Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
La SARL CARL ZEISS est une filiale de la société ZEISS en Allemagne ayant pour activité la fabrication et la commercialisation de matériel optique destiné aux secteurs industriels de la recherche et médical. La société CARL ZEISS a organisé la distribution du matériel ZEISS selon des divisions internes dont l’une, intitulée » micro « , gère la commercialisation de l’ensemble de la gamme des microscopes de la marque, elle-même répartie en fonction du type de produit, les éléments standard de la gamme représentant sur les trois dernières années une moyenne de 524 ventes par an étant confiés à un réseau de revendeurs sur l’ensemble du territoire métropolitain bénéficiant notamment, d’une remise de 25 % pour l’achat de ce matériel tandis que le haut de gamme correspondant au cours de la même période à 11 ventes annuelles est assuré par son propre personnel. A partir du 05 juin 1984, la SA MICRO MECANIQUE a pu bénéficier du label » réparateur agréé CARL ZEISS RFA » puis est devenue le 19 février 1985 revendeur de la société CARL ZEISS pour son matériel microscopique standard. Par courrier du 19 juin 1990, la société CARL ZEISS ayant mis sur le marché une nouvelle gamme d’instruments dont elle entendait assumer elle-même l’entretien a avisé la société MICRO MECANIQUE de ce qu’elle ne pouvait maintenir à son profit le label d’atelier de réparation agréé en précisant que les accords de partenariat commercial demeuraient en vigueur. En 1997, la société MICRO MECANIQUE a revendu à L’INSTITUT PASTEUR un microscope AXIOPHOT qui n’entrait pas dans le programme de revente et qu’elle avait acquis, par un circuit parallèle, par l’intermédiaire d’une société allemande auprès de la société mère ZEISS. Arguant d’un comportement inadmissible et d’un manquement à son obligation de loyauté à son égard de la part de la société MICRO MECANIQUE, la société CARL ZEISS a, par lettre du 14 avril 1997 mis un terme immédiat à leurs relations commerciales. La société CARL ZEISS a, par la suite,
accepté de fournir la société MICRO MECANIQUE aux conditions de son tarif sans remise. C’est dans ces circonstances que la société MICRO MECANIQUE a initié une action à l’encontre de la société CARL ZEISS devant le tribunal de commerce de VERSAILLES aux fins d’obtenir le bénéfice des modalités de prix antérieures sous astreinte, outre des dommages et intérêts et cette dernière a formé une demande reconventionnelle en réparation du préjudice prétendument subi. Par jugement rendu le 16 juin 1999, cette juridiction a dit que la société CARL ZEISS n’avait pas usé d’une pratique discriminatoire en se réservant personnellement la commercialisation des appareils de haute technologie dont le microscope AXIOPHOT 2, que la société MICRO MECANIQUE n’avait pas commis de faute en procédant à l’achat par un circuit parallèle d’un microscope de ce type revendu à L’INSTITUT PASTEUR, et que la société CARL ZEISS n’était pas fondée pour ce seul motif à rompre les relations commerciales et à refuser toute remise, condamné la société CARL ZEISS à verser à la société MICRO MECANIQUE les sommes de 19.875,80 francs (3.030,05 euros) au titre de remise complémentaire pour l’exercice 1995 – 1996 et de 210.000 francs (32.014,29 euros) de dommages et intérêts, rejeté les demandes reconventionnelles de la société CARL ZEISS, alloué à la société MICRO MECANIQUE une indemnité de 10.000 francs (1.524,49 euros) en vertu de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et condamné la société défenderesse aux dépens. Appelante de cette décision, la société CARL ZEISS expose que le réseau de revendeurs des produits ZEISS dont faisait partie la société MICRO MECANIQUE qui a été constitué uniquement pour la commercialisation du matériel standard, n’a pas vocation à vendre la partie supérieure de sa gamme comprenant les microscopes AXIOPLAN et AXIOPHOT distribuée en raison de sa spécificité par ses propres services. Elle relève que nonobstant cette organisation, la société MICRO MECANIQUE a fourni à
l’INSTITUT PASTEUR un équipement AXIOPHOT en violant ses obligations de loyauté et celle fondamentale de collaboration commerciale ce qui justifiait la cessation des relations contractuelles et du bénéfice des conditions tarifaires réservées aux revendeurs. Elle prétend que les agissements de la société MICRO MECANIQUE lui ont causé divers chefs de préjudice résultant de la perte de marge afférente à cette affaire de 91.331 francs (19.923,32 euros) et de la perte d’un marché important en soulignant que l’intimée n’a pas hésité à recourir à une revente à perte pour le capter. Elle considère que la société MICRO MECANIQUE ne peut éluder sa responsabilité en critiquant de manière artificielle les pratiques commerciales qu’elle avait développées à son égard en indiquant que leurs deux sociétés ne sont pas concurrentes et que l’abus de position dominante et les discriminations que celle-ci lui impute sont inopérantes et, en relevant qu’il n’y avait pas lieu de la privilégier en lui laissant commercialiser ses produits haut de gamme dont elle se réserve la vente. Elle dénie tout manquement de sa part au titre de l’organisation de la vente des microscopes de technologie courante en faisant valoir que la société MICRO MECANIQUE disposant d’une parfaite égalité de traitement avec les autres revendeurs sur le plan des remises de base et supplémentaires, que celle-ci peut toujours acquérir des pièces de la société ZEISS au tarif normal eu égard à la rupture des relations contractuelles et que les livraisons qui lui étaient destinées ont été acheminées selon un cours normal. Elle ajoute que la société MICRO MECANIQUE ne peut prétendre avoir subi un préjudice, au demeurant évalué selon des critères non pertinents, eu égard au caractère extrêmement fluctuant de son chiffre d’affaires et non justifié des éléments invoqués. Elle sollicite donc, par voie d’infirmation, l’entier débouté de la société MICRO MECANIQUE, 59.658,03 euros de dommages et intérêts en réparation de son
préjudice financier, la publication de l’arrêt à intervenir aux frais de l’intimée dans trois journaux d’audience nationale de son choix à concurrence de 3.048,98 euros maximum par insertion ainsi qu’une indemnité de 7.622,45 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. La société MICRO MECANIQUE oppose qu’elle était fondée par le principe du libre jeu de la concurrence à se fournir sur un marché parallèle et en déduit que la société CARL ZEISS a rompu abusivement les accords contractuels en soutenant que la conclusion de l’opération régulière avec l’INSTITUT PASTEUR a été exclusive de toute concurrence déloyale de sa part. Elle fait état de pratiques discriminatoires dont aurait fait preuve à son égard la société CARL ZEISS, occupant selon elle une position dominante sur le marché de la vente de microscope haut de gamme, en lui refusant de lui vendre ce type de matériel alors qu’elle dispose des compétences requises à cette fin et que l’appelante ne mène pas, en réalité, une politique commerciale de vente directe uniforme, en n’acceptant pas de manière injustifiée d’appliquer des remises commerciales depuis la cessation des relations contractuelles et en lui imposant des délais de livraison anormalement longs. Elle se prévaut du préjudice lié à la rupture inopinée et sans fondement des relations commerciales sans préavis au sens de l’article L.442-6 du code de commerce qui n’a pas été évalué à sa juste mesure par les premiers juges, outre de ceux résultant de la perte de marge sur la vente du matériel de gamme standard de mai 1997 au 31 décembre 2000 de 211.669,67 euros, de la réimpression de son catalogue (55.082,42 euros), de l’atteinte à sa réputation commerciale (30.489,80 euros) et de la perte de marge sur le matériel haut de gamme (76.225 euros) ainsi que du non acquittement de sa facture du 13 juin 1997 au titre des remises supplémentaires. Elle forme appel incident pour voir dire la société CARL ZEISS mal fondée à lui refuser la commercialisation de ses
appareils de haute technologie dont le microscope AXIOPHOT 2 ou AXIOVERT 135 et obtenir les sommes de 3.838,86 euros à titre de remise complémentaire pour l’exercice 1995/1996 et de 373.466,85 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier et commercial. Elle réclame, en outre, l’insertion de la présente décision dans deux journaux de son choix aux frais de la société CARL ZEISS et une indemnité de 9.147 euros en vertu de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2002. La société MICRO MECANIQUE a sollicité le 28 mars 2002, sa révocation en invoquant les conclusions et trois pièces déposées par l’appelante le 14 février 2002 et les nouveaux documents qu’elle entend communiquer par les contredire. La société CARL ZEISS s’est opposée à cette prétention et a demandé à la Cour de déclarer irrecevables les pièces versées aux débats par la société MICRO MECANIQUE après la clôture. ä MOTIFS DE LA DECISION : SUR L’INCIDENT DE REVOCATION DE L’ORDONNANCE DE CLOTURE Considérant que l’appel de la décision attaquée ayant été relevé, le 28 juillet 1999, les parties ont l’une et l’autre disposé des plus larges délais pour présenter leurs moyens et produire les pièces utiles à leur défense avant que la clôture intervienne, seulement le 28 février 2002 ; considérant qu’alors que son prononcé avait déjà été reporté, au 14 février 2002, la société MICRO MECANIQUE avait signifié des conclusions, le 04 février 2002, et communiqué 9 nouvelles pièces concernant déjà les sociétés MASSILIA, META SYSTEMS et NOESIS ; que la société CARL ZEISS a, dès lors en réponse, signifié des écritures et communiqué trois autres pièces le 14 février 2002, la clôture ayant été consécutivement renvoyée au 28 février 2002 aux fins de permettre à la société MICRO MECANIQUE de les examiner et le cas échéant d’y répliquer ; que le 28 février 2002, l’ordonnance de clôture a été rendue sans nouvelle intervention de la société MICRO
MECANIQUE qui ne s’y est pas opposée ; considérant que deux des trois pièces communiquées par la société MICRO MECANIQUE, le 27 mars 2002, soit un mois moins un jour après la clôture et la veille de l’audience de plaidoiries portée à sa connaissance dès le 26 janvier 2000, sont de date antérieure à son prononcé et qu’il appartenait à l’intimée de recueillir auparavant l’attestation de la clinique EL FARABI ; considérant qu’en l’absence de toute cause grave au sens de l’article 784 du nouveau code de procédure civile survenue depuis l’ordonnance de clôture, celle-ci sera maintenue tandis que les pièces nä 55 à 57 produites le 27 mars 2002 par la société MICRO MECANIQUE seront exclues des débats en application de l’article 783 du même code. * Sur la rupture des relations contractuelles :
Considérant qu’il s’infère de l’ensemble des éléments de la cause, que Monsieur X…, après avoir été agent technique mécanicien au sein de la société CARL ZEISS du 05 janvier 1976 au 30 mars 1979, jour de sa démission, a créé la société MICRO MECANIQUE dont il est le dirigeant ; considérant qu’après son départ, Monsieur X… a repris contact avec la société CARL ZEISS et obtenu de sa part, le 05 juin 1984, que la société MICRO MECANIQUE puisse bénéficier du label de réparateur agréé par cette société, et le 19 février 1985, qu’elle soit intégrée dans son réseau de revendeurs ; considérant qu’aux termes du courrier du 19 février 1985, l’accord de la société CARL ZEISS est subordonné expressément à la revente des équipements standard de microscopes ZEISS et de leurs accessoires, dans la région où la société MICRO MECANIQUE assure la maintenance d’instruments divers et à la durée d’un an ; considérant que cet accord a été renouvelé, le 02 juillet 1996, sans limitation de durée, mais à la même condition explicite d’exclusion de tout le programme AXIO correspondant au haut de gamme, étant toutefois stipulé au profit de la société MICRO MECANIQUE dans les cas où elle signalerait un besoin
au sujet de ces appareils à la société CARL ZEISS, des remises sur le matériel consommable et sur les prix de certaines pièces de remplacement ainsi qu’une commission d’informateur de 5 % ; considérant, en outre, que les « conditions revendeurs » énoncent dans le programme de revente confié à la société MICRO MECANIQUE chacun des matériels standard et accessoires qui en sont l’objet et stipulent une remise de base de 25 % sur tous ceux-ci et une remise supplémentaire, en fonction des chiffres d’affaires réalisés ; considérant que lors du lancement de nouveaux instruments, le maintien de ces mêmes accords dans les conditions identiques a été confirmé, le 19 juin 1990, par la société CARL ZEISS à la société MICRO MECANIQUE ; considérant qu’il ressort de la lettre du 09 octobre 1995 et de l’attestation de Monsieur Y…, du 20 octobre 1997, qu’en différentes occasions, la société MICRO MECANIQUE a tenté d’obtenir de la société CARL ZEISS la faculté de revendre les microscopes haut de gamme, mais que Monsieur Z…, directeur de la division « Micro », lui avait clairement indiqué que cela n’entrait pas dans la politique commerciale de la société CARL ZEISS compte tenu de la nature très spécifique du matériel en cause ; considérant qu’il suit de là, qu’il était imparti à la société MICRO MECANIQUE sans nulle équivoque et de façon constante, depuis 1985, la commercialisation des équipements microscopiques ZEISS, standard, sans avoir aucune vocation de vendre les produits AXIOPLAN et AXIOPHOT ; or, considérant qu’après que l’INSTITUT PASTEUR souhaitant être équipé d’un modèle AXIOPHOT 2 ait pris contact avec la société CARL ZEISS qui lui a fait deux propositions successives avec en second lieu une remise plus importante ayant su être concurrencée par une autre société, la société MICRO MECANIQUE le lui a vendu, le 24 mars 1997, après l’avoir fait acquérir auprès de la société mère CARL ZEISS en Allemagne, par la société de droit allemand CHRONIMO ;
considérant que la société CARL ZEISS se prévalant de cette situation a, par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 avril 1997, rompu les relations avec la société MICRO MECANIQUE à effet immédiat ; considérant que le non respect patent de la société MICRO MECANIQUE des conditions contractuelles du partenariat commercial qu’elle entretenait avec la société CARL ZEISS comme son manquement manifeste à l’exécution loyale et de bonne foi des conventions existant entre elles, sont constitutifs d’un motif valable pour la société CARL ZEISS de mettre un terme à leurs relations ; considérant toutefois, que les relations commerciales entre les parties s’étaient poursuivies auparavant pendant douze ans sereinement aux dires mêmes de la société CARL ZEISS ; que la société MICRO MECANIQUE n’était titulaire d’aucune exclusivité mais qu’il apparaît que ses chiffres d’affaires au titre des produits CARL ZEISS avaient beaucoup augmenté au cours des deux dernières années sans que néanmoins, il ne soit allégué qu’elle ait dû effectuer des investissements spécifiques pour l’exercice de cette activité ; considérant que le manquement final à ses obligations par la société MICRO MECANIQUE, unique au cours des douze années précédentes, ne s’avère pas suffisamment grave au regard de l’ancienneté des relations commerciales pour la priver du préavis prescrit par l’article L 442-6.I alinéa 5 du code de commerce ; considérant qu’eu égard à l’ensemble de ces circonstances, le préjudice ainsi créé à l’encontre de la société MICRO MECANIQUE peut être évalué à la somme de 107.600 francs (16.403,51 euros) sur la base d’une marge de 30 % sur le chiffre d’affaires réalisé du 1er janvier 1997 jusqu’à la rupture du 14 avril 1997 pendant les cinq mois qui auraient constitué, selon la Cour, un préavis raisonnable en l’espèce. * Sur les demandes indemnitaires de la société CARL ZEISS :
Considérant qu’en raison des violations à ses obligations contractuelles déjà constatées, commises par la société MICRO
MECANIQUE ayant engagé sa responsabilité contractuelle, la société CARL ZEISS est en droit de revendiquer la réparation de son préjudice financier en résultant qui correspond à la marge bénéficiaire perdue s’élevant, au vu des justificatifs produits, à la somme de 91.331 francs (13.923,32 euros) ; considérant que la société CARL ZEISS allègue encore que la société MICRO MECANIQUE aurait usé d’un procédé déloyal de revente à perte de l’AXIOPHOT 2 pour l’écarter du marché conclu avec l’INSTITUT PASTEUR ; considérant que bien que la carence de la société MICRO MECANIQUE à communiquer la facture d’achat dont elle s’est acquittée auprès de la société CHRONIMO et celle du coût du transport de l’appareil depuis l’Allemagne jusqu’en France, ne permette pas à la Cour d’apprécier si cette société s’est livrée à une revente à perte au sens de l’article L 442-2 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi nä 96.588 du 1er juillet 1996 entrée en vigueur le 1er janvier 1997 et applicable à la vente en cause du 24 mars 1997, il est indéniable qu’au vu des seuls montants de la facture de la société ZEISS à la société CHRONIMO et du coût de matériel complémentaire nécessaire, sa marge théorique était, à tout le moins, négligeable voire nulle ; que toutefois, cette pratique n’a pas eu pour finalité d’exclure la société CARL ZEISS de l’opération dans la mesure où l’Institut Pasteur qui était déjà titulaire des deux offres successives formulées par la société CARL ZEISS dont la dernière à concurrence de 277.175,85 francs TTC (42.255,19 euros), a préféré acquérir auprès de la société MICRO MECANIQUE au prix supérieur de 284.012,35 francs TTC (43.297,40 euros), en estimant devoir privilégier la qualité des services antérieurement rendus par cette dernière lors de ses interventions de maintenance d’un ancien microscope ainsi que l’a indiqué dans un courrier du 13 février 1998 et qu’en outre, elle aurait en tout cas été à l’origine du même préjudice résultant de la perte de marge sur le marché en question
qui a déjà réparé précédemment ; que la société ZEISS doit dès lors être déboutée de la demande de ce chef. * Sur les prétendues pratiques discriminatoires de la société CARL ZEISS : Considérant que la société MICRO MECANIQUE prétend à cet égard, que l’exclusion par la société CARL ZEISS de ses microscopes de type AXIOPLAN 1 et 2, AXIOPHOT 1 et 2 et AXIOVERT 100 et 135 du programme de distribution avec les revendeurs constituerait un abus de position dominante prohibé par l’article L 420-2 du code de commerce ; considérant que s’il peut être admis que les sociétés CARL ZEISS et MICRO MECANIQUE sont concurrentes sur le marché de la vente de la microscopie haut de gamme dans la mesure où la société CARL ZEISS vend directement ce type de matériel à ses clients et où, il n’est pas discuté que la société MICRO MECANIQUE revend du matériel de ce type de marque NIKON et OLYMPUS, la société MICRO MECANIQUE ne rapporte nullement la preuve qui lui incombe de la position dominante alléguée de la société CARL ZEISS puisqu’elle se contente de la lui imputer sans fournir le moindre élément de nature à permettre à la Cour de se prononcer sur sa réalité ; considérant que la société MICRO MECANIQUE ne peut utilement soutenir que la politique commerciale menée par la société CARL ZEISS attribuant la distribution de la partie standard de sa gamme de microscopie à un réseau de revendeurs dont elle était membre et commercialisant directement par ses soins la partie haut de gamme est discriminatoire dès lors qu’elle est adéquate, compte tenu des spécificités particulières de ce matériel de haute technologie et du nombre limité de marchés et qu’elle est dictée par des considérations objectives tenant au type même de matériel à sa technicité ainsi qu’à la formation requise pour la vente, son installation et ses réparations ; considérant que la société MICRO MECANIQUE ne peut utilement prétendre disposer de toute la compétence nécessaire pour vendre du matériel de microscopie de pointe en se
fondant sur la formation reçue par son dirigeant Monsieur X… au sein de la société CARL ZEISS il y a plus de 20 ans, compte tenu de l’évolution des techniques survenue depuis, alors que ces équipements nécessitent une formation et une expérience dont le fabricant peut légitimement estimer être le seul à avoir la véritable maîtrise, laquelle contribue largement à la préservation et au développement de son image et de sa marque, étant de surcroît observé que la société CARL ZEISS n’aurait pu faire d’exception en faveur de la société MICRO MECANIQUE sans risquer de se voir imputer d’éventuelles discriminations de traitement par certains de ses autres revendeurs ; considérant que la société MICRO MECANIQUE ne peut davantage invoquer l’absence de politique commerciale uniforme de la part de la société CARL ZEISS, en affirmant que cette dernière aurait alloué des marchés de la distribution de microscopes haut de gamme à certains revendeurs ; considérant, en effet, que la mention dans le catalogue de vente de la société BIO-BLOCK, fournisseur de matériel de laboratoire du microscope AXIOVERT 100 dont le prix est, au demeurant, plus de la moitié moindre de celui d’AXIOPHOT ce qui le situe à la marge basse des appareils hauts de gamme, aux fins d’exploiter ce support commercial diffusé à plus de 100.000 exemplaires par an, n’implique pas sa revente par cette société, laquelle a clairement attesté, le 11 mai 1998, transmettre ensuite purement et simplement les demandes d’achat consécutives à la société CARL ZEISS qui les traitent directement en sorte que cette société, agit en qualité d’apporteur d’affaires pour ce modèle, ce qui n’a nullement été interdit à la société MICRO MECANIQUE qui pouvait ainsi, lorsqu’elle appartenait au réseau des revendeurs des produits standard jouer ce rôle et bénéficier d’une commission spécifique à ce titre ; considérant que les cas des sociétés MASSILIA, ATL, META SYSTEMS et NOESIS ne sont pas davantage pertinents ; considérant ainsi qu’il ressort des pièces
produites par la société CARL ZEISS que les sociétés META SYSTEMS et NOESIS ont pour activité de proposer à leurs clients un projet global d’installation de laboratoire comprenant les différents équipements concernés et intègrent dans ce schéma général, le matériel microscopique en s’informant auprès de la société CARL ZEISS des modèles susceptibles d’être offerts à ses clients pouvant comprendre des produits haut de gamme selon les besoins de ces derniers, tandis que la société CARL ZEISS conserve la maîtrise de la démonstration, de la mise en fonctionnement et du service après-vente ; considérant qu’en ce qui concerne la société ATL, la société CARL ZEISS lui a vendu du matériel de démonstration conformément à sa politique commerciale la conduisant à assurer elle-même la distribution de son matériel haut de gamme ; considérant que pour sa part, la société MASSILIA a certifié, le 24 janvier 2002, n’avoir jamais vendu de microscopes ZEISS en France et précisé avoir une activité internationale dédiée aux appels d’offres pour des laboratoires, cliniques ou hôpitaux étrangers, aux fins de leur fournir des équipements « clés en mains »; considérant que la société MICRO MECANIQUE ne démontre ainsi aucun refus de vente présentant un caractère discriminatoire à son détriment de la part de la société CARL ZEISS ; considérant qu’en raison de la rupture des relations contractuelles, la société MICRO MECANIQUE ne peut sérieusement revendiquer le bénéfice des remises accordées aux revendeurs agréés par la société CARL ZEISS, étant souligné que la société intimée a continué par la suite à s’approvisionner auprès de la société CARL ZEISS aux conditions normales de son tarif et que le tribunal ne pouvait retenir à l’encontre de cette dernière un refus de vente dont l’interdiction entre professionnels a été abrogée par la loi du 1er juillet 1996 ; considérant enfin que les délais de livraison anormalement longs allégués par la société MICRO MECANIQUE ne sont
pas établis au vu de l’ensemble des documents administratifs se rapportant à la commande litigieuse et à l’attestation de Madame A… du 11 septembre 1998 qui en était chargée. * Sur les demandes formées par la société MICRO MECANIQUE :
* sur la remise supplémentaire qui serait due à la société intimée :
Considérant que cette société n’est pas fondée à contester le montant de cette remise au titre de l’année 1996 calculée par la société CARL ZEISS sur un chiffre d’affaires de 397.515,95 francs en prétendant que la période de référence était l’année civile, alors que celle à prendre en compte s’écoule sur l’exercice du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1996 et qu’elle ne démontre pas que celui-ci pendant ce délai aurait été supérieur ; que le montant de 19.875,80 francs (3.030,05 euros) exactement évalué par le tribunal en fonction du pourcentage de 5 % prévu au titre de la réalisation de chiffres d’affaires situés entre 350.000 francs HT et 600.000 francs HT sera confirmé. * Sur la perte de marge sur la vente de matériel de gamme standard : Considérant que la société MICRO MECANIQUE qui ne peut se prévaloir d’une rupture abusive des relations contractuelles et qui a continué de se fournir auprès de la société CARL ZEISS, selon son barème ordinaire n’est pas fondée à réclamer une somme de ce chef alors qu’elle n’est plus en droit d’obtenir les conditions applicables aux seuls revendeurs agréés par l’appelante. * Sur les frais de réimpression de son catalogue : Considérant que la société MICRO MECANIQUE qui peut toujours avoir vocation de revendre le même matériel ZEISS comme, lorsqu’elle était revendeur, ne peut rechercher le remboursement du coût de la réédition de son catalogue duquel elle a souhaité exclure les produits ZEISS, auprès de la société appelante puisque la cessation des accords antérieurs ne se révèle pas abusive. * Sur l’atteinte à la réputation commerciale : Considérant que la société MICRO MECANIQUE n’établit aucunement avoir subi un préjudice
quelconque d’image. Sur les autres prétentions des parties : Considérant que les préjudices soufferts par celles-ci étant déjà exactement réparés par les dommages et intérêts accordés par la Cour, il n’y a pas lieu d’ordonner la publication du présent arrêt ; considérant que l’équité commande d’accorder à la société CARL ZEISS une indemnité de 3.000 euros en vertu de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; considérant que la société MICRO MECANIQUE qui succombe à titre principal en ses prétentions, supportera les dépens d’appel. ä PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, REJETTE la demande de révocation de l’ordonnance de clôture de la SA MICRO MECANIQUE, EXCLUT des débats les pièces nä 55 à 57 par elle communiquées le 27 mars 2002, INFIRME le jugement déféré sous réserve de ses dispositions concernant l’absence de pratique discriminatoire de la SA CARL ZEISS dans la vente directe de ses microscopes haut de gamme, la condamnation de la SA CARL ZEISS au titre de la remise supplémentaire, l’article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens, Et statuant à nouveau des autres chefs, CONDAMNE la SA CARL ZEISS à verser à la SA MICRO MECANIQUE la somme de 16.403,51 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L 442-6.I alinéa 5 du code de commerce, CONDAMNE la SA MICRO MECANIQUE à payer à la SA CARL ZEISS la somme de 13.923,32 euros en réparation de son préjudice financier, ORDONNE la compensation jusqu’à due concurrence des créances respectives des parties, LES DEBOUTE de toutes leurs autres prétentions indemnitaires, CONDAMNE la SA MICRO MECANIQUE à régler à la SA CARL ZEISS une indemnité de 3.000 euros en application
de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, LA CONDAMNE aux dépens d’appel qui seront recouvrés par la SCP DEBRAY-CHEMIN, avoués, conformément à l’article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER
LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M.THERESE GENISSEL
F. LAPORTE