Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, CT0082, du 24 mars 2006

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Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, CT0082, du 24 mars 2006

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ARRÊT NoR.G : 04/01675 LA SCI X… IMMOBILIER Y… C/ Z… COUR D’APPEL DE SAINT-DENISCHAMBRE CIVILEARRÊ DU 24 MARS 2006 Appel d’une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 14 SEPTEMBRE 2004 suivant déclaration d’appel en date du 21 OCTOBRE 2004APPELANTS :- LA SCI X… IMMOBILIER44, rue Mahatma Ghandhi97419 LA POSSESSIONReprésentée par Me Iqbal A…, avocat au barreau de SAINT-DENIS- Maître Christophe Y… ès qualité de liquidateur de la SCI X… IMMOBILIER … Représenté par Me Iqbal A…, avocat au barreau de SAINT-DENISINTIME :Maître Houssen Z… ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL IMMOBILIÈRE DES MASCAREIGNES … 97400 SAINT-DENISReprésenté par Me Robert FERDINAND, avocat au barreau de SAINT DENIS

CLÈTURE LE : 10 février 2006 DÉBATS : en application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 février 2006, en audience publique, devant M. Gérard GROS Conseiller chargé du rapport, assisté de Michelle B…, Agent Administratif faisant fonction de greffier, les parties ne s’y étant pas opposées.Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 24 mars 2006.Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Président : Jean Paul SEBILEAUConseiller : Gérard GROSConseiller : Patrick FIEVET Qui en ont délibéréArrêt : prononcé publiquement par mise à disposition des

parties le 24 mars 2006Greffier : Michelle B…, Agent Administratif faisant fonction de greffier***********************

FAITS, PROCÉDURE, PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant arrêt de la Cour d’Appel de Saint Denis du 7 mars 1995 le plan de continuation de la SARL IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES a été arrêté, l’arrêt donnant acte à M. Valère X…, gérant de la Société, de son offre d’inscription hypothécaire au profit du Commissaire à l’exécution du plan, Me Z…, sur un immeuble lui appartenant pour garantir l’exécution du plan. Par acte notarié des 7 et 8 décembre 1995 la SCI SOUPARYENMESTRY IMMOBILIER dont le gérant était également M. Valère X… a concédé une hypothèque sur un bien immobilier appartenant à la SCI au profit de Me Z…, ès qualité, en garantie du paiement par la Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES de la somme en principal de 8 705 000 F selon l’échéancier prévu au plan de redressement, l’acte indiquant que M. X… n’étant en réalité pas propriétaire personnel de l’immeuble, dont l’affectation hypothécaire était mentionné dans l’acte, celle-ci était donc donnée par la SCI X… sur un autre bien;

Par jugement du Tribunal Mixte de Commerce de Saint Denis du 8 mars 2000 la résiliation du plan de redressement de la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES a été prononcée et par jugement du même tribunal du même jour, la Société a été mise en liquidation judiciaire.

Par acte d’huissier du 12/02/2002 Me Z…, ès qualité de liquidateur de la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES a fait délivrer à la SCI X… IMMOBILIER une sommation à tiers détenteur en vue de la réalisation de son gage immobilier après qu’un commandement aux fins de saisie immobilière ait été adressé à la SCI le 8 février 2002.

Par acte d’huissier du 4 juillet 2002 la SCI X… a fait assigner devant le TGI de Saint Denis Me Z…, ès qualité de liquidateur de la SARL IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES aux fins de voir déclarer nul et non avenu l’acte de cautionnement avec affectation hypothécaire consenti à la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES les 7 et 8 décembre 1995, voir ordonner la radiation des hypothèques prises en vertu de cet acte et déclarer nul et non avenu le commandement de payer aux fins de saisie immobilière délivré par Me Z… .

La SCI X… IMMOBILIER ayant été mise en liquidation judiciaire durant la procédure devant le tribunal, Me Y… ès qualité de liquidateur est intervenu volontairement à l’instance pour reprendre la demande de la SCI;

Par jugement du 14 septembre 2004 le TGI de Saint Denis a débouté Me Y…, ès qualité de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné à payer à Me Z…, ès qualité de liquidateur de la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES, la somme de 1 500 ç .

Par déclaration reçue au greffe le 21/10/2004 la SCI X… IMMOBILIER et Me Y…, ès qualité de liquidateur de celle-ci, ont relevé appel de cette décision .

Par conclusions du 14 février 2006 , dernières en date , auxquelles il est expressément référé, Me Y… , ès qualité de mandataire liquidateur de la SCI X… IMMOBILIER , demande à la Cour de :

[* infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

*]voir constater que l’acte de cautionnement avec affectation hypothécaire est nul et non avenu.

[* voir constater que l’affectation de cautionnement hypothécaire est nulle et non avenue.

*] voir ordonner la radiation des inscriptions prises le 9 janvier

1996 Vol. 1996 no 75 sur la parcelle de terrain cadastré AE 210 et de l’inscription prise le 9 janvier 1996 Vol.1996 no 75 sur la parcelle de terrain cadastré AR 477 appartenant à la requérante.

[* voir dire par ailleurs qu’il convient de considérer comme nul et non avenu le commandement de payer aux fins de saisie immobilière délivré par acte d’huissier en date du 8 février de l’an 2002.

*] voir condamner le défendeur aux dépens dont distraction au profit de Maître Iqbal A… .

Par conclusions du 26 octobre 2005, dernières en date, auxquelles il est expressément référé, Me Z…, ès qualité de liquidateur de la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES demande à la Cour de :

A titre principal :

– statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel;

– dire l’acte d’appel nul;

A titre subsidiaire, au fond :

– constater qu’il n’existe aucune contrariété du cautionnement avec l’objet social de la SCI X… IMMOBILIER ; que l’affectation hypothécaire a été consentie par les associés (Monsieur X… Valère étant l’associé majoritaire) et il existe une communauté d’intérêts certaine entre les deux sociétés ;

– constater qu’il n’existe aucune nullité formelle de l’affectation hypothécaire ; l’hypothèque ayant été prise au profit de Maître Houssen Z… et l’acte notarié précisant clairement la qualité du mandataire; aucun grief n’étant causé à la SCI X… IMMOBILIÈRE;

– constater que la SCI X… IMMOBILIÈRE n’est pas le garant de l’intégralité du passif de la SARL IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES , mais uniquement du passif du plan qui a trait à des dettes échues ;

– constater que l’instance en cours ne peut avoir pour but d’examiner

ou de contester des créances; le passif ayant d’ores et déjà été arrêté;

– constater que la SCI X… IMMOBILIÈRE était parfaitement au courant des difficultés rencontrées par la SARL IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES à travers la personne de son gérant et de son associé majoritaire, qui était aussi gérant de la SARL liquidée;

– dire que nul ne peut invoquer sa propre turpitude;

– débouter en conséquence Maître Christophe Y… ès-qualité de liquidateur de la SCI X… IMMOBILIÈRE, de ses demandes, fins et conclusions , en confirmant la décision attaquée;

– condamner Maître Christophe Y… ès-qualité de liquidateur de la SCI X… IMMOBILIÈRE à payer à Maître Houssen Z… ès-qualité de liquidateur de la SARL IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES la somme de 2 500 ç au titre de l’article 700 du NCPC ainsi qu’aux entiers dépens;

L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2006.

A l’audience du 17 février 2006 à laquelle l’affaire a été fixée, l’avocat de Me Z… ès-qualité, a formé par lettre simple une demande de réouverture des débats pour lui permettre d’examiner des pièces jointes aux dernières conclusions de son adversaire ;********************

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de réouverture des débats ;

Attendu que la demande de réouverture des débats qui s’analyse en réalité en une demande de révocation d’ordonnance de clôture aurait du être formée par voie de conclusions écrites, qu’au demeurant Me Z… ès-qualité, avait le temps, avant l’ordonnance de clôture , de prendre connaissance des dernières écritures déposées par l’appelant et des pièces qui y étaient jointes et éventuellement d’y répliquer;

que la demande sera rejetée;

Sur la recevabilité et la validité de l’acte d’appel;

Attendu qu’aucun acte de signification du jugement n’étant produit aux débats par les parties, la Cour n’est pas en mesure de dire que l’appel serait irrecevable pour avoir été formé hors délai;

Attendu d’autre part que s’il est vrai que la SCI X… IMMOBILIER en liquidation judiciaire n’avait pas qualité pour relever appel et que c’est à tort qu’elle a été indiquée comme appelante dans la déclaration d’appel du 21 octobre 2004, il convient de relever que cette déclaration d’appel mentionne également expressément comme appelant Me Y…, ès-qualité de mandataire-liquidateur de la SCI X… IMMOBILIER ; que dès lors ladite déclaration doit être déclarée valable quant à l’appel relevé par le représentant de la société en liquidation;

Sur le fond

Attendu qu’à l’appui de sa demande tendant à faire juger nul l’acte de cautionnement hypothécaire consenti les 7 et 8 décembre 1995 par la SCI X… IMMOBILIER au profit de la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES afin de garantir celle-ci dans l’exécution du plan de redressement fixé par l’arrêt de la Cour d’Appel de Saint Denis du 7 mars 1995, Me Y…, ès-qualité de liquidateur de la SCI X… IMMOBILIER soutient que ce cautionnement est nul pour dépassement de l’objet social, que les inscriptions hypothécaires sont nulles faute d’avoir été prises par le gérant de la SARL Sté IMMOBILIÈRE des MASCAREIGNES (SIM) , que le cautionnement hypothécaire est également nul puisque pris en violation de l’arrêt de la Cour du 7 mars 1995 (c’est un autre bien qui a été donné en garantie et le cautionnement a été donné en garantie d’un plan et non en garantie du passif de la société );

Attendu que lorsque les mêmes personnes, dirigeants ou associés ont

des intérêts communs dans plusieurs personnes morales , il peut être tentant d’utiliser le crédit de l’une au bénéfice de l’autre; que de tels cautionnements s’ils ne répondent pas à l’objet social sont nuls; que s’il est vrai que la conformité à l’objet social doit être appréciée avec une certaine souplesse et qu’une approche strictement juridique de cet objet interdirait le cautionnement entre sociétés du même groupe , encore est-il nécessaire qu’il existe entre elles une communauté d’intérêts;

Attendu qu’en l’espèce il est certain que l’affectation hypothécaire de ses biens ne rentrait pas dans l’objet social de la SCI X… IMMOBILIER , s’agissant pour une société de nature civile d’un acte à caractère commercial puis que le cautionnement hypothécaire consenti à la SARL SIM avait pour but de soutenir le plan de continuation de cette société commerciale; que contrairement à ce que prétend le mandataire – liquidateur de la SARL SIM il n’existait strictement aucune communauté d’intérêts entre les deux sociétés , l’une étant propriétaire de biens immobiliers situés dans l’Ouest de la Réunion tandis que l’autre avait pour objet de construire et de gérer des immeubles dans le Sud de l’Ile; que si les deux sociétés comprenaient exclusivement comme associés des membres de la famille X… en réalité, ainsi que l’appelant l’observe fort justement le cautionnement hypothécaire qui ne présentait aucun intérêt pour la SCI X… n’a été donné que pour une seule raison, M. Valère X… étant le gérant tant de la SCI que de la SARL SIM et que dès lors c’est son seul intérêt personnel qui a été déterminant, lequel ne recouvre pas nécessairement l’intérêt social ; que le fait, relevé par le premier juge que l’unanimité des associés de la SCI X… ait donné son accord au cautionnement et qu’il n’y ait pas eu de fraude avérée , est sans intérêt dès lors qu’il est établi que M. X…

détenait 49 parts sur 50 dans cette société , l’autre associé étant son frère et que dès lors la notion d’unanimité dans la décision n’a aucun sens , l’actionnaire minoritaire ne pouvant en outre, compte tenu du lien de parenté l’unissant au gérant disposer d’une réelle indépendance et d’une totale liberté de décision ;

Attendu qu’il est donc établi que le cautionnement hypothécaire donné en 1995 par la SCI X… pour garantir l’exécution du plan de redressement qui avait été accordé à la SARL SIM par la Cour d’Appel n’avait aucun rapport direct avec l’objet social de la SCI , n’était d’aucun intérêt pour elle, profitait à une société commerciale avec laquelle elle n’avait aucune communauté d’intérêts , le seul intérêt à l’opération étant purement personnel, celui du gérant commun aux deux sociétés;

Attendu que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens invoqués par Me Y… , ès-qualité de mandataire liquidateur de la SCI X… IMMOBILIER pour faire annuler ce cautionnement , il convient d’infirmer le jugement entrepris et de prononcer avec toutes conséquences de droit la nullité de l’acte de cautionnement avec affectation hypothécaire des 7 et 8 décembre 1995 ;

Attendu que Me Z…, ès-qualité de liquidateur de la SARL SIM qui succombe sera débouté de sa demande au titre de l’article 700 du NCPC et condamné aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Rejette la demande de réouverture des débats ;

Dit recevable et bien fondé l’appel relevé par Me Y… , ès qualité de mandataire liquidateur de la SCI X… IMMOBILIER contre le jugement du TGI de Saint Denis du 14 septembre 2004 ;

Infirme cette décision en toutes ses dispositions et statuant à

nouveau :

Dit et juge que l’acte de cautionnement avec affectation hypothécaire des 7 et 8 décembre 1995 est nul et non avenu ;

Constate en conséquence que l’affectation de cautionnement hypothécaire est nulle et non avenue ;

Ordonne la radiation des inscriptions prises le 9 janvier 1996 Vol. 1996 no 75 sur la parcelle de terrain cadastré AE 210 et de l’inscription prise le 9 janvier 1996 Vol.1996 no 75 sur la parcelle de terrain cadastré AR 477 appartenant à la SCI X… IMMOBILIER;

Dit nul et non avenu le commandement de payer aux fins de saisie immobilière délivré par acte d’huissier en date du 8 février de l’an 2002;

Déboute Me Z…, ès qualité de liquidateur de la Sté SIM de sa demande au titre de l’article 700 du NCPC ;

Le condamne aux dépens dont distraction au profit de Maître A… , sur sa demande ,conformément à l’article 699 du NCPC ;

Le présent arrêt a été signé par M. Jean-Paul SEBILEAU, Premier Président, et par Michelle B…, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


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