Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société à responsabilité limitée Xyphos, dont le siège est route départementale 73, à Couzon au Mont d’Or, Fontaines-sur-Saône (Rhône), en cassation d’un arrêt rendu le 13 juin 1991 par la cour d’appel de Lyon (1re Chambre civile), au profit de la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), dont le siège est … à Neuilly-sur- Seine (Hauts-de-Seine), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 16 juin 1993, où étaient présents : M. Grégoire, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Thierry, Renard-Payen, conseillers, M. Lesec, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Grégoire, les observations de Me Ryziger, avocat de la société Xyphos, de Me Thomas-Raquin, avocat de la société SACEM, les conclusions de M. Lesec, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu le principe de la primauté du droit communautaire, ensemble l’article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que société Xyphos, qui exploite une discothèque, a conclu le 24 octobre 1985 un contrat général de représentation avec la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique ;
qu’elle n’a pas réglé les redevances dont elle était débitrice pour la période ayant couru de janvier à décembre 1989, et que la SACEM l’a fait assigner devant le juge des référés en paiement d’une provision d’un montant égal à celui de ces redevances ; que la société Xyphos a prétendu que la SACEM s’était rendue coupable d’un abus de position dominante en violation de l’article 86 du traité de Rome, et que le contrat du 24 octobre 1985 était en conséquence illicite ;
Attendu que pour accueillir la demande de la SACEM, la cour d’appel a retenu qu’elle était incompétente pour apprécier la validité du contrat de représentation au regard du traité de Rome, et qu’il lui appartenait seulement de constater que la créance de la SACEM n’était pas sérieusement contestable, dès lors que les stipulations qu’elle invoquait n’étaient pas manifestement illicites ;
Attendu qu’en refusant ainsi d’examiner s’il pouvait être ou non sérieusement soutenu que le taux de redevance proposé par la SACEM, à son cocontractant avait été fixé en violation de l’article 86 du traité de Rome, tel qu’interprété par les arrêts de la Cour de justice des communautés européennes, la cour d’appel a violé le principe et le texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 juin 1991, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble ;
Condamne la société SACEM, envers la société Xyphos, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d’appel de Lyon, en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du treize octobre mil neuf cent quatre vingt treize.