Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la compagnie LES ASSURANCES GENERALES DE FRANCE, société anonyme dont le siège social est … (2e),
en cassation d’un arrêt rendu le 3 septembre 1986 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (3e chambre civile), au profit de :
1°/ Monsieur Jean-Pierre Y…, demeurant … (Bouches-du-Rhône),
2°/ Monsieur A… ARNAUD, demeurant … à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône),
3°/ L’entreprise de travaux publics TRAQUINI, dont le siège social est quartier des Crottes à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône),
défendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l’audience publique du 4 janvier 1989, où étaient présents :
M. Jouhaud, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Camille Bernard, rapporteur, MM. B…, Grégoire, Lesec, Kuhnmunch, Fouret, Bernard de Saint-Affrique, Thierry, Averseng, Pinochet, Mabilat, conseillers, Mme Z…, M. Charruault, conseillers référendaires, M. Dontenwille, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Camille Bernard, les observations de Me Vuitton, avocat de la compagnie des Assurances générales de France (AGF), les conclusions de M. Dontenwille, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, le 21 septembre 1979, l’entreprise Y… procédait, avec une pelle mécanique louée à l’entreprise C…, à des travaux de démolition sur un immeuble contigu à la propriété de M. X… ; qu’au cours d’une manoeuvre de l’engin, consistant à pousser une poutre enfouie sous des décombres, une partie de l’immeuble s’est écrasée sur le bâtiment appartenant à M. X… qui a été entièrement démoli ; que M. X… a, le 12 mars 1980, assigné M. Y… et M. C… en réparation de son préjudice ; que M. Y… a appelé en garantie son assureur, la compagnie des Assurances générales de France (AGF), auprès de laquelle il avait souscrit, le 28 avril 1976, un contrat d’assurance de responsabilité civile des chefs d’entreprise, garantissant « les dommages causés par le fait des préposés, de l’exécution des travaux et des ouvrages,.. du matériel, y compris tout appareil mécanique de levage ou de manutention, tels que grue fixe ou sur rails, ascenseur, escalator, monte-charges, pont-roulant » ; que l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 septembre 1986) a déclaré
M. Y… entièrement responsable de l’accident, sur le fondement de l’article 1384 du Code civil, et a dit que la compagnie AGF devrait le garantir de toutes les condamnations prononcées contre lui ; Attendu que la compagnie AGF fait grief à la cour d’appel de l’avoir condamnée à garantir, alors, d’une part, qu’ayant, selon le moyen, constaté l’existence d’une clause d’exclusion relative aux dommages causés ou subis en et hors circulation par tous véhicules terrestres à moteur assujettis à l’obligation d’assurance automobile, elle ne pouvait refuser de lui faire produire ses effets sans violer l’article 1134 du Code civil ; alors, d’autre part, que la clause excluait les dommages causés par des véhicules ; qu’en appliquant néanmoins la garantie à un appareil de levage automobile dont la qualification de véhicule, retenue par le tribunal, n’était pas contestée, l’arrêt attaqué a, selon le moyen, dénaturé la clause claire et précise de la police d’assurance ; alors, enfin, qu’en se bornant, selon le moyen, à affirmer que l’application de la clause viderait de son contenu le contrat d’assurance responsabilité civile de chantier, sans préciser en quoi cette clause aurait un tel effet général, la juridiction du second degré a privé sa décision de base légale ;
Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel, qui n’a pas considéré que la clause d’exclusion litigieuse était claire et précise, s’est trouvée dans la nécessité de l’interpréter en estimant qu’elle ne pouvait recevoir application que dans le cas où le dommage, lié à la circulation ou au stationnement de l’engin, devait être couvert par une assurance obligatoire imposée par l’article L. 211-1 du Code des assurances (loi du 27 février 1958), et que tel n’était pas le cas en l’espèce, où le dommage avait été occasionné par une « manoeuvre de la pelle, ayant provoqué le déplacement d’une poutre dans les décombres, manoeuvre totalement étrangère à la notion d’accident de la circulation telle que l’entend la loi du 27 février 1958, dont l’application a entraîné l’insertion dans les polices des clauses d’exclusion » ; que cette interprétation nécessaire est exclusive de la dénaturation alléguée ; Attendu, ensuite, que ces motifs justifient légalement la décision, abstraction faite de celui
critiqué par le pourvoi ; d’où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses trois branches ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;