Cour d’appel de Versailles, CT0005, du 24 mai 2005

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Cour d’appel de Versailles, CT0005, du 24 mai 2005

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES Chambres commerciales réunies D.C./P.G. ARRET No Code nac : 63C contradictoire DU 24 MAI 2005 R.G. No 03/04061 AFFAIRE : Michel G. X… … C/ SA AUDIT DE FRANCE – SODIP Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 janvier 1999 par le tribunal de grande instance de PARIS No Chambre : 9ème No Section : 3ème No RG : 98/15805 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD SCP KEIME GUTTIN JARRY E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE CINQ, La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

DEMANDEURS devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation (Chambre Commerciale, Financière et Economique) du 23 avril 2003 cassant et annulant partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel de PARIS, 3ème chambre, section A, le 31 octobre 2000. Monsieur Michel G. X… demeurant 119, rue de la Mutualité – UCCLE 1180 BRUXELLES – BELGIQUE. SARL BUROMASTER agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège 130/132, rue de Normandie 92400 COURBEVOIE. SA FINANCIERE GENERALE D’INVESTISSEMENT « F.G.I. », ayant son siège 130/132 rue de Normandie 92400 COURBEVOIE. Société en liquidation judiciaire et représentée par : Maître Laurence RIFFIER prise en sa qualité de liquidateur, demeurant « Le Clémenceau 1 », 205

avenue Georges Clémenceau 92024 NANTERRE CEDEX. SA MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION « MBTG », agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège 7 avenue de la Grande armée 75116 PARIS. SARL Compagnie de Financement Immobilier « COFIM », agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège 7 avenue de la Grande Armée 75116 PARIS. SA MICHEL BERNARD GESTION agissant en la personne de ses représentants légaux 914.694,10 euros à la société MICHEL BERNARD GESTION, – 3.048.980,34 euros à monsieur Michel X… et, subsidiairement, 72.349,71 euros et 1.461,27 euros à la société BUROMASTER, 18.686,29 euros à MBTG, 653.54 euros à COFIM et 9.507,69 euros à F.G.I., réclamant en outre 15.245 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. La société AUDIT DE FRANCE – SODIP réplique qu’elle s’est vu confier une mission d’expertise comptable exclusivement par la société COFIM jusqu’au 31 mars 1993 et par les sociétés BUROMASTER et FGI jusqu’au 30 septembre 1995, ayant limité sa mission pour les sociétés MICHEL BERNARD GESTION et MBTG à la seule délivrance d’une attestation pour l’obtention de la carte professionnelle. Elle relève qu’il a été définitivement jugé qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exécution de son devoir de conseil en se bornant à vérifier la conformité de la comptabilisation des agios avec les tickets émis par les banques. Elle considère que n’est pas tranchée la question de savoir si elle a commis une faute en ne relevant pas d’éventuelles anomalies

concernant les dates de valeur. Elle fait valoir que la portée du rapport PROGVAL se trouve sensiblement diminuée par les décisions de la cour de cassation qui considèrent non sensiblement diminuée par les décisions de la cour de cassation qui considèrent non justifié l’usage des dates ou jours de valeur, sauf en ce qui concerne les remises de chèques en vue de leur encaissement. Elle estime qu’il n’est pas sérieux d’exiger de l’expert comptable qu’il applique immédiatement un revirement de jurisprudence, à l’époque incertain, qui contredisait des années de pratique bancaire. Elle soutient qu’il ne saurait être imposé à l’expert comptable, dans le cadre de sa mission, de procéder à un contrôle du calcul des dates de valeur et se prévaut à cet égard de l’avis de la compagnie nationale des Commissaires aux Comptes, transposable, selon elle, aux experts comptables. Elle en conclut qu’aucune faute ne peut en l’état lui domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège 7 avenue de la Grande Armée 75116 PARIS. représentés par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués – N du dossier 0338492 Rep/assistant : Me Sylvie DREYFUS aux lieu et place de Me NEIDHART, avocat au barreau de PARIS (A.365) DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI SA AUDIT DE FRANCE – SODIP prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège 12 Cours Lumière 94306 VINCENNES. représentée par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoués, No du dossier 03.930 Rep/assistant : Me Jacques SENTEX, avocat au barreau de PARIS (R.36). Composition de la cour : L’affaire a été débattue à l’audience solennelle du 08 Mars 2005, Monsieur COUPIN Denis, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de : Madame

Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Monsieur Philippe BOIFFIN, Conseiller, Madame Marion BRYLINSKI, Conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse GENISSEL Y… la communication de l’affaire au ministère public en date du 12 novembre 2004 FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES Monsieur Michel X… et les sociétés BUROMASTER, COFIM, F.G.I., MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION MBTG ont assigné la société AUDIT DE FRANCE – SODIP et monsieur Denis Z… en leurs qualités respectivement d’expert comptable et de commissaire aux comptes, devant le tribunal de grande instance de Paris en responsabilité professionnelle pour ne pas avoir vérifié les calculs des agios prélevés et les dates de valeur appliquées par les banques sur divers comptes des sociétés animées par monsieur X… A… un jugement rendu le 18 janvier 1999, cette juridiction, après avoir constaté qu’étaient prescrites les demandes dirigées contre monsieur

Z… pour les faits et les rapports certifiés antérieurement au 07 être reprochée au niveau du contrôle du calcul des dates de valeur. En ce qui concerne le préjudice, elle observe que les redressements suggérés par PROGVAL s’élèvent à 72.349,71 euros et 1.461,21 euros pour la société BUROMASTER. Elle souligne qu’aucune justification n’est produite pour les sociétés FGI et COFIM. Elle critique le rapport PROGVAL à la lumière d’une part de la jurisprudence n’acceptant les dates de valeur que pour les remises de chèques et d’autre part des conditions générales de la B.N.P. et de la CAISSE D’EPARGNE qui ne font pas de distinction entre les chèques sur place et ceux hors place et qui retiennent respectivement 2 et 3 jours alors que le calcul PROGVAL est basé sur 1 jour pour les chèques sur place et 2 jours sur ceux hors place. Elle en déduit que la cour ne peut retenir ce rapport et ne pourrait tout au plus qu’ordonner une expertise judiciaire. Elle soutient que la somme de 73.810,92 euros est rigoureusement sans influence sur la déconfiture du groupe X…, compte tenu de la différence considérable entre les encours financiers et les actifs de celui-ci. Elle affirme que les crédits de refinancement ont été consentis pour supporter non pas des agios abusifs mais des découverts créés par des opérations sans rapport avec l’objet social de la société BUROMASTER. Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement entrepris, au débouté des demandeurs et à leur condamnation in solidum à lui payer 10.000 euros par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Le dossier a été communiqué au ministère public le 12 novembre 2004. La procédure a été clôturée par une ordonnance du

conseiller de la mise en état en date du 22 février 2005. MOTIFS DE LA DECISION Sur les limites de la cassation Considérant que dans son arrêt rendu le 31 octobre 2000, la cour d’appel de Paris a relevé que l’expert comptable, qui était investi d’une mission générale incluant un devoir de conseil, se livrait à un certain nombre de contrôles et en a déduit que la octobre 1993, a estimé que les demandeurs ne rapportaient pas la preuve de la commission par ce dernier de la moindre faute susceptible d’engager sa responsabilité. Elle a pareillement rejeté les demandes indemnitaires contre la société AUDIT DE FRANCE – SODIP, expert comptable, en relevant qu’une transaction signée avec les banques, lesquelles ont abandonné 117 millions de francs (17.836.535,02 euros) de créances, prouvait que la dégradation de la situation ne pouvait être imputée à la surfacturation d’agios et en retenant que n’était pas établie la relation entre les préjudices allégués et un quelconque manquement de la société AUDIT DE FRANCE – SODIP à ses obligations. Elle a en revanche fait droit aux demandes reconventionnelles en paiement des honoraires de monsieur Z… et de la société AUDIT DE FRANCE – SODIP. A… un arrêt en date du 31 octobre 2000, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement, accordant de surcroît la capitalisation des intérêts sur les condamnations non encore exécutées prononcées en faveur de monsieur Z… et condamnant les appelants à payer 20.000 francs (3.048,98 euros) à chacun des intimés. Sur pourvoi de monsieur Michel X… et des sociétés BUROMASTER, COFIM, F.G.I., MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD

TRANSACTION GESTION MBTG et par un arrêt rendu le 23 avril 2003, la chambre commerciale, financière et économique de la cour de cassation, après avoir écarté trois moyens, a relevé que, pour rejeter la demande formée contre l’expert comptable et tendant à la réparation du préjudice résultant des anomalies affectant les dates de valeur, la cour d’appel avait considéré que la transaction conclue avec les banques, qui a conduit celles-ci à l’abandon de 117.000.000 francs (17.836.535,02 euros) de créances, prouvait que la dégradation de la situation du groupe, qui exerçait son activité dans le domaine de l’immobilier, en crise grave depuis plusieurs années, ne pouvait en aucun cas être imputée à la surfacturation d’agios ou à société AUDIT DE FRANCE – SODIP n’avait pas commis de faute dans l’exécution de son devoir de conseil relativement à l’examen des tickets d’agios ; Considérant que la cour de cassation, statuant sur le troisième moyen de cassation pris en ses trois branches, relatif à l’indemnisation du préjudice financier résultant des surfacturations d’agios, a estimé qu’en statuant ainsi la cour d’appel avait légalement justifié sa décision et a déclaré le moyen non fondé ; Qu’il en résulte que la question de la prétendue faute de la société AUDIT DE FRANCE – SODIP dans l’exécution de son devoir de conseil relativement aux agios est définitivement jugée par la négative ; Considérant que la cour d’appel a retenu que « tout au plus peut-il être reproché à l’expert comptable de ne pas avoir attiré l’attention sur les anomalies affectant les dates de valeur » ; qu’elle a spécifié que les appelants ne justifiaient pas d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice dont ils excipaient ; Considérant que la cour de cassation, examinant le quatrième moyen pris en sa troisième branche, a jugé que la cour d’appel n’avait pas donné de base légale à sa décision puisqu’elle n’avait pas recherché si la faute qu’elle relevait n’avait pas causé aux sociétés du groupe X… un préjudice distinct de celui résultant de la dégradation de la situation du groupe imputable à la crise du secteur de l’immobilier ; qu’elle a cassé la décision seulement en ce qu’elle avait rejeté les demandes en réparation des anomalies affectant les dates de valeur ; Considérant qu’aux termes des dispositions des articles 623 et 624 du nouveau code de procédure civile la cassation est limitée à la portée du moyen qui en constitue la base mais ne laisse rien subsister du chef du dispositif qu’elle atteint, quel que soit, à l’égard de celui-ci, le moyen qui a déterminé cette cassation ; Qu’il en résulte que, comme le soutient à bon droit la société AUDIT DE FRANCE – SODIP, le seul litige qui reste soumis à la cour de renvoi est celui

des dates de valeur erronées qui, au demeurant, n’ont fait l’objet d’aucune discussion à l’occasion de cet accord. La cour de cassation a dit qu’en statuant ainsi, sans rechercher si la faute qu’elle relevait n’avait pas causé aux sociétés un préjudice distinct de celui résultant de la dégradation du groupe imputable à la crise du secteur immobilier, la cour d’appel n’avait pas donné de base légale à sa décision. Elle a en conséquence cassé et annulé l’arrêt mais seulement en ce qu’il a rejeté les demandes formées par monsieur Michel X… et les sociétés BUROMASTER, COFIM, F.G.I., MICHEL BERNARD GESTION et MBTG contre la société AUDIT DE FRANCE – SODIP en réparation du préjudice résultant des anomalies affectant les dates de valeur, et renvoyé les parties devant la cour de Versailles. Monsieur Michel X… et les sociétés BUROMASTER, COFIM, F.G.I., MICHEL BERNARD GESTION et MBTG ont saisi la cour de renvoi le 04 juin 2003 en intimant la seule société AUDIT DE FRANCE – SODIP. A… des conclusions signifiées le 03 octobre 2003, maître RIFFIER est intervenu en sa qualité de mandataire liquidateur de la société F.G.I. Monsieur X… et les sociétés BUROMASTER, COFIM, F.G.I., MICHEL BERNARD GESTION et MBTG font une description du groupe de sociétés dont monsieur X… est l’actionnaire et l’animateur et de la société AUDIT DE FRANCE – SODIP qui en était l’expert comptable. Ils expliquent qu’à la suite d’une procédure d’alerte déclenchée par le commissaire aux comptes, un cabinet extérieur spécialisé dénommé PROGVAL a fait une vérification du calcul des frais bancaires, révélant que sur 65.000.000 francs (9.909.186,12 euros) d’agios facturés pendant une dizaine d’années, plus de

21.674.965,08 de francs (3.304.327,13 euros) avaient été prélevés sur les comptes bancaires sans aucun fondement contractuel ou au titre d’abus commis par les banques dans l’utilisation du système des dates de valeur. Ils précisent qu’en résultat de l’intervention d’un mandataire relatif à la prétendue faute de la société AUDIT DE FRANCE – SODIP de n’avoir pas attiré l’attention de ses clients sur les anomalies affectant les dates de valeur et ses éventuelles conséquences ; Sur la faute alléguée Considérant que monsieur Michel X…, les sociétés BUROMASTER, COFIM, MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION MBTG, maître RIFFIER es-qualités, expliquent que, s’ils ont fait appel à un expert comptable c’est qu’ils attendaient de ce dernier des prestations fiables et notamment la surveillance des comptes ; Considérant qu’il ressort de l’attestation délivrée par monsieur DUPIN DE SAINT B… qui a procédé aux rapports d’analyse de la tenue des comptes des sociétés du groupe BUSONI, que les demandes indemnitaires de ces dernières portent sur les anomalies affectant les dates de valeur entre le 30 septembre 1984 et le 30 septembre 1994 ; Considérant qu’il n’est pas discuté que, pendant cette période, la société AUDIT DE FRANCE – SODIP était l’expert comptable de monsieur X… et intervenait sur certaines des sociétés du groupe de celui-ci ; que

l’ancienneté de sa prestation est avérée par les termes de sa lettre du 19 décembre 1994 affirmant rester à la disposition de son client « comme depuis maintenant près de 20 années » ; Considérant que les parties ne font pas état de lettres ayant eu pour objet de définir, pendant la période litigieuse de dix ans, les limites de la mission de l’expert comptable ; Considérant toutefois que sont produits aux débats des courriers adressés par la société AUDIT DE FRANCE – SODIP à monsieur X… les 19 décembre 1994 et 9 octobre 1995, qui n’ont pas entraîné de réponse ou de protestation sur les points relatifs au montant des honoraires perçus des deux sociétés BUROMASTER et FGI et à la définition de la mission ; Considérant que la société AUDIT DE FRANCE – SODIP rappelait que, pour la société BUROMASTER, ses honoraires annuels étaient passés de 289.300 francs (44.103,50 euros) HT en 1990/91 à 182.750 francs ad’hoc, une transaction a été signée aux termes de laquelle les banques ont « forfaitisé » leurs créances et transigé en bénéficiant en contrepartie de l’abandon des 21 immeubles que les sociétés BUROMASTER, FGI, MBTG et leur filiales possédaient, du règlement d’une somme de 8.000.000 francs (1.219.592,14 euros) par monsieur X…, caution, et de la délégation des loyers générés par les immeubles financés par la BGC privant la société MICHEL BERNARD GESTION et le groupe d’un revenu locatif. Invoquant l’arrêt de la cour de cassation, ils affirment que la faute

de l’expert comptable, qui consistait à n’avoir pas décelé les anomalies affectant les dates de valeur, n’est plus contestable. Ils réfutent les arguments invoqués par la société AUDIT DE FRANCE – SODIP en faisant valoir qu’ils attendaient de leur expert comptable des prestations fiables. Ils observent que les conclusions du cabinet d’études PROGVAL n’avaient jamais, jusque là, été remises en cause et s’en emparent pour chiffrer les préjudices résultant des carences et des fautes de la société AUDIT DE FRANCE – SODIP, à raison de 72.349,71 euros et 1.461,27 euros pour la société BUROMASTER, 18.686,29 euros pour MBTG, 653,54 euros pour COGIM et 9.507,69 euros pour F.G.I. Ils soutiennent que la faute commise par l’expert comptable, de ne pas avoir dénoncé plus tôt les erreurs sur les dates de valeur, a été de nature à aggraver la situation des sociétés du groupe, notamment par l’obligation dans laquelle elles se sont trouvées de procéder en 1992 et 1993 à leur refinancement. Détaillant les conséquences financières pour les sociétés et monsieur X… personnellement de la transaction qu’ils ont été amenés à signer et affirmant l’existence d’un lien

direct qui ne peut être éludé au prétexte de la crise de l’immobilier, ils demandent à la cour de condamner la société AUDIT DE FRANCE – SODIP à payer : – 330.432.712,80 euros aux sociétés FGI, représentée par maître RIFFIER, BUROMASTER, MBTG et COFIM, – (27.860,06 euros) HT en 1993/94 ; qu’elle écrivait aussi « notre mission, à votre demande et pour réduire le montant de nos honoraires, est limitée depuis de nombreuses années à la révision des comptes annuels et éventuellement de situations intermédiaires » ; qu’elle ajoutait que « notre cabinet n’a jamais été missionné pour procéder au contrôle des charges financières décomptées par vos partenaires financiers. L’importance des moyens mis en .uvre par le cabinet PROGVAL et le niveau des honoraires facturés par ce cabinet font notamment apparaître clairement la particularité de cette mission. Nous n’avons jamais négocié les conditions de vos financements ni participé à ces négociations » ; Considérant que les facturations par une banque, à ses clients, d’agios résultant des délais d’encaissement des chèques découlent des conditions contractuelles de fonctionnement du compte bancaire et participent donc des relations entre un fournisseur et son client ; Considérant que, sauf stipulation contraire qui ne sont en l’espèce ni alléguées ni démontrées, il n’entre pas dans la mission d’un expert comptable, chargé de la révision des comptes, de vérifier le bien fondé des

facturations adressées par les divers fournisseurs à sa cliente ; Considérant de surcroît que la société AUDIT DE FRANCE – SODIP expose, sans être contredite, que le contrôle du calcul des dates de valeur exigerait non seulement le pointage des relevés des comptes bancaires mais aussi des bordereaux de remise des chèques ; Considérant ainsi que c’est à tort que monsieur Michel X…, les sociétés BUROMASTER, COFIM, MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION MBTG, maître RIFFIER es-qualités imputent à faute à la société AUDIT DE FRANCE – SODIP l’absence de contrôle des dates de valeur retenues par les banques, vérification dont il n’est pas démontré qu’elle faisait partie de la mission de l’expert comptable ; Mais considérant qu’en plus de l’exécution des taches qui lui sont confiées, un expert comptable est tenu, à l’égard de son client, à un devoir général de conseil, en sa qualité de professionnel averti de la matière qu’il traite ; Considérant que, par une décision rendue le 06 avril 1993 et confirmée par un second arrêt du 10 janvier 1995, la cour de cassation a mis en cause, pour partie, la pratique bancaire des dates de valeur qui ont pour effet d’accroître l’ampleur et la durée des découverts générateurs de frais financiers ; Considérant que, si pour la période de septembre 1994 à avril 1993, il ne peut être fait grief à la société AUDIT DE FRANCE-SODIP d’avoir ignoré la

question des dates de valeur, laquelle n’entrait pas dans sa mission, la publication de la décision importante de la cour de cassation, largement relayée par les organes professionnels d’information, devait l’amener à s’assurer auprès de son client que celui-ci était informé de cette jurisprudence nouvelle de manière à lui permettre de faire valoir auprès des banques une éventuelle discussion des conditions de fonctionnement de ses comptes ; Considérant qu’en s’abstenant de procéder à une telle information, la société AUDIT DE FRANCE-SODIP a manqué à son obligation de conseil ; que ce manquement n’est pas atténué par le niveau de formation et la compétence juridique de monsieur X…, dirigeant du groupe ; que cette faute a causé un préjudice égal au montant de certains des intérêts décomptés par les banques sur les surplus de découverts ainsi créés ; Considérant que les appelants chiffrent le préjudice qui en résulte aux sommes respectives de 72.349,71 euros et 1.461,27 euros pour la société BUROMASTER, 18.686,29 euros pour la société MBTG, 653,54 euros pour la COFIM et 9.507,69 euros pour la société F.G.I., en se prévalant des calculs effectués par le cabinet PROGVAL ; Mais considérant que ce consultant extérieur a procédé à une étude sur la période de septembre 1984 à septembre 1994 de telle sorte que n’ont pas été individualisés les résultats obtenus pour la seule période

d’avril 1993 à septembre 1994 ; Considérant que pendant cette période, la société AUDIT DE FRANCE-SODIP n’était l’expert comptable que des sociétés BUROMASTER et F.G.I. ; Considérant qu’elle fait observer, sans être contredite, que les arrêts de la cour de cassation ne remettent en cause le principe des dates de valeur que pour les remises ou les retraits d’espèces et non pour les celles des chèques en vue de leur encaissement ; que les appelants ne distinguent aucunement les chèques et les espèces ; Considérant que le rapport PROGVAL a été établi de manière unilatérale, sur la commande de monsieur X… ; que les appelants ne discutent pas devant la cour les critiques articulées par la société AUDIT DE FRANCE-SODIP à l’encontre de cette étude et qui tiennent à la circonstance que le cabinet PROGVAL a retenu le postulat de décalages calculés à raison d’un jour de date de valeur pour les chèques remis sur place et de deux jours pour ceux hors place, alors que les conditions générales de la BNP appliquent deux jours pour toutes les remises et celles de la CAISSE D’EPARGNE retiennent trois jours. Considérant que la détermination du préjudice exact résultant de la faute commise nécessiterait de reprendre, pour les seules sociétés BUROMASTER et FGI, chaque mouvement de remise sur les comptes bancaires en distinguant les virements, les chèques et éventuellement les espèces, de vérifier, à l’aide du bordereau de remise bancaire, la date exacte de présentation, de la comparer avec la date de valeur retenue pour chaque opération, de redresser, au jour le jour pendant les dix-huit mois considérés, le solde théorique

de l’éventuel découvert, puis de calculer les frais financiers solde théorique de l’éventuel découvert, puis de calculer les frais financiers résultant de ce solde reconstitué et de les comparer à ceux effectivement facturés par la banque ; Considérant qu’une telle détermination du préjudice, qui reste à la charge des sociétés BUROMASTER et FGI, est rendue impossible par la circonstance que le délai de dix ans, édicté par l’article L.123-22 du code de commerce, de conservation des archives de comptabilité commerciale est écoulé ; Considérant que monsieur Michel X…, les sociétés BUROMASTER, COFIM, MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION MBTG, maître RIFFIER es-qualités, seront, dès lors, déboutés de leur demande d’indemnisation d’un préjudice indéterminable ; Sur les demandes accessoires Considérant que l’équité ne commande pas l’application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que les dépens d’appel seront supportés, après masse, par moitié par chacune des parties qui échouent partiellement en leurs prétentions ; A… CES MOTIFS Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort, sur renvoi après cassation partielle d’une décision de la cour d’appel de Paris en date du 31 octobre 2000 et arrêt de la cour de cassation rendu le 23 avril 2003, Confirme, par substitution de motifs, le jugement en ses dispositions déférées, Déboute monsieur Michel

X…, les sociétés BUROMASTER, COFIM, MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION MBTG, maître RIFFIER es-qualités de mandataire liquidateur de la société F.G.I. de leurs demandes indemnitaires dirigées contre la société AUDIT DE FRANCE – SODIP, Y ajoutant, Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, Condamne monsieur Michel X…, les sociétés BUROMASTER, COFIM, MICHEL BERNARD GESTION et MICHEL BERNARD TRANSACTION GESTION MBTG, maître RIFFIER es-qualités de mandataire liquidateur de la société F.G.I. d’une part et la société AUDIT DE FRANCE – SODIP d’autre part, au paiement, chacun pour moitié, de tous les dépens, en ce compris ceux de l’arrêt cassé, Dit que ceux exposés devant la présente cour pourront être recouvrés directement par les SCP KEIME-GUTTIN-JARRY et LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD, avoués, conformément aux

dispositions de l’article 699 nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


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