Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
DR
Code nac : 39H
12ème chambre section 1
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 18 MARS 2010
R.G. No 08/08774
AFFAIRE :
Société PUBLICOM MEDITERRANEE
C/
– Société PAGES JAUNES
– Société PAGES JAUNES GROUPE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Septembre 2008 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
No chambre : 3
No RG : 2006F3846
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
– SCP DEBRAY-CHEMIN
– SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DIX HUIT MARS DEUX MILLE DIX,
La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Société PUBLICOM MEDITERRANEE
ayant son siège 10 rue de Galice 13100 AIX EN PROVENCE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP DEBRAY-CHEMIN, avoués – No du dossier 08000935
Plaidant par Me Claude VAUDANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
APPELANTE
****************
– Société PAGES JAUNES anciennement dénommée ODA
ayant son siège 7 avenue de la Cristallerie 92317 SEVRES CEDEX, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués – No du dossier 0845976
Plaidant par Me Fabrice VAN CAUWELAERT, avocat au barreau de PARIS
– Société PAGES JAUNES GROUPE
ayant son siège 7 avenue de la Cristallerie 92317 SEVRES CEDEX, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués – No du dossier 0845976
Plaidant par Me Fabrice VAN CAUWELAERT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 Février 2010, Madame Dominique ROSENTHAL, présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Dominique ROSENTHAL, président,
Madame Marie-Hélène POINSEAUX, conseiller,
Monsieur Claude TESTUT, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MAREVILLE
Vu l’appel interjeté le 19 novembre 2008, par la société Publicom Méditerranée d’un jugement rendu le 24 septembre 2008 par le tribunal de commerce de Nanterre qui a :
* mis hors de cause la société Pages Jaunes Groupe,
* reçu la société Pages Jaunes en son intervention volontaire,
* débouté la société Publicom Méditerranée de ses demandes,
* condamné la société Publicom Méditerranée à payer à la société Pages Jaunes la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
Vu les dernières écritures en date du 11 janvier 2010, par lesquelles la société Publicom Méditerranée, poursuivant l’infirmation de la décision entreprise demande à la cour de :
* dire que les documents produits, dont notamment le rapport de la DGCCRF, l’avis du conseil de la concurrence du 22 mars 1994, l’échange de courriers entre les parties et les attestations de ses clients, rapportent la preuve de comportements fautifs réitérés, reprochés à la société Pages Jaunes Groupe et Pages Jaunes, constitutifs d’abus de position dominantes, de pratiques discriminatoires et de concurrence déloyale de 1999 à 2009,
* dire que les documents produits, dont notamment ses bilans depuis 1999 et les attestations de son expert comptable établissent ses préjudices consécutifs à la perte d’une partie de la remise professionnelle, de la baisse du coût des frais techniques, de la perte de chiffre d’affaires et de clientèle, de celle de la valeur de son fonds de commerce et de la perte de trésorerie durant la même période,
* écarter les courriers produits aux débats par les sociétés intimées, dénués de date certaine, à défaut de communication des récépissés de leur envoi en recommandé et accusés de réception,
* débouter les sociétés Pages Jaunes et Pages Jaunes Groupe de leurs demandes,
* condamner conjointement et solidairement les sociétés Pages Jaunes et Pages Jaunes Groupe au paiement de la somme de 4.174.442 euros en réparation des préjudices subis soit :
1.174.442 euros correspondant à la perte de la différence sur la remise et à la baisse des frais techniques,
3.000.000 euros correspondant à la perte de clientèle ayant une incidence sur le chiffre d’affaires et la valeur du fonds de commerce ainsi que sur la trésorerie,
* condamner conjointement et solidairement les sociétés Pages Jaunes et Pages Jaunes Groupe au paiement des sommes suivantes :
10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
le montant retenu par l’huissier en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001,
* ordonner conjointement et solidairement aux sociétés Pages Jaunes Groupe et Pages Jaunes la publication, à leurs frais, de l’arrêt à intervenir dans trois quotidiens régionaux et nationaux,
* dire que les condamnations porteront intérêts de droit à compter de l’assignation,
* ordonner la capitalisation des intérêts,
* condamner conjointement et solidairement les sociétés Pages Jaunes et Pages Jaunes Groupe au paiement de la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
Vu les dernières écritures en date du 25 janvier 2010, aux termes desquelles les sociétés Pages Jaunes Groupe et Pages Jaunes prient la cour de :
confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
* mis la société Pages Jaunes Groupe hors de cause,
* reçu la société Pages Jaunes en son intervention volontaire,
* débouté la société Publicom Méditerranée de ses demandes,
* condamné la société Publicom Méditerranée au paiement de la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens,
le réformer pour le surplus et statuant à nouveau :
* condamner la société Publicom Méditerranée au paiement de la somme de 8.000 euros en raison du caractère abusif de la procédure intentée,
en tous les cas :
* condamner la société Publicom Méditerranée au paiement de la somme de 8.000 euros en raison du caractère abusif de l’appel,
* condamner la société Publicom Méditerranée au paiement de la somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens.
SUR CE, LA COUR
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu’il convient de rappeler que :
* la société Pages Jaunes, anciennement ODA, édite un annuaire professionnel annuel dans lequel des annonceurs peuvent acheter des espaces publicitaires soit directement, soit en recourant à une agence de publicité,
* la société Publicom Méditerranée est une agence de publicité qui conçoit pour le compte de ses clients des publicités à paraître notamment dans cet annuaire,
* ces sociétés sont en relation depuis 1997,
* la société Publicom Méditerranée reprochant à la société Pages Jaunes Groupe un abus de position dominante, des pratiques discriminatoires, un comportement déloyal faussant la libre concurrence, illustré par des lettres de réclamation adressées de 1999 à 2005, l’a assignée devant le tribunal de commerce de Nanterre en paiement de dommages et intérêts,
* la société Pages Jaunes est intervenue volontairement à l’instance ;
Sur la mise hors de cause de la société Pages Jaunes Groupe :
Considérant que la société Publicom Méditerranée, tout en reconnaissant l’intervention volontaire de la société Pages Jaunes, entend obtenir la condamnation conjointe et solidaire de la société Pages Jaunes Groupe ;
Mais considérant que cette dernière a cédé son activité d’édition et de distribution d’annuaires à sa filiale, la société Pages Jaunes SA, à effet au 1er janvier 2004, qui lui succède dans ses droits et obligations ;
Que de sorte, la société Pages Jaunes Groupe, qui n’est plus éditrice, a été justement mise hors de cause par le tribunal ;
Sur les demandes de la société Publicom Méditerranée en ce qu’elles sont formées à l’encontre de la société Pages Jaunes :
Considérant que devant la cour, la société Publicom Méditerranée fonde ses demandes sur les dispositions des articles L.420-2, L.441-6, L.442-6-I,1o-2o du code de commerce et 1382 du code civil ;
Qu’elle prétend, tout à la fois, que depuis le début de leur relation contractuelle, les sociétés Pages Jaunes Groupe et Pages Jaunes ont abusé de leur position dominante, se sont rendues coupables de pratiques discriminatoires et de concurrence déloyale ;
Qu’elle invoque en substance comme fautifs des comportements de la société Pages Jaunes à l’encontre d’annonceurs, la suppression d’une remise de 5 % et la diminution du coût des frais techniques ;
Qu’elle expose reprocher aux sociétés Pages Jaunes Groupe et Pages Jaunes quinze griefs énoncés dans de nombreuses lettres recommandées avec accusé de réception transmises depuis 1999 :
1- la pratique d’une ristourne de 5 % inférieurs à celle habituelle de 15 % consentie par les diffuseurs aux agences de publicité,
2- le refus de communication des renseignements permettant l’accès au logiciel interne de tarification « SESAME »,
3- la baisse de moitié du coût des frais techniques,
4- le refus de communication de la liste des préconisations de marques,
5- la pratique d’une concurrence déloyale,
6- l’obligation de réalisation des maquettes sur un MAC,
7- le refus de communication des pages de couverture des annuaires soldés ou donnés gratuitement un mois avant la date de forclusion,
8- le refus d’accepter les ordres d’insertion pour le compte de clients ayant annulé une commande précédente,
9- le refus de consentir une remise de promotion budgets à partir d’un certain seuil pour les sociétés d’un même groupe,
10- la multiplication de difficultés de contraintes techniques pour les clients lors de la fabrication des publicités,
11- le refus aux clients de tolérance consenties à ceux ayant traité directement avec la régie publicitaire,
12- l’existence de pratiques discriminatoires,
13- l’appui de la société France Telecom,
14- la disparition sur l’annuaire de 2002 de toute référence à la possibilité d’utiliser des agents de publicité,
15- la suppression de la ristourne professionnelle de 5 % ;
Sur le rapport de la DGCCRF du 18 juin 2007 :
Considérant qu’au soutien de ses prétentions, la société Publicom Méditerranée fait état d’un rapport de la direction nationale des enquêtes de concurrence, DNEC, du 18 juin 2007, établi à la suite d’une enquête qui concernerait, selon elle, des faits similaires à ceux reprochés ;
Qu’elle reprend in extenso et commente, en pages 21 à 60 de ses conclusions, des passages de ce rapport extraits des pages 30 à 232 ;
Mais considérant, outre que ce rapport ne présente aucun lien avec le présent litige, que ce document n’a aucune portée probante dès lors qu’il est un rapport administratif interne et que la DGCCRF n’a pas donné suite à cette enquête et a classé le dossier sans le transmettre ni à l’autorité de concurrence, ni à la société Pages Jaunes, ainsi qu’il est établi par la pièce 52 versée aux débats par les sociétés intimées ;
Sur les prétendus comportements fautifs à l’égard des annonceurs :
Considérant que la société Publicom Méditerranée prétend par ailleurs fonder sa demande par la production d’une compilation de courriers qui démontrerait les agissements reprochés à la société Pages Jaunes ;
Considérant toutefois qu’elle omet de préciser que la société Pages Jaunes a apporté une réponse argumentée aux diverses mises en causes et a indemnisé les annonceurs dont les insertions étaient erronées ;
Que la société Publicom Méditerranée ne saurait solliciter le rejet des débats des courriers produits par la société Pages Jaunes au seul motif qu’ils n’auraient pas été envoyés en recommandé avec accusé de réception et ce d’autant, que devant le tribunal de commerce, elle en avait accepté la communication ;
Considérant qu’il ressort des pièces produites que la société Pages Jaunes a répondu utilement aux reproches formulés par la société Publicom Méditerranée :
– le 11 juillet 2000 : les établissements Morselli Lourtet,
– les 27 avril et 13 août 2001 : société Optique Pirioux,
– les 21 janvier 2002, 2 mai 2002 et 5 mai 2003 : société Technic Habitat,
– le 6 mars 2006 : société Air Mer Terre,
– le 24 juillet 2003 : société Proferco,
– le 8 septembre 2003 : société Espi Immobilier,
– le 14 janvier 2004 : société Marseille Protection,
– le 30 janvier 2003 : société MCM,
– les 4 mars, 7 avril, 2 septembre 2003 : société Cipec,
– le 5 octobre 1999 : société Fimotel ;
Que force est de constater que lorsque la société Pages Jaunes n’a pas adressé de courriers à la société Publicom Méditerranée, les erreurs ont été néanmoins rectifiées et des avoirs consentis aux annonceurs afin de les dédommager :
– bon de commande du 20 décembre 2002, concernant l’annonceur Lunch Service faisant apparaître une remise de 194 euros à titre de compensation,
– bon de commande du 6 décembre 2002, concernant l’annonceur Fora Sud,
– bon de commande du 20 mai 2003, concernant l’annonceur Gims faisant apparaître une remise de 4.496 euros à titre de compensation,
– bon de commande du 9 avril 2003, concernant la société Renault Nîmes faisant apparaître une remise de 72 euros ;
Que s’agissant de Monsieur Z…, garage Renault de la Valette, le traitement de la commande a bien été honoré le 21 décembre 1999, aux fins de parution dans l’édition 2000 ;
Qu’aucun reproche n’est justifié en ce qui concerne l’annonce de la société SGGM dès lors, que l’erreur portant sur le classement de l’annonce n’est pas imputable à la société Pages Jaunes ;
Considérant que ces échanges de courriers, s’ils révèlent des prestations commerciales de qualité inégale, n’établissent pas une intention malveillante ou une volonté de nuire ;
Considérant en ce qui concerne les prétendus actes de concurrence déloyale et de démarchage, que la société Pages Jaunes a également répondu aux interrogations de la société Publicom Méditerranée, ainsi qu’il résulte des différents courriers et courriels produits aux débats :
– 18 juillet 2000 : annonceurs Sud Peri Soft et Azur Funéraires,
– 19 février 2004 : annonceur Siam Provence,
– 24 janvier 2003 : annonceur Duo Copy,
– 12 avril 2000 : annonceurs des Bouches-du-Rhône,
– 3 et 18 juin 1999 : société Jaume Valenza,
– 10 juin 2009 : le client Le Froid Méditerranéen,
– 10 juin 2009 : le client Pompes Funèbres de l’Esterel ;
Considérant qu’en vertu du principe de la libre concurrence, il ne peut être reproché à la société Pages Jaunes d’avoir, sans dénigrement et actes déloyaux, sollicité des annonceurs, ce qu’elle a rappelé à la société Publicom Méditerranée dans un courrier du 12 avril 2000, cette situation de concurrence impliquant que certains clients décident de contracter directement auprès d’elle ou de recourir à une agence de publicité ;
Que les trois attestations versées aux débats par la société Publicom Méditerranée (pièces 25, 76 et 143) qui font état des démarches des commerciaux de la société Pages Jaunes, sont insuffisantes à établir un démarchage fautif ou un dénigrement ;
Considérant s’agissant des refus d’insertion dont se plaint la société Publicom Méditerranée que ceux-ci sont justifiés par le respect des normes techniques préconisées par la société Pages Jaunes dans ses conditions générales de ventes ainsi qu’il ressort des courriers adressés :
– 18 décembre 2000 : société Espace 96,
– 18 février 2000 : société Help Dépannage,
– 26 août 2002 : société Rent A Car,
– 24 juin et 8 septembre 2004 : société Lyon Pneu Service,
– 30 octobre 2006 : Gie Sainte Marguerite,
– 26 octobre 2005 : société Pompes Funèbres Universelles,
– 31 mai 1999 : société Atout Services,
– 5 octobre 1999 : société Cmdt,
– 19 mars 2002 : annonceur APF,
– 25 mai et 24 juin 2004 : annonceur Rossi,
– 28 mars et 24 juillet 2003 : annonceur Revel,
– 24 mars et 23 mai 2005 : annonceur Pyrame ;
Considérant que la société Publicom Méditerranée reproche également à la société Pages Jaunes de ne pas lui communiquer le calcul de l’engagé de ses clients pour l’année N-1, afin de lui faciliter l’établissement d’un devis pour l’année en cours ;
Mais considérant que la société Pages Jaunes a, sans comportement déloyal, répondu à la société Publicom Méditerranée le 23 avril 2002, qu’un annonceur qui mandate une agence de publicité pour ses souscriptions publicitaires est à même d’informer son mandataire sur le budget qu’il a souscrit pour l’édition N-1 et sur le détail des parutions ;
Sur la remise consentie par la société Pages Jaunes :
Considérant que la société Publicom Méditerranée soutient que la décision de la société Pages Jaunes de supprimer une ristourne de 5 %, qui s’élevait autrefois à 15 %, lui causerait un préjudice financier ;
Qu’elle expose que sa rémunération se décompose comme suit :
– 5 % HT des factures établies par la société Pages Jaunes, correspondant à la ristourne consentie aux clients qui ne font pas fabriquer leurs publicités par la régie publicitaire,
– les frais techniques afférents à la fabrication des frais de publicité ;
Considérant qu’il convient de rappeler en droit qu’aux termes des dispositions de l’article 20 de la loi du 29 janvier 1993, tout achat d’espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l’édition ou la distribution d’imprimés publicitaires ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d’un annonceur et dans le cadre d’un contrat de mandat écrit. Ce contrat fixe les conditions de la rémunération du mandataire … ;
Que selon l’article 21 de cette loi, le mandataire ne peut ni recevoir d’autre paiement que celui qui lui est versé par son mandant pour la rémunération de l’exercice de son mandat ni aucune autre rémunération ou avantage quelconque de la part du vendeur ;
Considérant que le courrier invoqué par la société Publicom Méditerranée en date du 16 décembre 2009, annonce la suppression de cette remise aux seuls achats d’espaces publicitaires dans les annuaires en ligne et sur les services de renseignements téléphoniques, cette remise continuant à s’appliquer pour toute commande publicitaire portant sur les supports annuaires imprimés ;
Que cette remise est accordée aux annonceurs et ne constitue pas une commission des agences de publicité, la rémunération de l’agence résultant, aux termes des dispositions de l’article 20 de la loi du 29 janvier 1983 précité, du seul mandat écrit la liant à l’annonceur, l’article 21 de la même loi prohibant tout autre paiement et toute rémunération ou avantage quelconque de la part du vendeur ;
Que la détermination des tarifs et avantages proposés par un opérateur relève de sa liberté commerciale ; qu’une remise consentie par un support à un annonceur qui recourt à un intermédiaire de publicité n’est pas discriminatoire dès lors qu’elle est accordée à tous les annonceurs qui font appel aux services d’un intermédiaire ;
Qu’il n’est pas démenti en l’espèce, que la société Pages Jaunes consent ses remises à chaque annonceur achetant son espace par le biais d’une agence de publicité, sans aucune distinction, de sorte qu’aucune pratique discriminatoire ou anticoncurrentielle n’est démontrée ;
Que si la société Publicom Méditerranée a fait le choix de ne solliciter aucun paiement d’honoraires de la part de ses annonceurs et de ne tirer sa rémunération que de la facturation des frais techniques de réalisation des annonces et de la remise accordée par la société Pages Jaunes, cette décision lui incombe, de sorte qu’elle ne peut imputer à cette dernière une baisse de ses revenus ;
Sur le coût des frais techniques :
Considérant que la société Publicom Méditerranée énonce également que le montant de sa rémunération serait déterminé par les coûts afférents à la fabrication de la publicité ; qu’elle soutient avoir été contrainte de s’aligner sur les prix pratiqués par la société Pages Jaunes pour demeurer compétitive ;
Mais considérant que le principe de la liberté du commerce permet une baisse des prix et/ou une augmentation de la qualité des services, le droit de la concurrence interdisant aux opérateurs de s’entendre sur leurs tarifs ;
Qu’en sollicitant des dommages et intérêts en raison de la baisse prétendue des frais techniques, la société Publicom Méditerranée ne fait que reprocher à la société Pages Jaunes de ne pas l’avoir associée à la détermination de ses tarifs, c’est à dire de ne pas avoir mis en place une entente sur les prix ;
Qu’en toute hypothèse, l’analyse des pièces versées aux débats par la société Publicom Méditerranée (105, 126, 127 et 128) ne révèle pas la diminution de moitié des frais techniques, mais seulement de 12 % pour trois formats, les frais afférents à quatre formats étant restés stables et ceux relatifs à un format ayant augmenté ;
Considérant que la société Publicom Méditerranée ne saurait davantage reprocher à la société Pages Jaunes de lui avoir imposé la réalisation d’un logo lui occasionnant un surcoût qu’elle ne peut facturer à ses clients ;
Qu’en effet, cette affirmation est démentie par la lettre circulaire envoyée par la société Pages Jaunes à l’ensemble des agences de publicité le 18 mai 2006, qui ne concerne que les annonces nouvelles pour lesquelles l’agence doit fournir un logo dont le coût est nécessairement facturé au client ; qu’en revanche, les annonces en renouvellement n’impliquent aucun frais de fabrication technique ;
Sur les autres griefs :
Considérant enfin que la société Publicom Méditerranée ne saurait reprocher à la société Pages Jaunes de ne pouvoir accéder à son logiciel de tarification et d’utiliser un logiciel du système MAC, cette société étant libre de le faire et de conserver les outils de gestion qu’elle a mis au point ;
Considérant que toutes autres allégations, liées notamment au refus de communication de la liste des préconisations de marques, des pages de couverture des annuaires soldés ou donnés gratuitement, à la présence du réseau des agences de la société Pages Jaunes sur le site internet « pages jaunes.fr », la disparition sur l’annuaire 2002 de la mention relative à la possibilité d’utiliser des agences de publicité, ne sont nullement étayées et sont dénuées de fondement ;
Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Publicom Méditerranée ne justifie ni d’un abus de position dominante de la société Pages Jaunes, ni de pratiques discriminatoires ou anticoncurrentielles, ni d’actes de concurrence déloyale ;
Que par voie de conséquence, la décision déférée, qui l’a déboutée de l’intégralité de ses demandes, mérite confirmation ;
Sur les autres demandes :
Considérant que l’action en justice, comme l’exercice du droit d’appel, ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d’erreur grossière équipollente au dol ou encore de légèreté blâmable ; que ces exigences ne sont pas satisfaites en l’espèce ; que la demande reconventionnelle sera rejetée ;
Considérant qu’il résulte du sens de l’arrêt que la société Publicom Méditerranée ne saurait bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; qu’en revanche, l’équité commande de la condamner, sur ce même fondement, à verser à la société Pages Jaunes une indemnité complémentaire de 10.000 euros ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire,
– CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré,
– Y AJOUTANT,
– CONDAMNE la société Publicom Méditerranée à payer à la société Pages Jaunes la somme complémentaire de 10.000 euros (dix mille euros) au titre des frais irrépétibles d’appel,
– REJETTE toutes autres demandes contraires à la motivation,
– CONDAMNE la société Publicom Méditerranée aux dépens et DIT que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par la SCP Lissarrague Dupuis Boccon-Gibod, avoués.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Dominique ROSENTHAL, président, et par Sabine MAREVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,