Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Manuel Y…, demeurant …,
en cassation d’un arrêt rendu le 23 janvier 1991 par la cour d’appel de Paris (2e chambre, section B), au profit :
1°/ de M. Joaquim Y…, demeurant …,
2°/ de M. José de X…, demeurant …,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 14 mai 1996, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Chartier, conseiller rapporteur, M. Grégoire, conseiller, M. Roehrich, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Chartier, les observations de la SCP Ryziger et Bouzidi, avocat de M. Y…, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. de X…, les conclusions de M. Roehrich, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Manuel Y… fait grief à l’arrêt attaqué (Paris, 23 janvier 1991) d’avoir reconnu l’existence d’une société créée de fait entre lui-même, et ses frères, M. Joaquim Y…, et M. de X…, alors que d’une part, la charge de la preuve de ce qu’une somme d’argent a été versée à titre d’apport pèse sur celui qui prétend démontrer l’existence d’une société créée de fait, et qu’en estimant que MM. Manuel et Joaquim Y… ne rapportaient pas le moindre élément de preuve permettant de penser que les sommes versées par M. de X… constituaient des prêts qu’il consentait à son frère Manuel, tandis qu’il appartenait à M. de X… de démontrer que les sommes qu’il avait versées l’avaient été à titre d’apport, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve; alors que, d’autre part, en estimant que MM. Y… ne produisaient aucune pièce à l’appui de leurs prétentions contestant l’apport en nature d’un camion Mercedes par M. de X… sans s’expliquer sur les raisons qui l’ont conduite à ne pas tenir compte des pièces versées aux débats en première instance et contenues en annexe du rapport d’expertise, la cour d’appel a inuffisamment motivé sa décision; et alors que, enfin, en affirmant que MM. Y… ne produisent ni n’offrent de produire l’attestation que le vendeur du camion aurait dû leur délivrer, sans examiner les documents régulièrement produits en première instance et annexés au rapport de l’expert, la cour d’appel a violé les articles 9 et 132 du nouveau Code de procédure civile et 1343 du Code civil;
Mais attendu que la cour d’appel, par adoption des motifs des premiers juges, retient qu’il résulte des investigations de l’expert nommé par le tribunal que M. de X… a effectué un apport en numéraire par remise d’un chèque le 27 janvier 1982; que dès lors, en relevant que MM. Y… ne rapportaient pas la moindre preuve de ce que les sommes versées constituaient des prêts, elle n’a pas inversé la charge de la preuve, mais seulement constaté que ceux-ci ne rapportaient pas la preuve contraire;
Et attendu que les deux autres branches, qui portent sur un apport en nature de M. de X…, sont inopérantes au regard du moyen, dès lors que, du seul rejet de la première branche, il résulte que M. de X… a bien effectué un apport;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Et, sur le second moyen :
Attendu qu’il est reproché à la cour d’appel d’avoir reconnu l’existence d’une société créée de fait, alors que, en aucun de ses motifs elle n’a caractérisé la vocation de M. de X… à participer aux pertes, privant ainsi son arrêt de base légale au regard de l’article 1832 du Code civil;
Mais attendu qu’ayant constaté la vocation de M. de X… à participer aux bénéfices, elle a ainsi implicitement mais nécessairement constaté sa vocation, simplement éventuelle, à participer aux pertes; que le moyen n’est pas fondé;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Manuel Y…, envers M. Joaquim Y… et M. de X…, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-cinq juin mil neuf cent quatre-vingt-seize.