Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société à responsabilité limitée La Colline, dont le siège social est à Solaize (Rhône), Saint-Symphorien d’Ozon,
2 / M. Serge X… Y…, agissant en son nom personnel, Etablissements La Colline, Solaize (Rhône), Saint-Symphorien d’Ozon, en cassation d’un arrêt rendu le 13 juin 1991 par la cour d’appel de Lyon (1re chambre), au profit de la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique « SACEM », dont le siège est … (Hauts-de-Seine), défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 16 juin 1993, où étaient présents : M. Grégoire, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Thierry et Renard-Payen, conseillers, M. Lesec, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Grégoire, les observations de Me Ryziger, avocat de la société La Colline et de M. Di Y…, de Me Thomas-Raquin, avocat de la SACEM, les conclusions de M. Lesec, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu le principe de la primauté du droit communautaire, ensemble l’article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que société La Colline, qui exploite une discothèque, a conclu le 26 novembre 1985 un contrat général de représentation avec la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique ;
qu’elle n’a pas réglé les redevances dont elle était débitrice pour la période ayant couru de mars à septembre 1989, et que la SACEM l’a fait assigner devant le juge des référés en paiement d’une provision d’un montant égal à celui de ces redevances ; que la société La Colline a prétendu que la SACEM s’était rendue coupable d’un abus de position dominante en violation de l’article 86 du traité de Rome, et que le contrat du 26 novembre 1985 était en conséquence illicite ;
Attendu que pour accueillir la demande de la SACEM, la cour d’appel a retenu qu’elle était incompétente pour apprécier la validité du contrat de représentation au regard du traité de Rome, et qu’il lui appartenait seulement de constater que la créance de la SACEM n’était pas sérieusement contestable, dès lors que les stipulations qu’elle invoquait n’étaient pas manifestement illicites ;
Attendu qu’en refusant ainsi d’examiner s’il pouvait être ou non sérieusement soutenu que le taux de redevance proposé par la SACEM, à son cocontractant avait été fixé en violation de l’article 86 du traité de Rome, tel qu’interprété par les arrêts de la Cour de justice des communautés européennes, la cour d’appel a violé le principe et le texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 juin 1991, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble ;
Condamne la SACEM, envers la société La Colline et M. Di Y…, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d’appel de Lyon, en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du treize octobre mil neuf cent quatre vingt treize.