Cour d’appel de Versailles, CT0012, du 3 mars 2005

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Cour d’appel de Versailles, CT0012, du 3 mars 2005

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES 12me chambre section 2 D.C./P.G. ARRET Nä Code nac : 36Z contradictoire DU 03 MARS 2005 R.G. Nä 03/08392 AFFAIRE : S.A. COOPERATIVE DE COMMERCANTS DETAILLANTS CIME NEUILLY … C/ Patrick X… D cision d f r e Ë la cour : Jugement rendu le 23 Septembre 2003 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE Nä Chambre : 5me Nä Section : Nä RG :

2002F01273 Exp ditions ex cutoires Exp ditions d livr es le : Ë : SCP KEIME GUTTIN JARRY SCP GAS E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE TROIS MARS DEUX MILLE CINQ, La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arr t suivant dans l’affaire entre : S.A. COOPERATIVE DE COMMERCANTS DETAILLANTS CIME NEUILLY ayant son sige 108 /116 avenue Charles de Gaulle 92200 NEUILLY SUR SEINE, agissant poursuites et diligences de son Pr sident Directeur G n ral domicili en cette qualit audit sige. S.A.R.L. CARREAU DE NEUILLY ayant son sige 108 /116 avenue Charles de Gaulle 92200 NEUILLY SUR SEINE, agissant poursuites et diligences de son g rant domicili en cette qualit audit sige. repr sent es par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avou s – Nä du dossier 03.875 Rep/assistant : Me C dric FISCHER avocat au barreau de PARIS (P.147). APPELANTES Monsieur Patrick X… … par la SCP GAS, avou s – Nä du dossier 20030934 Rep/assistant : Me Eric COHEN avocat au barreau de PARIS (C.1958). INTIME Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 786 du nouveau code de proc dure civile, l’affaire a t d battue Ë l’audience publique du 18 Janvier 2005 les avocats des parties ne s’y tant pas oppos s, devant Monsieur Denis COUPIN, conseiller charg du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le d lib r de la cour, compos e de : Madame Y… oise LAPORTE, Pr sident, Monsieur Z… ois FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des

d bats : Melle Fabienne A…, Faisant fonction 5FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES La soci t CIME NEUILLY est une soci t anonyme coop rative de commer ants ind pendants, dont monsieur Patrick X… est actionnaire et administrateur. Elle d tient une participation, anciennement de 99,80% et aujourd’hui de 100%, dans la soci t Ë responsabilit limit e CARREAU DE NEUILLY dont monsieur X… a t d sign g rant le 18 septembre 1996. Les soci t s CIME NEUILLY et CARREAU DE NEUILLY sont chacune titulaires d’un bail, respectivement consenti d’une part par la SEM NEUILLY HOTEL DE VILLE (dite NHV) et d’autre part par la Ville de Neuilly-sur-Seine. Ces baux portent sur l’ensemble immobilier constituant un march couvert, connu sous la d nomination « Le carreau de Neuilly », dont les tals ou boutiques sont sous-lou s aux commer ants d taillants pr sents sur ce march . A la suite d’un diff rend survenu en d cembre 2001, et par d lib ration du 15 f vrier 2002, la soci t CIME NEUILLY, associ e majoritaire de la soci t CARREAU DE NEUILLY, a vot la r vocation de monsieur X… de ses fonctions de g rant. Estimant que cette d cision tait d pourvue de juste motif et tait intervenue dans des conditions vexatoires, ce dernier a saisi le tribunal de commerce de Nanterre pour r clamer 35.000 euros de dommages et int r ts. Par un jugement rendu le 23 septembre 2003, cette juridiction a retenu que, eu gard aux circonstances, la soci t CIME NEUILLY, associ e majoritaire de la soci t CARREAU DE NEUILLY, tait fond e Ë demander la r vocation du g rant, mais que des all gations port es dans une circulaire destin e aux commer ants du march , pr sentaient un caractre vexatoire. Elle a en cons quence condamn solidairement les soci t s CIME NEUILLY et CARREAU DE NEUILLY Ë payer Ë monsieur X… 15.000 euros de dommages et int r ts ainsi que 1.500 euros pour ses frais irr p tibles. Les soci t s CIME NEUILLY et CARREAU DE NEUILLY, qui ont interjet appel de cette d cision, rappellent

ensemble les circonstances dans lesquelles est intervenue la r vocation de monsieur X…. Elles expliquent que la soci t CARREAU DE NEUILLY s’est trouv e dans une situation complexe lors du renouvellement du bail principal conclu avec la soci t NHV et venu Ë ch ance le 1er janvier 2001. Elles font grief Ë monsieur X… d’avoir, contre les instructions re ues, sign un bail qui, sur plusieurs points, n’ tait selon elles pas acceptable car pr judiciant gravement aux int r ts de la soci t CARREAU DE NEUILLY. Elles expliquent que monsieur X… ne s’est pas assur au pr alable que les sous-locataires signeraient les sous-baux et accepteraient la r percussion de la hausse du loyer pay Ë la NHV. Elles ajoutent que monsieur X… s’est cru autoris Ë passer commande verbale, sans devis, de travaux sur le march couvert situ rue WINDSOR dont l’exploitation est afferm e Ë la soci t CARREAU DE NEUILLY qui s’est ainsi trouv e contrainte de payer une somme de 10.923,41 euros. Elles exposent que, le 11 d cembre 2001, le conseil d’administration de la soci t CIME NEUILLY avait conf r Ë monsieur X… les pouvoirs, notamment, de signer une convention r glement e autorisant le versement Ë la soci t CARREAU DE NEUILLY d’une indemnit annuelle de 27.000 euros, mais que par lettre du 27 d cembre 2001 monsieur X… a refus toute responsabilit li e Ë ses fonctions de g rant. Elles approuvent en cons quence le jugement qui a estim que la r vocation de monsieur X… tait justifi e mais le critique d’avoir allou Ë ce dernier une somme de 15.000 euros en retenant le caractre vexatoire de la d cision. Elles observent que les premiers juges ne se sont fond s que sur la diffusion d’un communiqu ant rieur Ë la r vocation et n’ont pas caract ris une faute personnelle commise par la soci t CIME NEUILLY lors du vote. Elles affirment que la r vocation tait d pourvue d’intention de nuire et n’est pas intervenue de fa on brutale ni dans des conditions

vexatoires. Elles demandent en cons quence Ë la cour de confirmer le jugement en sa disposition disant que la r vocation est intervenue pour de justes motifs, de l’infirmer pour le surplus, de d bouter monsieur X… de toutes ses demandes et de le condamner Ë leur payer 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de proc dure civile. Monsieur Patrick X… r plique que sa r vocation est intervenue en l’absence de justes motifs car aucun manquement ou aucune faute dans l’exercice de son mandat ne peuvent lui tre reproch s. Il r fute, point par point les griefs articul s par les appelantes et soutient qu’il n’a jamais refus les responsabilit s li es Ë la fonction de g rant en expliquant que l’indemnit annuelle vers e par la soci t CIME NEUILLY Ë la soci t CARREAU DE NEUILLY a t ramen e de 45.000 euros Ë 27.000 euros et que les termes de sa lettre du 27 d cembre 2001 ont concern exclusivement cette r vision Ë la baisse dont il craignait les effets. Il affirme que cette r vocation brutale et sans motif lui a caus un pr judice mat riel li Ë la perte de r mun ration et un pr judice moral puisque les accusations tendaient Ë mettre en cause sa probit . Il chiffre ce pr judice Ë 20.000 euros. Rappelant les termes des deux communiqu s diffus s le 24 janvier 2002 par la soci t CIME NEUILLY, et discutant l’exactitude des faits qui y sont pr sent s, il considre que l’intention fautive de lui nuire est caract ris e. Il conclut ainsi Ë la confirmation du jugement qui lui a allou 15.000 euros de dommages et int r ts de ce chef mais Ë son infirmation sur les motifs de la r vocation, demandant Ë la cour de condamner in solidum la soci t CIME NEUILLY et la soci t CARREAU DE NEUILLY Ë lui payer 20.000 euros de dommages et int r ts en r paration des pr judices subis Ë raison de sa r vocation sans juste motif ainsi que 3.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de proc dure civile et de les condamner aux d pens

incluant les honoraires pay s Ë ma »tre GRENASSIA, huissier de justice. La proc dure a t clÂtur e par une ordonnance du conseiller de la mise en tat en date du 16 d cembre 2004 et l’affaire a t voqu e Ë l’audience du 18 janvier 2005. MOTIFS DE LA DECISION Consid rant qu’aux termes des dispositions de l’article L.223-25 du code de commerce le g rant d’une soci t Ë responsabilit limit e est r vocable par d cision des associ s repr sentant plus de la moiti des parts sociales ; que d cid e sans juste motif, la r vocation peut donner lieu Ë dommages et int r ts ; Consid rant que le 11 d cembre 2001, l’assembl e g n rale de la soci t CARREAU DE NEUILLY, constitu e des deux seuls associ s CIME NEUILLY propri taire de 499 parts et monsieur X… titulaire d’une part, discutait le renouvellement de la convention r glement e existante entre la soci t CARREAU DE NEUILLY et la soci t CIME NEUILLY au titre de la r mun ration des services rendus par cette dernire ; Consid rant qu’il ressort du procs-verbal de cette assembl e et des correspondances cons cutives que l’indemnit annuelle qui avait t ant rieurement de 45.000 euros HT s’est trouv e ramen e, par la d cision de cette assembl e, Ë 27.000 euros ; Consid rant que les associ s donnaient aussi mandat au g rant de finaliser le renouvellement du bail avec la soci t NHV, moyennant un loyer annuel de 1.654.000 francs (252.150,67 euros) HT ainsi que de r gulariser, au regard de la situation des sous-locataires, la cession envisag e par la soci t SOTRAREST de son fonds de commerce incluant le droit au sous-bail ; Consid rant qu’Ë la suite de cette d lib ration, monsieur X… crivait le 27 d cembre 2001 aux membres du conseil d’administration de la soci t CIME NEUILLY pour rappeler que, depuis sa cr ation en 1983, celle-ci avait toujours vers une indemnit qui, r vis e annuellement, s’ levait en 2001 Ë 45.000 euros ; qu’il mettait l’opinion que la r duction de cette indemnit Ë 27.000 euros

risquait d’emp cher la soci t de reconstituer les cautions des commer ants ; Consid rant que monsieur X… concluait son analyse par la phrase suivante : « En cons quence, par la pr sente, je refuse toute responsabilit li e Ë mes fonctions de g rant sur les cons quences financires et juridiques de vos d cisions. Monsieur B… et moi-m me n’ayant pas pris part au vote » ; Consid rant que les termes de cette correspondance traduisent l’existence d’une profonde etgrave dissension entre le g rant et l’associ majoritaire, puisque le d saccord portait sur une incidence financire trs importante de 18.000 euros ; que le g rant signifiait aussi son refus d’assumer ses responsabilit s li es Ë ses fonctions de g rant ; Consid rant que ce refus, m me Ë consid rer, comme le fait valoir aujourd’hui monsieur X…, qu’il ne concernait que la question de l’allocation forfaitaire annuelle, constituait un motif l gitime de r vocation ds lors qu’un tel d saccord rendait impossible le maintien de monsieur X… dans ses fonctions de g rant et que ce dernier n’avait pas offert sa d mission ; Que doit en cons quence recevoir confirmation le jugement qui a dit que la soci t CIME NEUILLY, associ e majoritaire de la soci t CARREAU DE NEUILLY, tait fond e Ë demander la r vocation du g rant et a, en cons quence, d bout ce dernier de sa demande indemnitaire sur le fondement d’une r vocation d pourvue de juste motif sans qu’il soit n cessaire d’examiner la pertinence des autres griefs voqu s par la soci t CIME NEUILLY ; Consid rant que c’est par lettre du 17 janvier 2002 que la soci t CIME NEUILLY a sollicit du g rant, monsieur X…, la r union d’une assembl e devant statuer sur sa r vocation ; que par lettre du 24 du m me mois, elle r it rait sa demande Ë laquelle monsieur X… ne donnait suite que par une convocation mise le 30 janvier pour une r union de l’assembl e, compte tenu du d lai l gal de quinze jours, tenue le 15 f vrier suivant ; Consid rant que,

par deux communiqu s en date du 24 janvier 2002, le pr sident du conseil d’administration de la soci t CIME NEUILLY a port Ë la connaissance des commer ants du march , actionnaires, sa d cision de demander la convocation d’une assembl e de la filiale CARREAU DE NEUILLY pour statuer sur la r vocation de monsieur X… ; Consid rant que ces communiqu s rappelaient, dans des termes identiques, les r solutions vot es par l’assembl e de la soci t CARREAU DE NEUILLY le 11 d cembre 2002 et informaient du refus crit de monsieur X… d’assumer toute responsabilit li e Ë ses fonctions de g rant ; Consid rant qu’aprs avoir expos les retards dans l’ex cution par le g rant de ces d cisions, le pr sident de la soci t CIME NEUILLY indiquait : « Je considre que : – le renouvellement du bail de la SARL avec la soci t NHV doit tre conclu conform ment aux d cisions prises par le Conseil d’Administration de la soci t CIME NEUILLY, – les d cisions d’attribution des emplacements doivent tre propos es en accord avec les int r ts communs de l’ensemble des commer ants, – les facturations des loyers et charges doivent faire preuve de la plus grande transparence vis Ë vis de tous. » ; Consid rant que ce dernier membre de phrase laissait Ë penser aux destinataires de ce communiqu qu’outre les retards explicitement rappel s, monsieur X… serait responsable d’un d faut de transparence dans les facturations des loyers et des charges ; Consid rant que cette affirmation, compte tenu du contexte de dissension constat et expos dans le communiqu , tait de nature Ë porter un discr dit sur la probit de monsieur X… et pouvait tre comprise par les destinataires comme une intention de nuire Ë celui-ci ; que la lecture inexacte qu’en fait aujourd’hui la soci t CIME NEUILLY comme ayant eu simplement pour objet de rassurer les commer ants, toujours trs inquiets, des charges qu’on leur fait supporter, est extraite du contexte

conflictuel de l’ poque ; Consid rant que la circonstance que ces communiqu s aient t diffus s le 24 janvier alors que le vote de la r vocation ne soit intervenu que par d lib ration du 15 f vrier suivant ne saurait tre artificiellement dissoci de la r vocation, en tant que processus global, que la soci t CIME NEUILLY avait r clam e ds le 17 janvier 2002 ; Consid rant en effet que l’appr ciation de la manire dont a t faite une r vocation de dirigeant, ne peut se limiter Ë la seule attitude des intervenants lors de la d lib ration de l’assembl e, mais doit n cessairement prendre en compte les comportements pr c dant et suivant la d cision ; Consid rant ainsi que les circonstances qui ont entour la r vocation de monsieur X…, m me d cid e pour un juste motif, ont port atteinte Ë l’honorabilit de la personne du g rant r voqu auquel elles ont caus un grief particulier dont ce dernier est bien fond Ë r clamer la r paration ; Consid rant que c’est ds lors Ë bon droit que les premiers juges ont satisfait la demande d’indemnisation de monsieur X… en lui allouant de ce chef une somme de 15.000 euros qui, eu gard aux r percussions de cette dissension, expos e aux regards de tous les commer ants du march , correspond Ë la juste appr ciation du pr judice moral subi par monsieur X… ; Qu’il r sulte de ce qui pr cde que le jugement entrepris doit recevoir confirmation en toutes ses dispositions ; SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES Consid rant qu’il serait in quitable de laisser Ë monsieur X… la charge des frais qu’il a t contraint d’engager en cause d’appel ; que les soci t s CIME NEUILLY et CARREAU DE NEUILLY seront condamn es in solidum Ë lui payer une indemnit compl mentaire de 1.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de proc dure civile ; Consid rant que l’ quit ne commande pas d’allouer des sommes sur le fondement du m me texte aux appelantes qui, succombant dans l’exercice de leur recours, doivent

tre condamn es aux d pens d’appel ; Consid rant en revanche que les frais et honoraires d’huissier relatifs Ë la signification de la d cision de premire instance ne saurait compter au nombre de ces d pens ; que la demande de monsieur X… de ce chef ne peut prosp rer ; PAR CES MOTIFS Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort, CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant, CONDAMNE in solidum la soci t CIME NEUILLY et la soci t CARREAU DE NEUILLY Ë payer Ë monsieur Patrick X… la somme compl mentaire de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de proc dure civile, DIT n’y avoir lieu Ë application de ce m me texte au b n fice des appelantes, LES CONDAMNE, sous la m me solidarit , aux d pens d’appel qui pourront tre recouvr s directement par la SCP Daniel et Beno »t GAS, soci t titulaire d’un office d’avou , conform ment aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de proc dure civile. Arr t prononc par Madame Y… oise LAPORTE, Pr sident, et sign par Madame Y… oise LAPORTE, Pr sident et par Mme C… rse GENISSEL, greffier pr sent lors du prononc Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


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