Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Edgar A…, né le 14 mars 1950 à Neuilly-sur-Seine, de nationalité française, médecin, demeurant … (16ème),
en cassation d’un arrêt rendu le 16 mars 1989 par la cour d’appel de Paris (1ère chambre B), au profit :
1°) de la société civile professionnelle de médecins Z…, Y… et A…, ayant siège … (16ème),
2°) de M. X…, Pascal Z…, médecin, demeurant …, à Montfort-l’Amaury (Yvelines),
3°) de M. Michel Y…, médecin, demeurant … (16ème),
défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l’audience publique du 20 février 1991, où étaient présents :
M. Jouhaud, président, M. Mabilat, rapporteur, MM. Viennois, Lesec, Kuhnmunch, Fouret, Pinochet, Mme Lescure, conseillers, M. Charruault, conseiller référendaire, Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Mabilat, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. A…, de la SCP Delaporte et Briard, avocat de M. Z…, les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut contre M. Y… et la société civile professionnelle de médecins Z…, Y… et A… ; Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu l’article 1131 du Code civil ; Attendu qu’une société civile professionnelle de médecins a été constituée, le 30 mai 1984, entre MM. Z…, Y… et A… qui, outre un apport en industrie ont, chacun, apporté en nature le droit de présenter un successeur à la clientèle ; que le capital social, formé de ces apports en nature, a été fixé à deux millions de francs et divisé en 2 000 parts sociales qui ont été réparties entre les associés, à raison de 1 600 pour M. Z…, 300 pour M. Y… et 100 pour M. A… ; qu’en 1984, cette répartition a été modifiée par une cession de parts de M. Z… à chacun des deux coassociés ; que, par acte du 10 janvier 1986, M. A…, désireux de se retirer de la société, a cédé à M. Z… les 600 parts dont il était titulaire, au prix de 500 000 francs, et a été autorisé « à se
rétablir où bon lui semblera », par dérogation aux dispositions des statuts interdisant à un associé qui se retire de la société de se rétablir, pendant deux ans, dans le même arrondissement de Paris
ou un arrondissement limitrophe ; qu’à la même date, les trois associés ont conclu un « protocole transactionnel » aux termes duquel « ayant procédé à l’examen de tous les comptes existant entre eux, il sont convenus de régler ceux-ci à titre forfaitaire, transactionnel et définitif » par le versement à M. A…, pour solde de tout compte, de la somme de
100 000 francs, à la charge de la société Y… et Z… ; que, le 9 mai 1986, M. Z… et la société ont assigné M. A…, le premier en nullité de la cession de parts sociales pour défaut de cause, la seconde en nullité de « l’accord transactionnel » ; ,
Attendu que, pour déclarer nulle la cession des parts sociales, ainsi que, par voie de conséquence, la nullité de l’accord transactionnel, la cour d’appel a énoncé que, si des éléments autres que ceux dont les associés ont fait apport lors de la constitution de la société ont été acquis par la suite, le droit de présentation à la clientèle n’en reste pas moins l’élément essentiel de l’actif de la société dont l’objet est l’exercice de la profession médicale, ainsi qu’il résulte des statuts aux termes desquels la cession des parts entraînera interdiction, par le cédant, de se rétablir à proximité pendant deux ans, et que M. A… n’établit pas que pour le prix de 500 000 francs, il aurait cédé seulement sa part des éléments autres que le droit de présentation à la clientèle ; qu’elle en a déduit que l’autorisation donnée à M. A…, dans l’acte de cession, de se rétablir où bon lui semblerait dès la signature de l’acte en le dispensant de l’interdiction de rétablissement prévue aux statuts, avait vidé les parts sociales de leur consistance ; Attendu qu’en se prononçant ainsi, alors que la cession de parts sociales litigieuse n’était pas dépourvue de cause, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 16 mars 1989, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Douai ; Condamne les défendeurs, envers M. A…, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ; Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d’appel de Paris, en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt cinq mars mil neuf cent quatre vingt onze.