Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 23 OCTOBRE 2001
(N , 6 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 2001/06034 Pas de jonction Décision dont recours : décision n°01-241 de la Commission des opérations de bourse en date du 20/03/2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : REJET DEMANDEURS AU RECOURS :
– Monsieur X… Jérome Y… 23, rue Marcel Cerdan – 92300 LEVALLOIS-PERRET Assisté de Maître J.-C. SIMON, 25, rue de Prony – 75017 PARIS – Monsieur MORHANGE Edouard Y… 5, square Clignancourt – 75018 PARIS Assisté de Maître J.-C. SIMON, 25, rue de Prony – 75017 PARIS DEFENDERESSES AU RECOURS : – S.A. LIBERTY SURF GROUP, ayant son siège 10, rue Fructidor – 75834 PARIS CEDEX 17 Prise en la personne de Monsieur Christophe PARCOT Z… par la SCP TEYTAUD, avoués, 4-6, quai de la Mégisserie et 1, rue Edouard Colonne – 75001 PARIS Assistée de Maître D. PASTUREL, Toque B 184 – S.p.a. TISCALI, ayant son siège Viale Trento, 39 CAGLIARI – ITALIE Prise en la personne de ses représentants légaux Z… par la SCP TEYTAUD, avoués, 4-6, quai de la Mégisserie et 1, rue Edouard Colonne – 75001 PARIS Assistée de Maître O. DIAZ, Toque R 170 EN PRESENCE DE : – La Commission des opérations de bourse, 39-43, quai André Citroùn – 75015 PARIS Z… aux débats par Madame A…, munie d’un mandat régulier. COMPOSITION DE LA COUR : B… des débats et du délibéré, Monsieur LACABARATS, Président Madame BREGEON, Conseiller Monsieur LE DAUPHIN, Conseiller GREFFIER :
B… des débats : Madame PADEL B… du prononcé de l’arrêt : Madame C… MINISTERE D… : Monsieur E…, Substitut Général DEBATS : A l’audience publique du 19 Juin 2001, ARRET : Prononcé publiquement le VINGT TROIS OCTOBRE DEUX MIL UN, par Monsieur LACABARATS, Président, qui en a signé la minute avec Madame C…, Greffier.
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Après avoir entendu les conseils des parties, les observations de Madame le représentant de la Commisssion des opérations de bourse et celles du Ministère D….
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Par décision publiée le 8 février 2001, le Conseil des marchés financiers (CMF) a déclaré recevable l’offre publique d’échange avec soulte initiée par la société TISCALI S.p.A. (TISCALI) visant la
totalité des actions de la société LIBERTY SURF GROUP (LIBERTY SURF). Le 20 mars suivant, la Commission des opérations de bourse (COB) a apposé le visa n°01-241 sur la note d’information relative à l’offre. Cette note a été publiée le 22 mars 2001 et, le même jour, le CMF a fait connaître que ladite offre publique d’échange serait ouverte du 22 mars au 27 avril 2001.
LA COUR
Vu le recours en annulation formé le 30 mars 2001 par Messieurs Jérôme X… et Edouard MORHANGE à l’encontre du visa délivré par la COB le 20 mars précédent,
Vu les moyens déposés le 24 avril 2001, par lesquels les requérants demandent à la cour d’annuler ledit visa au motif que l’information ainsi diffusée contrevient aux dispositions d’ordre public du règlement COB n°89-03 relatives à la répartition du capital de la société visée par l’offre, dans la mesure où : * ils ont convenu le 5 juillet 2000 avec la société LIBERTY SURF de lui céder la totalité du capital de la société FILM NON STOP fondée par eux, une partie du paiement du prix étant subordonnée à la réalisation de certaines conditions et devant intervenir sous forme de remise d’actions de la société LIBERTY SURF, * ils n’ont pu obtenir le paiement du solde du prix s’élevant à 17.700.000 francs, * la note d’information sur l’offre publique d’échange, établie conjointement par les sociétés TISCALI et LIBERTY SURF, présente l’acquisition de la société FILM NON STOP de manière incomplète et trompeuse, en sa page 35, sous la rubrique « Capital potentiel / capital autorisé », en ce qui concerne le principe même de l’exigibilité du complément de prix, sa date d’exigibilité ainsi que son montant,
Vu les conclusions en date du 29 mai 2001, par lesquelles la société
TISCALI, défenderesse, demande à la cour de : * dire, à titre principal, qu’elle est incompétente pour juger le recours, le moyen invoqué par Messieurs X… et MORHANGE relevant de l’interprétation d’un contrat de droit privé extérieur au contrôle de la COB, * dire, subsidiairement, que les requérants sont dépourvus d’intérêt à agir en raison de l’absence d’effet utile de leur recours et les déclarer irrecevables en celui-ci, * très subsidiairement, les déclarer mal fondés, * en toute hypothèse, condamner les requérants à lui payer la somme de 100.000 francs au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Vu les conclusions en date du 29 mai 2001, par lesquelles la société LIBERTY SURF, autre défenderesse, demande à la cour de : * dire, à titre principal, que l’unique moyen invoqué par Messieurs X… et MORHANGE est inopérant, la COB n’ayant ni le pouvoir, ni la compétence de se prononcer sur l’interprétation d’un contrat, * constater, subsidiairement, que Messieurs X… et MORHANGE sont dépourvus d’intérêt à agir en raison de l’absence d’effet utile de leur recours et les déclarer en conséquence irrecevables en celui-ci, * en toute hypothèse, les condamner à lui verser la somme de 100.000 francs au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, Vu les observations du 7 juin 2001, par lesquelles la COB conclut au rejet de la demande des requérants,
Le Ministère D… ayant été entendu en ses observations orales tendant à l’irrecevabilité du recours,
SUR CE,
Considérant que relève de la compétence de cette cour l’examen des recours contre les décisions par lesquelles la COB appose son visa préalable sur le projet de document destiné à l’information du public, portant sur le contenu et les modalités d’une offre publique
d’acquisition de titres de capital d’un émetteur faisant appel public à l’épargne, fût-ce, comme en l’espèce, par voie d’échange ;
Que, dès lors, le recours exercé le 30 mars 2001 par Messieurs X… et MORHANGE à l’encontre du visa délivré par la COB le 20 mars précédent sur la note d’information relative à l’offre d’échange avec soulte initiée par la société TISCALI visant les actions de la société LIBERTY SURF, est en soi recevable ;
Considérant cependant que l’opération elle-même n’a pas été remise en cause puisqu’aucun recours n’a été exercé par Messieurs X… et MORHANGE envers les décisions prises par le CMF, tant en ce qui concerne celle du 8 février 2001 sur sa recevabilité que celle du 22 mars 2001 sur son déroulement jusqu’au 27 avril 2001 ; que les intéressés n’ont pas davantage sollicité qu’il soit sursis à l’exécution du visa déféré en sorte que, le 11 mai 2001, le CMF a constaté l’achèvement de l’offre en publiant une décision n°201CO518 indiquant que le résultat de celle-ci confère à la société TISCALI, compte tenu des titres déjà détenus, 94,50 % du capital et des droits de vote de la société LIBERTY SURF ;
Considérant qu’il s’ensuit que le présent recours est devenu inopérant, l’annulation éventuelle de la décision critiquée ne pouvant rétroactivement priver d’effet l’offre en cause puisqu’elle laisserait subsister des décisions distinctes devenues définitives relatives à la recevabilité et au calendrier de ladite offre ;
Considérant qu’en toute hypothèse, la COB, lorsqu’elle appose un visa sur des documents d’information destinés au public, exerce une prérogative de protection de l’épargne investie en valeurs mobilières qui n’implique aucune authentification des éléments comptables et financiers présentés ; qu’elle attribue celui-ci après examen de la pertinence et de la cohérence de l’information donnée dans la perspective de l’opération proposée aux investisseurs ;
Que la juridiction de la cour, saisie d’un recours à l’encontre d’une telle décision, ne peut s’exercer que dans la seule limite des compétences relevant de l’autorité qui s’est prononcée en première instance et ne saurait s’étendre à des problèmes externes à l’offre publique en cause, notamment à ceux relevant exclusivement du droit privé des contrats et obligations ;
Qu’en l’espèce, pour démontrer l’inexactitude de l’information diffusée, les requérants se prévalent d’engagements contractuels de la société LIBERTY SURF à leur égard, relatifs au paiement d’un complément du prix d’achat, par celle-ci, de la société FILM NON STOP ; qu’un tel grief, en ce qu’il implique l’interprétation d’un contrat de droit privé, est donc inopérant ;
Considérant, au surplus, que la COB fait valoir qu’elle a vérifié la cohérence et le caractère suffisant de la note d’information soumise à son examen en la rapprochant avec les données déjà rendues publiques ou connues d’elle et, qu’à ce titre, elle a demandé que soient exposés les engagements portant sur le capital de la société LIBERTY SURF, en sorte qu’y ont été présentées les conditions de paiement du complément de prix que cette dernière « s’est engagée à payer aux anciens actionnaires de la société FILM NON STOP » ; que la COB souligne avec pertinence que l’indication du montant maximum du complément de prix, avec l’énoncé des conditions d’exigibilité de celui-ci (à savoir la réalisation d’objectifs définis) ainsi que la date et les modalités de paiement, constituait la seule information utile pour permettre aux investisseurs d’apprécier la portée des engagements de la société LIBERTY SURF ; qu’elle observe que les mentions figurant dans ladite note correspondent à celles de l’article 2.03 du protocole de cession de la société FILM NON STOP ; que la COB démontre ainsi avoir satisfait à sa mission en s’assurant de la conformité du contenu de la note litigieuse aux prescriptions
de son règlement n° 89-03, contrairement à ce que soutiennent les requérants ;
Considérant qu’il convient d’attribuer à chacune des défenderesses la somme de 50.000 francs au titre des frais non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le recours,
Condamne Messieurs Jérôme X… et Edouard MORHANGE à payer aux sociétés TISCALI S.p.A. et LIBERTY SURF GROUP la somme de 50.000 francs, à chacune, au titre des frais non compris dans les dépens,
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties, Condamne Messieurs Jérôme X… et Edouard MORHANGE aux dépens.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT