Cour d’appel de Versailles, 12 octobre 2011, 10/04199

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Cour d’appel de Versailles, 12 octobre 2011, 10/04199

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 12 OCTOBRE 2011

R. G. No 10/ 04199

AFFAIRE :

Hélène X…

C/

S. A. CEA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 13 Juillet 2010 par le Conseil de Prud’hommes-Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : Activités diverses

No RG : 09/ 00270

Copies exécutoires délivrées à :

Me Jeannette KOHN

Me Violaine CHAUSSINAND-NOGARET

Copies certifiées conformes délivrées à :

Hélène X…

S. A. CEA

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE OCTOBRE DEUX MILLE ONZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame Hélène X…

78480 VERNEUIL SUR SEINE

comparant en personne, assistée de Me Jeannette KOHN, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

S. A. CEA

46 Sente du Pré

95320 ST LEU LA FORET

représentée par Me Violaine CHAUSSINAND-NOGARET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Juin 2011, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller chargé (e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,

Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,

Madame Christine FAVEREAU, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,

PROCEDURE

Mme Hélène X… a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 10 août 2010, l’appel portant sur la totalité du jugement.

FAITS

Mme Hélène X…, né le 17 avril 1950, a été engagée en qualité de secrétaire, assistante de direction non cadre, niveau IV, échelon 1, coefficient 255, par CDI à compter du 2 janvier 2008, par la société Compagnie Européenne d’Ascenseurs, dite CEA, société de maintenance et dépannage d’ascenseurs employant une trentaine de personnes, après le décès de l’ancienne secrétaire en décembre 2007, qui était restée 8 ans dans l’entreprise.

Son salaire était de 2. 500 € brut, outre un 13ème mois et l’intéressement.

La salariée était convoquée à un entretien le 20 octobre 2008, puis le 21 novembre 2008, la société lui adressait un courrier de recadrage. La salariée adressait un courrier de contestation le 26 novembre 2008, protestant du fait qu’elle était affectée au standard, auquel répondait la société le 3 décembre 2008 en demandant à la salariée de s’améliorer.

Suivant courrier du 12 janvier 2009, la société CEA convoquait la salariée pour un entretien le 20 janvier 2009 en vue d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse et par courrier en date du 23 janvier 2009, elle était licenciée pour faute avec dispense de préavis.

Mme Hélène X… bénéficiait de moins de 2 ans d’ancienneté et la société compte plus de 11 salariés.

Mme Hélène X… a saisi le C. P. H le 27 mars 2009 de demandes tendant à dire que son licenciement est abusif et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre.

La convention collective applicable est celle de la métallurgie.

DECISION

Par jugement rendu le 13 juillet 2010, le C. P. H de Montmorency (section Industrie) a :

– dit que le licenciement de Mme Hélène X… résulte bien d’une cause réelle et sérieuse

-condamné la société CEA à verser à Mme Hélène X… la somme de 2. 500 € à titre d’indemnité de préavis

-débouté Mme Hélène X… du surplus de ses demandes

-laissé les éventuels dépens à la charge des parties

DEMANDES

Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement par Mme Hélène X…, appelante, aux termes desquelles elle demande à la cour, de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société à payer à Mme X… la somme de 2. 500 € au titre de l’indemnité de préavis

-dire que son licenciement est intervenu sans cause réelle ni sérieuse

-condamner la société CEA au paiement de la somme de 25. 000 € en réparation des préjudices subis du fait de la rupture du contrat de travail

-condamner la société CEA au paiement de la somme de 2. 500 € au titre de l’article 700 du CPC

Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement par la société CEA, intimée, par lesquelles elle demande à la cour, de :

– confirmer le jugement

-dire et juger Mme X… non fondée en ses demandes

-l’en débouter

-la condamner aux dépens

MOTIFS DE LA DECISION

-Sur la régularité de la procédure de licenciement

Considérant que la salariée soutient que la lettre de convocation à entretien préalable évoque un licenciement pour cause réelle et sérieuse, alors que le licenciement notifié est fondé sur la faute, que la sanction est injustifiée et les mentions dans la lettre de convocation à entretien préalable ne satisfont pas à l’exigence de loyauté, de respect des droits de la défense du salarié et manifeste la mauvaise foi de l’employeur ;

Que l’employeur réplique que la mention des motifs pour lesquels le licenciement est envisagé n’est nullement requise, que la salariée s’était bien organisée pour sa défense, étant assistée d’un délégué du personnel ;

Considérant que la lettre de convocation à entretien préalable doit seulement indiquer l’objet de l’entretien et non les motifs appuyant le licenciement ;

Que dès lors, la lettre de convocation satisfait à l’exigence de loyauté et au respect des droits du salarié et le moyen sera écarté ;

– Sur la rupture du contrat de travail

Considérant selon l’article L. 1232-6 alinéas 1 et 2 du code du travail que  » lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur  » ;

Considérant selon l’article L. 1232-1 du même code que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu’ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l’encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ;

Considérant enfin selon l’article L. 1235-1  » qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié  » ;

Que les motifs énoncés par l’employeur dans la lettre de licenciement fixent les termes et les limites du litige ;

Considérant en l’espèce, que par courrier en date du 23 janvier 2009, la société CEA a procédé au licenciement de Mme X…, en invoquant une mauvaise volonté délibérée de sa part en refusant de s’occuper du téléphone, constitutive d’une faute en recensant 5 motifs de licenciement :

– mauvaise gestion du parc automobile

-absence de commande des prestations de nettoyage des bureaux

-nombreuses erreurs de facturation ou d’expédition de commandes

-remise tardive de courriers recommandés

-refus de répondre au téléphone

Considérant que la salariée relève à titre préalable que le jugement a omis d’indiquer aux parties le fait que Mme Sylvie Y… épouse Z…, gérante de la société CEA, était conseillère élue au titre du collège employeur de la section industrie du CPH de Montmorency ;

Considérant toutefois, que la salarié n’invoquant aucun grief de ce chef, cet argument sera écarté ;

Que la salariée soutient que le licenciement relève clairement de la sanction disciplinaire, alors que l’employeur exclut expressément l’insuffisance professionnelle comme motif du licenciement, qu’elle conteste à la fois la mauvaise volonté invoquée par l’employeur comme motif de la rupture du contrat de travail et les divers griefs qui lui sont reprochés, qu’elle était amenée à répondre à plus de 50 appels par jour tout en ayant à remplir ses autres fonctions, que le poste de standardiste qu’on lui a demandé d’assurer après le départ de la jeune en alternance, rendait impossible l’exécution normale de son contrat de travail de secrétaire, assistante de direction et constituait une modification substantielle de ses conditions de travail devant l’amener à démissionner, qu’elle a exécuté toutes le consignes qui lui ont été données et pris toutes les initiatives entrant dans ses attributions, qu’on lui reproche de ne pas avoir pris les décisions qui auraient dues être prises par la direction, qu’elle ne s’est occupée du suivi et non de la gestion du parc automobile, soit 28 véhicules, que depuis le second trimestre 2008, que le reproche selon lequel elle a été insuffisamment polyvalente est totalement inapproprié ;

Que la société rétorque que la rémunération de base de la salariée était au dessus des minima garantis, que la salariée avait donc plus de responsabilités qu’une simple secrétaire, ce qui explique les attentes de la société, que Mme X… s’est vu confier moins de tâches que l’ancienne secrétaire, que la mauvaise volonté de Mme X… est très rapidement apparue avec la prise du téléphone, qu’au départ de la jeune en formation en alternance en BTS d’assistante de gestion (juillet 2008), la salariée est passée en titulaire au niveau du téléphone au lieu de suppléante à partir de septembre 2008, qu’en compensation, la salariée s’est vu retirer la gestion du fichier Progilift, qu’historiquement, la secrétaire de direction en place a toujours secondé la standardiste lorsque celle-ci était en ligne, en prenant des appels, que la salariée a persisté dans son comportement fautif (pas de prescription), que la salariée n’était pas surchargée de travail, que la salariée effectuait une mauvaise gestion du parc automobile ;

Considérant que la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis, c’est-à-dire, matériellement vérifiables et personnellement imputables au salarié ;

Mais considérant en l’espèce, que la lettre de licenciement à caractère disciplinaire évoque la mauvaise volonté de la salariée, alors que les manquements relevés caractérisent une inaptitude à exercer le travail de façon satisfaisante et que la salariée est passée en titulaire au niveau du téléphone, constituant ainsi une modification substantielle de ses conditions de travail auxquelles elle n’a pas donné son accord en vertu d’un avenant ;

Que la circonstance que la jeune en alternance, Mlle A… ait été embauchée en janvier 2009 en qualité de secrétaire pour remplacer la salariée licenciée tend à confirmer, ainsi que le souligne Mme X…, que l’intention de l’employeur en septembre 2008 était de supprimer un emploi en regroupant les tâches d’assistante de direction et de standardiste en second, Mlle A… attestant elle-même qu’après son embauche, elle s’occupait du standard et effectuait la mise en page de devis ;

Qu’enfin, il convient de souligner que la société a embauché la salariée en lui procurant une rémunération de base au dessus des minima garantis, eu égard à son expérience et non pas eu égard à la polyvalence de son poste de travail, comme l’ont retenu les premiers juges ;

Que dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit que le licenciement de Mme X… procède d’une cause réelle et sérieuse et rejeté ses demandes indemnitaires ;

– Sur les demandes indemnitaires de la salariée

Considérant que la salariée ayant moins de deux ans d’ancienneté, peut prétendre en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi en application de l’article L 1235-5 du code du travail ;

Considérant en l’espèce, que la salariée avait un an d’ancienneté et avait presque 59 ans au moment de son licenciement ;

Qu’elle est toujours en recherche d’emploi ;

Qu’il lui sera alloué à titre d’indemnité en réparation des préjudices subis du fait de la rupture de son contrat de travail, la somme de 10. 000 € ;

– Sur l’article 700 du CPC

Considérant qu’il sera alloué une indemnité à la salariée au titre des frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a condamné la société CEA à verser à Mme Hélène X… la somme de 2. 500 € à titre d’indemnité de préavis

DIT que le licenciement de Mme Hélène X… est intervenu sans cause réelle ni sérieuse

CONDAMNE la société Compagnie Européenne d’Ascenseurs à payer à Mme Hélène X… la somme de 10. 000 € en réparation des préjudices subis du fait de la rupture du contrat de travail

CONDAMNE la société Compagnie Européenne d’Ascenseurs à payer à Mme Hélène X… la somme de 2. 000 € au titre de l’article 700 du CPC

REJETTE toute autre demande

CONDAMNE la société Compagnie Européenne d’Ascenseurs aux entiers dépens.

Arrêt-prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Marie Claude CALOT Conseiller en l’absence de Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président empêché et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


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