Cour d’appel d’Orléans, Chambre commerciale, 19 juin 2008, 07/02348

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Cour d’appel d’Orléans, Chambre commerciale, 19 juin 2008, 07/02348

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS

la SCP LAVAL- LUEGER

la SCP DESPLANQUES- DEVAUCHELLE

19 / 06 / 2008 ARRÊT du : 19 JUIN 2008

No RG : 07 / 02348

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 28 Juin 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :

Madame Mary- Claude X… épouse Y…, demeurant …

représentée par la SCP LAVAL- LUEGER, avoués à la Cour

ayant pour avocat la SELARL CONSEILS ET SYNERGIES, du barreau de TOURS

D’UNE PART

INTIMÉ :

Monsieur Antoine Y…, demeurant …

représenté par la SCP DESPLANQUES- DEVAUCHELLE, avoués à la Cour

ayant pour avocat Me Stéphane PRIMATESTA, du barreau de POITIERS

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL EN DATE DU 25 Septembre 2007

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l’audience publique du 15 Mai 2008, devant Monsieur Le Président REMERY, Magistrat Rapporteur et Monsieur Alain GARNIER, Conseiller, par application de l’article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :

Monsieur Jean- Pierre REMERY, Président de Chambre qui en a rendu compte à la collégialité,

Madame Odile MAGDELEINE, Conseiller,

Monsieur Alain GARNIER, Conseiller.

Greffier :

Madame Nadia FERNANDEZ, lors des débats et du prononcé de l’arrêt.

Lecture de l’arrêt à l’audience en Chambre du Conseil du 19 Juin 2008, par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

La Cour statue sur l’appel, interjeté par M. X…, épouse Y…, suivant déclaration du 25 septembre 2007 (no 07 / 02348), d’un jugement rendu le 28 juin 2007 par le tribunal de grande instance de Tours.

Pour l’exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées et déposées les :

*18 mars 2008 (par M. Y…),

*22 avril 2008 (par Mme Y…- X…).

Dans le présent arrêt, il sera seulement rappelé ici que les époux Y…, qui sont en instance en divorce, sont propriétaires d’un fonds de commerce de pharmacie, que Mme Y…, pharmacienne, exploite individuellement au centre commercial des Atlantes à St- Pierre- des- Corps (Indre- et- Loire). Souhaitant apporter ce bien commun à une S. A. R. L., la société Pharmacie des Atlantes, dont les statuts ont été enregistrés le 27 mars 2007 et dont le capital est réparti entre elle- même, à concurrence de 80 %, et son fils Jérôme, également pharmacien, pour le surplus, Mme Y… s’est heurté au refus de son époux et a saisi le tribunal de grande instance de Tours, sur le fondement de l’article 217 du Code civil, afin de passer outre. Le jugement déféré à la Cour dans la présente instance ayant rejeté sa demande d’autorisation d’apport en nature à titre onéreux, Mme Y… en a relevé appel.

En appel, chaque partie a développé les demandes et moyens qui seront analysés et discutés dans les motifs du présent arrêt.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du magistrat de la mise en état du 7 mai 2008, dont les avoués des parties ont été avisés.

A l’issue des débats, le président d’audience a indiqué aux parties que l’arrêt serait rendu le 19 juin 2008.

MOTIFS DE L’ARRÊT

Sur la procédure

Attendu qu’il résulte des dispositions des articles 1286 à 1288 du Code de procédure civile que, lorsque la cour d’appel est saisie, sur le fondement de l’article 217 du Code civil, d’une demande d’autorisation judiciaire pour passer outre au refus d’un conjoint de consentir à un acte de disposition sur les biens communs, l’affaire, dont la nature est ainsi contentieuse- ce qui exclut également le caractère obligatoire de la communication de la cause au ministère public, les dispositions générales de l’article 425 du Code de procédure civile ne la prévoyant pas, non plus, en cette matière- doit être instruite et jugée en chambre du conseil ; qu’en l’espèce, les débats, qui ont eu lieu le 15 mai 2008, se sont cependant tenus en audience publique, mais sans que personne n’ait, conformément aux dispositions des articles 437 et 446 du Code de procédure civile, requis la poursuite des débats en chambre du conseil ou soulevé, avant leur clôture, de nullité à cet égard ; qu’il y a donc lieu de passer outre ;

Sur le fond

Attendu que l’apport en société d’un fonds de commerce, dont le caractère commun n’est pas discuté est, au sens de l’article 1424 du Code civil, une aliénation et suppose donc le consentement des deux époux ou, à défaut, l’autorisation judiciaire prévue à l’article 217 du Code civil ;

Attendu qu’aux termes de ce dernier texte, l’autorisation, dont la possibilité n’est pas exclue en cas d’instance en divorce en cours, peut être donnée si le refus du conjoint n’est pas justifié par l’intérêt de la famille ; qu’à lire le texte, il n’appartient donc pas spécialement à Mme Y… de démontrer que l’acte projeté est conforme à l’intérêt familial, comme l’exige M. Y… (p. 6 de ses conclusions), mais de prouver que le refus de son conjoint n’est pas, quant à lui, justifié par un tel intérêt ; que, par conséquent, l’intérêt de la famille fait, en réalité, l’objet par les juges d’une appréciation globale ;

Que, pour l’essentiel l’opposition de M. Y… est fondée sur le fait que, dans une S. A. R. L. exploitant une officine de pharmacie, tous les associés doivent être pharmaciens, par application des dispositions de l’article L. 5125- 17, alinéa 3 du Code de la santé publique et que, lui- même étant mandataire judiciaire, il ne peut être associé, de sorte que ses intérêts patrimoniaux se trouveraient compromis, comme ceux de la communauté, l’apport étant fait, selon lui, sans contrepartie pour elle, contrairement à la vente qu’il appelle de ses voeux ; que, toutefois, M. Y…, qui conteste globalement le choix d’un apport en société du fonds, sans distinguer entre les différentes formes sociales possibles, ne s’explique pas sur les conséquences fiscales, plus pénalisantes, d’une cession par rapport à celles de l’opération de mise en société envisagée et ne prend pas en considération le fait que si, effectivement, dans la forme sociale choisie, lui- même ne puisse être associé, la valeur des parts attribuées à son épouse entrera dans le patrimoine commun, de sorte que, lors de la liquidation de la communauté, ses droits personnels seront préservés, M. Y… n’explicitant pas en quoi  » la valeur de la pharmacie  » pourrait être diminuée- ou cette diminution favorisée- par l’apport en société (p. 7 de ses conclusions) ; que, par ailleurs, la mise en société d’une officine individuelle de pharmacie, en ce qu’elle permet, en l’espèce, à Mme Y… de ne pas être seule à assumer les lourdes obligations professionnelles, notamment au regard du temps de présence, des pharmaciens d’officine, et aussi d’établir le seul enfant commun du couple- qui, au surplus, apporte une importante trésorerie-, ne peut, quelle que soit la situation personnelle des parties, être jugée contraire à l’intérêt familial ; que, par conséquent, il n’existe pas, au sens de l’article 217 du Code civil, de justification au refus de M. Y… ;

Que le jugement sera donc infirmé ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

STATUANT hors la présence du public, par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort :

INFIRME le jugement déféré et AUTORISE Mme Mary- Claude X…, épouse Y…, à apporter à la S. A. R. L. Pharmacie des Atlantes, dont le siège est Centre commercial « Les Atlantes » à Saint- Pierre- des- Corps (Indre- et- Loire), le fonds de commerce d’officine de pharmacie dépendant de la communauté formée entre elle et son époux Antoine Y…, qu’elle exploitait individuellement en ce lieu, tel que cet apport est prévu par le contrat d’apport établi par Actis conseils le 27 mars 2007 ;

CONDAMNE M. Y… aux dépens de première instance et d’appel et à payer à Mme X…- Y…, la somme de 2. 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

ACCORDE à la SCP Laval- Lueger, titulaire d’un office d’avoué près la cour d’appel d’Orléans, le droit à recouvrement direct reconnu par l’article 699 du Code de procédure civile ;

ET le présent arrêt a été signé par M. Rémery, Président et Mme Fernandez, Greffier ayant assisté au prononcé de l’arrêt.


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