportait aucune autre autorisation, la cour d’appel, qui a souverainement apprécié les modalités de remise en état qu’elle a justement laissées à la charge de toutes les parties responsables à l’égard de la Caisse de retraite des notaires, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne, ensemble, la SCI des Bourrets et la société Unimag à payer à la Caisse de retraite des notaires la somme de huit mille francs en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne la SCI des Bourrets et la société Unimag aux dépens du pourvoi principal ;
Condamne la SCI Tête de Pont de Suresnes et la société Sepimo aux dépens du pourvoi incident ;
Les condamne, ensemble, aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze mai mil neuf cent quatre vingt treize.