Cour de cassation, Chambre civile 1, du 1 mars 1988, 86-17.417, Inédit

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Cour de cassation, Chambre civile 1, du 1 mars 1988, 86-17.417, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société L’ESPACE, société anonyme, dont le siège est Z.A.C. de Mercières à Compiègne (Oise),

en cassation d’un arrêt rendu le 11 juillet 1986 par la cour d’appel d’Amiens, au profit de la société des AUTEURS ET COMPOSITEURS et EDITEURS DE MUSIQUES (SACEM), dont le siège social est à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), …,

défenderesse à la cassation

La demanderesse invoque à l’appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt :

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 27 janvier 1988, où étaient présents :

M. Fabre, président maintenu comme conseiller, faisant fonctions de président ; M. Grégoire, rapporteur ; M. Jouhaud, conseiller ; Mme Flipo, avocat général ; Mlle Ydrac, greffier de chambre

Sur le rapport de M. le conseiller Grégoire, les observations de Me Ryziger, avocat de la société L’Espace, de la SCP Riché, Blondel et Thomas-Raquin, avocat de la société des Auteurs et Compositeurs et Editeurs de Musique, les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que la société « l’Espace », qui exploitait une discothèque, fait grief à l’arrêt attaqué (Amiens, 11 juillet 1986), statuant en référé, de l’avoir condamnée à payer à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) une provision de 379,075 francs pour des faits de contrefaçon ayant consisté à diffuser, sans l’autorisation de cette société, des oeuvres inscrites à son répertoire, alors, selon le moyen, d’une part, que la SACEM devait démontrer à la fois que des auteurs lui avaient apporté leurs droits de représentation et que des oeuvres appartenant à ce répertoire avaient été diffusées par la société l’Espace, et qu’en l’absence de cette double preuve l’arrêt se trouve privé de base légale, et alors encore que les auteurs ne lui ayant apporté que le droit d’autoriser ou d’interdire la représentation de leurs oeuvres, la SACEM n’avait pas qualité pour agir en contrefaçon en leur nom ; qu’en refusant d’examiner les conclusions développées en ce sens devant elle la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile, et alors encore qu’en l’absence de contrat de représentation conclu avec la société l’Espace l’article 41, alinéa 2, de la loi du 11 mars 1957 ne donnait pas vocation à la SACEM pour agir contre cette société, et alors enfin qu’en agissant comme mandataire de sociétés d’auteurs étrangères la SACEM ne s’est pas conformée à la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur » ;

Mais attendu qu’en conférant aux organismes professionnels d’auteurs visés à l’alinéa 2 de l’article 43 de la loi du 11 mars 1957 la « qualité pour ester en justice pour la défense des intérêts dont ils ont statutairement la charge », l’alinéa 2 de l’article 65 du même texte leur a donné le pouvoir d’exercer l’action en contrefaçon, alors même qu’ils ne sont pas cessionnaires des droits des auteurs, en cas de reproduction ou de représentation, sans leur consentement, des oeuvres qui constituent leur répertoire ou celui des sociétés d’auteurs dont elles ont reçu mandat pour agir aux mêmes fins ; qu’ayant constaté que depuis octobre 1984 la société l’Espace diffusait dans sa discothèque des oeuvres inscrites au répertoire de la SACEM, c’est à bon droit que la cour d’appel reconnait à celle-ci la qualité pour agir en contrefaçon ; Attendu que la société l’Espace fait encore grief à l’arrêt d’avoir déclaré qu’elle a commis une contrefaçon alors, selon le moyen, que la diffusion d’oeuvres musicales dans une discothèque ne constitue pas une représentation mais une communication indirecte au public et que la cour d’appel a en conséquence violé l’article 27 de la loi du 11 mars 1957 et l’article 426 du Code pénal ; Mais attendu que la représentation, telle que définie par l’article 27 de la loi du 11 mars 1957, implique seulement la présence d’un public et peut consister en une communication de l’oeuvre par un procédé quelconque, et en particulier par le disque, de sorte que chaque audition du disque par le public constitue une représentation de l’oeuvre ; D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que le pourvoi reproche à l’arrêt d’avoir déclarée bien fondée la demande de provision de la SACEM, alors qu’en refusant d’examiner le moyen tiré d’un abus de position dominante commis par la SACEM, la cour d’appel aurait violé le principe d’applicabilité directe du droit communautaire, et alors encore que la société l’Espace, se fondant sur le même abus de position dominante, critiquait le montant des sommes réclamées par la SACEM au titre du droit de reproduction et du droit de représentation, et que la cour d’appel a dénaturé les termes du litige en déclarant que l’appelante ne critiquait ni le mode de calcul ni le montant des sommes réclamées ; et alors enfin que la cour d’appel ne s’est pas expliquée sur le moyen d’où résultait la nullité du contrat de représentation proposé par la SACEM ; Mais attendu que la créance invoquée par la SACEM ayant pour fondement la responsabilité délictuelle de la société l’Espace, la cour d’appel n’avait pas à répondre à des moyens ayant trait à la validité des contrats proposés par la SACEM et au montant prétendument excessif des droits qui auraient pu être éventuellement convenus, montant qui ne constituait en l’état qu’un simple élément d’appréciation ; D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ; Sur le quatrième moyen :

Attendu qu’il est enfin reproché à l’arrêt d’affirmer que la provision allouée à la SACEM est calculée par référence aux redevances contractuelles qu’elle aurait pu prévoir, alors, selon le moyen, que la condamnation de la société l’Espace à produire un bordereau de recette démontre que la cour d’appel ne possédait pas les éléments d’information nécessaires et n’a pas contrôlé les calculs présentés par la SACEM, violant ainsi l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la cour d’appel a déclaré fixer la provision allouée à la SACEM à la somme qui lui est apparue non sérieusement contestable et que la communication de pièces sollicitée par la SACEM a pour objet de permettre une évaluation définitive de sa créance ; que par ces seuls motifs l’arrêt se trouve légalement justifié ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


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