Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 24 novembre 1987, 86-11.682, Publié au bulletin

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Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 24 novembre 1987, 86-11.682, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que Claudius X…, qui exploitait, sous la forme personnelle, une entreprise de réparation, achat et vente de véhicules automobiles, avait placé celle-ci, en 1949, sous la forme d’une société à responsabilité limitée et en 1962 sous celle d’une société anonyme dénommée  » Claudius X… et ses fils  » dont il était le président-directeur général et possédait neuf cent cinquante actions sur les mille deux cents composant le capital social ; qu’aux termes de deux actes notariés en date du 22 février 1967, Marie Y… son épouse et lui-même avaient fait donation en avancement d’hoirie et en imputation par moitié sur leurs successions respectives, de quatre cent soixante-dix actions de la société  » Claudius X… et ses fils  » à chacun de leurs deux fils, MM. Maurice et André X…, déjà actionnaires de cette société ; que cette donation était consentie à charge par les donataires de servir à leurs parents une rente annuelle et viagère de 10 800 francs constituée sur leurs deux têtes et devant s’éteindre seulement lorsque les donataires se seraient libérés de leur rapport par imputation sur leur part successorale et pour une valeur forfaitaire de 250 francs par action ; que les époux X…-Y… sont décédés, le mari le 21 décembre 1978, et la femme le 18 décembre 1980, laissant, outre leurs deux fils Maurice et André, leurs deux filles Simone épouse Z… et Paulette épouse A… ; que, statuant au résultat d’une mesure d’instruction, le tribunal de grande instance a ordonné les opérations de liquidation et de partage des successions des époux X…-Y…, a fixé à 117 500 francs le montant du rapport dû par chacun de MM. Maurice et André X… sur la base de 250 francs par action conformément aux actes de donation de 1967 et à 466 290 francs la valeur actuelle desdites actions, telle que résultant du rapport d’expertise et a dit que le montant des arrérages de la rente viagère payée par les donataires serait déduit de la masse à retenir pour le calcul de la quotité disponible, mais après déduction des revenus retirés de ces actions par les donataires depuis le jour de la donation jusqu’à celui du partage ; que MM. Maurice et André X… ont relevé appel de ce jugement et devant la juridiction du second degré ont déclaré, invoquant les dispositions de l’article 859 du Code civil effectuer en nature le rapport des actions litigieuses ; que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris et a dit MM. X… irrecevables à procéder au rapport en nature des biens donnés ; .

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que MM. Maurice et André X… reprochent à l’arrêt attaqué (Lyon, 4 décembre 1985) de les avoir déclarés irrecevables à effectuer le rapport en nature des actions données, au motif qu’ayant, dans leurs conclusions de première instance signifiées après le dépôt du rapport d’expertise, opté pour le rapport en valeur, ils ne pouvaient revenir sur leur choix, alors que, d’une part, l’article 859 du Code civil, qui donne à l’héritier la faculté de rapporter en nature le bien donné, ne dispose nullement, selon le moyen, que ce rapport serait impossible lorsque le donataire avait d’abord entendu qu’il y ait partage en valeur et qu’en déclarant les frères X… irrecevables à procéder au rapport en nature par suite de leur option antérieure en faveur du rapport en valeur, la cour d’appel aurait ajouté au texte de l’article précité une disposition qui n’y figure pas ; et alors que, d’autre part, elle n’aurait pas répondu à leurs conclusions par lesquelles ils faisaient valoir qu’ils avaient renoncé au bénéfice des donations de 1967 et décidé de restituer les actions litigieuses à l’indivision, pour que le partage en soit fait en nature ;

Mais attendu que l’arrêt attaqué constate que MM. Maurice et André X… avaient, aux termes de leurs écritures de première instance, accepté que le rapport soit fait en valeur conformément aux stipulations des actes de donation du 22 février 1967 et que leurs cohéritières avaient, de même, par des écritures prises devant les premiers juges, accepté ce rapport tant dans son mode que pour sa valeur ; que de ces constatations, la cour d’appel a justement déduit que cet accord ne pouvait plus être remis en cause et que MM. Maurice et André X… ne pouvaient plus revenir sur leur choix fait en considération des donations de 1967 ; qu’elle a répondu aux conclusions invoquées et légalement justifié sa décision ; d’où il suit que le moyen ne peut être accueili en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que MM. Maurice et André X… reprochent encore à l’arrêt attaqué d’avoir dit qu’ils seront tenus de rapporter à la succession outre la valeur des actions données, les revenus qu’ils en ont tirés, alors que le rapport successoral ne saurait excéder la valeur du bien donné ni s’exercer sur la plus-value conférée à celui-ci par le travail du donataire et qu’en condamnant les frères X… à rapporter les revenus procurés par les actions litigieuses, dès lors que ceux-ci étaient les fruits de leur travail au sein de la société, la cour d’appel aurait violé, par fausse application, l’article 856 du Code civil ;

Mais attendu que l’arrêt attaqué, qui a exactement retenu la valeur de rapport en moins prenant fixée par les actes de donation du 22 février 1967 sur la base de 250 francs par action, n’encourt aucune des critiques formulées par le moyen, lequel manque en fait ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu’il est enfin reproché à l’arrêt attaqué d’avoir dit qu’il convenait de déduire de la valeur des biens donnés les arrérages de la rente viagère qu’ont pu verser les donataires, ces arrérages étant eux-mêmes diminués des revenus que les donataires ont retirés des biens donnés jusqu’au jour du partage, alors que, les fruits et intérêts des choses sujettes à rapport n’étant dus qu’à compter du jour de l’ouverture de la succession, la cour d’appel, en statuant comme elle a fait, aurait, par fausse application, violé l’article 856 du Code civil ;

Mais attendu que pour l’évaluation d’une donation avec charge, le montant de cette charge n’est déductible qu’après avoir été diminué des revenus tirés par le donataire du bien donné ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui avait à rechercher non pas le montant du rapport mais l’importance de la charge, a décidé à bon droit et sans avoir à faire application de l’article 856 du Code civil, que, de la valeur des biens donnés devant être réunis fictivement à la masse des biens à partager, il convenait de déduire les arrérages de la rente qu’avaient pu verser les donataires, ces arrérages étant eux-mêmes diminués des revenus que les donataires ont retirés des biens donnés ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


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