Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS 8è chambre, section B ARRET DU 18 JANVIER 2001 (N , 6 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 2000/09777 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 19/11/1999 par le JUGE DE L’EXECUTION DU TGI de PARIS. RG n : 1999/85249 (Juge :
Madame FORES X…) Date ordonnance de clôture : 23 Novembre 2000 Nature de la décision : contradictoire. Décision : INFIRMATION PARTIELLE. APPELANTE : S.A. SEMAK prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 6 bis rue de la Paix (94) VINCENNES représentée par la SCP MENARD-SCELLE-MILLET, avoué assistée de Maître DELIGNERE, avocat, D 465, INTIMEE : S.A. AGF HOLDING (venant aux droits de AGFASSURANCES) prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 87 rue de Richelieu 75002 PARIS (adresse pour la correspondance et la délivrance d’actes de procédure : 12 boulevard de la Madeleine 75009 PARIS) représentée par la SCP GIBOU-PIGNOT-GRAPPOTTE-BENETREAU, avoué assistée de Maître TANDONNET, avocat plaidant pour le Cabine UHRY, C 1060. COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : Président : Monsieur ANQUETIL, Conseiller désigné pour présider cette Chambre par ordonnance du Premier Président en l’absence et par empêchement du Président de cette Chambre, Conseillers : Madame Y… et Madame Z…. DEBATS : à l’audience publique du 29 novembre 2000 GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l’arrêt, Madame A…. ARRET :
contradictoire. Prononcé publiquement par Monsieur ANQUETIL, Président, qui a signé la minute avec Madame A…, Greffier. Autorisée par ordonnance du Juge de l’exécution du Tribunal de grande instance de Paris en date du 18 aôut 1999, la société ASSURANCES GENERALES DE FRANCE- ASSURANCES a pratiqué une saisie conservatoire sur le mobilier et les meubles meublants se trouvant dans les lieux loués et occupés par la société SEMAK suivant procès-verbal en date
du 19 août 1999; la société SEMAK alléguant la nullité de la saisie, et en tant que de besoin sollicitant la distraction de certains objets saisis, a assigné les AGF devant le Juge de l’exécution qui, par jugement en date du 19 novembre 1999 a : – déclaré nulle la saisie conservatoire en ce qu’elle porte sur le canapé et un fauteuil, et le télécopieur CANON, – ordonné que ces objets soient retirés des objets saisis, – rejeté les autres demandes des parties, – laissé les dépens à la charge de la société SEMAK;
Appel a été interjeté par la société SEMAK qui demande à la Cour par dernières conclusions signifiées le 22 novembre 2000 de : – déclarer irrecevables les conclusions déposées au nom d’une société AGF-HOLDING, – déclarer nulle la saisie pratiquée par les AGF, – subsidiairement, ordonner la distraction des objets saisis, à l’exception de 2 imprimantes EPSON et d’une visionneuse KODAK, – condamner les AGF à verser à la société SEMAK la somme de 10.000 francs au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,et aux dépens de première instance et d’appel;
Aux termes de ces écritures, la société SEMAK fait valoir en premier lieu, que les conclusions signifiées devant la Cour par la partie adverse sont irrecevables, car elles émanent d’une société AGF-HOLDING dont l’existence légale n’est pas établie; subsidiairement, l’appelante expose que la saisie est nulle à plusieurs titres; qu’en effet, elle porte sur du mobilier qui a déjà fait l’objet de 2 saisies antérieures; qu’il n’a pas été procédé aux significations requises par l’article 230 du décret du 30 juillet 1992 ;que les objets étaient indisponibles du fait des saisies antérieures; qu’en tout état de cause, plusieurs de ces objets n’appartenaient plus à la société SEMAK, pour avoir été vendus à un tiers;
Par conclusions signifiées le 23 novembre 2000, la société
AGF-HOLDING est également appelante et demande à la Cour de : – lui donner acte de son changement de dénomination sociale, – dire que la saisie conservatoire pratiquée le 18 août 1999 à la demande de AGF-ASSURANCES devenue AGF-HOLDING doit produire tous ses effets, – confirmer le jugement déféré pour le surplus, – condamner la société SEMAK à verser la somme de 15.000 francs au titre des frais non répétibles et aux dépens de première instance et d’appel;
Aux termes de ces écritures, la concluante fait valoir,sur le moyen d’irrecevablilité soulevé par la partie adverse, qu’elle a changé sa dénomination sociale, laquelle n’est plus AGF-ASSURANCES mais AGF-HOLDING; au fond, elle expose que le débiteur ne peut se prévaloir des saisies antérieures; qu’en effet, la première saisie n’a plus d’existence, les causes en ayant été réglées à la créancière; qu’il n’y a eu aucune deuxième saisie; qu’en effet le procès-verbal d’opposition-jonction en date du 12 juillet 1999 ne constitue pas une saisie, et qu’en tout état de cause, si saisie il y avait, elle porterait sur des objets non identifiés; que la société SEMAK n’apporte aucune preuve de ce que les objets saisis auraient été vendus, et que notammment, si le commissaire aux comptes atteste de l’existence d’une écriture comptable, aucun élément ne permet de considérer qu’une véritable cession matérielle a eu lieu relativement aux objets saisis;
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :
SUR LA RECEVABILITE DES CONCLUSIONS SIGNIFIEES PAR LA SOCIETE AGF HOLDING
Considérant que l’intimée a constitué avoué et conclu sous la nouvelle dénomination sociale de « AGF-HOLDING », alors qu’en première instance le créancier saisissant s’est fait connaître sous le nom de « AGF ASSURANCES »; qu’elle prouve par les pièces qu’elle verse aux débats que par décision en date du 22 mai 2000, l’Assemblée générale
des actionnaires de la société AGF ASSURANCES a autorisé le conseil d’administration à décider de la modification de sa dénomination sociale en celle de AGF-HOLDING; que cette résolution est devenue effective, puisqu’il résulte d’un extrait Kbis du registre du commerce en date du 23 novembre 2000 que la société AGF-HOLDING est répertoriée, qu’elle porte le même numéro d’immatriculation que la société AGF ASSURANCES, et qu’il s’agit bien en fait de la même société qui a seulement modifié son nom; que les conclusions sont régulières et recevables;
SUR LA SAISIE CONSERVATOIRE
Considérant qu’il n’est pas contesté que la société AGF-HOLDING dispose d’une créance de loyers paraissant fondée en son principe, et menacée dans son recouvrement, à l’encontre de la société SEMAK son locataire, actuellement en liquidation amiable, ce principe de créance lui permettant de faire une saisie conservatoire; qu’au demeurant, postérieurement à la saisie conservatoire, le Tribunal d’instance de Paris 8éme arrondissement a rendu un jugement assorti de l’exécution provisoire condamnant la société SEMAK à verser une somme de 525.655 francs au titre des loyers impayés à la société AGF ASSURANCES ;
Considérant qu’antérieurement à la saisie conservatoire litigieuse, les biens de la société SEMAK ont fait l’objet d’une première saisie-vente en date du 10 juin 1999, à laquelle par voie d’opposition-jonction un deuxième créancier saisissant s’est joint, la caisse ORGANIC, suivant procès-verbal en date du 12 juillet 1999; que la première saisie n’a plus de cause, la créance ayant été réglée, mais que demeure en cours la deuxième saisie-vente, en date du 12 juillet 1999;
Considérant qu’il convient de constater que la liste des objets
saisis par AGF-ASSURANCES n’est pas identique à la liste des objets précédemment saisis; que seuls sont communs un canapé, un fauteuil, un télécopieur Canon et deux oeuvres picturales (une lithographie et une tableau : »jardin 1980″) ; qu’en conséquence, hormis ces pièces, la société AGF-HOLDING est premier saisissant;
Considérant que l’article 230 du décret du 31 juillet 1992 impose au dernier créancier saisissant de signifier une copie du procés-verbal de saisie à chacun des créanciers dont les diligences sont antérieures aux siennes; que cependant, aucune nullité ni caducité n’est prévue en cas d’inobservation de cette règle, la seule sanction étant que le créancier qui ne s’est pas fait connaître ne pourra concourir à la répartition des deniers; que ce moyen de nullité sera écarté;
Considérant qu’il convient de constater que le décret ci-dessus mentionné n’envisage pas l’hypothèse du créancier qui effectue une saisie conservatoire après une saisie-vente, puisque ce saisissant est exclu de la distribution des deniers, ainsi qu’il résulte de l’article 54 de la loi du 9 juillet 1991, selon lequel seuls sont admis à faire valoir leurs droits sur le prix de vente les créanciers saisissants ou opposants qui ont procédé à une mesure conservatoire sur les mêmes biens avant la saisie-vente; mais qu’aucun texte n’interdit de faire une saisie conservatoire après une saisie-vente; que la sanction prévue en ce cas n’est pas la nullité de la saisie, mais son inefficacité, conformément à l’article 54 sus-visé, le créancier gardant cependant un intérêt dans le cas où la précédente saisie-vente ne verrait pas son aboutissement; qu’en conséquence la saisie conservatoire a été valablement pratiquée sur tout le mobilier, même préalablement saisi;
Considérant en conséquence que le jugement sera infirmé en ce qu’il a annulé la saisie conservatoire portant sur des objets précédemment
saisis;
Considérant que la société SEMAK entend démontrer qu’un certain nombre des objets saisis (tableaux ou sculptures) ont été vendus le 31 janvier 1999 à une société SAFRED, pour un montant de 50.000 francs, qui n’ont pas été versés directement, mais se sont compensés avec une dette de la société SAFRED à l’égard de la SEMAK; qu’elle produit des pièces comptables qui font apparaître qu’effectivement les objets apparaissaient au poste immobilisation oeuvres d’art de son bilan pour un montant de 50.000 francs; qu’un acte de cession est intervenu le 31 janvier 1999 (Conf.cession d’immobilisation sur document à en tête de la société SAFRED); que le même jour le compte oeuvre d’art a été débité de 50.000 francs, puis recrédité, alors que le compte de la société SAFRED, créditeur, était pour sa part débité de 50.000 francs; que ces écritures sont certifiées conformes, et ont été vérifiées par les commissaires aux comptes (conf.attestations de Jean PAGNOD et de la COMPAGNIE FIDUCIAIRE DE PASSY); qu’elles apportent la preuve de la propriété des objets se trouvant sur l’acte de cession; que la saisie doit être annulée en ce qu’elle porte sur ces objets ;
Considérant que les dépens de première instance et d’appel seront supportés par le débiteur saisi; qu’il est conforme à l’équité que la société SEMAK soit condamnée à verser la somme de 8.000 francs au titre des frais non répétibles exposés par la partie adverse; PAR CES MOTIFS : et ceux non contraires du Premier juge,
Donne acte à la société AGF-HOLDING de son changement de dénomination sociale,
Déclare recevables les dernières conclusions signifiées par la société AGF-HOLDING,
Infirmant partiellement,
Dit que la saisie conservatoire est régulière, et qu’elle doit
produire ses effets sur tous les biens saisis, sauf sur : – 1 sculpture KANGOUROU « post-historique »1988 – 1 sculpture murale « homme à bouche rouge » – 1 sculpture murale 2 personnages « DIMUS MACEDI » – 1 sculpture ovale « oeuf brisé » – 1 objet d’art plexiglass ART CURIAL – 1 pièce encadrée « jardin 1980 »
Annule la saisie conservatoire en ce qu’elle porte sur ces 6 objets, Confirme le jugement pour le surplus en toutes ses dispositions,
Ajoutant,
Condamne la société SEMAK à verser à la société AGF-HOLDING la somme de 8.000 francs au titre de l’article 700 du Nouveau COde de Procédure Civile,
La condamne aux dépens d’appel que la SCP GIBOU pourra recouvrer conformément à l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Greffier, Le Président,