Cour d’appel de Paris, du 1 avril 2003, 2002/18613

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Cour d’appel de Paris, du 1 avril 2003, 2002/18613

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 1er AVRIL 2003 (N , 14 pages) Numéro d’inscription au répertoire général :

2002/18613 Pas de jonction Décision dont recours : décision de la Commission des opérations de bourse en date du 24/09/2002 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : REFORMATION PARTIELLE DEMANDEUR AU RECOURS : Monsieur NICOLAS X… … par la SCP VERDUN-SEVENO, avoués, 5, rue Récamier – 75007 PARIS Assisté de Maître P.-Y. LE MAZOU, 92, rue de Richelieu – 75002 PARIS, toque K 52 EN PRESENCE DE : – La Commission des opérations de bourse, 17, place de la Bourse – 75002 PARIS Représentée aux débats par Madame Y…, munie d’un mandat régulier. COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Monsieur BREILLAT, Président Madame PEZARD, Président Monsieur LE DAUPHIN, Conseiller GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l’arrêt, Madame PADEL, greffier MINISTERE PUBLIC : Monsieur Z…, Substitut Général DEBATS : A l’audience publique du 18 Février 2003, ARRET : Prononcé publiquement le PREMIER AVRIL DEUX MIL TROIS, par Monsieur BREILLAT, Président, qui en a signé la minute avec Madame PADEL, greffier.

* * * Après avoir, à l’audience publique du 18 février 2003, entendu le conseil du demandeur, les observations de Madame le représentant du Président de la Commission des opérations de bourse et celles du Ministère Public, le conseil du demandeur ayant eu la parole en dernier.

*

* *

Constituée le 14 novembre 1996 et mise en liquidation judiciaire le 11 avril 2002, la société anonyme Kalisto Entertainment (ci-après la société Kalisto) était spécialisée dans la création et l’édition de jeux vidéos pour PC et consoles.

M. Nicolas X…, son fondateur, a exercé les fonctions de président du conseil d’administration.

Les actions émises par la société Kalisto ont été admises le 25 juin 1999 au Nouveau Marché de la bourse de Paris après délivrance, le 9 juin 1999, du visa de la Commission des opérations de bourse sur le prospectus définitif relatif à cette opération.

Neuf mois après cette introduction en bourse, réalisée au cours de 1,49 euro, le cours de l’action Kalisto avait progressé de près de 2000% pour atteindre, en mars 2000, près de 30 euros.

Les commissaires aux comptes de la société Kalisto ayant, le 28 septembre 2000, porté à la connaissance de la Commission des opérations de bourse des éléments qui les conduisaient à penser que les comptes de l’exercice 1999 ne donnaient pas une image fidèle de ladite société, le directeur général de la Commission a décidé, le 12 janvier 2001, d’ouvrir une enquête sur l’information financière et le

marché du titre Kalisto à compter du 31 décembre 1999. Le 22 mars 2001, l’enquête a été étendue pour couvrir l’information financière et le marché du titre à compter du 9 juin 1999.

Au vu des résultats de l’enquête, le directeur général de la Commission a, le 18 juillet 2001, demandé au président de celle-ci de désigner un rapporteur lequel a procédé, le 30 novembre 2001, à une notification de griefs sur le fondement des articles L. 621-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier et des articles 2, 3 et 4 du règlement n° 98-07 de la Commission relatif à l’obligation d’information du public et 4 du règlement n° 90-04 relatif à l’établissement des cours.

Après avoir retenu que l’information diffusée pour le compte de la société Kalisto au cours de l’année 2000 et jusqu’au 12 mars 2001 ne répondait pas aux exigences d’exactitude et de sincérité résultant des articles 2 et 3 du règlement n° 98-07, que se trouvait également caractérisé un manquement à l’obligation prévue à l’article 4 du même règlement dès lors que n’avaient pas été portés à la connaissance du public, le plus tôt possible, des faits importants susceptibles s’ils avaient été connus, d’avoir une incidence significative sur le cours du titre Kalisto et qu’il était en outre établi que le rachat, le 20 septembre 2000, d’un bloc de titres Kalisto détenu par l’un de ses dirigeants, M. A…, n’était pas conforme aux objectifs visés par la société Kalisto dans une note d’information relative à la mise en oeuvre d’un programme de rachat d’actions propres, sur laquelle la Commission avait apposé son visa le 4 avril 2000, la COB, considérant que ces faits avaient faussé le fonctionnement du marché et porté atteinte à l’égalité d’information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts, a, le 24 septembre 2002, prononcé à l’encontre de M. Nicolas X… une sanction pécuniaire de 300.000 euros et ordonné la publication de sa décision à son bulletin mensuel et au

Journal Officiel de la République française.

La cour ;

Vu le recours formé par M. X…, le 25 octobre 2002, à l’encontre de cette décision ;

Vu le mémoire déposé le 25 novembre 2002 par lequel M. X… demande à la cour :

– à titre principal, d’annuler la décision de la COB, ainsi que l’intégralité de la procédure d’instruction engagée à la suite de la lettre de notification des griefs du 30 novembre 2001, pour violation des principes d’ordre public d’indépendance et d’impartialité et des droits de la défense,

– à titre subsidiaire, de dire qu’il n’y a pas lieu d’entrer en voie de condamnation à son encontre, en l’absence de manquement imputable à la société Kalisto et de faute détachable qui lui soit personnellement imputable et en l’absence d’atteinte au fonctionnement du marché ainsi qu’à l’égalité de traitement des investisseurs,

– à titre très subsidiaire, sur la proportionnalité de la sanction, de prendre en considération le fait qu’il n’a tiré aucun avantage personnel des manquements retenus à son encontre ;

Vu les observations écrites de la Commission des opérations de bourse, déposées le 3 janvier 2003, tendant au rejet du recours ;

Vu le mémoire en réponse du requérant, déposé le 3 février 2003 ;

Ou’, à l’audience du 18 février 2003, le conseil de M. X…, Mme le représentant de la Commission des opérations de bourse et le ministère public en leurs observations, le conseil de M. X… ayant eu la parole en dernier ;

Sur ce :

Sur les moyens tendant à l’annulation de la procédure et de la décision :

Considérant que le requérant dénonce la violation du principe de loyauté résultant de « la particulière ambigu’té de la procédure d’instruction suivie par la COB, dans l’application de son devoir de déterminer l’identité exacte de la personne poursuivie », dès lors que la lettre du 30 novembre 2001 valant notification de griefs, visait expressément une procédure « concernant la société Kalisto » et ne faisait état d’aucun fait susceptible d’engager spécifiquement sa responsabilité personnelle ; que M. X… en déduit que ladite lettre ne peut valoir, à son égard, notification de griefs au sens des dispositions de l’article 6 du décret n° 2000-721 du 1er août 2000 ; Qu’il fait aussi valoir que le principe de la personnalisation des peines interdit à la Commission des opérations de bourse de sanctionner un dirigeant, à titre personnel, en lieu et place de la personne morale émettrice, sans qu’ait été préalablement discutée et constatée à son encontre une « faute distincte de ses obligations à l’égard de sa société et de ses actionnaires » et que, loin de viser une faute détachable de sa fonction de président de la société kalisto, seule susceptible de justifier une sanction à son égard, le rapporteur l’a mis en cause en sa qualité de représentant de la personne morale émettrice ; que le requérant en déduit que la procédure a été conduite en méconnaissance du principe du contradictoire et doit, en conséquence, être considérée comme nulle en son ensemble ;

Mais considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, le prononcé de sanctions pécuniaires à l’égard du dirigeant de la personne morale émettrice n’est pas subordonné à la démonstration d’une faute séparable de ses fonctions dès lors que la Commission des opérations de bourse n’est pas saisie d’une action en responsabilité mais décide du bien-fondé d’accusations en matière

pénale au sens des dispositions de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et que l’imputabilité à la personne morale émettrice de pratiques contraires aux règlements de la Commission commises par son dirigeant dans l’exercice de ses fonctions n’exclut pas que ce dernier soit directement sanctionné en tant qu’auteur des agissements incriminés lorsque, comme en l’espèce, les règlements en cause le prévoient expressément ; que c’est donc vainement que le requérant conclut à l’annulation de l’ensemble de la procédure au motif que les faits visés par la lettre de notification des griefs, n’étant pas relatifs à des fautes distinctes de ses fonctions de dirigeant, sont impropres à justifier sa mise en cause à titre personnel ;

Considérant, en second lieu, qu’en dépit d’une maladresse de rédaction ci-dessus mentionnée, invoquée par le requérant, les termes de la lettre du 30 novembre 2001, portant notification de griefs et adressée à M. Nicolas X…, font clairement apparaître que la personne mise en cause par le rapporteur – lequel, saisi des faits relevés par les enquêteurs, a régulièrement fait usage des pouvoirs qu’il tient des dispositions de l’article 6 du décret n° 90-263 du 23 mars 1990, modifié – est le président du conseil d’administration de la société Kalisto et non la société émettrice ;

Considérant, en effet, que la lettre précitée relate des faits se rapportant à l’information financière diffusée par la société Kalisto et au rachat d’un bloc de titres Kalisto et, sur ces différents points, fait grief à M. X… d’avoir eu un comportement de nature à caractériser des manquements aux articles 2, 3 et 4 du règlement n° 98-07 et 4 du règlement n° 90-04 de la Commission ; que la notification, accompagnée du rapport d’enquête et d’un document rappelant les droits de la défense, indique par ailleurs à M. X… qu’il peut se faire assister par toute personne de son choix et

prendre connaissance et copie des pièces du dossier tout au long de la procédure et l’invite à faire parvenir au rapporteur ses observations écrites dans un délai d’un mois ;

Considérant, en outre, qu’un mémoire en réponse ayant été déposé le 3 janvier 2002 « pour la société Kalisto », le rapporteur a rappelé à M. X…, par lettre du 9 janvier 2002, que la notification des griefs le concernait à titre personnel et ne visait pas la société Kalisto en tant que personne morale, et l’a informé qu’un nouveau délai d’un mois lui était accordé pour présenter les observations écrites qu’il pourrait estimer utiles à sa « défense personnelle » ; que M. X… a, par lettre du 18 janvier 2002, accusé réception de cette correspondance, ce dont il résulte que l’erreur qu’aurait commise le requérant quant à l’identité de la personne mise en cause a été dissipée au plus tard à la réception de la lettre du rapporteur du 9 janvier 2002 ;

Considérant, encore, que cette erreur, à la supposer réelle, n’a pu affecter l’exercice des droits de la défense ;

Considérant, à cet égard, d’abord, qu’entendu par le rapporteur, avec l’assistance de ses conseils, le 19 février 2002, soit à une date où aucune ambigu’té ne pouvait subsister dans son esprit sur sa qualité de personne mise en cause, M. X…, qui a, le 27 février 2002, versé au dossier des pièces complémentaires, a bénéficié d’un nouveau délai d’un mois à compter de la réception, le 14 janvier 2002, de la lettre précitée pour présenter ses observations écrites ;

Considérant, ensuite, que le rapport du rapporteur ayant été adressé à M. X… par pli recommandé du 29 mai 2002, avec l’indication qu’il disposait d’un délai d’un mois pour y répondre et avec une lettre de convocation à la séance de la Commission du 2 juillet 2002, M. X… a sollicité et obtenu de cette dernière, lors de la séance du 2 juillet 2002, le renvoi de l’examen des faits au 24 septembre 2002 ;

Considérant que bien qu’il ait été convoqué dès le 2 juillet à la séance du 24 septembre 2002 et bien que la décision de renvoi n’ait pas eu pour effet de faire courir un nouveau délai de réponse au rapport qui lui avait été notifié le 29 mai 2002, peu important à cet égard qu’un nouvel exemplaire du rapport, corrigé d’une erreur matérielle n’en affectant pas le sens, lui ait été adressé le 15 juillet 2002, M. X… n’a fait parvenir ses observations en réponse à la Commission des opérations de bourse que le 23 septembre 2002 à 16 heures 15 ;

Considérant qu’il résulte des constatations qui précèdent que le requérant n’est pas fondé à soutenir que la procédure le concernant a été conduite en violation des droits de la défense et qu’il ne peut, en particulier, faire utilement grief à la Commission des opérations de bourse d’avoir violé le principe du contradictoire en s’abstenant d’apporter « à l’importante argumentation développée (…) dans son mémoire du 23 septembre 2002 » toutes les réponses qu’appelait, selon lui, ladite argumentation ;

Considérant que M. X… fait encore valoir que la décision déférée n’a en réalité fait l’objet d’aucun délibéré ; qu’en effet le procès-verbal de séance, lequel indique que le délibéré se serait tenu avant 10 heures 30 le 24 septembre 2002, ne peut en aucune manière apporter la preuve de la réalité de la délibération puisque l’audience n’a pris fin qu’à 10 heures 45 et que cette audience était immédiatement suivie par une autre affaire ;

Mais considérant que s’il est exact que le procès-verbal de la séance de la COB du 24 septembre 2002 relative à la procédure suivie à l’encontre de M. X… mentionne, à la fin de la dernière page, que « la prochaine séance de la commission aura lieu ce même jour à 10 heures 30 », la preuve est rapportée de l’inexactitude de cette

mention ;

Considérant, en effet, que tant M. X…, dans ses écritures devant la cour, que la COB indiquent que la séance dont s’agit n’a pris fin qu’à 10 heures 45, ce qui suffit à établir que la mention litigieuse est affectée d’une erreur matérielle, la COB précisant sur ce point, sans être utilement contredite, que la séance suivante a eu lieu, en réalité, à 11 heures 30 ; qu’ au surplus, après avoir décrit le déroulement de la séance concernant M. X…, tenue publiquement, le procès-verbal précise que l’affaire a été « mise en délibéré » et « qu’après avoir délibéré » la Commission a arrêté les termes de la décision par laquelle elle a prononcé la sanction pécuniaire ci-dessus rappelée ;

Considérant que M. X… n’est pas davantage fondé à reprocher à la Commission d’avoir méconnu l’obligation de motivation s’imposant à elle dès lors que la décision déférée contient, hors toute contradiction, l’énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent à la juridiction de recours d’en contrôler la légalité, étant ici observé qu’aucun texte n’interdit à la Commission de s’approprier, lorsqu’elle les tient pour pertinents, des motifs figurant dans le rapport du rapporteur et que, sous couvert de ce grief non fondé de défaut de motifs, le requérant discute en réalité la pertinence des appréciations de la Commission ;

Sur le fond :

Considérant qu’aux termes de l’article 2 du règlement n° 98-07 relatif à l’obligation d’information du public, l’information donnée au public doit être exacte, précise et sincère ; que l’article 3 dudit règlement dispose que constitue, pour toute personne, une atteinte à la bonne information du public la communication d’une

information inexacte, imprécise ou trompeuse ; que l’article 4 prévoit que tout émetteur doit, le plus tôt possible, porter à la connaissance du public tout fait important susceptible, s’il était connu, d’avoir une incidence significative sur le cours d’un instrument financier ;

Que selon l’article 4 du règlement n° 90-04 relatif à l’établissement des cours, les ordres transmis sur le marché doivent correspondre aux objectifs visés par la personne qui en prend l’initiative ;

Considérant qu’il y a lieu d’observer, liminairement, qu’aucun texte ne fait obstacle, contrairement à ce que soutient le requérant, à ce que soient pris en considération, à titre de simples éléments de preuve, des documents rédigés en langue anglaise, versés au dossier de la procédure, étant au demeurant observé qu’il n’est pas fait grief à la Commission d’avoir dénaturé ces écrits et qu’au surplus, et en toute hypothèse, aucune de ces pièces n’est nécessaire à la démonstration de l’existence des manquements aux règlements de la Commission ci-dessous mentionnés ;

* Sur les faits exceptionnels et litiges :

Considérant que la société Kalisto a publié dans le quotidien Les Echos des 30 juin et 1er juillet 2000 une note d’opération préliminaire, sur laquelle la COB avait apposé son visa le 26 juin 2000, en vue d’une augmentation de capital à hauteur de 4 millions d’actions nouvelles à émettre ;

Considérant que ce document désigne, en rubrique I, M. Nicolas X… comme responsable de la note d’opération préliminaire et contient, sous la mention suivante, intitulée « attestation du responsable de le note d’opération préliminaire » un texte ainsi rédigé : « A ma connaissance, les données de la présente note d’opération sont conformes à la réalité : elles comprennent toutes les informations nécessaires aux investisseurs pour fonder leur jugement sur le

patrimoine, l’activité, la situation financière et les perspectives de la société Kalisto Entertainement ainsi que les droits attachés aux titres offerts : elles ne comportent pas d’omission susceptible d’en altérer la portée » ;

Considérant cependant que cette note d’information, publiée et mise à la disposition du public, ne comportait pas de rubrique « Faits exceptionnels et litiges », rubrique alors prévue au point 4.6 du chapitre IV de l’instruction de la COB de novembre 1996 prise en application du règlement n° 95-01 relatif au nouveau marché ;

Or considérant, en premier lieu, qu’il est constant que le 2 octobre 1998, la société Kalisto a conclu avec la société japonaise Square un contrat par lequel Kalisto s’est engagée à réaliser le jeu vidéo Dark Earth 2 en l’adaptant sur la console PlayStation 1 de la société Sony, moyennant la somme de 5 millions de dollars ; que le calendrier des paiements, prévoyant initialement 5 échéances, a été ultérieurement modifié, le dernier versement de 3 millions de dollars étant subordonné à la livraison de la version « Bêta », au plus tard le 31 décembre 1999 ;

Considérant que M. X… s’étant rendu au Japon, le 8 novembre 1999, pour livrer la version bêta, compatible avec la console PlayStation 1, le client lui a fait part, ainsi que le requérant l’a indiqué lors de son audition par le rapporteur, des difficultés qu’il rencontrait sur la marché japonais du fait du lancement par Sony d’une PlayStation 2, rendant moins attractifs les logiciels développés sur la PlayStation 1 ; que la société Kalisto a, dans ces conditions, accepté, par avenant daté du 15 novembre 1999, le « portage » du jeu qu’elle avait créé sur la PlayStation 2 ;

Considérant qu’ainsi que le rappelle le requérant, la société Square a proposé à la société Kalisto, par lettre du 28 avril 2000, d’imputer les avances déjà versées – lesquelles n’incluaient pas la

créance de 3 millions de dollars, demeurée impayée – « sur le transport du contenu du jeu sur PlayStation 2 » (mémoire, p. 40), proposition acceptée, le 4 mai 2000, par M. X… ;

Considérant que ce dernier a aussi indiqué, lors de l’audition du 19 février 2002, que « Sony ayant changé l’environnement technique de la PlayStation 2, Square a estimé en avril-mai 2000 que le jeu en cause ne l’intéressait plus »de sorte que la société Kalisto « n’a pas eu à porter le logiciel » sur la PlayStation 2 ;

Considérant qu’il est ainsi établi que le président de la société Kalisto ne pouvait ignorer, à partir de la fin du mois d’avril 2000, l’existence d’un risque, dont la probabilité de réalisation était déjà très élevée, de non recouvrement de la créance de 3.000.000 de dollars sur la société Square, laquelle créance figurait au poste « créances clients » et en « chiffres d’affaires » dans les comptes de l’exercice 1999 de la société Kalisto, publiés au BALO le 29 mars 2000 ; que la connaissance d’un tel risque est, au demeurant, suffisamment attestée par les termes de la lettre adressée le 8 novembre 2000 par M. X… aux commissaires aux comptes de la société Kalisto, où il est écrit que c’est la lettre de la société Square du 28 avril 2000 qui a « motivé la constitution de la provision » se rapportant à la créance de 3.000.000 de dollars ;

Considérant, en second lieu, que le 27 avril 1998, un contrat d’édition relatif au jeu vidéo « Nightmare creatures 2 » a été conclu entre les sociétés Kalisto et Activision ;

Considérant que dans « le courant de l’année 1999 », ainsi que l’a précisé M. X… à l’occasion de son audition par le rapporteur, un contentieux est apparu entre les parties, en raison d’une demande de modification formulée par Activision et jugée non pertinente par Kalisto ; que cette dernière ayant pris l’initiative de céder à la société Universal, à la fin de l’année 1999, les droits

d’exploitation du jeu précité, antérieurement transmis à la société Activision, celle-ci a obtenu, le 22 mai 2000, la signature par la société Kalisto d’un accord de résiliation amiable prévoyant le paiement par Kalisto d’une indemnité de 1.500.000 dollars payée, à hauteur de 765.625 dollars le 7 juin 2000 et pour le solde, le 28 juillet 2000, et évoquée dans le rapport d’activité du premier semestre comme une « indemnisation suite à un litige contractuel » ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que M. X… aurait dû porter à la connaissance du public l’état des relations – litigieuses – de la société Kalisto avec les sociétés Square et Activision, le plus tôt possible, et notamment dans la note d’opération préliminaire parue dans Les Echos le 30 juin 2000, et non pas attendre le 24 novembre 2000, date de la publication au BALO des comptes du premier semestre 2000, dès lors que ces informations étaient susceptibles, eu égard au montant des sommes en jeu (4,5 millions de dollars), d’avoir une incidence significative sur l’activité et le résultat de la société Kalisto, partant sur le cours des titres émis par celle-ci et son évolution ;

Considérant que le requérant, qui ne rapporte pas la preuve de ses allégations – au demeurant inopérantes – selon lesquelles la société Kalisto n’a subi « aucune perte de profit espéré » au titre des jeux précités, et qui ne peut utilement invoquer, pour s’exonérer de ses obligations propres, l’intervention de différents prestataires de services au stade de la rédaction de la note d’opération préliminaire visée par la COB, fait, par ailleurs, vainement valoir que ladite note n’a eu aucune influence sur le marché, l’augmentation de capital envisagée n’ayant pas été réalisée, dès lors que la note en cause a été diffusée et publiée et que les investisseurs étaient fondés à croire à la fiabilité des informations qu’elle contenait relativement à la situation financière de la société Kalisto ;

* Sur la communication financière de la société Kalisto :

Considérant qu’il résulte des constatations faites par la Commission des opérations de bourse que M. X… est l’auteur de manquements aux obligations énoncées par les articles 2, 3 et 4 du règlement n° 98-07 de la Commission en ce qu’il a, relativement au chiffre d’affaires de la société Kalisto au titre de l’exercice 2000, d’une part, pris l’initiative de diffuser au public une information ne répondant pas aux exigences d’exactitude et de sincérité résultant des articles 2 et 3 du règlement susvisé et, d’autre part, en ce qu’il s’est abstenu de porter à la connaissance du public, le plus tôt possible, des faits importants susceptibles, s’ils avaient été connus d’avoir une incidence significative sur le cours du titre Kalisto ;

Considérant qu’il suffit de relever ici, sur le premier point, que le 22 mars 2000 était publié dans le quotidien La Tribune un communiqué émanant de la société Kalisto et dont M. X… n’a pu ignorer la teneur, où il était affirmé, sous le sous-titre Perspectives que « Le chiffre d’affaires de 145 MF prévu pour 2001 pourra être réalisé dès l’an 2000 » ;

Considérant que bien que la société Kalisto ait, comme le relève le requérant (mémoire, p. 9) vécu quatre crises en 2000, à savoir une crise de croissance, due au développement rapide de l’activité dans les années précédentes, la crise du marché du jeu vidéo, du fait de l’attentisme des clients qui limitèrent leurs achats dans la perspective de la distribution en masse de la console PlayStation 2, la crise liée à la faiblesse du développement de l’internet payant et, au cours du deuxième semestre 2000, la crise boursière, qui fit obstacle à la réalisation de l’augmentation de capital prévue, ladite société a fait paraître le 23 novembre 2000, dans Les Echos, un communiqué où il était notamment écrit, sous le titre Kalisto

confirme ses perspectives qu’en « l’état des négociations actuelles et des projets en cours, Kalisto reste confiant sur les objectifs de chiffre d’affaires de 170 millions de francs fixés pour l’exercice 2000, avec un fort développement dans le domaine on line. Conformément aux années précédentes, Kalisto réalisera plus de 80% de son chiffre d’affaires sur le dernier trimestre » ;

Considérant cependant que M. X… connaissait, avant la parution de ce communiqué, et abstraction faite de la lettre du directeur financier en date du 4 décembre 2000, qu’il conteste avoir reçu, la gravité de la situation réelle de la société qu’il dirigeait ;

Considérant, en effet, que le procès-verbal du Comité de direction du 15 novembre 2000 sur la présentation de la situation financière de la société Kalisto (cote 2302) énonce que « le risque est très élevé de ne pas réaliser le chiffre d’affaires d’ici la fin de l’année » ; qu’il y est en outre mentionné, notamment, que « la situation financière de la société Kalisto est critique, avec une trésorerie exsangue et une profitabilité fortement négative sur les opérations courantes » ; qu’il y est aussi indiqué que « quel que soit l’aboutissement du projet avec Wanadoo, l’analyse de l’avancement des projets en cours montre que Kalisto dépense plus en développement de jeux qu’elle ne peut espérer de rentrées financières » ;

Qu’il est ainsi établi que l’information publiée au cours de l’année 2000 pour le compte de la société Kalisto n’était ni exacte ni sincère et que M. X… a porté atteinte à l’exigence de bonne information du public ;

Considérant, sur le second point, que quelles qu’aient pu être, jusqu’au début du mois de février 2001 (cf cote 3108), les illusions de M. X… quant à la signature avec la société Wanadoo d’un contrat qui aurait contribué à hauteur de 130 millions de francs au chiffre d’affaires de l’exercice 2000, le président de la société Kalisto

savait, à la date du 31 décembre 2000, que le contrat espéré n’avait pas été signé et que, de ce fait, il y aurait nécessairement un écart important entre la réalité du chiffre d’affaires de l’exercice 2000 et les annonces plus qu’optimistes précédemment intervenues à cet égard ;

Or considérant que bien que la société Kalisto fût légalement tenue de publier au BALO dans les 45 jours de la clôture de l’exercice et que la COB eût répondu négativement, le 16 février 2001, à une demande de report au 15 mars 2001 de cette publication, de sorte que le retard apporté par la société Kalisto à l’exécution de l’obligation ci-dessus rappelée ne saurait être tenu pour légitime, ce n’est que dans un communiqué publié dans Les Echos le 12 mars 2001 que la société Kalisto annonçait que le chiffre d’affaires au titre de l’exercice 2000 s’établissait à 19 millions de francs et que la perte consolidée de l’exercice devrait atteindre approximativement 175 millions de francs ;

Qu’il est ainsi établi que M. X… a manqué à l’obligation de porter à la connaissance du public tout fait important susceptible, s’il était connu, d’avoir une incidence significative sur le cours des titres Kalisto, étant observé que tel était nécessairement le cas de la « colossale différence » existant, comme l’a admis le requérant, entre le chiffre d’affaires de 170 millions de francs prévu le 23 novembre 2000 et celui effectivement réalisé ;

* Sur le rachat d’un bloc de titres Kalisto par la société Kalisto à M. A… :

Considérant que, de ce chef, la COB a retenu, en premier lieu, que M. X… avait contrevenu aux prescriptions de l’article 4, alinéa 1er, du règlement n° 90-04 relatif à l’établissement des cours, selon lesquelles les ordres transmis sur le marché doivent correspondre aux objectifs visés par la personne qui en prend l’initiative ;

Considérant qu’après avoir relevé que son visa avait été apposé le « 4 avril 2001 » (en réalité, le 4 avril 2000) sur la note d’information émanant de la société Kalisto relative à la mise en oeuvre d’un programme de rachat d’actions propres, où il était écrit que de tels rachats devaient, notamment, viser à optimiser la gestion patrimoniale et financière de la société et à régulariser le cours de bourse de l’action de la société, la Commission relève, pour se prononcer comme elle a fait, que le 20 septembre 2000, M. A… a cédé à la société Kalisto 367.200 actions au cours de 17,5 euros, pour une valeur de 42 millions de francs ; qu’elle énonce ensuite qu’il apparaît que le rachat par M. X… pour le compte de la société Kalisto ne correspondait pas aux objectifs visés par le programme de rachat dans la note d’information précitée ;

Considérant cependant que cette affirmation n’est pas étayée par des constatations propres à en établir le bien-fondé, étant en outre observé que selon le rapport d’enquête, le cours de l’action Kalisto s’établissaitant cependant que cette affirmation n’est pas étayée par des constatations propres à en établir le bien-fondé, étant en outre observé que selon le rapport d’enquête, le cours de l’action Kalisto s’établissait à 22,79 euros le 30 août 2000 et qu’il n’a pas été répondu à l’argumentation de M. X… faisant valoir que le rachat, le 20 septembre 2000, au titre de l’auto-contrôle, du solde de la participation minoritaire de M. A…, lequel entendait, en tout état de cause, céder ses titres, répondait, sans épuiser sa trésorerie, à l’intérêt de la société Kalisto ainsi qu’aux objectifs visés par la note d’information susvisée dès lors que la mise sur le marché des actions détenues par M. A… aurait provoqué une chute sensible du cours et compromis la bonne fin de deux opérations alors en voie de réalisation, à savoir l’apport en nature à la société Kalisto de l’ensemble des actions représentant le capital de la

société Daylight (Kalisto USA) et l’absorption par Kalisto de la société Interactive Online Sports afin de permettre à celle-là de détenir directement les droits d’exploitation de la technologie du jeu Ultimate Race ;

Considérant que la Commission a retenu, en second lieu, pour en déduire que M. X… avait aussi méconnu les dispositions des articles 2 et 3 du règlement n° 98-07, que la décision de rachat « semble » avoir été motivée par un engagement personnel que M. X… avait pris vis-à-vis de M. A…, qui n’a pas été mentionné dans la note d’information du 4 avril 2000, alors qu’il aurait dû l’être conformément aux textes précités ; que la décision ajoute que « toutefois lors de son audition du 19 février 2002, M. X… n’a apporté aucun élément précis sur la réalité et la motivation de cet engagement » ;

Considérant que de tels motifs sont impropres à établir que M. X… a commis le manquement susvisé ;

Considérant, dès lors, qu’aucun des manquements retenus par la Commission à l’encontre du requérant au titre de l’opération de rachat d’un bloc de titres Kalisto par la société Kalisto à M. A… n’est caractérisé ;

Sur la sanction :

Considérant que les pratiques relevées sont incriminées par l’article L. 621-14 du code monétaire et financier dans la mesure où elles ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché ou de porter atteinte aux intérêts des investisseurs ;

Considérant qu’il ressort des constatations qui précèdent que le comportement de M. X…, contraire à la réglementation boursière, peu important à cet égard que le requérant n’ait pas été animé par la volonté de tromper, ayant eu pour effet de fausser, au cours de l’année 2000 et jusqu’au 12 mars 2001, la perception que les

investisseurs avaient de la situation fi


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