Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, 28 avril 2022, 21/002951

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Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, 28 avril 2022, 21/002951

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AFFAIRE : No RG 21/00295 – No Portalis DBWB-V-B7F-FQFP

Code Aff. :AL ARRÊT N

ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT DENIS en date du 19 Janvier 2021, rg no 20/00605

COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 28 AVRIL 2022

APPELANT :

Monsieur [U] [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

CAISSE GÉNÉRALE DE SÉCURITÉ SOCIALE DE LA REUNION venant aux droits de la CAISSE LOCALE DÉLÉGUÉE POUR LA SÉCURITÉ SOCIALE DES TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS DE LA REUNION

Pôle Expertise Juridique Recouvrement Travailleurs Indépendants

TSA 90001

[Localité 2]

Représentant : Me Patrice SANDRIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉBATS : En application des dispositions de l’article 946 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 février 2022 devant la cour composée de :

Président :M. Alain LACOUR,

Conseiller :M. Laurent CALBO,

Conseiller :Mme Aurélie POLICE,

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 28 avril 2022.

ARRÊT : mis à disposition des parties le 28 AVRIL 2022

Greffier lors des débats : Mme Nadia HANAFI,

greffier lors de la mise à disposition de l’arrêt : Mme Monique LEBRUN

* *

*

LA COUR :

Exposé du litige :

Par requête enregistrée le 9 septembre 2020 , M. [T] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion en contestation d’une décision implicite de la commission de recours amiable de la Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (CGSSR) relative à la validation d’une mise en demeure en date du 15 février 2020 portant sur la somme de 10 891 euros. Le tribunal judiciaire de Saint-Denis-de-la-Réunion par jugement du 19 janvier 2021 , a notamment condamné M. [T] au paiement de la mise en demeure à hauteur de 106 euros, de la somme de 400 euros au titre d’une amende civile et de la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Appel de cette décision a été interjeté par M. [T] le 19 février 2021 . La procédure a été instruite conformément aux dispositions de l’article 446-2 du code de procédure civile.

Vu les conclusions notifiées le 27 octobre 2021 par M. [T] , oralement soutenues à l’audience ;

Vu les conclusions notifiées le 11 janvier 2022 par la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion, venant aux droits du RSI, oralement soutenues à l’audience ;

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu’aux développements infra.

Sur ce :

Sur la saisine préjudicielle de la Cour de justice de l’Union européenne :

Selon l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le juge national saisi, s’il estime qu’une décision sur l’interprétation d’un traité ou des actes pris par les institutions de l’Union est nécessaire pour rendre son jugement, peut demander à la Cour de statuer sur cette question. Si le renvoi préjudiciel devant la CJUE est obligatoire lorsque la question est soulevée devant une juridiction dont la décision n’est pas susceptible d’un recours juridictionnel en droit interne, tel n’est pas le cas en l’espèce, le présent arrêt étant susceptible de pourvoi.

En outre, il sera relevé, d’une part, que selon l’article 2, d) de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement et du Conseil, on entend, aux fins de la directive, par « pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs », « toute action, omission, conduite démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit aux consommateurs » ; d’autre part, que le recouvrement selon les règles d’ordre public du code de la sécurité sociale des cotisations et contributions dues par une personne assujettie à titre obligatoire au régime social des travailleurs indépendants ne revêt pas le caractère d’une pratique commerciale au sens des dispositions sus-rappelées et n’entre pas, dès lors dans le champ d’application de la directive.

En conséquence la demande sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Sur le sursis à statuer dans l’attente de la décision de la Commission européenne :

M. [T] produit une plainte pour non-respect de la législation de l’Union européenne relative à des pratiques anticoncurrentielles et abus de position dominante visant l’État français, la Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion, la caisse RSI de la Réunion, la caisse nationale RSI et soutient que le sort du litige soumis à la cour sera impacté si la Commission européenne confirme que la France a violé les directives précitées.

La décision de la Commission européenne n’étant pas nécessaire à la résolution du litige, il n’y a lieu de surseoir à statuer par application des dispositions de l’article 378 du code de procédure civile.

Sur la régularité de la mise en demeure :

– Sur la nullité pour défaut de pouvoir à agir :

Vu les articles L. 244-2 et R.244-1 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige ;

La mise en demeure litigieuse a été émise par le directeur de la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion. N’étant pas de nature contentieuse, l’absence de signature ou d’identification de son signataire n’en affecte pas la validité. Le moyen de l’appelant, qui soutient qu’il appartient à la CGSSR de rapporter la preuve de ce que l’émetteur de la mise en demeure a été régulièrement nommé ou encore de la possibilité statutaire de nommer un directeur par intérim sous le mandat duquel la mise en demeure a été émise est dès lors inopérant.

– Sur l’annulation de la mise en demeure pour inopposabilité de l’organisme vis-à-vis des tiers :

La caisse de base du RSI de la Réunion, devenue CGSSR, ayant été créée par la loi, et non par l’arrêté préfectoral du 25 juillet 2006, le moyen de nullité excipant d’une inopposabilité de l’organisme à l’égard des tiers sera rejeté.

– Sur la nullité formelle :

L’omission des mentions prescrites par l’article L.212-1 du code des relations entre le public et les administrations n’affectant pas la validité de la mise en demeure prévue par l’article L.244-2 du code de la sécurité sociale, dès lors que celle-ci mentionne la dénomination de l’organisme qui l’a émise, ce qui est le cas en l’espèce, la mise en demeure litigieuse portant indication de ce qu’elle a été délivrée par la CGSSR dont l’adresse est précisée, le moyen de l’appelant excipant de l’absence des mentions prévues par la loi est inopérant.

La mise en demeure adressée par un organisme de sécurité sociale, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit lui permettre d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de ses obligations, en application des dispositions de l’article L.244-2 du code de la sécurité sociale.

Tel est le cas en l’espèce, la mise en demeure délivrée le 15 février 2020 précisant la cause des sommes réclamées à M. [T] , au titre des cotisations maladie, invalidité décès, retraite de base et retraite complémentaire, des allocations familiales, de la formation professionnelle, de la CSG et CRDS du 4e trimestre 2019 , leurs montants respectifs, ainsi que les majorations de retard, générant une créance de 10 891 euros au titre des cotisations provisionnelles, en ce compris des majorations de retard à concurrence de 538 euros.

Ces mentions permettaient donc à M. [T] de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation. En conséquence, le moyen de nullité tiré de l’absence d’information du cotisant sur la nature, la cause et l’étendue de l’obligation est également inopérant.

La caisse justifiant avoir procédé à un ajustement des cotisations au titre de la régularisation des cotisations du 4e trimestre 2019 , au vu de la déclaration de revenus de 2018 , la mise en demeure sera validée pour la somme de 106 euros.

M. [T] sera condamné à son paiement.

Sur les demandes de dommages-intérêts :

M. [T] soutient que la caisse est fautive, sans toutefois le démontrer. Il sera en conséquence débouté de ce chef.

La caisse reproche à M. [T] l’utilisation des voies de recours à des fins dilatoires et dans l’intention de se soustraire à son obligation de s’acquitter de ses cotisations lui causant un préjudice.

Or, le retard en paiement des cotisations est compensé par leur majoration. En outre, la caisse ne démontre pas que l’usage d’une voie de recours par M. [T] aurait dégénéré en abus du droit d’ester. La caisse sera déboutée de sa demande.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement,

Confirme le jugement rendu le 19 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion excepté en ce qu’il a condamné M. [T] au paiement de la somme de 400 euros au titre de l’amende civile ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit n’y avoir lieu à amende civile;

Y ajoutant,

Rejette les demandes de M. [T] ;

Rejette la demande de dommages-intérêts de la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion ;

Condamne M. [T] à payer à la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par M. Alain Lacour, président, et par Mme Monique Lebrun, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière,le président,


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