Cour d’appel de Paris RG n° 22/16358 2 mai 2024

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Cour d’appel de Paris RG n° 22/16358 2 mai 2024
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour d’appel de Paris
RG n° 22/16358
2 mai 2024
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 02 MAI 2024

(n° , 21 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/16358 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGNOW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 mars 2022 – Juge des contentieux de la protection de MELUN – RG n° 11-19-000863

APPELANTS

Monsieur [E] [S]

né le 28 novembre 1951 à [Localité 8] (97)

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, toque : D2104

ayant pour avocat plaidant Me Gilbert GARRETA de la SCP GARRETA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PAU

Madame [N], [O] [J] épouse [S]

née le 30 mars 1952 à [Localité 7] (94)

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, toque : D2104

ayant pour avocat plaidant Me Gilbert GARRETA de la SCP GARRETA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PAU

INTIMÉES

La société DOMOFINANCE, société anonyme à conseil d’administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité

N° SIRET : 450 275 490 00057

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

La SAS [D] prise en la personne de Me [U] [D], en qualité de mandataire liquidateur de SAS FUTURA INTERNATIONALE

[Adresse 2]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans le cadre d’un démarchage à domicile, le 31 janvier 2017, M. [E] [S] et Mme [N] [J] épouse [S] ont conclu avec la société Futura Internationale un contrat prévoyant la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques au prix de 27 400 euros.

Pour financer cette opération, M. et Mme [S] ont validé le même jour avec la société Domofinance, un contrat de crédit affecté prévoyant un financement en capital de 27 400 euros sur une durée de 145 mois au taux d’intérêts contractuel de 3,67 % l’an, remboursable en 140 échéances mensuelles de 265,58 euros chacune hors assurance facultative avec un différé d’amortissement de 180 jours.

Les travaux ont été réalisés au domicile de M. et [S] le 7 mars 2017 et les fonds ont été débloqués par la banque au profit du vendeur sur la base d’une attestation de réception des travaux sans réserve signée à cette date par M. [S].

L’installation a été raccordée au réseau électrique le 15 juin 2017 et M. [S] a validé un contrat d’achat de l’énergie produite par son installation avec la société EDF le 22 octobre 2018.

La société Futura Internationale a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire par jugement du 15 septembre 2021 du tribunal de commerce de Créteil et la société [D] prise en la personne de Maître [U] [D] désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Saisi par M. et Mme [S] le 17 décembre 2021 d’une demande tendant principalement à l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté et à défaut à leur résolution, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Melun, par un jugement réputé contradictoire rendu le 8 mars 2022 auquel il convient de se reporter, a :

– prononcé la nullité du contrat de vente et constaté celle du contrat de crédit affecté,

– condamné solidairement M. et Mme [S] à rembourser à la société Domofinance le somme de 27 400 euros au titre du capital emprunté,

– condamné la société Domofinance à restituer à M. et Mme [S] les échéances du prêt déjà remboursées soit la somme de 5 037,76 euros arrêtée au 5 mars 2019,

– ordonné la compensation des sommes dues,

– condamné la société Domofinance à payer la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles des demandeurs et aux dépens,

– rejeté le surplus des demandes

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le juge a relevé que le bon de commande ne comportait aucune information sur le délai et les modalités de rétractation de sorte que la nullité était encourue et il a considéré que le fait de laisser s’exécuter le contrat sans y mettre fin ne suffisait pas à en déduire la connaissance par les acquéreurs des vices affectant l’acte. Il a constaté l’annulation du contrat de crédit et a considéré que la banque avait commis une faute en débloquant les fonds sur la base d’une attestation de réception des travaux ne mentionnant pas l’exécution de toutes les prestations à la charge du vendeur, à savoir le raccordement au réseau outre les démarches administratives à effectuer.

Il a noté que les acquéreurs bénéficiaient d’une installation fonctionnelle depuis plusieurs années et qu’ils revendaient l’énergie produite et que dès lors ils échouaient à démontrer un préjudice de sorte que la banque ne pouvait être privée de la restitution du capital prêté par suite de l’annulation des contrats. Il a considéré que la demande de garantie formée par la banque était devenue sans objet ainsi que sa demande de restitution du matériel.

Par une déclaration enregistrée le 19 septembre 2022, M. et Mme [S] ont relevé appel de cette décision.

Aux termes de leurs dernières écritures responsives et récapitulatives numérotées 2 remises le 13 février 2024, ils demandent notamment à la cour :

– de les déclarer recevables en leur appel,

– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il les a condamnés solidairement au paiement de la somme de 27 400 euros en remboursement du capital emprunté et ordonné la compensation,

– de confirmer le jugement pour le surplus,

– statuant à nouveau,

– de prononcer l’annulation du contrat de vente pour absence de régularité formelle de l’acte et subsidiairement pour dol,

– de leur donner acte de ce qu’ils offrent de tenir à la disposition de Maître [U] [D], en qualité de mandataire liquidateur de la société venderesse, les matériels objets du contrat de vente, pendant un délai de trois mois et de dire que passé ce délai de trois mois, en cas d’inaction de la part du liquidateur, ils pourront faire leur affaire personnelle de ladite installation,

– de prononcer l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté en conséquence de l’annulation du contrat principal de vente,

– de priver la société Domofinance de son droit à obtenir restitution du capital prêté, en conséquence des fautes par elle commises lors de l’accord du financement et du déblocage des fonds et du préjudice par eux subis, en lien avec ces fautes,

– de la condamner à leur restituer le montant total des échéances par eux déjà remboursées, soit la somme de 15 395,38 euros, le cas échéant à parfaire au jour de l’arrêt à intervenir en tenant compte des éventuelles mensualités prélevées entre la date des présentes écritures et le jour du délibéré,

– de débouter la banque de son appel incident, et de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires telles que dirigées à leur encontre,

– de la condamner à leur verser une indemnité d’un montant de 2 800 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel et aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Les appelants expliquent avoir été démarchés à domicile le 31 janvier 2017 par un représentant de la société Futura Internationale, que selon le document manuscrit établi par le démarcheur qui leur a été remis, l’installation devait être autofinancée au bout de 10 ans et permettre ensuite de dégager un bénéfice annuel moyen de l’ordre de 2 632 euros. Ils indiquent qu’à l’issue de la première année de production soit entre le 15 juin 2017 et le 14 juin 2018, l’installation a finalement rapporté la modique somme de 617,69 euros soit moins de 30 % des promesses du vendeur qui s’était engagé sur une production pour la première année à hauteur de 2 002 euros. Ils déplorent le fait que l’installation ne leur ait pas rapporté davantage au cours des périodes suivantes : 820,48 euros sur la période du 15 juin 2018 au 14 juin 2019, 680,67 euros sur la période du 15 juin 2019 au 14 juin 2020, 720,44 euros sur la période du 15 juin 2020 au 14 juin 2021 et 670,25 euros sur la période du 15 juin 2021 au 14 juin 2022. Ils soutiennent qu’il est incontestable que les parties ont entendu faire entrer dans le champ contractuel la question de la rentabilité de l’opération et que les éléments mentionnés par le commercial sur ce document manuscrit ont été déterminants de leur consentement, qu’ils avaient précisé à maintes reprises au commercial qu’ils n’étaient pas en capacité financière d’assumer l’acquisition de ce bien et que l’autofinancement de l’opération a donc été l’élément déterminant pour eux.

Ils expliquent avoir tenté de trouver une solution amiable avant d’engager une procédure judiciaire en adressant une mise en demeure aussi bien à la société Futura Internationale qu’à la société de crédit le 25 septembre 2017 sans qu’aucune réponse ne leur soit apportée quant à leur demande d’annulation et de remboursement.

Ils déplorent l’absence sur le bon de commande de toute information sur le délai et les modalités d’exercice du droit de rétractation et que c’est avec mauvaise foi que la société Domofinance prétend que la seule présence d’un bordereau de rétractation était en soi suffisante pour leur permettre de se rétracter. Ils rappellent qu’au travers notamment des articles L. 221-5, L. 221-18 et l’annexe à l’article R. 221-3 du code de la consommation, la loi a renforcé le formalisme concernant le droit de rétractation du consommateur, tenant à son information, aux modalités et délai d’exercice, porté de 7 à 14 jours depuis la loi du n° 2014-344 du 17 mars 2014, et pouvant aller jusqu’à 12 mois en cas de défaut de délivrance de l’information légale. Ils font état de ce que la société venderesse a remis un écrit qui aurait pu les induire en erreur en faisant mention à tort des articles L. 121-21 à L. 121-26 anciens du code de la consommation juste au-dessus de leurs signatures et auxquels ils auraient pu se référer et alors que l’ancien article L. 121-25 prévoyait un délai de rétractation de 7 jours à compter de la signature du contrat.

Ils estiment que la société Futura Internationale a gravement manqué à son obligation d’informations précontractuelles, a mis en échec les nouvelles garanties accordées au consommateur découlant de l’article L. 121-17 devenu L. 221-18 portant à 14 jours le délai de rétractation et déterminant les règles de fixation du point de départ dudit délai, à savoir 14 jours à compter de la réception des matériels et que cette omission entraîne la nullité du bon de commande.

Ils déplorent également l’absence de mention relative au type de panneaux (monocristallin ou polycristallin), à la marque, au nombre et aux dimensions de l’onduleur, aux performances, au poids et aux dimensions des panneaux photovoltaïques. Ils insistent sur le fait que l’inobservation de ce formalisme leur fait grief indépendamment du fait qu’il s’agit de nullités de protection lesquelles ne nécessitent pas la démonstration d’un quelconque grief contrairement à ce que prétend l’intimée aux termes de ses conclusions.

Ils font état de conditions d’exécution de la prestation non renseignées, à défaut de précision de la nature de la pose des panneaux en intégration au bâti ou en surimposition, des modalités de pose des panneaux (et notamment les étapes de l’installation, les modalités de fixation des panneaux, le recouvrement total ou partiel de la toiture, le format de pose en portrait ou paysage, les conséquences de l’installation sur la toiture servant de support), de la date ou du délai prévisible de mise en service de l’installation. Ils déplorent l’absence de remise d’un plan technique.

Ils indiquent que le bon de commande ne mentionne qu’un prix global de 27 400 euros sans aucune discrimination entre le coût unitaire des différents matériaux composant l’installation et sans aucune ventilation entre les différentes prestations de pose ni sans mention du coût de la main d”uvre.

Ils estiment ne pas avoir été informés de l’existence de la garantie décennale et surtout des coordonnées de l’assureur afin de leur permettre d’intenter une action directe.

Ils notent que le bon de commande n’indique pas la possibilité de recourir au médiateur de la consommation alors qu’il s’agit d’une mention obligatoire depuis 2016.

Ils contestent avoir confirmé l’acte entaché d’irrégularités dans la mesure où ils n’ont jamais pu avoir connaissance des vices affectant le contrat, ni lors de la souscription, ni postérieurement, puisqu’ils n’ont jamais eu connaissance des textes applicables aux exigences de forme des bons de commande souscrits dans le cadre d’un démarchage à domicile en vigueur au jour de la signature de celui-ci, à savoir le 31 janvier 2017, ni de la sanction applicable en cas de défaut des mentions obligatoires devant impérativement figurer dans le bon de commande, c’est-à-dire la nullité (article L. 242-1). Ils rappellent que les articles visés au-dessus des signatures des parties, à savoir les articles L. 121-21 à L. 121-26, correspondent aux anciens articles du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, aujourd’hui abrogés et la lecture des articles L. 121-21 et suivants actuels qui correspondent aux sections 10 et suivantes du chapitre consacré aux pratiques commerciales interdites dans le code de la consommation (frais de recouvrement, publicité sur les opérations réglementées) auraient pu largement les induire en erreur.

Ils ajoutent que le fait de laisser le vendeur procéder à l’installation des panneaux photovoltaïques, de réceptionner l’installation sans réserve et de solliciter de la banque qu’elle verse les fonds et enfin de laisser le raccordement s’opérer et de signer le contrat de rachat ne saurait caractériser une exécution volontaire du contrat entaché de nullité. Ils soutiennent par ailleurs que la fiche de réception des travaux ne contient pas la substance de l’obligation, c’est-à-dire les mentions obligatoires exigées par le code de la consommation quant à la validité du bon de commande et qui font défaut.

Ils reprochent des agissements dolosifs au vendeur sur le fondement de l’article 1137 du code civil et de l’article L. 111-1 du code de la consommation. Ils déplorent qu’en ne leur donnant pas toutes informations sur les caractéristiques essentielles des biens offerts ainsi que sur les modalités de pose, la société Futura Internationale ne leur a pas permis de contracter en toute connaissance de cause en ayant notamment la possibilité de procéder à des comparaisons utiles durant la période du délai de rétractation, avec des prestations de même nature proposées par des sociétés concurrentes, alors même qu’ils n’ont pas été informés des modalités et délais pour exercer leur droit de rétractation. Surtout, ils reprochent à cette société d’avoir cru pouvoir leur donner de fausses indications sur les performances des panneaux solaires en prétendant que l’installation serait autofinancée au bout de 12 ans et permettrait ensuite de dégager un bénéfice. Ils soutiennent qu’il est manifeste que les chiffres avancés sont totalement arbitraires et faux et constituent des man’uvres destinées à provoquer dans la tête des co-contractants une erreur, évidemment déterminante du consentement, ceux-ci étant persuadés qu’ils allaient réaliser une opération avantageuse et in fine autofinancer leur projet par la revente de leur électricité à EDF.

Ils rappellent que l’annulation du contrat de vente emporte l’obligation pour l’acquéreur de restituer le bien au vendeur et l’obligation pour ce dernier de restituer le prix de vente à l’acquéreur. Ils s’engagent à restituer le matériel installé chez eux. Ils demandent de voir constater l’annulation subséquente du contrat de crédit.

Ils imputent divers manquements à la société Domofinance devant la priver de son droit à obtenir restitution du capital prêté.

Ils expliquent qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 312-48 et L. 312-52 du code de la consommation, qu’il incombe au prêteur, avant de donner son accord au financement de l’opération, de s’assurer de la régularité du contrat principal conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile, au regard du formalisme imposé par les articles L. 221-5 et suivants et L. 111-1 relatifs aux mentions obligatoires, aux conditions et modalités d’exercice du droit de rétractation et du formulaire de rétractation annexé et que la banque a commis une faute contractuelle en donnant son accord de financement puis en débloquant les fonds sans avoir relevé l’irrégularité, de surcroît, flagrante, du bon de commande ne comportant strictement aucune mention légale quant aux modalités et délais, relativement au droit de rétractation et en s’étant abstenue de vérifier que le vendeur avait communiqué aux acheteurs toutes les informations prévues par les articles L. 221-5 et L. 111-1 et suivants du code de la consommation.

Ils rappellent que le commercial de la société Futura Internationale venu les démarcher a agi en tant que représentant ou mandataire de l’établissement de crédit Domofinance pour leur faire signer l’offre préalable de crédit de sorte qu’il appartenait à l’établissement bancaire de procéder préalablement aux vérifications nécessaires que commande l’indivisibilité qui existe entre le contrat de vente et le contrat de crédit affecté, auprès du vendeur et de l’emprunteur, ce qui lui aurait permis de constater aisément que ce contrat était affecté d’une cause de nullité flagrante et de refuser de financer l’opération.

Ils reprochent encore une faute à la banque pour avoir débloqué les fonds dès le 8 mars 2017, alors même que l’ensemble des prestations prévues au bon de commande n’était pas effectué (raccordement, contrat de rachat, mise en service), sur la base d’une fiche de réception ne contenant aucune mention sur le raccordement et la mise en service de l’installation, ne permettant pas au prêteur de se convaincre immédiatement de l’exécution pleine et entière des obligations à la charge de la société venderesse telles qu’énoncées au bon de commande.

Ils font état de divers préjudices. Ils expliquent que le délai pendant lequel pouvait s’exercer le droit de rétractation a été totalement et irrémédiablement sacrifié puisqu’ils se sont trouvés dans l’impossibilité de fait de l’exercer dans les 14 jours de la livraison pour ne pas en avoir été utilement informés, qu’ils se sont trouvés dans l’impossibilité de vérifier auprès de la concurrence si les produits roposés à la vente étaient susceptibles d’être acquis et installés à des conditions économiques meilleures. Ils estiment que l’irrégularité était détectable par la banque avant de débloquer les fonds, qu’elle est donc à l’origine de leur préjudice.

Ils font également état de diverses désordres et malfaçons affectant l’installation tels que décrits par un huissier de justice, à la suite de fortes averses survenues au cours du mois de juin 2021, selon procès-verbal de constat du 25 juin 2021. Ils ajoutent que le préjudice est constitué par l’existence d’un capital à rembourser intégralement à la banque pour une installation totalement inutile et de surcroît dont ils vont perdre la propriété, en dehors de toute faute de leur part, et sur laquelle aucune somme ne pourra être récupérée à l’encontre de l’installateur. Ils ajoutent que le prix de vente de l’installation est devenu un préjudice pour eux car celle qui doit le restituer, à savoir la société venderesse, est insolvable. En conclusion, ils indiquent que leur préjudice ne serait pas né si la banque avait veillé au respect du droit de la consommation, comme elle en a l’obligation.

Ils demandent à la cour de débouter la banque de toutes ses demandes de condamnation au titre du capital emprunté, demandes qui méconnaissent le principe d’effectivité et de proportionnalité mais encore contraires au rétablissement en droit et en fait de la situation du consommateur. Ils font valoir que la sanction de la restitution du capital du contrat de crédit par le consommateur au prêteur, n’est en rien proportionnée et ne rétablit pas le consommateur dans la situation de fait d’origine, puisqu’on lui demande de restituer une somme d’argent qu’il n’a jamais perçue correspondant au prix d’achat d’une installation dont il n’est plus propriétaire du fait de l’annulation du bon de commande, que la situation du consommateur est donc sans lien avec celle avant contrat, puisqu’il se trouve débiteur d’une somme correspondant environ aux 4/5ème du coût total de l’opération (le capital sans les intérêts) pour une installation qui ne lui appartient plus et qu’il doit restituer.

A partir du moment où une faute est retenue à l’encontre de la banque, ils rappellent que celle-ci doit être privée du capital et des intérêts, et que par conséquent, toute somme perçue au titre de l’exécution du contrat de crédit lui est indue et doit donner lieu à répétition au profit des emprunteurs.

Aux termes de ses dernières écritures enregistrées le 15 janvier 2024, la société Domofinance demande notamment à la cour :

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente et a constaté la nullité du contrat de crédit affecté, en ce qu’il a limité la condamnation solidaire de M. et Mme [S] au paiement de la somme de 27 400 euros en remboursement du capital emprunté, en ce qu’il a condamné la société Domofinance à payer la somme de 5 037,76 euros arrêtée au 5 mars 2019 selon décompte du 29 mars 2019 en remboursement des échéances versées, en ce qu’il a débouté la banque du surplus de ses demandes, en ce compris sa demande à l’encontre de la société Futura Internationale de garantie de la restitution du capital prêté, et donc de condamnation à lui régler la somme de 27 400 euros à ce titre, sa demande de condamnation de la société Futura Internationale à lui régler la somme de 6 844 euros à titre de dommages et intérêts au titre des intérêts perdus, en ce qu’il l’a condamnée à payer une somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance,

– subsidiairement, en cas de nullité du contrat de crédit, de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné solidairement M. et Mme [S] à lui payer la somme de 27 400 euros en restitution du capital prêté, et fera droit aux demandes de fixation des créances à la procédure collective de la société Futura Internationale, outre les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens,

– statuant à nouveau, à titre principal, de déclarer irrecevables les demandes en nullité des contrats, de dire et juger à tout le moins que les demandes ne sont pas fondées et les rejeter ainsi que les demandes en restitution des mensualités réglées,

– de constater que M. et Mme [S] sont défaillants dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 5 juin 2022 et de les condamner solidairement à payer la somme de 19 129,48 euros avec les intérêts au taux contractuel à compter du 3 juin 2022 sur la somme de 17 712,49 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit, outre la restitution en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées et de les condamner, en tant que de besoin, solidairement à restituer cette somme puis subsidiairement, les condamner solidairement à régler les mensualités échues impayées postérieurement au jugement arrêtées au jour où la cour statue, soit la somme de 6 108,34 euros correspondant aux échéances échues impayées de juillet 2022 à mai 2024 inclus, et leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,

– subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande visant à la décharge de l’obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter et les condamner, en conséquence, solidairement au paiement de la somme de 27 400 euros en restitution du capital prêté,

– en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande visant à la privation de la créance de la société Domofinance et à a tout le moins, la rejeter,

– très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due par la société Domofinance eu égard au préjudice effectivement subi par l’emprunteur à charge pour lui de l’établir et eu égard à la faute de l’emprunteur ayant concouru à son propre préjudice, de limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. et Mme [S] d’en justifier et en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et de dire et juger que M. et Mme [S] restent tenus solidairement de restituer l’entier capital à hauteur de 27 400 euros,

– à titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de créance de la banque, de condamner in solidum M. et Mme [S] à payer à la société Domofinance la somme de 27 400 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, de leur enjoindre de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la société [D], en qualité de liquidateur judiciaire dans un délai de15 jours à compter de la signification de l’arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et dire et juger qu’à défaut de restitution, ils resteront tenus solidairement du remboursement du capital prêté et subsidiairement, de les priver de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

– de dire et juger, en tout état de cause, en cas de nullité des contrats, que la société Futura Internationale est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n’exonère toutefois pas l’emprunteur de son obligation lorsqu’il n’en a pas été déchargé et de condamner, en conséquence, cette société à garantir la restitution de l’entier capital prêté, et donc à payer à la société Domofinance la somme de 27 400 euros au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté ; subsidiairement, si la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n’y faire droit que partiellement, de condamner la société Futura Internationale à payer à la société Domofinance la somme de 27 400 euros, ou le solde, sur le fondement de la répétition de l’indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité de condamner par ailleurs, la société Futura internationale au paiement des intérêts perdus du fait de l’annulation ou résolution des contrats, et donc à payer à la société Domofinance la somme de 6 844euros à ce titre et de fixer en conséquence les créances de la société Domofinance au passif de la procédure collective de la société Futura Internationale à hauteur de sommes de 27 400 euros et 6 844 euros,

– en tout état de cause, de condamner la société Futura Internationale à garantir la société Domofinance de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre, en conséquence, en cas de décharge de l’obligation de l’emprunteur sur le fondement de la responsabilité de la banque, de la condamner à lui régler la somme de 34 244 euros dans la limite toutefois de la décharge prononcée et de fixer en conséquence la créance de la société Domofinance au passif de la procédure collective de la société Futura Internationale à hauteur de la somme de 34 244 euros,

– de débouter M. et Mme [S] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

– d’ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

– en tout état de cause, de les condamner in solidum au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil.

Elle soulève le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d’un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi sur le fondement de l’article 1103 du code civil.

Elle soulève le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande.

Elle conteste toute méconnaissance des articles L. 111-1, L. 221-5 et L. 221-8 du code de la consommation, rappelle le caractère strict de l’interprétation de ces textes et estime que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par les textes.

Elle rejette toute irrégularité dans le bon de commande au regard de la désignation du matériel vendu, aux modalités de paiement et d’exécution. Elle soutient en particulier que la marque n’est pas une caractéristique essentielle, que les textes n’imposent pas de voir mentionner le prix unitaire, que le contrat précise un délai de livraison au 31 mars 2017. S’agissant de la mention relative à la possibilité de saisir le médiateur à la consommation, elle soutient qu’aucun texte ne prévoit la nullité pour défaut des mentions figurant à l’article L. 111-1 du code de la consommation et que les époux [S] n’ont pas produit les conditions générales de vente afin de vérifier pleinement le respect des dispositions légales. Elle estime que les appelants ont bien reçu cette information qui figure au contrat de crédit signé le même jour.

Elle indique que la mention relative aux pièces détachées de l’article L. 111-4 n’est pas requise à peine de nullité.

Elle observe que les appelants ont expressément reconnu, dans les conditions particulières, avoir reçu les conditions générales et le bordereau de rétractation, que le bordereau est bien présent, permettant aux acquéreurs de se rétracter avec mention des modalités selon lesquelles ils peuvent y procéder, de sorte qu’ils ont bien été informés de leur droit de rétractation et des modalités pour y procéder. Elle ajoute que ce bordereau mentionne par ailleurs bien un délai de 14 jours de sorte que les développements des acquéreurs afférent un délai de 7 jours n’est pas fondé.

Elle note que les acquéreurs ne justifient pas d’un préjudice qui résulterait des irrégularités alléguées, qu’il ressort selon elle d’un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 20 mai 2020 que le seul constat d’irrégularités formelles du bon de commande ne suffit pas à fonder le prononcé de la nullité du contrat en l’absence de preuve par l’acquéreur qu’il en a résulté pour lui un préjudice.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que les acquéreurs ont confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d’une nullité du bon de commande en attestant de l’exécution conforme des travaux sans aucune réserve, en procédant au paiement du prix de la prestation, en laissant l’installation être raccordée puis en revendant l’électricité à la société EDF. Elle soutient que les acquéreurs ne peuvent adopter une attitude contradictoire en sollicitant, d’un côté, la nullité des contrats et en poursuivant de l’autre, leur exécution et rappelle que conformément au “principe de l’estoppel” une partie ne peut avoir une attitude “incompatible” avec ses demandes. (Cf. Cass. 2 ème civ. 15 mars 2018).

Elle note que les allégations de dol au sens des anciens articles 1130 et 1137 du code civil ne sont aucunement étayées et note que le bon de commande ne comporte aucune stipulation pouvant s’analyser en un engagement d’autofinancement et alors que la prétendue simulation manuscrite produite désormais en pièce adverse n° 1 n’était pas produite en première instance, et il n’est nullement établi qu’elle émanerait de la société venderesse. Elle ajoute que les acquéreurs font également état de ce que le bon de commande aurait été présenté comme une “candidature” et que certaines informations auraient été omises alors que ces éléments ne sont pas à même d’établir une tromperie. Elle déplore qu’aucune aucune expertise n’est produite de nature à établir la rentabilité ni aucun justificatif concernant le crédit d’impôt perçu.

En l’absence d’anéantissement des contrats, elle note que le contrat de crédit est maintenu et fait connaître que les emprunteurs ont cessé de régler les échéances du crédit et qu’elle est donc bien fondée à solliciter la résiliation du contrat à effet au 3 juin 2022 du fait des mensualités impayées depuis cette date et leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 19 129,48 euros avec les intérêts au taux contractuel à compter du 3 juin 2022 sur la somme de 17 712,49 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes restituées au titre de l’exécution provisoire du jugement. Subsidiairement, si l’infirmation du jugement devrait donner lieu à restitution des sommes versées au titre de l’exécution provisoire, elle demande la condamnation à régler les échéances échues impayées au titre du crédit jusqu’à la date de l’arrêt à venir, soit la somme de 6 108,34 euros correspondant aux échéances de juillet 2022 à mai 2024 inclus (265,58 x 23) et injonction d’avoir à reprendre le remboursement du crédit sous peine de déchéance du terme.

Subsidiairement, elle fait valoir que si la nullité ou la résolution du contrat de crédit était prononcée, les acquéreurs devront restituer le montant du capital prêté et qu’ils ne démontrent pas l’existence d’une faute, d’un lien de causalité et d’un préjudice permettant de les exonérer de cette restitution.

Elle conteste toute faute dans le déblocage des fonds que ce soit dans la vérification de la régularité du bon de commande à laquelle elle n’était pas tenue ou dans la vérification de l’exécution des prestations à la charge du vendeur sur la base d’une attestation de fin de travaux sans réserve. Elle rappelle qu’en cas de nullité, seule la responsabilité civile délictuelle des parties peut être engagée ce qui ne permet pas aux parties de faire valoir l’inexécution d’une obligation contractuelle supposée n’avoir jamais existé.

Elle soutient qu’à supposer que le préjudice résultant de la faute dans la vérification du bon de commande consiste dans une perte de chance pour l’acquéreur-emprunteur de ne pas poursuivre la relation contractuelle comme cela a pu être jugé dans le cadre de certains arrêts, il n’en reste pas moins que le couple [S] ne justifie pas en l’espèce avoir effectivement perdu une chance de ne pas contracter, que la faute ne consisterait pas ici dans le fait d’avoir versé les fonds prêtés, mais consisterait dans le fait de ne pas avoir alerté l’acquéreur sur les irrégularités du bon de commande, étant rappelé que l’acquéreur a la faculté de confirmer le contrat et donc de passer outre les irrégularités formelles, de sorte qu’il ne subit dans cette hypothèse – à défaut d’informations concernant les irrégularités – qu’une perte de chance de ne pas avoir poursuivi la relation contractuelle en connaissance desdites irrégularités.

Elle ajoute qu’il n’y a aucun lien de causalité entre la faute dans le déblocage des fonds prêtés alors que la prestation n’est pas achevée, qui empêche l’acquéreur d’obtenir le cas échéant l’achèvement de la prestation, et l’impossibilité pour l’acquéreur d’obtenir restitution du prix de vente auprès du vendeur, qui résulte de la liquidation judiciaire du vendeur.

A titre subsidiaire, si la cour devait estimer qu’un préjudice a été subi et que le lien de causalité est caractérisé, elle demande de limiter sa condamnation en proportion du préjudice effectivement subi en lien de causalité avec la faute opérée, à savoir la part de la prestation qui n’aurait pas été achevée, à charge pour l’acquéreur d’en justifier et de prendre en considération la limitation de responsabilité liée à la signature fautive de l’attestation et demande de versement des fonds prêtés.

Subsidiairement, si par extraordinaire la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n’y faire droit que partiellement, elle demande la condamnation de la société venderesse à payer la somme correspondant au capital versé, ou à défaut le solde n’entrant pas dans le champ de la garantie, sur le fondement de la répétition de l’indu ou sur le fondement de la responsabilité civile.

Suivant acte délivré le 15 novembre 2022 à personne morale, la société [D] prise en la personne de Maître [U] [D] a reçu signification de la déclaration d’appel. Elle a reçu signification des conclusions des appelants par actes des 16 janvier 2023, 21 juin 2023 et 14 février 2024 remis à personne morale. La société [D] n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 février 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 13 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour constate :

– que les appelants ne poursuivent plus à hauteur d’appel la résolution des contrats,

– que le contrat de vente conclu le 31 janvier 2017 est soumis aux dispositions des articles L. 221-5 suivants du code de la consommation dans leur version postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 dès lors qu’il a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile,

– que le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

– qu’il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version postérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Sur les fins de non-recevoir

La société Domofinance soulève dans le corps de ses écritures le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande.

Cette fin de non-recevoir n’est pas reprise dans le dispositif des écritures de sorte qu’il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point par application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile.

Si la société Domofinance sollicite également de déclarer irrecevable la demande visant à la privation de sa créance ou à la décharge de l’obligation de rembourser le capital et à a tout le moins, de la rejeter, elle ne formule en réalité aucune fin de non-recevoir à ce titre.

– Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l’article 1103 du code civil

La société Domofinance se fonde dans ses écritures sur l’article 1103 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé des demandes en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d’un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, il n’est pas expliqué en quoi le non-respect des dispositions de l’article 1103 du code civil en leur version applicable en la cause viendrait fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Il s’ensuit qu’aucune irrecevabilité n’est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d’appel doit être rejetée.

Sur la demande d’annulation des contrats

– Sur le moyen tiré du non-respect du formalisme contractuel

En application de l’article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 et lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État.

Selon l’article R. 221-3 issu du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016, les informations relatives au droit de rétractation mentionnées aux 2°, 3° et 4° de l’article L. 221-5 peuvent être fournies au moyen de l’avis d’information type dûment complété figurant en annexe au présent code.

L’article L. 221-8 du même code prévoit que dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues à l’article L. 221-5. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.

L’article L. 221-9 dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.

L’article L. 242-1 du même code précise que les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Selon l’article L. 111-1 en sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 12 février 2020, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence de toute restriction d’installation de logiciel, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

L’article L. 111-2 du même code précise qu’outre les mentions prévues à l’article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services et, lorsqu’il n’y a pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État. Les informations complémentaires qui ne sont communiquées qu’à la demande du consommateur sont également précisées par décret en Conseil d’État.

L’article R. 111-1 du code de la consommation en sa version applicable prévoit que l’application des 4°, 5° et 6° de l’article L. 111-1, le professionnel communique au consommateur les informations suivantes, son nom ou sa dénomination sociale, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique, les modalités de paiement, de livraison et d’exécution du contrat ainsi que celles prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations, s’il y a lieu, l’existence et les modalités d’exercice de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 217-4 à L. 217-13 et de celle des défauts de la chose vendue dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil ainsi que, le cas échéant, de la garantie commerciale et du service après-vente mentionnés respectivement aux articles L. 217-15 et L. 217-17, s’il y a lieu, la durée du contrat ou, s’il s’agit d’un contrat à durée indéterminée ou à tacite reconduction, les conditions de sa résiliation, s’il y a lieu, toute interopérabilité pertinente du contenu numérique avec certains matériels ou logiciels dont le professionnel a ou devrait raisonnablement avoir connaissance ainsi que les fonctionnalités du contenu numérique, y compris les mesures de protection technique applicables, les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont il relève.

L’article R. 111-2 en sa version applicable au contrat vient préciser que pour l’application des dispositions de l’article L. 111-2, outre les informations prévues à l’article R. 111-1, le professionnel communique au consommateur ou met à sa disposition les informations suivantes sur le statut et la forme juridique de l’entreprise, les coordonnées permettant d’entrer en contact rapidement et de communiquer directement avec lui, le cas échéant, le numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, si son activité est soumise à un régime d’autorisation, le nom et l’adresse de l’autorité ayant délivré l’autorisation, s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification, s’il est membre d’une profession réglementée, son titre professionnel, l’État membre de l’Union européenne dans lequel il a été octroyé ainsi que, le cas échéant, le nom de l’ordre ou de l’organisme professionnel auprès duquel il est inscrit, les conditions générales, s’il en utilise, le cas échéant, les clauses contractuelles relatives à la législation applicable et la juridiction compétente, l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.

Contrairement à ce qu’indique la société Domofinance, M. et Mme [S] communiquent aux débats l’original du bon de commande à en-tête Futura Internationale sur quatre pages en recto verso, contenant en dernière page les conditions générales de vente.

M. et Mme [S] contestent le respect des points 1, 2, 3, 5,6 outre une violation des dis-positions relatives au droit de rétractation.

L’objet de la vente est décrit ainsi :

“PHOTOVOLTAIQUE PRODUCTION D’ELECTRICITE

ETUDE/FOUNRITURE/INSTALLATION COMPRISE

Puissance 4 200 Wc composé de 14 modules solaires photovoltaïques de type Thalcos

Puissance unitaire 300 Wc certifiés NF EN 61215 CLASSE II

Câblage, protection électrique, boîtier ACDC, interrupteur/sectionneur, parafoudre, DDR 30 M, coupe-circuit, câbles solaires 4mm2

Démarches administratives, déclaration préalable de travaux (demande d’autorisation à la mairie), demande ERDF (électricité réseau, distribution France), demande de raccordement, élaboration de la demande de contrat d’achat EDF AOA (agence d’obligation d’achat)

Total 27 200€ (…)

Montage effectué par Futura (…)

Date d’installation 31 mars 2017″.

Il n’est pas justifié, au-delà de considérations générales, en quoi le poids, le type de panneaux, leur dimension et performance, le nombre et ses dimensions pouvaient constituer, in concreto, des caractéristiques essentielles des matériels vendus au sens de l’article précité. La marque des panneaux est bien renseignée (Thaleos), celle de l’onduleur (Omnilk) mais n’est précisée que sur la facture établie le 8 mars 2017 par la société Furuta Internationale.

Il faut observer que les dispositions légales précitées n’imposent pas la mention du prix de chaque composant de l’équipement, du prix de la main d”uvre ni le développement détaillé des modalités techniques de pose des matériels (nature de la pose des panneaux, modalités de pose) ou la remise d’un plan technique.

Il est prévu un délai d’installation de 90 jours et une date de livraison au 31 mars 2017, date respectée puisque la livraison et la pose ont été réalisés le 7 mars 2017. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le vendeur ne saurait s’engager sur un délai prévisible ou encore quant à une date de mise en service de l’installation puisqu’il n’a à sa charge que la réalisation des démarches administratives préalables et alors que le raccordement au réseau électrique, les différentes autorisations administratives nécessaires puis la validation d’un contrat de rachat d’énergie ne relèvent pas de sa compétence.

En contradiction avec les dispositions de l’article R. 111-2 prises pour l’application de l’article L. 111-2 du code de la consommation, le contrat ne contient aucune mention relative à l’éventuelle garantie financière ou à l’assurance de responsabilité professionnelle souscrite par la société Futura Internationale, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.

Il ne mentionne pas non plus la possibilité de recourir aux services du médiateur de la consommation alors que les textes imposent à peine de nullité que le contrat soit revêtu de cette mention. La société Domofinance ne saurait se retrancher derrière le fait que le contrat de crédit validé le même jour comporte une clause permettant de recourir à une procédure extrajudiciaire puisque les textes exigent cette mention dans le cadre de la conclusion à domicile du contrat de vente au stade précontractuel et au stade contractuel.

M. et Mme [S] se plaignent également de ne pas avoir reçu d’informations précontractuelles quant au délai et aux modalités d’exercice du droit de rétractation, que ces informations ne figurent ni au bordereau ni au contrat lui-même.

En application de l’article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d’un contrat, le professionnel communique notamment au consommateur, de manière lisible et compréhensible les conditions, le délai et les modalités d’exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation.

Selon l’article L. 221-18 du code de la consommation, en vigueur depuis le 1er juillet 2016, le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.

L’article L. 221-20 du code de la consommation en vigueur depuis le 1er juillet 2016 dispose que “lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 221-5, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l’article L. 221-18. Toutefois, lorsque la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d’une période de quatorze jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations”.

L’article R. 221-1 créé par le décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 précise que le formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5 figure en annexe au présent code. Il est formulé ainsi : “MODÈLE DE FORMULAIRE DE RÉTRACTATION

(Veuillez compléter et renvoyer le présent formulaire uniquement si vous souhaitez vous rétracter du contrat.)

A l’attention de [le professionnel insère ici son nom, son adresse géographique et, lorsqu’ils sont disponibles, son numéro de télécopieur et son adresse électronique] :

Je/nous (*) vous notifie/notifions (*) par la présente ma/notre (*) rétractation du contrat portant sur la vente du bien (*)/pour la prestation de services (*) ci-dessous :

Commandé le (*)/reçu le (*) :

Nom du (des) consommateur(s) :

Adresse du (des) consommateur(s) :

Signature du (des) consommateur(s) (uniquement en cas de notification du présent formulaire sur papier) :

Date :

(*) Rayez la mention inutile”.

Le bon de commande contient en bas des conditions générales de vente à son pied un bordereau de rétractation. Ce bordereau est séparé du corps du contrat par une ligne discontinue suffisamment explicite de la possibilité de le détacher. Il comporte toutes les mentions exigées par l’article précité.

Contrairement à ce qui est soutenu, le formulaire ne porte pas mention des articles L. 121-21 à L. 121-26 qui n’étaient alors plus en vigueur mais la mention de l’article R. 121-1. Aucune reproduction textuelle n’est exigée.

En revanche, ni les conditions particulières ni les conditions générales ne font état de la possibilité de se rétracter, du délai de rétractation et de ses modalités.

Partant c’est à bon droit que le premier juge a considéré que le contrat encourait l’annulation sans qu’il soit besoin de démonstration d’un quelconque préjudice, étant précisé que comme l’a admis la Cour de cassation certes sous l’empire de la législation antérieure, l’éventuelle prolongation du délai de rétractation prévue en cas de sanction n’est pas exclusive du droit pour le consommateur de demander l’annulation du contrat.

L’article 1181 du code civil précise que la nullité relative peut être couverte par la confirmation. La confirmation au sens de l’article 1182 du code civil est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. L’exécution volontaire du contrat en connaissance de la cause de nullité vaut confirmation et emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés sans préjudice des droits des tiers.

Il n’est pas contesté que M. et Mme [S] ont exécuté l’ensemble contractuel en acceptant la livraison et la pose du matériel sans émettre de réserve, en sollicitant de la banque le paiement du prix de la prestation, en laissant l’installation être raccordée puis en revendant l’électricité à la société EDF même après délivrance de leur assignation en justice.

Pour autant, les conditions générales de vente sont pour le moins peu détaillées et contiennent en tout et pour tout sept paragraphes relatifs aux garanties et exclusions, au bilan thermique, à la pose et à l’installation, à l’indépendance de l’installateur, à la réclamation et aux réserves de livraison, au paiement et au rendement, aides et crédits d’impôts et au tarif de rachat. Le bon de commande est taisant quant à la réglementation sur le démarchage à domicile et en particulier quant aux mentions devant figurer au contrat ou aux informations devant être portées à la connaissance des contractants sous peine de nullité du contrat. Il ne mentionne jamais qu’il est conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile ou hors établissement. La seule référence est une mention pré-imprimée selon laquelle les acquéreurs déclarent être d’accord avec les conditions générales de vente et reconnaissent avoir pris connaissance des articles L. 121-21 à L. 121-26 du code de la consommation applicables à la vente à domicile et il doit être relevé que ces articles n’étaient plus en vigueur au moment de la signature du contrat en janvier 2017 depuis le 1er juillet 2016.

Il n’est donc pas démontré que M. et Mme [S], en tant que consommateurs profanes, aient eu connaissance des irrégularités affectant le contrat au moment de sa signature et ils ne peuvent donc avoir manifesté leur intention de couvrir les causes de nullité affectant la convention, l’exécution volontaire des contrats étant indifférente. La cour constate qu’ils ont adressé à la société Futura Internationale le 25 septembre 2017, un courrier aux termes duquel ils sollicitent l’annulation du contrat en se fondant sur le non-respect des dispositions d’ordre public du code de la consommation et le non-respect d’un prétendu auto-financement.

C’est donc à bon droit que le premier juge a prononcé la nullité du contrat de vente et a constaté celle du contrat de crédit sur le fondement de l’article L. 312-55 du code de la consommation.

Sur les conséquences de l’annulation des contrats et la faute de la société Domofinance

Le premier juge a indiqué que la demande de restitution du matériel était sans objet.

Pour autant, l’anéantissement des contrats a pour conséquence de remettre les parties en l’état où elles se trouvaient avant signature du contrat.

Dès lors, il convient de donner acte à M. et Mme [S] de ce qu’ils offrent de tenir à la disposition de la société Maître [U] [D], en qualité de mandataire liquidateur de la société Futura Internationale, les matériels objet du contrat de vente, pendant un délai de trois mois et de dire que passé ce délai de trois mois, en cas d’inaction de la part du liquidateur, ils pourront faire leur affaire personnelle de ladite installation.

L’anéantissement des contrats conduit à la restitution du prix de vente par le vendeur à l’acquéreur, à la restitution par ce dernier, en sa qualité d’emprunteur, du capital prêté à la banque. Le fait que la somme prêtée ait été versée directement au vendeur en règlement du prix, par la banque, pour le compte de l’acquéreur-emprunteur reste indifférent ; l’obligation de restitution de l’emprunteur à l’égard de la banque demeure.

Ainsi, l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté sous déduction des sommes d’ores été déjà réglées. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut-être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute

Les appelants reprochent divers manquements à la banque devant la priver de son droit à restitution du capital avec remboursement des sommes versées au titre du crédit. Le premier juge a retenu une faute de la banque dans le déblocage des fonds au vu d’une attestation de réception des travaux incomplète ne mentionnant pas l’exécution de toutes les prestations à la charge du vendeur, à savoir le raccordement au réseau outre les démarches administratives à effectuer. Il a considéré que M. et Mme [S] échouaient à démontrer un préjudice dans la mesure où ils bénéficiaient d’une installation fonctionnelle avec revente de l’énergie produite.

Le contrat principal et le contrat de crédit dédié à son financement forment une “opération commerciale unique” au sens de l’article L. 311-1, 11° du code de la consommation, laquelle s’accompagne d’une interdépendance entre le contrat principal et le crédit qui le finance ainsi qu’il résulte des articles L. 311-30 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable au litige. Il est de jurisprudence constante que le prêteur est dès lors tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et que faute de le faire il commet une faute.

Si la banque ne saurait être tenue à une analyse fine du bon de commande au regard de la règlementation applicable en matière de démarchage à domicile, elle doit en revanche être en mesure, avant de débloquer les fonds, de s’assurer que le bon de commande n’est pas entaché d’une irrégularité manifeste. En l’espèce, l’absence de toute mention relative aux conditions, délai et modalités d’exercice du droit de rétractation et de toute mention relative à la possibilité de saisir le médiateur de la consommation aurait dû attirer son attention.

Elle a donc commis une faute en débloquant les fonds sur la base d’un contrat atteint d’irrégularités manifestes.

En revanche il ne peut lui être reproché comme l’a fait le premier juge d’avoir débloqué les fonds alors que les travaux n’étaient pas terminés et l’installation non raccordée.

En effet, en application de l’article L. 312-48 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er juillet 2016, “les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, les obligations prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci”.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée mais il ne lui appartient pas de s’assurer par lui-même de l’exécution des prestations et il ne saurait être garant de l’exécution du contrat principal.

Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoit expressément que les fonds sont mis à disposition à la livraison du bien, par chèque ou virement au bénéficiaire mentionné dans l’attestation de fin de travaux.

La société Domofinance a débloqué les fonds sur la base d’une demande signée par M. [S] le 7 mars 2017 attestant que les travaux objets du financement étaient terminés et conformes au bon de commande n° 066344 du 31 janvier 2017 et par laquelle il demandait à la société Domofinance de payer la somme de 27 400 euros au vendeur.

Le certificat de livraison permet d’identifier sans ambiguïté l’opération financée et d’attester de la livraison de l’installation photovoltaïque à la charge de la société venderesse.

Le contrôle opéré par la banque ne saurait porter ni sur des autorisations administratives relevant d’organismes tiers, ni sur la réalisation du raccordement réalisé ultérieurement par ERDF, structure tierce par rapport à l’ensemble contractuel.

Cette attestation est donc suffisante pour apporter la preuve de l’exécution du contrat principal.

La seule faute commise par la banque concerne donc le défaut de vérification de la conformité du bon de commande.

La privation de la créance de restitution est subordonnée à l’existence d’un préjudice lequel doit être en lien avec la faute retenue en l’espèce ici le défaut de vérification de la validité formelle du bon de commande, ce qui n’est que l’application du principe général de responsabilité qui implique une faute, un préjudice et un lien de causalité.

Sur ce point, le seul préjudice consisterait pour M. et Mme [S] d’avoir perdu une chance de se rétracter ou de saisir le médiateur à la consommation, faute d’avoir été informés de cette faculté ou de ses modalités avant que la banque ne débloque les fonds.

Aucun autre préjudice invoqué par M. et Mme [S] ne saurait être en lien avec la seule faute de la banque retenue par la cour.

Dès lors la perte de chance doit être évaluée à 15 % du capital emprunté. La banque doit donc être privée de sa créance de restitution à hauteur de 4 110 euros sur 27 400 euros sans que le fait pour l’acquéreur de signer une attestation de fin de travaux sans émettre de réserve et de donner un ordre de paiement sans lesquels la banque n’aurait jamais réglé les fonds à la société venderesse, ne puisse être constitutif d’une quelconque faute de nature à limiter la décharge comme le demande la société Domofinance. Cette dernière doit donc être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre. Il en est de même de sa demande de condamnation à voir restituer les revenus perçus au titre de la revente d’énergie.

M. et Mme [S] ne sont donc tenus solidairement à restitution du capital emprunté qu’à hauteur de la somme de 23 290 euros. Les sommes versées par eux au titre du contrat de prêt soit la somme de 15 129,80 euros arrêtée au 3 juin 2022 selon l’historique de compte communiqué par la banque devront venir en déduction, avec compensation telle qu’ordonnée par la décision querellée.

Les parties restent par ailleurs redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement infirmé.

L’article L. 312-56 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date des contrats prévoit que la résolution judiciaire ou l’annulation du contrat principal survient du fait du vendeur, celui-ci pourra, à la demande du prêteur, être condamné à garantir l’emprunteur du remboursement du prêt, sans préjudice de dommages et intérêts vis-à-vis du prêteur et de l’emprunteur.

La société Futura Internationale doit sa garantie à la société Domofinance puisque le fait de ne pas avoir respecté le formalisme du contrat lui est entièrement imputable. Il convient de fixer cette garantie à la somme dont est privée la banque sur le capital prêté soit la somme de 4 110 euros et de constater cette créance de garantie à concurrence de 4 110 euros au passif de la procédure collective de la société Futura Internationale, la déclaration de créance ayant été effectuée le 9 novembre 2021 pour une somme de 32 244 euros. Le surplus des demandes concernant la somme à laquelle la banque aurait pu prétendre au titre du crédit soit 34 244 euros (27 400 euros de capital + 6 844 euros au titre des intérêts) doit en revanche être rejeté.

Les demandes en résiliation du contrat de crédit et en paiement du fait de la résiliation du contrat ou du fait des impayés sont devenus sans objet du fait de l’annulation du contrat de crédit.

Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles doivent être confirmées. La société Domofinance qui succombe doit être tenue aux dépens d’appel. Elle est condamnée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à payer M. et Mme [S] une somme de 2 000 euros, les intimés étant déboutés de leur demande à ce titre.

Les parties sont déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, et par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné solidairement M. [E] [S] et Mme [N] [J] épouse [S] à rembourser à la société Domofinance le somme de 27 400 euros au titre du capital emprunté et condamné la société Domofinance à restituer à leur restituer les échéances du prêt déjà remboursées soit la somme de 5 037,76 euros arrêtée au 5 mars 2019 ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Donne acte à M. [E] [S] et Mme [N] [J] épouse [S] de ce qu’ils s’engagent à tenir à la disposition de Maître [U] [D], en qualité de mandataire liquidateur de la société Futura Internationale, les matériels objets du contrat de vente, pendant un délai de trois mois à compter de la signification de l’arrêt et dit que passé ce délai de trois mois, en cas d’inaction de la part du liquidateur, ils pourront faire leur affaire personnelle de ladite installation ;

Condamne solidairement M. [E] [S] et Mme [N] [J] épouse [S] à rembourser à la société Domofinance la somme de 23 290 euros au titre du capital emprunté ;

Condamne la société Domofinance à restituer à M. [E] [S] et Mme [N] [J] épouse [S] les échéances du prêt déjà remboursées soit la somme de 15 129,80 euros arrêtée au 3 juin 2022 ;

Dit que la société Futura Internationale doit sa garantie à la société Domofinance à hauteur de la somme de 4 110 euros ;

Constate cette créance de garantie à concurrence de 4 110 euros au passif de la procédure collective de la société Futura Internationale ;

Déboute la société Domofinance de sa demande en paiement et en résiliation du contrat de crédit ;

Rappelle que les parties restent redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société Domofinance aux dépens d’appel ;

Condamne la société Domofinance à payer à M. [E] [S] et Mme [N] [J] épouse [S] la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


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